
La folie des crèmeries
Non, vous ne rêvez pas. Les crèmeries se multiplient, alors que, statistiquement, nous consommons moins de crème glacée.
Dans le milieu, on note une spécialisation de la crèmerie. « Avant, on voyait juste des Crémière ou des Dairy Queen, lance le cofondateur des Givrés Alexandre Deslauriers. Ensuite, des chaînes comme Chocolats Favoris et La Diperie sont arrivées avec leur offre de trempage. »
PHOTO ALAIN ROBERGE, LA PRESSE
Alexandre Deslauriers et Martin Maheu-Picard ont fondé il y a 15 ans Les Givrés avec un modèle d'affaires qui prévoyait des bars laitiers et de la vente au détail. Ils sont aujourd'hui à la tête de la plus grande fabrique de crème glacée et de sorbet de manière artisanale du Québec.
Alexandre Deslauriers est dans le domaine de la crème glacée depuis 30 ans. Avant de fonder Les Givrés, il y a 15 ans, il a travaillé au Bilboquet – deux commerces montréalais qui ont assurément fait partie de l'amorce de cette spécialisation, en présentant des offres différentes de ce qu'il y avait au menu jusqu'alors. Selon lui, il ne faut pas être naïf et voir « un effet de mode » dans la crèmerie comme il y en a eu un pour le cupcake, il y a une vingtaine d'années. Plusieurs pâtisseries en avaient fait leur spécialité, peu ont survécu à l'essoufflement de l'intérêt.
« C'est ça, l'entrepreneuriat, appuie Alexandre Deslauriers. Il y a toujours des ouvertures et des fermetures. »
Le défi avec la crème glacée, c'est qu'on en vend essentiellement cinq mois par année.
Alexandre Deslauriers, cofondateur des Givrés
Pour tirer son épingle du jeu, le modèle d'affaire des Givrés compte quatre crèmeries, mais surtout des produits vendus dans les restaurants, les épiceries et les autres crèmeries. L'entreprise a une centaine de clients et fonctionne 11 mois par année – tout le monde est en vacances en janvier. La première tâche après le retour des Fêtes est la fabrication des cornets – l'équipe en a fait pratiquement 200 000 cette année.
PHOTO ALAIN ROBERGE, LA PRESSE Dans leur fabrique montréalaise, Les Givrés font tout, du début à la fin. Pour la crème glacée à la pistache, ils font eux-mêmes leur pâte de pistache. Pour celle au thé chai, ils infusent du thé qui provient de la maison Camellia Sinensis et font ensuite le mélange d'épices.
PHOTO ALAIN ROBERGE, LA PRESSE Chaque pot est rempli à la main. Parfois, il faut deux ou trois employés pour faire la tâche, lorsque des ingrédients sont ajoutés à la crème glacée au moment de l'emballage. Ici, le sorbet fait de framboises québécoises.
PHOTO ALAIN ROBERGE, LA PRESSE L'approvisionnement en matières premières peut être complexe. Parfois, c'est le prix qui augmente beaucoup, parfois, ce sont les sources qui deviennent problématiques. Dans le cas de la pistache (parfum hyper populaire), ces deux facteurs sont actuellement mis en cause. Le prix a explosé et Les Givrés ont laissé leur approvisionnement américain pour passer à la pistache iranienne, mais la situation politique incertaine met aussi de la pression sur cette source d'approvisionnement.
PHOTO ALAIN ROBERGE, LA PRESSE Les glaces molles sont destinées aux quatre crèmeries des Givrés et à quelques clients montréalais. Une poche de crème glacée a une durée de conservation de deux semaines seulement.
PHOTO ALAIN ROBERGE, LA PRESSE La vanille reste le parfum le plus populaire. Cette machine qui contient 170 litres de crème glacée sera remplie 6 fois durant la haute saison.
PHOTO ALAIN ROBERGE, LA PRESSE Une douzaine de personnes travaillent dans l'atelier de 5000 pieds carrés de la rue Chabot. Trois employés goûtent à chaque recette de crème glacée pour s'assurer de la qualité. Autour de 25 employés s'ajoutent durant la saison estivale dans les bars laitiers des Givrés.
PHOTO ALAIN ROBERGE, LA PRESSE
Dans leur fabrique montréalaise, Les Givrés font tout, du début à la fin. Pour la crème glacée à la pistache, ils font eux-mêmes leur pâte de pistache. Pour celle au thé chai, ils infusent du thé qui provient de la maison Camellia Sinensis et font ensuite le mélange d'épices.
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Le restaurateur Nicholas Rosati le confirme : « Il faut vendre beaucoup, beaucoup de crème glacée durant la saison estivale » pour arriver. Et espérer qu'il n'y aura pas trop de jours de pluie.
C'est un business qui est très difficile. C'est saisonnier. C'est un produit qui n'est pas cher, alors il faut vraiment faire du volume durant quatre ou cinq mois.
Nicholas Rosati, fondateur de la crèmerie Dalla Rose
En plus de sa crèmerie, Dalla Rose vend sa glace et ses bombes Alaska en ligne et sa crème glacée dans quelques commerces. Plusieurs crèmeries adoptent ce modèle d'affaires pour rester actives hors saison.
Segmentation du marché
« Il y a un boom de crème glacée cette année », constate Zahra Eliassa, copropriétaire de la crèmerie Holy Molly avec son conjoint Adnane Bennani. Le couple, qui fait ses premiers pas dans le commerce, a eu la surprise de voir qu'une autre crèmerie s'installait pratiquement juste en face, avenue Laurier Est, le printemps dernier.
Zahra Eliassa mise fort sur le fait que les deux comptoirs ont des personnalités très fortes. « On est différents », précise-t-elle, en définissant sa personnalité artisanale et assurément moyen-orientale.
PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE
Zahra Eliassa et Adnane Bennani ont récemment ouvert la petite crèmerie Holy Molly sur l'avenue Laurier Est. La grand-mère d'Adnane avait une crèmerie, au Maroc. « Il a grandi dans la crème glacée, dans les saveurs, les fruits, les noix, confie sa conjointe. On avait depuis longtemps cette idée de créer de la crème glacée ici. »
Les deux entrepreneurs sont d'origine marocaine, et cela se devine dans les parfums de Holy Molly où l'on retrouve des oranges confites, de la fleur d'oranger et des dattes.
Peu d'endroits illustrent l'actuel engouement pour les crèmeries comme l'avenue Laurier à Montréal.
Dans sa partie est, presque en face de Holy Molly se trouve Coquine, qui a comme particularité d'offrir des crèmes glacées alcoolisées. En poursuivant vers l'ouest, les amateurs vont croiser Beau Bec, la crèmerie classique du quartier. Un peu plus loin, la pâtisserie Fous desserts fait aussi des crèmes glacées et le café Noble, de l'autre côté de la rue, offre le classique affogato – ce mélange de crème glacée et de café.
La folie des crèmeries se poursuit plus à l'ouest avec l'ouverture d'un deuxième comptoir Iconoglace, angle Laurier et Clark, à quelques pas de Kem Coba – deux adresses hyper populaires chez les amateurs de crème glacée.
C'est dans ce paysage glacé déjà bien nanti que Clémence Corbière a eu l'idée d'ouvrir l'Atelier Mélilot, début mai.
Un commerce de quartier
C'est par nécessité que la pâtisserie Mélilot de l'avenue Laurier Ouest a ouvert une petite sœur glacée. Le commerce avait mis la main sur un nouvel espace tout près pour préparer et stocker des aliments, mais il a fallu ouvrir un second commerce, car le local a pignon sur rue…
PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, ARCHIVES LA PRESSE
Les copropriétaires de la pâtisserie Mélilot : Vincent Gagnon-Boisvert, Clémence Corbière et Aurélien Kerzerho
Clémence Corbière s'est lancée dans ce nouveau projet en étant consciente qu'il y avait déjà plusieurs bars laitiers dans le coin.
Mélilot a donc misé sur une petite crèmerie de quartier qui ne propose que quelques parfums qu'on ne voit pas ailleurs, dont celui au kouign-amann, ce gâteau breton au beurre, une des spécialités de la pâtisserie. Ce qui mène à ce savoureux constat : s'il reste du kouign-amann après la journée à la pâtisserie, il part vers la crèmerie. « On est devenus presque zéro perte ! », lance Clémence Corbière.
Et les affaires de cette première saison vont bien. L'Atelier Mélilot a déjà une clientèle d'habitués, des gens qui habitent le quartier Outremont.
Une crèmerie, c'est le style de commerce que tu consommes à 300 mètres ou 500 mètres à la ronde.
Clémence Corbière, copropriétaire de la pâtisserie Mélilot
Nicholas Rosati, qui a fondé Dalla Rose il y a presque 10 ans, confirme que la crèmerie est décidément un commerce de quartier.
La crèmerie de M. Rosati se trouve dans un coin de Montréal où il n'y a pas eu saturation du marché, dans le Sud-Ouest. Il note ce comportement de ses clients : plusieurs arrêtent après un repas dans un bon resto du quartier. Ils préfèrent sauter le dessert au restaurant et terminer la soirée à la crèmerie.
Lui-même issu de la restauration haut de gamme, il voulait faire de la glace artisanale de qualité. « J'ai trouvé un petit trou dans le marché comme ça. »
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