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« Je ne valide pas ce que j'entends » : Marc Chirilcenco, l'entraîneur du club d'Avoine-Beaumont, réagit aux attaques dont il fait l'objet ainsi que sa femme
« Je ne valide pas ce que j'entends » : Marc Chirilcenco, l'entraîneur du club d'Avoine-Beaumont, réagit aux attaques dont il fait l'objet ainsi que sa femme

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time6 days ago

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« Je ne valide pas ce que j'entends » : Marc Chirilcenco, l'entraîneur du club d'Avoine-Beaumont, réagit aux attaques dont il fait l'objet ainsi que sa femme

L'entraîneur du club d'Avoine-Beaumont avec sa femme Gina, revient sur le départ de Kaylia Nemour qu'ils ont menée au titre olympique à Paris, et sur l'enquête judiciaire qui les vise. C'est lui qui a annoncé à la presse locale le départ de Kaylia Nemour, qu'il a formée et guidée dans son club d'Avoine-Beaumont (Indre-et-Loire) jusqu'au titre olympique des barres asymétriques, sous les couleurs de l'Algérie. Une semaine après que la jeune femme s'est exprimée dans nos colonnes, que d'autres familles de gymnastes ont témoigné de comportements contestables, Marc Chirilcenco a accepté le principe d'une interview en visio. Avec son conseil dans les rôles d'intermédiaire et garde-fou, présent sur un autre écran. Sans attendre la première question, le technicien a commencé à s'exprimer... « Pourquoi prendre la parole, et s'entourer d'un communicant ? Parce que le monde est ce qu'il est, je trouve qu'il y a beaucoup de dérives. On sait tous que l'enquête préliminaire de gendarmerie de Chinon, qui traîne depuis trois ans, est toujours en cours. Avec Gina (sa femme) qui n'est pas loin, on souhaitait porter un regard interrogatif sur ce qui se passe. On est forcément peinés par certaines choses. Bien sûr, par le départ de Kaylia. Lorsque le 5 mai, elle nous a annoncé, lors d'une brève entrevue avec sa maman, qu'elle souhaitait quitter le club, elle ne nous a pas donné d'explications ». « Elle a précisé qu'elle ne se sentait plus bien dans le nous a dit : "J'ai besoin de voir autre chose, d'aller voir ailleurs." Sur ce point, je n'ai rien à dire. Elle a 18 ans et, parce qu'à Avoine, on est dans un village, la question se pose pour toutes nos gymnastes de cet âge. Le départ d'une jeune fille de dix-huit ans qui découvre gloire, notoriété et des moyens financiers auxquels elle n'avait pas accès, c'est une demi-surprise. On pensait que ça aurait pu attendre les Championnats du monde (à Jakarta, Indonésie, 19-25 octobre). Le timing nous a paru en décalage, mais c'est son choix. Je l'ai dit dans la presse, c'est un choix que l'on respecte. On l'avait ramenée gentiment en forme, ce qui ne correspond pas tout à fait à ses propos. Peu importe, elle n'est pas entraîneur de gym. Et même si sa maman a voulu intervenir sur la planification, moi j'étais dans les clous pour qu'elle soit championne du monde dans quelques mois. Kaylia Nemour : « Je n'oublierai jamais d'où je viens, ni ce que j'ai vécu » En quoi l'interview qu'elle nous a accordée vous dérange-t-elle ?Quand on rentre des Jeux, je la laisse tranquille trois-quatre semaines, puis elle vient à sa guise début septembre. Elle se gère gentiment pour reprendre goût. Après une médaille d'or olympique, il faut forcément un temps de récupération. Mais comme il est clair qu'elle veut faire les Championnats du monde, je travaille mon calendrier. Je fais une réunion avec Kaylia et ses parents, j'étale les douze mois de l'année sur des feuilles A4 bien organisées, avec toutes les étapes de Coupe du monde, les stages. Nous choisissons ensemble les dates. Je regrette un peu certains propos déformés. Kaylia est partie soudainement, je ne sais pas ce qu'on lui a fait miroiter. On l'aurait poussée à quitter le club ?On vit dans une grande dynamique, on écoute les conseils à droite, à gauche. On a bien vu qu'elle avait une oreille attentive à d'autres paroles que les nôtres. En tant qu'adulte responsable, c'est sa route, sa carrière. Elle est libre. Mais je m'interroge sur ses choix. « Les ados doivent être respectueux des entraîneurs. Lorsque Kaylia a délibérément malmené notre collègue, forcément on lui a demandé de s'excuser » Marc Chirilcenco Entendez-vous sa volonté de vivre d'autres méthodes ?Je veux bien qu'on m'explique de quelle méthode il s'agit. J'ai une formation de base, avec un professorat de sport. Il n'y a pas de méthode particulière, juste de l'entraînement. Le sport de haut niveau a ses exigences. Depuis trois ans, ce n'est pas l'aspect technique mais plutôt des comportements qui vous sont reproché on a basé notre travail sur l'exigence, la rigueur, la qualité et le respect. Quand Kaylia dit qu'on lui a demandé de s'excuser... Les ados doivent être respectueux des entraîneurs. Lorsque Kaylia a délibérément malmené notre collègue, forcément on lui a demandé de s'excuser. Une entraîneuse d'Avoine-Beaumont suspendue Mais ce n'est pas ça qu'elle a raconté. Comme elle, une autre gymnaste a indiqué qu'en cas d'erreur sur un agrès, les filles devaient faire le tour de la salle pour s'excuser auprès de chaque entraîneur, ce qu'elles ont vécu comme une chose humiliante....C'est complètement faux ! Quand l'enfant jette ses maniques, tourne le dos à l'entraîneur, on intervient pour qu'elle ait une attitude digne et correcte vis-à-vis des adultes. Quand certaines athlètes déclarent que vous hurlez après les filles, que vous les sanctionnez... Est-ce votre conception du haut niveau ?Je parle de méthode, pas de comportement. Aujourd'hui, chaque éducateur assume ses comportements. Vous ne répondez pas. Ce qui vous est reproché vous a-t-il incité à changer votre comportement ?Vous prenez pour argent comptant ce qui est raconté ou colporté par les copines de Kaylia ou sa maman (ancienne présidente du club), qui a eu pendant trois ans un dossier entre les mains qu'elle connaît par coeur et dont il est facile de sortir des extraits, des témoignages et des formules de langage pour appuyer là où ça fait mal quand on a un objectif à peine voilé. Dans son environnement professionnel, elle manage plus de 500 collaborateurs. Quand je l'entends dire qu'elle a été sous emprise, qu'elle n'a rien vu, rien entendu, ça me fait doucement sourire... Évidemment qu'en trente ans d'enseignement, les pratiques et les comportements ont évolué. Que les jeunes filles témoignent de leur ressenti, c'est une chose ; la réalité du terrain, c'est autre chose. J'ai souhaité m'expliquer sur notre ressenti à nous, par rapport à cette situation. Je ne valide pas ce que j'entends parce que ce n'est pas ce qui se passe dans la salle de gym, et j'ai suffisamment de témoignages pour le corroborer. Pourquoi avoir dit lors d'une réunion du bureau du club que la maman de Kaylia avait porté plainte contre vous ?Parce qu'on a eu ce retour. On me donne l'information que la maman de Kaylia aurait porté plainte, je dis qu'elle aurait porté plainte... Nous avions eu une information suffisamment sûre, dont je ne révèlerai pas la source, pour croire que c'était le cas. « L'acharnement contre nous et le club vient de l'entourage de Kaylia et de parents mécontents » Cette affirmation devant les membres nouvellement élus du bureau a conduit le club à réagir contre la famille Nemour. Qu'en dites-vous ?C'est intéressant votre point de vue. J'ai comme l'impression que c'est nous qui sommes attaqués, et non pas Kaylia, que je défends, pour laquelle on a beaucoup d'estime et avec laquelle on n'est pas parti fâchés. On a un différend avec l'ancienne présidente du club depuis le retour des Mondiaux d'Anvers (2023). Je suis sur un plan sportif de carrière, et sa maman sur plan économique, un développement d'image et de business. Peu importe si l'affirmation s'est révélée fausse, et tant mieux pour nous, pour la gymnastique et pour le club. Je sais dans quelle mesure je me suis engagé dans le projet de Kaylia, parce que cette enfant méritait d'aller au bout de son rêve. D'autres ont été déçues, et le mécanisme est alors récurrent : on a beau être très vigilant sur le recrutement, il y a toujours des parents qui surinvestissent, et qui estiment qu'il suffit d'inscrire leur enfant à Avoine pour avoir une championne. Ce n'est pas comme ça que ça fonctionne. Que pensez-vous du témoignage des autres jeunes filles ?Quand on se rend compte au bout d'un an ou de six mois qu'on a fait le maximum pour une enfant, mais que son projet du haut niveau n'aboutit pas, on fait une réunion avec les parents. Les jeunes filles qui n'ont pas réussi cherchent des excuses, trouvent un coupable tout désigné : l'entraînement était trop dur, Marc était trop dur, la préparation physique était trop dure, les horaires d'entraînement ne convenaient pas... J'en passe et des meilleures. Comment justifiez-vous les reproches qui sont faits à votre égard depuis trois ans ?Mais il n'y a pas de suspicion. La Fédération fait un signalement la semaine avant la parution de votre article, lu par la présidente de la Fédération avant qu'il sorte bien entendu... Absolument pas. Jamais nous ne ferions relire l'interview d'une gymnaste à une présidente de Fédé bien c'est très bien. Mais il n'y a pas de hasard, quand il est provoqué à ce niveau-là. Les accusations d'emprise ne datent pas des propos de Kaylia Nemour...Ça date de 2022 et de la volonté de la Fédération de nous « obliger », y compris moi, à monter à l'Insep pour préparer les Jeux Olympiques. La commission départementale jeunesse et sports a conclu à une mascarade. Et c'est pour ça que ni le disciplinaire, ni l'enquête administrative n'ont retenu de griefs contre nous. Mais, je le rappelle, c'est pour Kaylia qu'on a été malmenés, que j'ai quitté mon poste de CTN et me suis mis en disponibilité, que je me retrouve sans poste en France, et sans plus de poste avec l'Algérie. Je suis entraîneur de club, et je ne le regrette pas du tout. L'épopée qu'on a construite avec Kaylia est une belle épopée. En aucun cas on a eu la volonté de blesser ou d'humilier. Ce qu'elle semble regretter, une fois encore, c'est l'ambiance de travail...C'est drôle, parce que j'ai un tas de témoignages de gens qui sont passés à l'entraînement, et je suis plutôt très drôle, prêt à détendre l'atmosphère et créer une ambiance saine de travail. Je ne suis pas le dernier à faire des blagues. L'acharnement contre nous et le club vient de l'entourage de Kaylia et de parents mécontents. J'ai du mal à comprendre pourquoi tant de haine gratuite. Mais chacun aura à répondre de ses paroles. »

« Ça ne peut plus durer »  : le club d'Avoine se déchire après des témoignages contre les entraîneurs
« Ça ne peut plus durer »  : le club d'Avoine se déchire après des témoignages contre les entraîneurs

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time6 days ago

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« Ça ne peut plus durer » : le club d'Avoine se déchire après des témoignages contre les entraîneurs

Depuis que Kaylia Nemour s'est exprimée la semaine passée, c'est un déferlement de témoignages entre deux clans qui s'affrontent, au sujet des méthodes supposées des entraîneurs Marc et Gina Chirilcenco. Elle pensait rétablir sa vérité, expliquer pour quelles raisons, à 18 ans, elle avait choisi de quitter le club d'Avoine-Beaumont où elle a grandi pendant quatorze ans, jusqu'au sacre olympique de l'été dernier. Mais c'est une brèche immense que Kaylia Nemour a dessinée. Depuis la semaine dernière, communiqués et témoignages affluent, qui défendent le club, ou dénoncent ses supposées dérives. Tous s'accordent sur un point, conscients que l'enquête préliminaire menée depuis trois ans par la gendarmerie de Chinon doit rendre un verdict : « Ça ne peut plus durer. » « Je n'oublierai jamais ce que j'ai vécu » : Kaylia Nemour explique les raisons qui l'ont poussée à quitter Avoine-Beaumont Le comité de soutien du club d'Indre-et-Loire, suivi par 972 personnes, a ainsi « réaffirmé son engagement et son soutien à ses entraîneurs, Marc et Gina Chirilcenco ». Vincent Pinaud, beau-frère de Marc et nouveau président du club, a certifié que le couple était « juste des entraîneurs exigeants qui se sont perpétuellement adaptés à l'évolution de la gymnastique et des gymnastes, en proposant individuellement à chacune d'elles un parcours correspondant à ses envies et à ses capacités, en parfait accord avec les parents ». Plusieurs familles ont embrayé, à l'image d'Emmanuel Pontlevoy dont la fille Claire participa à la qualification olympique de la France pour les Jeux de Tokyo, obtenant une 5e place par équipes aux Mondiaux de 2019. Dans un long texte, il s'indigne contre la Fédération française de gymnastique, écrivant notamment : « Claire ne bénéficie d'aucun accompagnement de cette fédération, que ce soit sur le plan médical ou pour sa reconversion. » Pourtant, après que la gymnaste encore adolescente s'était gravement blessée au genou pour la seconde fois, c'est à l'Insep qu'elle a été opérée, a effectué sa rééducation. Elle n'a jamais repris la compétition, mais a été prise en charge par la FFgym, avec des aides financières dépassant les 18 000€ annuels jusqu'en 2023. « Je n'ai jamais reçu d'insulte, de parole déplacée, d'humiliation, de main portée » Youna Dufournet au sujet de ses anciens entraîneurs Dans un entretien à la Nouvelle République, Youna Dufournet prend aussi le parti de ses anciens entraîneurs. La médaillée de bronze mondiale au saut de 2009, blessée lors d'une chute mémorable aux Championnats de France suivants alors que Marc Chirilcenco avait ouvert grands les bras sous les barres asymétriques, avait pourtant été exfiltrée de son club. Aujourd'hui, si elle estime que « le sport de haut niveau, c'est très difficile », devinant qu'il s'agit de savoir « jusqu'où l'athlète est capable d'aller pour réussir, jusqu'où il peut accepter la souffrance physique, de dépasser ses limites à outrance (...) », elle assure n'avoir « jamais reçu d'insulte, de parole déplacée, d'humiliation, de main portée ». Marc Chirilcenco, l'entraîneur du club d'Avoine-Beaumont, réagit aux attaques dont il fait l'objet ainsi que sa femme De nombreuses autres gymnastes, leurs parents ou entraîneurs formateurs ont une tout autre vision. Certains se sont réunis dans un groupe intitulé Balance_ta_gym sur Instagram (1776 followers). Partie d'Avoine pour l'Insep en 2023, Maëva Guéry évoque aussi avoir été « manipulée, rabaissée, humiliée ». Quant à Chloris Foucat, elle écrit : « Ce qui est dit dans les médias n'a rien de nouveau : j'avais alerté la fédération dès le mois de mai 2022 sur les mauvais traitements que je subissais de la part de mes entraîneurs. (...) Sans une once d'égoïsme, j'avais dénoncé ce que vivaient les autres gymnastes et quitté Avoine le mois suivant (...). » La jeune fille, encore mineure alors, avait essuyé « un déferlement de messages haineux ». Aujourd'hui, une technicienne qui souhaite garder l'anonymat et avait confié sa gymnaste à Avoine nous a aussi raconté : « Gina Chirilcenco avait prévenu que ce serait dur de passer de 10 à 35 heures par semaine, elle me tenait au courant, me disait : "Elle survit". » « Dans un courrier envoyé lundi au major de gendarmerie, ma fille reprend tout ce qu'elle a vécu : la pression, l'épuisement physique et psychologique, les blessures non soignées, la mise en danger quand elle devait courir une heure sous 40° C sans boire » Une mère de gymnaste Son athlète, joyeuse et timide adolescente, ne se plaignait pas. Pourtant elle a commencé à pleurer au quotidien. « Gina me disait qu'elle était trop difficile, avec un mauvais comportement, ce n'était pas à elle de s'adapter, la gymnaste devait se plier aux autres et tenir la cadence, explique-t-elle. Un jour, elle m'appelle au boulot en me hurlant dessus parce que ma gymnaste était tombée sur la tête et qu'elle l'avait punie trois heures au vestiaire. J'ai répondu que j'étais à cinq heures de route, et qu'il faudrait plutôt vérifier qu'elle est consciente. En un an, la malheureuse a eu des blessures sans jamais voir un médecin, Gina lui disait que c'était à ses parents de l'emmener passer une radio. » Embauchés par le club, plusieurs entraîneurs ont démissionné, certains disant « ne pas vouloir cautionner davantage les agissements, les cris de Marc et Gina Chirilcenco ». Une mère ajoute : « Dans un courrier envoyé lundi au major de gendarmerie, ma fille reprend tout ce qu'elle a vécu : la pression, l'épuisement physique et psychologique, les blessures non soignées, la mise en danger quand elle devait courir une heure sous 40 °C sans boire. » Gina Chirilcenco suspendue provisoirement après l'interview de Kaylia Nemour dans « L'Equipe » Et comme d'autres, elle a exposé le quotidien de sa fille. Jusqu'à cinq gymnastes étaient hébergées chez les Chirilcenco d'abord, puis dans une maison qu'ils louaient à côté de la leur. Les parents versaient environ 550 € de pension par mois. « Mais elles devaient prendre leur douche au gymnase, même quand l'eau était froide en plein hiver, et elles ne mangeaient pas à leur faim », s'indignent plusieurs parents. Certains espèrent une nouvelle enquête administrative qui pourrait aboutir au retrait des cartes professionnelles des entraîneurs (les deux précédentes les ont blanchis), d'autres une condamnation de la justice. Plusieurs familles envisagent ainsi de déposer une plainte collective pour éviter que l'enquête judiciaire ne soit abandonnée.

« Je n'oublierai jamais d'où je viens, ni ce que j'ai vécu »  : Kaylia Nemour explique les raisons qui l'ont poussée à quitter son club d'Avoine-Beaumont
« Je n'oublierai jamais d'où je viens, ni ce que j'ai vécu »  : Kaylia Nemour explique les raisons qui l'ont poussée à quitter son club d'Avoine-Beaumont

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time11-07-2025

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« Je n'oublierai jamais d'où je viens, ni ce que j'ai vécu »  : Kaylia Nemour explique les raisons qui l'ont poussée à quitter son club d'Avoine-Beaumont

Kaylia Nemour, championne olympique des barres asymétriques à Paris, a quitté son club d'Avoine-Beaumont. Pour la première fois depuis ce changement, elle ose s'exprimer. Le 3 juillet, Kaylia Nemour s'est envolée pour Spring (Texas), où elle effectue un stage dans le gymnase de la star américaine Simone Biles. Un répit salutaire pour la jeune femme de 18 ans, qui profite de moments joyeux et oublie, un peu, les attaques répétées sur les réseaux sociaux qu'elle et sa maman essuient ces dernières semaines. Kaylia Nemour, c'est cette jeune gymnaste qui a cristallisé pendant trois ans le conflit entre son désormais ancien club d'Avoine-Beaumont et la Fédération française de gymnastique, avec des plaintes des deux côtés et une enquête judiciaire toujours en cours. Pour reprendre le cours de sa passion, elle avait choisi, en 2022, de représenter l'Algérie. Et c'est sous les couleurs du pays de son père qu'elle est devenue championne olympique aux barres asymétriques lors des Jeux de Paris. Une première pour le continent africain en gymnastique. Seulement, le 14 mai, son entraîneur Marc Chirilcenco annonçait par voie de presse que la jeune prodige quittait Avoine, provoquant un torrent de critiques en Indre-et-Loire. Pour la première fois, Nemour a accepté de s'exprimer. Elle a « rétabli (sa) vérité » lors d'une heure et demie d'interview en visio. Parfois en colère, souvent drôle, elle espère que sa parole sera entendue et lui permettra de clore ce chapitre. « Depuis votre titre olympique, vous avez été très discrète. Pourquoi prendre la parole aujourd'hui ?Je voulais prendre du temps pour moi. Mais, ces derniers temps, des personnes disent que j'ai été manipulée, notamment par ma mère, que je ne fais pas mes propres choix. Mais je ne suis pas une extraterrestre ! J'ouvre les yeux sur tout ce qui s'est passé dans ma vie, dans ma carrière. J'ai la maturité nécessaire pour savoir ce qui est bon pour moi, ce qui ne l'est pas. J'ai besoin de parler à cause des rumeurs et des mensonges qui sont véhiculés par l'entourage de mon ancien club. Pourtant, je pensais être partie en bons termes, sans avoir à me justifier. Marc et Gina (Chirilcenco, ses anciens entraîneurs) ont dit dans un article (en date du 14 mai, dans la Nouvelle République) qu'ils respectaient mon choix. J'étais confiante, je suis passée à autre chose. Je voulais juste entamer sereinement ma prépa' pour les Mondiaux (19-25 octobre à Jakarta). Mais, non. Alors je veux m'exprimer calmement pour mettre tout au clair, tout enfermer dans une boîte. « Dans mon esprit, les choses étaient claires : j'avais dit au revoir et merci. Seulement, tout le monde m'a tourné le dos, on attaque ma maman » Kaylia Nemour Dans cet article, Marc Chirilcenco informe que vous quittez votre club et ne vous entraînerez plus avec lui et sa femme. Pourquoi ne pas l'avoir annoncé vous-même ?J'étais en stage en Algérie pour me ressourcer, je voulais me faire discrète. Après tout, je ne suis pas la première, et je ne serai pas la dernière à quitter un club. Dans mon esprit, les choses étaient claires : j'avais dit au revoir et merci. Seulement, tout le monde m'a tourné le dos, on attaque ma maman. J'ai besoin d'évacuer ce que j'ai en moi pour rétablir ma vérité et me concentrer sur mes prochains objectifs. Et qu'on laisse ma maman tranquille ! Avant de devenir championne olympique, vous avez cristallisé le conflit entre votre club et la Fédération française de gymnastique. Comment l'avez-vous vécu ?J'ai clairement été un dommage collatéral. Ça a été très difficile, je ne pouvais pas matcher. J'ai choisi de représenter l'Algérie. Et je ne le regrette pas du tout. C'était la solution pour faire de la gym et arrêter tout ce cirque. Et j'ai développé beaucoup de joie et d'amour pour l'Algérie. J'ai tout le temps envie d'y retourner, de rencontrer des gens, de découvrir la culture... « On était tellement tous sous emprise... » Quel regard portez-vous sur les inquiétudes de la FFGym à propos des méthodes en vigueur à Avoine ?(Long silence.) On était tellement tous sous emprise... Les filles, les parents. Quand tu es là-bas, tu ne sais pas, tu ne vois pas... Et comme on n'a vécu que ça, toute notre vie, ça nous semble normal. La phrase préférée de Marc et Gina, c'est : "La gym de haut niveau, c'est comme ça." Quand on rentre à la maison, on ne se plaint même pas à nos parents, on est persuadé que ce sont effectivement les contraintes du haut niveau. Mais je sais maintenant que ce n'est pas le cas, qu'on peut réussir dans un environnement plus serein. J'ai vu, ailleurs, des gymnastes rigoler avec leurs entraîneurs, sans que ça les empêche de performer. Je n'oublierai jamais d'où je viens, ni ce que j'ai vécu. Je ne renie rien mais je ne veux plus cautionner certaines méthodes. Est-ce le titre olympique qui vous donne la liberté, la légitimité de vous exprimer ?Après la médaille, j'ai regardé derrière moi et, waouh ! Qu'est-ce que c'était dur ! Plus jamais je ne referai une préparation comme ça. En revanche, en n'ayant plus de contraintes, j'ai commencé à ouvrir les yeux, à comprendre que rien n'était normal. Les cris quand on ne réussit pas, se faire virer quand on ne réussit pas... Il n'y a pas un entraînement où ils n'élèvent pas la voix. Je n'en pouvais plus. Il m'est arrivé de rester trois heures dans le vestiaire, sans savoir si je pourrais reprendre l'entraînement. J'ai vécu des humiliations, comme de devoir faire le tour de la salle pour m'excuser d'avoir raté un élément auprès de chacun des entraîneurs présents. « J'ai détesté, mais j'avais un objectif qui m'a permis de tenir et d'accepter. Mais je pense qu'il y a des limites à l'exigence » Kaylia Nemour à propos de la préparation des JO Mais vous êtes devenue championne olympique.Ça a été dur ! En même temps (elle grimace), quelle période ne l'a pas été ? En 2020, le Covid ; 2021, mes deux genoux opérés ; 2022, on m'empêche de matcher ; 2023... Alléluia (elle sourit), je deviens vice-championne du monde aux barres. J'ai surkiffé ces Championnats ! Je pensais que les Jeux, ça serait encore mieux. Seulement, préparer les JO, pour faire une médaille, surtout une médaille d'or, ce n'est pas la même préparation que pour une simple performance personnelle. J'étais épuisée tout le temps. Je savais que je devais garder mes forces pour les complets qu'il faudrait réussir à la perfection. Encore et encore... Ne vous en doutiez-vous pas ?Je ne m'attendais pas à ça. Marc me disait : "T'as plus d'horloge, t'as plus d'horaire, t'as plus d'heure". Je savais à quelle heure je commençais, jamais quand je finissais. J'ai détesté, mais j'avais un objectif qui m'a permis de tenir et d'accepter. Mais je pense qu'il y a des limites à l'exigence. Et mon corps ne m'a pas suivie. Pendant l'entraînement officiel à Paris, je me suis fait mal à la cheville. Rien qu'en effleurant la malléole, je pouvais pleurer. On a glacé, et j'ai serré les dents. Le 4 août 2024, vous avez donc été sacrée championne olympique aux barres asymé je n'ai pas fêté la médaille. Je le regrette tellement ! J'ai appris récemment que mes parents avaient proposé qu'on aille tous manger ensemble, mais Marc a refusé en prétendant que je n'avais pas le droit de sortir du village. Ils ont menti à ma famille, à mes amis, ça me fait tellement de peine pour eux. Et pour moi. Quelques jours après, j'ai voulu donner un bouquet qu'on m'avait offert à Gina, pour essayer d'apaiser les tensions. Elle l'a rejeté : "Je n'en veux pas de tes fleurs, tu peux les garder." C'est juste de la méchanceté. Ils m'ont privé d'un moment inoubliable. « J'étais à bout de ces méthodes, j'avais besoin de me reconstruire » Que représente cette médaille d'or ?Des années de travail et de sacrifices. Une immense fierté au regard de ce que j'ai vécu. Elle m'a donné de la visibilité. J'ai été invitée sur des émissions de télé, lors de la fashion week, au concert de Beyoncé... J'ai pu rencontrer d'autres sportifs et échanger avec eux. J'ai reçu des cadeaux, des produits de maquillage... Je ne voulais pas n'être que la hype" des Jeux, j'ai travaillé pour que ça perdure. Et ça, j'adore ! Je ne pensais pas que ce serait possible grâce à la gym, ou en habitant ailleurs qu'à Paris, mais je réalise un peu mon rêve. Comment s'est passée la reprise de l'entraînement ?J'ai repris début septembre, d'abord une séance par jour. Mais j'avais besoin d'une coupure plus longue pour le mental et le physique. Marc m'a annoncé une compétition dès novembre. Pourquoi si tôt ? Ça a commencé à être dur, je pleurais, je n'avais plus la motivation. J'avoue que j'ai pensé arrêter la gym. D'où le besoin de changement ?J'étais à bout de ces méthodes, j'avais besoin de me reconstruire. Je savais que si je continuais dans cette dynamique, je n'allais plus performer. Je sais ce que je leur dois, mais c'était la fin d'un chapitre. J'ai besoin de bienveillance, de me concentrer sur moi, de reprendre confiance. Depuis que je travaille avec Nadia (Massé, qui était sa chorégraphe et l'entraîne désormais), elle me rappelle que je fais de la gym pour moi, elle m'apprend à être fière de moi. Depuis trois ans, les investigations se sont multipliées, une enquête judiciaire reste en cours.J'ai été convoquée par la gendarmerie le samedi 24 mai. J'étais stressée mais je me suis rassurée en me répétant que je n'aurais qu'à répondre aux questions qu'on me poserait. Pendant l'audition qui a duré trois heures et demie, je ne me suis pas toujours bien sentie, ça a remué des choses de fou. Mais, contrairement à ce que certains racontent, je n'ai pas porté plainte, ni ma mère. Ça, ce sont des mensonges. « J'espère retrouver la flamme que j'avais perdue. L'étincelle revient doucement » Justement, votre mère qui était présidente du club peut être mise en cause. Comment le vivez-vous ?J'ai bien expliqué au major que je n'avais rien dit à ma mère jusqu'à très récemment, qu'elle n'était pratiquement pas à la salle. Donc elle ne savait pas. Quand Marc et Gina disaient que je suis horrible à entraîner, que je pleurniche, elle n'avait pas de raisons de douter d'eux, ni de s'inquiéter. Aujourd'hui, elle culpabilise. De la savoir si triste, ça me rend triste également. Comment voyez-vous votre avenir ?Je suis relancée jusqu'à Los Angeles. Je suis motivée pour bien m'entraîner, j'espère retrouver la flamme que j'avais perdue. L'étincelle revient doucement. Et je suis très contente de découvrir, de voyager, d'avoir changé de mode de vie. De trouver un équilibre en ayant une vie en dehors de la gym, en prenant le temps d'aller au resto, de faire les magasins... Ça ne m'empêchera pas de faire dix complets en poutre et cinq aux barres le lendemain. Avec Nadia, je développe une relation de confiance, sans jugement. Elle va m'aider dans mon projet, me demande mon avis tout le temps, elle est exigeante, mais à l'écoute aussi et trouve toujours à positiver. Elle me laisse de l'autonomie, ne me surveille pas en permanence. Qu'est-ce que ça fait du bien ! Même si, par manque d'habitude, ça reste un apprentissage. Avec votre famille, vous quittez donc Avoine pour Dijon.C'était obligatoire de changer. On va habiter dans une grande ville, je vais rencontrer de nouvelles personnes, j'aurais plus de libertés. C'est sûr que mes parents et mes deux frères nous suivent surtout, Elina (sa petite soeur, également gymnaste) et moi, pour nous permettre de continuer la gym. Mais ce n'était plus possible là-bas. Depuis six ans, on louait l'ancienne maison de Marc qui toquait et rentrait chez nous trop facilement. Bien sûr, je suis consciente que ce changement est une prise de risque. Mais l'important est de retrouver du calme et le plaisir. » À lire aussi De Jesus Dos Santos : «J'aurais tellement aimé être moi-même» Quel rapport de force choisir face aux Blacks ? Swiatek et le gazon, un mariage de raison Comment joue Amanda Anisimova ?

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