Bataille pour l'échappée, public en folie, chute de Pogacar... la 11e étape du Tour de France s'est transformée en bal de punks
Est-ce la punkitude de Ben Healy qui a dégouliné sur tout le monde ou le peloton est-il pris d'une hystérie collective les matins d'étapes qui n'intéressent pas Tadej Pogacar ? Mais enfin, c'était quoi cette folie qui a embrasé une journée qu'on avait qualifiée de plate, une salle d'attente avant d'attaquer les Pyrénées à laquelle on avait ajouté un petit coup de cul histoire d'épicer le final ?
Tous les regards s'étaient arrêtés sur la côte de Pech David, il est vrai très, très raide en son pied avec une approche étriquée, mais elle n'a même pas eu de rôle décisif tellement ces doux-dingues de cyclistes avaient décidé de dévaster la salle de jeux dès son ouverture au km 0. On se serait crus dans une église du Moyen-ge avec des affligés pris du feu de Saint-Antoine, convulsionnés, les membres brûlants, ou, moins loin, dans une rave au milieu d'une forêt d'Ardèche au petit matin, c'est à peu près la même chose, les champignons sont après tout un passe-temps éternel. Et les nombreux Toulousains sur le bord de la route qu'on a sentis très tôt en température ont ajouté à ce carnaval de fadas. Que Sébastien Piquet, la voix de Radio Tour, qui suit la course au coeur du réacteur dans la voiture de Thierry Gouvenou, le directeur technique de la Grande Boucle, a résumé ainsi, et vous nous pardonnerez la trivialité mais elle dit tout : « On n'a jamais eu le temps de s'arrêter pisser. »
Van der Poel, le chassé devient chasseur
S'il faut tenter de mettre un peu d'ordre dans ce gigantesque bazar, où il était parfois compliqué de savoir quel groupe était le peloton, on peut dégager deux grandes phases. La bataille pour l'échappée, interminable, avec cette fois un trio qui s'est dégagé dès le départ, bien outillé pour vivre longtemps en autonomie à l'avant : Jonas Abrahamsen, Mauro Schmid et Davide Ballerini. Mais derrière, les contres se succédaient comme des vagues sur la plage. Mathieu Burgaudeau et Fred Wright parvinrent à revenir sur la tête à 88 km de l'arrivée, soit après autant de bornes de baston. Puis un deuxième iceberg réussit à se détacher, à 63 km du terme, un groupe chevronné qu'on aurait pu retrouver dans le final d'une grande classique : Mathieu Van der Poel, Wout van Aert, Quinn Simmons, Arnaud De Lie, Axel Laurance.
La course bascula alors dans un autre temps, dans ce cinq contre cinq à l'avant pour la victoire d'étape. L'écart plongea rapidement mais il plafonna ensuite, 23 secondes à 30 km de la ligne, 20 secondes 10 km plus loin, le suspense était dingue et la résistance du premier groupe encore plus, d'autant qu'ils avaient embauché de bonne heure. Simmons décida de mettre fin à cette poursuite par équipes et de tenter de boucher le trou seul par une attaque dans la côte de Vieille-Toulouse, l'avant-dernière difficulté, mais à l'avant, Schmid et Abrahamsen accélérèrent quasiment au même moment.
Les deux yétis allaient conserver leur avantage jusqu'au bout, malgré le démarrage de Van der Poel au milieu de la rampe de Pech David. Le Néerlandais a sans doute lancé trop tard, il échoua à 7 secondes des deux fuyards, la deuxième fois qu'une deuxième étape, après son succès à Boulogne-sur-Mer, lui filait entre les doigts dans ce Tour, chassé dimanche vers Châteauroux, chasseur mercredi. Et au bout de cette journée de débauche, il a fallu une photo finish pour trancher 156 km d'échappée et offrir la victoire à Abrahamsen, qui a confirmé sa puissance de chasse-neige et apporté à sa formation Uno-X le premier succès de son histoire dans le Tour de France.
La seule règle qui n'a pas été brisée fut celle de ne pas attaquer Pogacar à terre
Voilà pour le cadre de cette boucle autour de Toulouse au cours de laquelle l'antienne « il faut compter chaque coup de pédale » parut bien périmée, déréglée par une bande de punks qui avaient décidé de piétiner les codes qui régissent la vie du peloton. Un défilé de Gremlins ingérables qui par exemple attaquèrent, relancèrent les opérations quand on pensait qu'un moment de répit avait été atteint et qu'à l'arrière, Tadej Pogacar, Ben Healy et le maillot vert Jonathan Milan s'étaient arrêtés pour un besoin naturel. Un comportement qui déplut au champion du monde, d'autant que Wout van Aert était pas mal à la manoeuvre à ce moment-là (78 km de l'arrivée).
Healy, justement, avait annoncé qu'il faudrait que lui et ses équipiers s'habituent à courir avec le maillot jaune, sous-entendu de manière plus défensive. Ce fut un sacré baptême du feu pour les Rose d'EF, dans une étape incontrôlable, totalement désarticulée, et il faut croire que leur leader irlandais ne peut pas vraiment se réfréner, que lui aussi fait un grand bras d'honneur à la bienséance, puisqu'on le vit attaquer tout seul pour rejoindre un gros contre, où Kévin Vauquelin s'était glissé, ce qui entraîna des réactions en chaîne de Pogacar, Jonas Vingegaard et Remco Evenepoel. Une folie à 68 km de Toulouse.
La seule règle qui n'a pas été brisée fut celle de ne pas attaquer un homme à terre. Pour le grand bonheur de Pogacar, qui chuta à 5 km du terme quand Tobias Johannessen, qui voulait suivre une énième accélération d'un Vauquelin très remuant, faucha sa roue avant. Le leader des UAE vit le trottoir s'approcher à toute vitesse et la peur monter en lui, mais il remonta sur son vélo sans grand dommage, carrosserie éraflée, et put rentrer tranquille car le groupe des favoris avait décidé de l'attendre. Un drapeau blanc brandi à raison, alors que la bataille entre les gros était en train de se figer, qu'il n'y avait plus grand-chose à gratter dans cette étape et que les Visma de Vingegaard avaient déjà tenté de titiller leur rival, mais avaient échoué, que ce soit le Danois avec une mine au sommet de Pech David ou Matteo Jorgenson qui avait encore accéléré dans la descente. La grande explication devrait être pour jeudi, dans la montée finale d'Hautacam, la première étape de montagne de ce Tour de France, où Pogacar se présentera ankylosé par sa chute et où les Frelons voudront faire la démonstration qu'ils peuvent vraiment le bousculer.
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