« Quand il est avec Pogacar, il oublie toutes ses ambitions » : l'altruiste Wellens enfin récompensé
Dans un petit salon de son hôtel à Toulouse, mardi, Tim Wellens avait opté pour un petit rafraîchissement de la nuque, probablement en prévision d'une séance photo qu'on avait sollicitée et qui fut finalement ajournée. On ne l'imaginait pas coquet mais, après plus d'une semaine à suer sang et eau pour son leader Tadej Pogacar, le Belge de 34 ans fut malgré tout bien inspiré de passer la tondeuse et, dimanche, sur le podium, il portait beau avec sa nouvelle coupe et son maillot de champion de Belgique.
Vainqueur d'une étape au coeur des massifs de pins et des étangs, aux confins de l'Aude et du Tarn, le coursier d'UAE s'est imposé comme à ses plus belles heures (deux victoires sur la Vuelta en 2020 et deux sur le Giro, en 2016 et 2018), comme il y a trois semaines en endossant le maillot tricolore, au bout d'un raid solitaire quasi identique d'une quarantaine de kilomètres : « Je suis très fier de mon nouveau maillot de champion de Belgique car le podium (il a devancé Remco Evenepoel et Jasper Philipsen à Binche) est très beau », évoquait-il lors de la journée de repos.
Au moment de classer ses meilleurs souvenirs, il englobait aussi son succès lors du Grand Prix de Montréal en 2015, « car Tom Boonen (son idole) avait déclaré que c'était la course la plus dure qu'il avait disputée », mais voici son ordonnancement un peu chamboulé avec sa performance à Carcassonne. « Une jolie coïncidence » puisque, selon lui, il n'avait pas coché cette étape, ni aucune d'ailleurs, car son rôle de cerbère pour Pogacar le cantonne aux basses oeuvres, un roule-toujours qui ne se plaint pas mais qui a décroché, dimanche, la timbale : « S'il y en a un qui mérite cette victoire, c'est Tim, souligne Mauro Gianetti, le manager général d'UAE. Il s'est toujours consacré à l'équipe. Il est très fort, il a déjà beaucoup gagné mais quand il est avec Tadej, il oublie toutes ses ambitions. »
« Je préfère participer à une victoire collective qu'être septième individuellement »
Tim Wellens
Le basculement s'est opéré en 2023 quand, après dix années chez Lotto, il cédait enfin, à 31 ans, aux sirènes de la formation émirienne : « Je me suis beaucoup amusé chez Lotto mais j'étais copain avec tout le monde, j'étais trop dans ma zone de confort. Et je savais que je ne pourrais pas lutter contre Pogacar et d'autres coureurs. Je préfère participer à une victoire collective qu'être septième individuellement. »
Né à Saint-Trond, Wellens, derrière ses airs de blondinet le doigt sur la couture, possède un « gros caractère, se remémore Tony Gallopin, son ancien coéquipier chez Lotto. Tim, c'est un spécial. Je ne peux pas dire casse-couilles car on s'entendait super bien. On a énormément rigolé mais on n'a pas toujours été d'accord. Il a ses idées, il est entier. Sur les tactiques de course, il ne faisait pas de compromis ».
Quand on a évoqué sa personnalité, Simone Pedrazzini, un de ses directeurs sportifs chez UAE, a rigolé : « Oh oui, gros caractère, il est très direct et ça, j'aime bien. Il dit les choses ». « C'est un mec 100 % professionnel, se souvient Steff Cras, lui aussi ancien équipier chez Lotto. Tim vit pour le cyclisme, il veut tout optimiser. » On l'a ainsi aperçu, en début de Tour, pointilleux et assez directif avec les mécanos de son équipe.
Têtu comme une mule, pas fait pour le football et explosion tardive
Quand il ne dit rien, ce n'est pas forcément bon signe. Demandez à son père, Léo, ancien coureur qui a disputé les JO de Moscou en 1980 et le Tour en 1981 avec ses deux frères (Johan et Paul, ce dernier vainqueur sur le Tour en 1977 et 1978) : « Il était têtu. À 16-17 ans, il ne m'a pas parlé pendant plusieurs mois, il passait par ma femme qui disait que j'étais aussi têtu (rires). » Les deux se sont rabibochés autour d'un bouquet de fleurs que le fiston a ramené d'une course gagnée, ce qui n'avait rien d'évident.
Après avoir tâté du football (« Il avait froid et quand le ballon était d'un côté, Tim se trouvait de l'autre et ne regardait pas dans la bonne direction », sourit Léo), le Limbourgeois est monté sur un VTT lors des vacances familiales en Autriche puis a commencé à rouler dans sa province natale. À l'adolescence, « tout petit », il s'interrogeait sur ses capacités, « mais à 17 ans, il a rattrapé tout le monde d'un coup », se rappelle ce père vainqueur d'une étape du Tour de l'Avenir 1983 et que le fils évoque aujourd'hui avec pudeur et respect, incapable d'admettre l'évidence, qu'il l'a dépassé sur le plan sportif depuis un moment : « Mon papa dit que je suis plus fort que lui mais moi, je ne sais pas (rires). »
Quand on lui avait rappelé, mardi, que Léo, avec sa quatrième place sur la Grande Boucle, à Thonon-les-Bains, avait fait mieux que lui (13e comme meilleur résultat jusqu'à dimanche), il avait demandé, amusé, qu'on ne répercute pas cette statistique : « Ce n'est pas marrant. »
« C'est un très grand chambreur. Tout en restant sérieux, il glisse ses petites blagues »
Tony Gallopin, son ancien coéquipier chez Lotto
Le garçon est surprenant. Derrière son visage impavide, en permanence sous contrôle, se cache, selon Gallopin, « un très grand chambreur. Il faut le connaître, son humour aussi. Tout en restant sérieux, il glisse ses petites blagues ». Sur ce plan, avec Pogacar, ils font la paire, voisins et amis à Monaco, malgré la différence d'âge (sept ans) et l'arrivée tardive du Belge chez UAE Emirates-XRG : « Tim a une grande et belle carrière mais je comprends son choix, observe Gallopin. S'il est heureux, épanoui, c'est le principal. En plus, il est très copain avec Tadej, c'est encore mieux de travailler ainsi pour son leader. »
Bien que « plus fort que lorsqu'il était chez Lotto » (Cras), il appréhende ce rôle de gregario sans déchirement. « Quand j'assiste Tadej, je n'ai aucune ambition personnelle », assume le Belge, tout en admettant n'avoir « jamais fait un Tour à ce niveau, même en 2019 (troisième du classement de la montagne) ». À chaque début d'après-midi, juste après l'autre fend-la-bise d'UAE qu'est Nils Politt, il se charge en effet d'écumer le peloton, de l'essorer, dans un seul but, « faciliter la vie de Tadej. Car que je sois là ou pas, il va gagner le Tour. Mais s'il est en milieu de peloton et qu'il y a une chute, c'est de ma faute car je n'étais pas présent pour le placer devant. Je suis son bodyguard. Ce n'est pas un travail ingrat ».
« Tim est un homme incroyable, intelligent, il sait gérer les moments de stress, admire Gianetti. Tadej apprend beaucoup de Tim. » Par procuration, les élèves de Saint-Trond, où sa mère Fabienne enseigne, s'en inspirent également « car même sans faire beaucoup d'efforts, il était un bon élève, tout en s'entraînant 50-60 km tous les jours », insiste son père, Léo. Allergique à la foule, trop stressé aussi, ce dernier a regardé l'étape entre Muret et Carcassonne devant sa télévision, auprès d'Antonie, la grand-mère, 99 ans, que Tim Wellens, tourné vers les autres, n'oublie jamais d'appeler chaque semaine.
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