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Dans les coulisses plus que précaires du foot suisse de deuxième division

Dans les coulisses plus que précaires du foot suisse de deuxième division

24 Heures3 days ago
La Challenge League se veut professionnelle, mais sa réalité est aussi faite de précarité, d'incertitudes et de manque d'attractivité. Décryptage d'un championnat qui ne fait plus trop rêver. Publié aujourd'hui à 10h48
Max Veloso, ici avec Neuchâtel Xamax en 2019, est un joueur expérimenté de Challenge League. Le Romand a décidé de travailler à 50% à côté du football pour davantage de stabilité et s'assurer une reconversion.
KEYSTONE
En bref:
«Des joueurs touchent de bons salaires ou un revenu correct, mais parler d'une ligue professionnelle avec certains joueurs qui gagnent 1000 francs par mois, ça me fait doucement rire.» Le constat de Max Veloso, 200 matches de Challenge League dans les pattes, est limpide. Et fait l'unanimité dans l'antichambre de la Super League.
«Les salaires sont vraiment trop bas dans cette catégorie de jeu, on doit absolument trouver des solutions, comme un revenu minimal, poursuit Lucien Valloni, président du syndicat des joueurs suisses. Certains signent parfois un contrat à 100% avec un salaire de moins de 2000 francs par mois, ce n'est pas viable en Suisse.»
«Il y a un problème de fond sur le fonctionnement de ce championnat, le métier de footballeur est l'un des rares jobs où l'on gagne moins bien notre vie en Suisse que dans d'autres pays européens, déplore Max Veloso. Le problème, c'est qu'il y a trop de frais pour ces clubs et pas assez de rentabilité, ce qui se répercute sur nous. Une partie des joueurs de cette ligue sont de faux professionnels: ils le sont dans l'âme et l'investissement, mais pas du tout dans l'aspect financier.»
Mis à part les joueurs de Neuchâtel, Vaduz, Aarau et quelques-uns dans d'autres équipes, ceux des petits clubs galèrent financièrement. «Ils s'en sortent parce qu'ils sont jeunes, habitent chez leurs parents ou en colocation», résume le Neuchâtelois. La précarité de la Challenge League
«La Challenge League se situe dans un entre-deux qui est assez difficile à appréhender pour certains joueurs, poursuit Karim Rossi. Tous les footballeurs ne sont pas millionnaires, loin de là. On fait les mêmes sacrifices qu'en Super League, mais certains ont des salaires très bas.»
Selon plusieurs observateurs du milieu, la situation s'est clairement dégradée après la pandémie de Covid-19. Les clubs suisses investissent moins et cela se ressent sur la qualité du championnat.
«Malgré mes très bonnes statistiques, avec des buts marqués régulièrement ces dernières années, il n'y a plus trop d'offres intéressantes en Suisse pour des profils comme le mien», analyse l'attaquant romand. Son âge (31 ans) et son expérience ont un coût. Et les clubs préfèrent souvent miser sur des profils plus jeunes dans une logique de revente.
L'hiver dernier, Karim Rossi a rejoint Schaffhouse en provenance d'Indonésie, avec l'objectif de sauver le club en Challenge League. La mission a échoué et le Vaudois, comme une grande partie de l'effectif, a été licencié. Retour par la case chômage et l'équipe du syndicat des joueurs pour garder la forme et se serrer les coudes entre galériens. En attendant le coup de fil d'un agent. Et un nouveau défi.
Cette situation peu confortable est devenue routinière ces derniers étés, avec la pression supplémentaire d'un mercato suisse qui commence très tôt et qui pousse les formations à constituer rapidement leurs effectifs. «D'autres profils sont recherchés et les clubs n'ont pas les moyens de me donner le salaire que je mérite», constate le joueur formé au LS. Mieux vaut des jeunes au salaire dérisoire
Cette impasse a poussé Karim Rossi à se lancer dans un véritable tour du monde des clubs: Suède, Bulgarie, Luxembourg, Chypre, Indonésie et désormais l'Azerbaïdjan, où il vient de signer en juillet avec Shamakhi . S'exiler dans des destinations parfois surprenantes pour y être clairement mieux loti.
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«Ces championnats parfois exotiques cherchent des joueurs comme moi, expérimentés, qui ont marqué des buts dans le monde entier et savent s'adapter, détaille le Romand. Mon profil y est valorisé et ces clubs m'offrent des conditions plus intéressantes.»
Dans l'antichambre de l'élite suisse, où les clubs ont la plupart du temps des budgets (très) serrés, on va ainsi plutôt économiser sur les salaires en misant sur la jeunesse. Mieux vaut deux ou trois joueurs sans expérience avec des fiches de paie dérisoires qu'un joueur aguerri qui coûtera plus cher. Une stratégie qui a des conséquences sur la qualité et l'attractivité du championnat.
À 33 ans et malgré sa précieuse expérience en Challenge League, le Neuchâtelois Max Veloso est dans le flou total quant à la suite de sa carrière. Va-t-il raccrocher les crampons? Blessé au tendon la saison passée à Carouge, il n'a pas été conservé au sein de l'effectif genevois.
Max Veloso a été informé assez vite de cette décision, mais les clubs jouent souvent la montre avec les prolongations de contrat. Ce sentiment d'incertitude, propre au football, est plus marqué dans cette ligue qui devient pour certains encore plus précaire.
«Ici, les clubs n'anticipent pas assez la saison suivante, ils ne veulent pas prendre de risques car ils ont trop peur pour leurs finances de faire des mauvais choix, des contrats ou des prolongations d'une année sont souvent proposés, surtout pour les profils plus âgés et expérimentés, soulève Max Veloso. Cela provoque énormément de changements de joueurs à l'intersaison et ça devient compliqué au niveau de la constance de créer une bonne équipe.» Des méthodes d'amateurs dans le football suisse
Ce constat est renforcé par le format du second échelon du football suisse, composé de dix équipes, où la lutte pour la promotion peut vite se transformer en une bagarre contre la relégation. Ce qui explique cette vision à court terme, tant sur le plan sportif qu'économique. Une équipe assurée du maintien en cours de saison n'a-t-elle pas tout intérêt à minimiser les risques financiers en misant sur de (très) jeunes joueurs?
Ancien joueur de Sion et Neuchâtel Xamax, notamment, Max Veloso s'estime chanceux de pouvoir bien vivre de sa passion, mais il a choisi de travailler à 50% dans le secteur du placement de personnel depuis trois ans pour anticiper sa reconversion. «La réalité de la Challenge League, c'est aussi que plusieurs équipes ont des joueurs à l'assurance chômage qui touchent un gain intermédiaire du club», souligne le milieu de terrain.
Cette solution légale peut permettre à des équipes de s'attacher les services de joueurs plus onéreux. «J'ai entendu dire qu'un ou deux clubs paient aussi des primes ou d'autres choses au noir, un procédé qu'on retrouvait seulement dans des ligues inférieures amateures», relève Max Veloso.
Lassés par cet entre-deux précaire ou par l'incertitude d'un renouvellement ou non de leur contrat chaque saison, certains joueurs jettent l'éponge. «De plus en plus de footballeurs qui ont pourtant un excellent niveau optent pour la troisième division pour travailler à côté, ne plus mettre le football en priorité, analyse Karim Rossi. Jouer en Challenge League dans ces conditions, pour certains joueurs, ça ne vaut malheureusement plus la peine.»
En lien avec la Challenge League Sylvain Bolt est journaliste à la rubrique sportive de 24 Heures, de la Tribune de Genève et du Matin Dimanche depuis 2019. Il couvre en particulier le ski alpin et le freeride, mais aussi le cyclisme et l'athlétisme. Plus d'infos @SylvainBolt
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