
Genève prépare une réforme du Cycle d'orientation: ce qui pourrait changer en 2027
Pour la 9e année, Anne Hiltpold projette que les élèves suivent dans chaque discipline le niveau le plus élevé du Plan d'études romand (image d'illustration).
ENRICO GASTALDELLO
En bref:
Qu'en est-il de la réforme du Cycle d'orientation (CO), trois ans après l'échec de CO22 , qui visait à instaurer des classes mixtes en 9e et 10e annéee? Le 19 juin, la cheffe de l'Instruction publique (DIP), Anne Hiltpold, a communiqué par e-mail au corps enseignant le cadre de réflexion dans lequel elle entend mener les travaux en collaboration avec le terrain.
Pour la 9e année, elle projette que les élèves suivent dans chaque discipline le niveau le plus élevé du Plan d'études romand. «Il y aurait un seul type de classe avec les élèves mélangés et les mêmes exigences, on peut donc parler d'une année hétérogène», selon Michaël Savoy, du syndicat enseignant (Famco). Anne Hiltpold, elle, ne commente pas.
Aux enseignants, elle communique que l'intention est de (re)donner au CO son rôle d'orientation, en décalant vers la 9e le processus d'orientation effectué actuellement en 8P, en se basant sur les résultats dans deux disciplines. Lesquelles? Français et maths, précise Michaël Savoy. Différencier les enseignements
Certaines disciplines pourraient bénéficier d'accompagnements pédagogiques particuliers afin de permettre aux enseignants de différencier leurs enseignements en fonction des capacités des élèves, ce qui est une nécessité dans un cadre hétérogène.
Dans cette perspective, deux établissements (Colombières et Voirets) seront impliqués dès la rentrée dans un projet pilote autour de la constitution de «groupes de besoins» en maths et en français.
Anne Hiltpold n'a pas souhaité expliquer son e.mail du 19 juin. Le DIP fait savoir: «Ce mail était à destination des collaborateurs, avec qui la magistrate souhaite construire cette réforme. Elle n'a pas prévu de communiquer au-delà pour l'heure.»
MAGALI GIRARDIN
Le but est de faire en sorte que plusieurs classes aient au même moment des leçons d'une même discipline. Ce qui permettra aux enseignants de constituer, pour une durée limitée, des groupes avec des élèves des différentes classes partageant les mêmes besoins ou difficultés – une pratique courante à l'école primaire.
Ces expériences seront suivies en vue d'une possible généralisation lors du déploiement du nouveau modèle de 9e année. «Nous nous retrouvons avec Anne Hiltpold sur cette vision d'une 9e hétérogène, c'est positif», salue Michaël Savoy. Au plus tôt en 2027
Pour la 10e et la 11e toutefois, «tout est encore très flou», prévient-il. Anne Hiltpold imagine «des filières corrélées à l'orientation au 12e degré, en lien avec les offres du secondaire II». Michaël Savoy traduit: «Il y aurait des filières collège, ECG, apprentissage…» Au risque de changer de façon cosmétique le seul nom des actuelles sections? «C'est possible», admet Michaël Savoy.
Selon lui, la conseillère d'État souhaite casser la hiérarchisation entre les filières en valorisant tous les parcours. Comment? «Cela fera partie des travaux de l'an prochain», selon Michaël Savoy. Une piste serait de permettre à des élèves tirés vers le bas par une seule discipline de rester pour toutes les autres dans la filière. Et inversement: si un élève brille dans une discipline particulière, il pourrait l'étudier dans la filière plus élevée. Anne Hiltpold ne commente pas.
«Au plus tôt, le déploiement du nouveau modèle se ferait à partir d'août 2027, en commençant par la nouvelle volée de 9e», précise le service communication de la magistrate.
Le délai dépendra de l'avancée des travaux et de l'accueil par le politique, puis éventuellement par le peuple des orientations qui auront été retenues. Pour rappel, le 4 mars 2001, 64,33% des votants avaient refusé l'instauration d'une 7e hétérogène (la 7e était l'actuelle 9e).
Ce projet socialiste avait été combattu par le Parti radical, soit la famille politique d'Anne Hiltpold, et les démocrates-chrétiens. À l'époque, trois établissements hétérogènes cohabitaient avec les Cycles à sections, et un rapport avait conclu que les deux systèmes s'équivalaient en termes de réussite scolaire.
À Genève en mai, CO22, combattu par le PLR, l'UDC et les Vert'libéraux, était de peu refusé dans les urnes . Il prévoyait en 9e et 10e que les élèves suivent les mêmes cours avec des exigences différenciées, avant une orientation vers des voies maturité ou certificat en 11e. Si cette solution divisait, il y avait consensus sur la nécessité de réformer le système actuel qui confine les élèves les moins scolaires dans des «classes ghettos» sans perspectives.
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Canicule: La météo promet une courte anomalie de fraîcheur
Dès dimanche soir, une perturbation débarque. Elle nous promet quelques bonnes nuits de sommeil, avant un retour de l'été dans des airs moins humides. Publié aujourd'hui à 21h27 Le dôme de chaleur, qui maintenait une chaleur étouffante sur l'Europe, cède la place à une dépression venue d'Islande, qui va rafraîchir les températures (image d'illustration). KEYSTONE/AP PHOTO/MARTIN MEISSNER En bref: La canicule fait une pause. Nous allons souffler quelque peu dans les jours qui viennent, surtout la nuit. La météo de la semaine nous promet en effet de passer d'une longue et très inhabituelle période de surchauffe à «une courte anomalie de fraîcheur», selon les termes de Frédéric Glassey, à MeteoNews. Le dôme de chaleur, qui maintenait une chaleur étouffante sur l'Europe, cède la place à une dépression venue d'Islande, qui va rafraîchir les températures. Une perturbation débarque dimanche, en cours de journée. «Lundi et mardi, nous serons dans un régime de nord-ouest plus perturbé, avec l'arrivée d'une masse d'air nettement plus fraîche. Cette évolution garantit des températures plus agréables en Suisse. Lundi, par exemple, il faut s'attendre à un maximum de 21 ou 22 degrés», précise Frédéric Glassey. Sous les normales de saison Avec ce coup de frais, la Suisse devrait même passer deux ou trois jours sous les normales saisonnières. «La norme, pour le mois de juillet, ce sont des températures qui se situent à 26-27 degrés maximum, précise le météorologue. Pour lundi et mardi, nous serons plus proches des 21-22 degrés, donc 3-4 degrés en dessous des normes. Mais durant l'épisode de canicule, nous étions 7 ou 8 degrés au-dessus des normales.» Cette pause dans la canicule n'est pas seulement bienvenue pour celles et ceux qui dorment mal la nuit. Elle sera aussi appréciée par les plantes et les cultures, puisque cette anomalie de fraîcheur nous apportera aussi des pluies. Des pluies utiles pour la nature «Des averses sont attendues entre dimanche et mardi. Il y aura des averses orageuses avec quelques bons coups de tonnerre et des rafales de vent, détaille Frédéric Glassey, mais la Suisse devrait échapper aux orages très spectaculaires qui ont provoqué de gros dégâts récemment en Italie et en Savoie, sauf ce dimanche au Tessin.» Et puis ces pluies seront pour l'essentiel «utiles pour la nature et l'agriculture, note le météorologue. Elles ne vont pas tomber dans un épisode de chaleur épouvantable, qui provoque une forte évaporation et des eaux qui ruissellent. Durant ces journées plus fraîches, on peut s'attendre à des pluies qui pénètrent un peu mieux dans le sol.» Frédéric Glassey, de MeteoNews. DR L'été revient jeudi À partir de mercredi, les températures repartent à la hausse et l'été fait son retour dès jeudi. MeteoNews s'attend à ce que le thermomètre flirte à nouveau avec les 30 degrés le week-end prochain. L'anticyclone se réinstalle, et nous repartons pour un épisode estival. Il faut cependant attendre un type de chaleur un peu différent. «La semaine qui s'achève était caractérisée par de très hautes températures, mais aussi par une humidité modérée, une combinaison qui est plus difficile à supporter, note Frédéric Glassey. Le week-end prochain, nous aurons à nouveau des températures proches des 30 degrés, mais avec une chaleur plus sèche, des nuits plus fraîches et une humidité assez basse. Le ressenti sera moins problématique. Et puis les premières journées de chaleur sont toujours les plus difficiles à supporter. Après, on commence à s'habituer.» Ce retour annoncé de l'été signifiera-t-il aussi le retour de la canicule? Pas forcément, mais la question se pose. «Selon nos modèles, il n'est pas impossible que la Suisse vive un ou deux autres épisodes de canicule cet été. Des signaux montrent que cette possibilité existe.» Cette perspective fera d'autant plus apprécier l'anomalie de fraîcheur qui nous est promise pour les jours qui viennent. Newsletter «Dernières nouvelles» Vous voulez rester au top de l'info? «24 heures» vous propose deux rendez-vous par jour, pour ne rien rater de ce qui se passe dans votre Canton, en Suisse ou dans le monde. Autres newsletters Jocelyn Rochat a travaillé pour le Nouveau Quotidien, le Journal de Genève, L'Hebdo et Télétop Matin. Il écrit désormais dans Le Matin Dimanche, la Tribune de Genève et 24 Heures. Plus d'infos Vous avez trouvé une erreur?Merci de nous la signaler.


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Elle étudie les couples depuis vingt ans, ce qu'elle dit sur le divorce va vous surprendre
Joëlle Darwiche, professeure et chercheuse en psychologie à l'Université de Lausanne, est spécialisée dans le couple et les relations familiales. Publié aujourd'hui à 12h14 Joëlle Darwiche, professeure et chercheuse en psychologie à l'Université de Lausanne, est spécialisée dans le couple et les relations familiales. En bref: Joëlle Darwiche mène actuellement, dans le cadre d'un projet financé par le Fonds national suisse (FNS) , une étude qui vise à évaluer comment se sentent, au quotidien, les familles dont les parents sont séparés. En Suisse, près d'un couple sur deux se sépare ou divorce. C'est banal, et en même temps, toujours très douloureux pour les personnes concernées. Pourquoi ce paradoxe? Il y a d'autres choses qui sont très fréquentes et très douloureuses: la mort, la maladie, la guerre. Ce n'est pas parce qu'un phénomène est fréquent qu'il est plus acceptable. Alors, pourquoi le divorce fait autant souffrir? 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Les personnes qui ont témoigné disent qu'en se séparant, elles disent aussi au revoir à une part d'elle-même. Exactement. C'est vraiment la question identitaire qui est centrale: on doit passer du «nous» conjugal au «je» après une séparation, et cela peut représenter une fragilisation identitaire. À cela s'ajoute, si on a des enfants, la construction d'une identité commune familiale. Ces identités de couple et de famille sont associées à beaucoup d'avantages, comme se sentir davantage entouré, sécurisé, reconnu socialement. Lorsqu'il y a une séparation, ces identités doivent se réorganiser. Cela prend du temps et de l'énergie interne. Une séparation peut-elle raviver les blessures d'enfance? Dans la formation de certains types de couple, il y a en effet une attente démesurée que l'autre comble certaines failles et blessures d'enfance, par exemple attendre de l'autre qu'il soit fier de nous ou nous aime inconditionnellement. Alors qu'au fond, on ne croit pas vraiment que ce soit possible, car on ne l'a pas reçu de ses parents. La séparation confronte au fait que l'autre n'a pas pu ou ne pourra jamais adoucir cette réalité-là. Elle rouvre les cicatrices. Cela va de pair avec beaucoup d'autres dossiers à gérer lorsque le couple a des enfants, la procédure légale, la garde des enfants, etc. Paradoxalement, beaucoup de personnes parlent aussi d'une forme de libération après leur divorce… Réussir sa relation de couple, c'est peut-être une des choses les plus difficiles qui soit. Aussi, certaines personnes savourent – au moins temporairement – une certaine liberté retrouvée. Dans les entretiens que nous menons, certains parents séparés disent qu'ils n'avaient plus eu l'occasion de sortir ou de partir en vacances depuis des années. En particulier ceux qui avaient une relation de couple très conflictuelle. Quand on se libère de toutes les concessions liées au couple, il peut y avoir une forme de jouissance. Comment les divorces ont-ils évolué ces dernières décennies? Avant, le couple était vraiment l'unité de base de la famille. Aujourd'hui, l'enfant est au centre, il constitue le lien entre ses parents puisque, dans une famille sur deux, le lien conjugal ne résiste pas. C'est aussi pour cela que les parents sentent parfois une certaine pression à réussir leur relation coparentale, à s'entendre comme parents même après une séparation. Cela implique donc plus de coordination entre ex-conjoints… Exactement. Et d'autant plus que le modèle de la garde partagée est de plus en plus fréquent. C'est une chance pour les enfants, pour les pères et pour les mères! Pour autant que la fréquence des conflits ne soit pas trop élevée. Il y a toujours des désaccords, mais cela se compense avec les bénéfices pour l'enfant de garder un lien fort avec ses deux parents. Dans notre série Marie Maurisse est journaliste société à la rubrique Vaudoise. Active depuis près de 15 ans dans le domaine et spécialisée dans l'enquête, elle a cofondé le média spécialisé Gotham City, réalisé plusieurs documentaires et écrit deux livres. Plus d'infos @mariemaurisse Vous avez trouvé une erreur?Merci de nous la signaler.


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12 hours ago
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Six conseils pour concilier parentalité et vacances
Peut-on s'offrir une pause sans enfant ou se permettre une trêve éducative pendant l'été? Quatre spécialistes répondent à nos questions. Publié aujourd'hui à 10h30 Mis à jour il y a 4 minutes Les vacances en famille ne sont pas forcément de tout repos. Voici quelques astuces d'expert·e·s pour les parents qui s'interrogent sur les façons de gérer les enfants et le couple pendant la pause estivale. Getty Images/iStockphoto Cet article du 6 août 2024 a été importé de et republié sur notre site le 4 juillet 2025. La réponse de Caroline Goldman, autrice de «Pourquoi? Petites leçons de psychologie, pour les 8 à 11 ans» (Éd. Dunod) Et toi, t'es allé·e où en vacances cet été? Cette question est un rituel incontournable au retour au bureau, et elle l'est encore plus dans les préaux à la rentrée scolaire. Pour les enfants qui ne sont pas partis en Grèce, en Italie ou vers d'autres destinations exotiques, répondre qu'on est resté à la maison est parfois difficile. 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Davantage sur les vacances et l'éducation des enfants Newsletter «Santé & Bien-être» Conseils, actualités et récits autour de la santé, de la nutrition, de la psychologie, de la forme et du bien-être. Autres newsletters Fabienne Rosset est journaliste depuis 2003, pour le magazine Femina et Le Matin Dimanche. Elle couvre les sujets société, et plus particulièrement les thèmes de la santé et de la psychologie. Plus d'infos Vous avez trouvé une erreur?Merci de nous la signaler.