Dernières actualités avec #primates


Le Figaro
16-07-2025
- Science
- Le Figaro
Ce lémurien de 30 grammes va-t-il être le premier primate du XXIe siècle à disparaître ?
La biodiversité animale est si importante qu'il arrive que des espèces disparaissent alors qu'elles sont méconnues du grand public. Or, cette destinée funeste pourrait concerner un lémurien pesant à peine le poids d'un stylo-bille. De nombreux facteurs tragiques, comme le braconnage, sont responsables de la disparition de centaines d'espèces animales et végétales. Au cours du XXe siècle, la souris de Pemberton, le cerf de Schomburgk, le phoque moine des Caraïbes, le cisco d'eau profonde ou encore le thylacine ont ainsi intégré la tragique liste des espèces éteintes. Mais parmi les nombreux ordres que compte le règne animal, les primates semblent épargnés par le phénomène d'extinction. Néanmoins, les animaux les plus petits et les plus rares pourraient disparaître dans les années à venir. La grande famille des primates pourrait ainsi perdre son plus petit représentant d'ici quelques dizaines d'années, si l'Homme n'intervient pas pour le protéger. Relativement méconnu du grand public, le microcèbe de Mme Berthe (Microcebus berthae) est pourtant le plus petit primate au monde. Mesurant à peine 9 cm de haut pour un poids de 30 grammes, il est aussi grand qu'une peluche. Il peut être observé dans la forêt sèche de Menabe, sur la côte est de Madagascar. Reconnaissable à ses grands yeux bruns et à sa fine queue rousse, ce petit lémurien est si petit qu'il peut tenir dans une paume de main. Pourquoi le microcèbe de Mme Berthe pourrait-il totalement disparaître dans quelques années ? Plusieurs dangers menacent cet animal emblématique de l'île. Dans un entretien accordé à Mongabay, daté de décembre 2022, Eric Isai Ameca y Juárez, un spécialiste de la perte de biodiversité et du changement climatique, expliquait que «le risque d'extinction augmente dramatiquement lorsque l'on prend en compte la déforestation et les conditions climatiques extrêmes». Or, le microcèbe de Mme Berthe vit sur un très petit territoire, très sensible à la déforestation à cause des besoins en bois de chauffage ou à l'extension des cultures. De plus, la région est régulièrement frappée par des cyclones et des vagues de chaleur. Ces catastrophes climatiques endommagent la végétation dans laquelle il vit et augmentent les risques de mortalité chez les jeunes. Publicité La situation est telle que le Groupe d'étude et de recherche sur les primates de Madagascar à tirer la sonnette d'alarme. Cependant, le microcèbe de Mme Berthe n'est pas le seul à souffrir de cette situation. D'après le rapport Primates in peril 2022-2023, trois autres espèces de lémuriens figurent dans la liste des 25 mammifères les plus menacés d'extinction.


Le Figaro
13-07-2025
- Science
- Le Figaro
Quand les chimpanzés lancent la mode de l'herbe dans les oreilles
En Zambie, des chimpanzés se décorent avec des brindilles. Un rituel social surprenant qui ouvre de nouvelles perspectives sur l'origine des traditions culturelles chez les primates, mais aussi chez les humains. Dans un sanctuaire pour chimpanzés en Zambie, en Afrique, des chercheurs ont observé un comportement bien particulier : les singes se placent des brins d'herbes ou des petits bâtons dans les oreilles, ou dans l'anus, pour se «décorer»... Ce comportement, reproduit par les différents chimpanzés du groupe, ouvre des nouvelles perspectives sur l'évolution des pratiques culturelles chez les primates non humains. L'équipe de recherche décrit cette observation dans un article publié dans la revue Behaviour, après avoir observé pendant 1 an 147 chimpanzés, répartis en 8 groupes sociaux. Ce qui est surprenant, c'est que les chercheurs avaient déjà observé ce comportement dans un groupe de chimpanzés, en 2010. «Julie, la femelle dominante, avait commencé à se mettre des brins d'herbe dans l'oreille, et les autres l'avaient imité», témoigne Emile Bryon, chercheur à l'Université de Utrecht (Pays Bas) en comportement animal et cognition. Un peu moins de 15 ans après, dans un autre groupe sans liens avec le premier, le même comportement a été observé, « toujours introduit par un chimpanzé dominant », précise le chercheur. En quelques jours, cette nouvelle mode a été reprise par la majorité du groupe. On peut lire dans l'étude que ni l'âge, ni le sexe des animaux ne semblent influencer significativement l'apprentissage de ce comportement. Après avoir vu un mâle dominant se mettre une herbe dans l'oreille, plusieurs chimpanzés du groupe ont imité son comportement. Jake Brooker Publicité Des gestes symboliques, pas pratiques Les chercheurs se sont d'abord demandé si ce geste n'était pas pour soulager des démangeaisons, causées par des infections ou des vers. «Le vétérinaire a fait plusieurs analyses, sur différents individus, et il n'a rien trouvé», témoigne Emile Bryon. Certains scientifiques se sont demandé s'ils n'imitaient pas des humains. Des soigneurs du premier groupe, en 2010, avaient raconté se mettre parfois des choses dans les oreilles pour avoir les mains libres. Mais les soigneurs du deuxième groupe «nous ont bien expliqué qu'ils ne l'avaient jamais fait, donc nous ne pensons pas qu'ils imitent les humains», conclut Emile Bryon. «On peut comparer ce phénomène au «grooming» main dans la main, une façon de se toiletter en se tenant les mains, qui est relativement spécifique à chaque groupe de chimpanzés. Il n'y a pas de bénéfices directs pour eux à le faire, comme l'herbe dans les oreilles», illustre le chercheur. Ces observations montrent que les animaux peuvent adopter et transmettre des comportements purement sociaux, sans but pratique. «On imagine qu'imiter ce qu'un chimpanzé du groupe fait, surtout si c'est un dominant, renforce le sentiment l'appartenance à ce groupe», avance Emile Bryon. «Les petits sont amusants à observer, car on voit qu'ils essayent de reproduire ce que font les adultes, glisse Emile Bryon, mais ils sont maladroits, ils prennent souvent des bâtons trop gros pour mettre dans leurs oreilles. Il y a aussi une femelle qui prend toujours deux bâtons, mais elle arrive les faire rentrer !» Les chimpanzés du groupe passent donc plusieurs heures, avec des brins d'herbe ou des petits bâtons coincés dans les oreilles, ou dans l'anus. Finalement, ces comportements sociaux peuvent se comparer à des comportements humains de type «tendance» ou «identité de groupe», comme les modes vestimentaires. Ces observations apportent un nouvel éclairage sur l'évolution des pratiques culturelles chez les primates non humains, et contribuent à une meilleure compréhension des origines évolutives de la transmission sociale de comportements à dimension symbolique. En somme, ces ornements sans fonction apparente rappellent que, chez les chimpanzés comme chez les humains, certains comportements peuvent émerger avant tout comme marqueurs sociaux. Imitation, appartenance au groupe, distinction culturelle : autant d'éléments qui façonnent les traditions… même les plus étonnantes.


24 Heures
08-07-2025
- Science
- 24 Heures
Les primates mâles ne sont pas les alpha dominants que l'on imagine
Accueil | Savoirs | Sciences | Une étude parue lundi bouleverse nos idées reçues sur les relations entre sexes opposés chez nos lointains cousins: les mâles ne dominent pas forcément les femelles. Publié aujourd'hui à 15h21 Un groupe d'experts a rassemblé pendant cinq ans des données issues de 121 espèces de primates (image d'illustration). AFP/JOHN MACDOUGALL Une étude publiée lundi bat en brèche l'idée d'une dominance des mâles largement répandue chez les primates , dressant un tableau bien plus nuancé des relations entre sexes opposés chez nos cousins singes et lémuriens. «Pendant longtemps, on a eu une vision complètement binaire de la question: on pensait qu'une espèce était soit dominée par les mâles, soit par les femelles, et que c'était un trait fixe. Assez récemment, cette idée a été remise en question par des études qui ont montré que c'était beaucoup plus compliqué que ça», explique à l'AFP la primatologue Elise Huchard, première autrice de l'étude publiée dans « Proceedings of the National Academy of Sciences » (PNAS). «On commence juste à se poser la question des facteurs qui influencent cette flexibilité», comme la démographie du groupe ou le ratio mâle/femelle, note la chercheuse du CNRS, qui travaille à l'Université de Montpellier. Mâles et femelles n'hésitent pas à se confronter Avec des collègues français et allemands, cette spécialiste des babouins chacma a fouillé la littérature scientifique à la recherche d'interactions susceptibles de révéler un rapport hiérarchique chez les primates: agression, menace ou comportement ritualisé de domination-soumission, comme lorsqu'un individu s'écarte spontanément du chemin d'un second. Un «travail de fourmi» de cinq ans qui leur a permis de rassembler des données issues de 253 populations représentant 121 espèces (lémuriens, singes, tarsiers, loris…). Et de découvrir que les confrontations entre individus de sexes opposés sont bien plus fréquentes qu'imaginé: en moyenne, plus de la moitié de ce type d'interactions au sein d'un groupe impliquent une femelle et un mâle. Une dominance stricte des mâles (+ de 90% des affrontements remportés), comme chez les babouins ou les chimpanzés, n'a été observée que dans 17% des cas. Et dans 13%, ce sont les femelles qui occupent le haut de la hiérarchie, par exemple chez les lémuriens. Mais chez la grande majorité des espèces, les confrontations peuvent être gagnées par les femelles comme par les mâles. Force physique et contrôle sur la reproduction Dans les cas où elle est marquée, la dominance des mâles s'observe surtout chez les espèces où ceux-ci disposent d'une nette supériorité physique, parce qu'ils sont plus gros, ou leurs canines plus imposantes. Ou encore chez les espèces terrestres, où la femelle peut moins facilement fuir ou se cacher que celles vivant dans les arbres. Les femelles ont en revanche tendance à dominer dans les sociétés où elles exercent un fort contrôle sur la reproduction. Les femelles babouins, par exemple, sont dotées d'une tumescence qui grossit pendant l'ovulation. Lors de cette période de quelques jours, le mâle «garde» la femelle, la suivant à la trace pour s'assurer qu'aucun autre concurrent ne viendra s'accoupler avec elle. Chez les bonobos, ce gonflement des tissus «n'est pas fiable», explique Elise Huchard. «Les mâles ne savent jamais quand elles ovulent ou pas. Du coup, elles peuvent s'accoupler avec qui elles veulent et quand elles veulent beaucoup plus facilement». Ce qui leur procure d'autant plus de pouvoir sur les mâles. La dominance des femelles est aussi plus fréquente dans les cas où existe une féroce compétition entre elles, notamment quand «le mâle prodigue des soins» aux petits. «Le monopoliser devient alors un enjeu», détaille la chercheuse. Dans ces sociétés, les femelles sont souvent solitaires ou n'acceptent que la présence d'un mâle à leurs côtés. Avec pour conséquence une monogamie très liée à la dominance des femelles. Semblables aux humains Peut-on extrapoler ces résultats aux humains? Nos origines évolutives (différences physiques entre les sexes, flexibilité des systèmes d'accouplement…) «ne sont pas forcément très déterministes» en ce qui concerne les relations hommes-femmes, estime Elise Huchard. Ce qui nous placerait plutôt dans la catégorie des primates sans dominance stricte d'un sexe sur l'autre. «Ces résultats corroborent assez bien ce qu'on sait des relations entre hommes et femmes chez les chasseurs-cueilleurs, qui sont plus égalitaires que dans les sociétés d'agriculteurs qui sont apparues ultérieurement», juge-t-elle, soulignant l'importance d'un regard interdisciplinaire sur le sujet. À lire aussi sur les animaux AFP Vous avez trouvé une erreur?Merci de nous la signaler.