
Comment le Canada peut attirer davantage de talents
Daniel Johnson
La Presse Canadienne
Sheldon McCormick, PDG de Communitech, un pôle technologique établi à Kitchener, en Ontario, a constaté un élan croissant autour de l'idée que le Canada doit « créer, acquérir et posséder davantage d'innovations » dans des domaines comme l'intelligence artificielle et les technologies de la santé.
Pour y parvenir, il faudrait protéger les données et la propriété intellectuelle, ainsi qu'attirer les talents nécessaires pour « ancrer la valeur économique ici, au pays », a-t-il ajouté.
Les défis pour attirer et retenir les talents soulignés par les acteurs du secteur technologique concernent la rémunération, le soutien gouvernemental et le coût de la vie.
Benjamin Bergen, président du Conseil des innovateurs canadiens, a souligné qu'il y avait eu une forte augmentation du nombre de talents technologiques américains venant au Canada pendant le premier mandat de Donald Trump, mais que cela ne semble pas avoir lieu actuellement.
« Je pense qu'une partie du défi réside simplement dans les nouvelles réalités économiques. Les embauches n'ont manifestement pas été aussi nombreuses que par le passé, a avancé M. Bergen. L'arrivée de Donald Trump à la Maison-Blanche n'est pas une stratégie pour notre secteur technologique. Cela peut être légèrement bénéfique, mais cela ne change pas grand-chose pour attirer des talents de qualité. »
Grace Lee Reynolds, PDG du pôle d'innovation MaRS Discovery District, observe cependant une tendance légèrement différente dans son univers technologique.
« De façon anecdotique, on a l'impression que de plus en plus de gens en parlent. On entend des anecdotes de personnes sur le point d'opérer ce type de changement », a-t-elle expliqué à propos des talents technologiques qui quittent les États-Unis pour le Canada.
« Il sera intéressant de pouvoir observer cela sur une plus longue période. Je pense que c'est vraiment crucial », a-t-elle précisé.
Le rôle des marchés publics
Selon M. Bergen, la réorientation des intérêts économiques du Canada permettrait au pays de bâtir et de développer des entreprises technologiques plus prospères, qui pourraient, à leur tour, attirer davantage de talents. Il a notamment mentionné que les marchés publics pourraient constituer un aspect crucial.
« L'une des raisons pour lesquelles la Silicon Valley est si unique est l'ensemble des marchés publics que le gouvernement américain a initialement conclus et continue de conclure avec les entreprises de la région », a indiqué M. Bergen.
En comparaison, le Canada acquiert moins ses propres solutions nationales, ce qui complique la croissance des entreprises, car elles ne reçoivent pas le même volume de commandes de la part du gouvernement, a-t-il ajouté.
Elaine Kunda, fondatrice et associée générale de Disruption Ventures, juge toutefois que les marchés publics ne constituent peut-être pas une solution universelle.
« Si l'on a l'impression que l'économie n'est pas en croissance et que les investisseurs investissent dans le secteur, les marchés publics ne résoudront pas les défis du secteur technologique. Au contraire, ils le rendent plus dépendant du gouvernement », a-t-elle déclaré.
Elle pense plutôt que le secteur bénéficierait grandement de crédits d'impôt pour les entreprises, qui inciteraient les gens à prendre davantage de risques.
Comparées aux entreprises technologiques canadiennes, les compagnies américaines ont beaucoup plus de facilité à lever des capitaux et à trouver des acheteurs pour leurs produits, selon M. Bergen.
Mme Lee Reynolds considère également l'accès au capital comme un obstacle à la croissance, le qualifiant de défi classique pour le Canada.
« Le capital, surtout à un stade précoce, est insuffisant pour permettre à son entreprise de croître et de prendre de l'expansion. Il n'y en a pas assez ici », a-t-elle estimé.
S'assurer de retenir les talents
Dans le contexte actuel, Mme Lee Reynolds croit qu'il est important de retenir les talents au pays, car les gens perçoivent les opportunités au Canada « du point de vue des valeurs ».
« Il faut alors parler de collaboration avec le gouvernement, ou de travail collaboratif au sein d'un écosystème, pour débloquer davantage de financement en démarrage afin de permettre aux entreprises de croître », a-t-elle affirmé.
Alors que les entreprises technologiques canadiennes s'efforcent de prendre de l'expansion, Lucy Hargreaves, PDG du groupe de réflexion spécialisé dans les technologies Build Canada, affirme que le défi consiste à attirer les meilleurs talents du monde entier et à empêcher les travailleurs locaux de quitter le Canada.
« La première chose à faire est de s'assurer que les personnes que nous avons ne partent pas. C'est formidable d'attirer de nouveaux talents au pays, mais nous avons des talents incroyables au Canada », a-t-elle soutenu.
« Chaque année, nos universités forment des diplômés extrêmement talentueux et compétents, notamment grâce à des programmes de renommée mondiale dans le domaine des technologies, comme ceux de Waterloo. La première chose à faire est donc de savoir comment les inciter à rester », a-t-elle souligné.
Selon Mme Hargreaves, la rémunération est un enjeu majeur pour les travailleurs du secteur technologique qui envisagent de déménager ou de rester au Canada.
« Les salaires jouent un rôle important. Si l'on considère les salaires actuels dans le secteur technologique et dans d'autres secteurs au Canada, ils ne sont généralement pas compétitifs. Il peut y avoir quelques exceptions, mais en général, les salaires ne sont pas compétitifs par rapport aux dollars américains offerts dans la Silicon Valley », a-t-elle mentionné.
Une étude menée en 2023 par The Dais, un groupe de réflexion de l'Université métropolitaine de Toronto, a révélé que les travailleurs américains du secteur technologique gagnaient en moyenne 122 604 $, tandis que les travailleurs canadiens du même secteur gagnaient en moyenne 83 698 $.
Après ajustement pour tenir compte du taux de change et du coût de la vie, l'étude a révélé que les travailleurs américains du secteur technologique gagnaient environ 46 % de plus.
« Le coût de la vie au Canada n'est pas beaucoup moins élevé, a rappelé M. Bergen. Et souvent, nos entreprises membres nous disent qu'elles cherchent peut-être à embaucher ou à faire venir un excellent directeur technique ou directeur financier. Mais franchement, le coût de la vie est plus élevé ou équivalent à celui d'autres grandes juridictions. »
Selon lui, les entreprises canadiennes cherchant à attirer des talents américains pourraient devoir payer « beaucoup plus » pour compenser les problèmes liés au coût de la vie et à la faiblesse du dollar, qui a créé un « écart de plus en plus grand ».
Dans l'ensemble, il a avancé que certaines « personnes extrêmement talentueuses » pourraient choisir de travailler au Canada en fonction des valeurs du pays, mais il aimerait que le gouvernement renforce les possibilités de réussite des entreprises technologiques nationales.
Hashtags

Essayez nos fonctionnalités IA
Découvrez ce que Daily8 IA peut faire pour vous :
Commentaires
Aucun commentaire pour le moment...
Articles connexes


La Presse
4 hours ago
- La Presse
Des fermetures éclair de A à Z
On les voit souvent le long des autoroutes ou dans les parcs industriels. Le commun des mortels n'y a pas accès, mais cet été, l'équipe de La Presse Affaires s'est fait ouvrir les portes d'usines qui font partie du paysage. Au bout de la ligne orange du métro de Montréal, après avoir emprunté le boulevard Thimens dans l'arrondissement de Saint-Laurent, on arrive au Japon. YKK Montréal YKK est le sigle de Yoshida Kogyo Kabushi, une entreprise fondée au Japon en 1934 par Tadao Yoshida et toujours propriété de la famille fondatrice. L'entreprise est connue mondialement pour ses fermetures à glissière, mais elle fabrique aussi d'autres sortes d'attaches comme des boutons-pression et des boucles de plastique. L'entreprise a des usines partout dans le monde, qui emploient 46 000 personnes. L'usine de Montréal, dans l'arrondissement de Saint-Laurent, est la seule au Canada. Elle existe depuis 1978 et compte 150 employés. L'usine YKK Canada est un morceau du Japon industriel, établi dans l'île de Montréal depuis 50 ans. Un gros morceau : l'usine et le terrain occupent une superficie totale de 500 000 pieds carrés. Tout le monde a environ 300 produits YKK chez eux, nous dit Hugues Charbonneau, président de YKK Canada, qui nous accueille sur les lieux. PHOTO FRANÇOIS ROY, LA PRESSE Hugues Charbonneau est président de YKK Canada depuis cinq ans. Au niveau mondial, l'entreprise fabrique chaque année 10 milliards de fermetures éclair. Assez pour faire huit fois le tour de la Terre. Hugues Charbonneau, président de YKK Canada L'usine de Montréal est une rareté au Québec. Elle fabrique son produit de A à Z, avec du fil, du métal brut, du plastique et des couleurs. Le tissu de la fermeture à glissière est tissé sur place à partir de fil, puis il est teint à la couleur désirée. Les accroches en métal ou en plastique sont fabriquées sur place aussi et fixées à la bande de tissu. Finalement, le curseur qui arbore la marque de fermetures la plus répandue dans le monde est façonné à partir du métal en bobine venu du Japon. Même recette, de Mexico à Shanghaï L'usine de YKK Canada est unique au Québec, mais elle a des sœurs dans 72 pays dans le monde. Des sœurs jumelles. « Si, magiquement, je vous transporte au Mexique, vous ne saurez pas que vous êtes au Mexique. Toutes les usines de YKK dans le monde sont pareilles, aussi propres, les machines installées de la même façon. Si je vais à Shanghaï, c'est pareil aussi. » Il y a peu de va-et-vient et peu de bruit dans l'immense usine, où la sophistication et l'automatisation des machines fabriquées par YKK elle-même sautent aux yeux. Il y a de la technologie insoupçonnée dans les attaches, les fermetures et les boutons-pression qui sortent de l'usine de Montréal. PHOTO FRANÇOIS ROY, LA PRESSE Toute la machinerie qui sert à la production est fabriquée par YKK au Japon. Bon an mal an, l'usine investit 3 % de son chiffre d'affaires pour améliorer son fonctionnement. PHOTO FRANÇOIS ROY, LA PRESSE Certains secteurs de l'usine roulent 24 heures sur 24 pour approvisionner les autres départements. PHOTO FRANÇOIS ROY, LA PRESSE Parmi les clients de YKK Canada, les vedettes canadiennes du vêtement que sont Arc'Téryx, Canada Goose et Moose Knuckles. PHOTO FRANÇOIS ROY, LA PRESSE La couleur est appliquée sur les curseurs de métal avec une technologie qui vient de Toyota et qui est utilisée pour peindre les voitures. Les curseurs reçoivent deux couches d'apprêt, quatre couches de couleur et deux couches de finition. PHOTO FRANÇOIS ROY, LA PRESSE Les couleurs YKK sont disponibles partout dans le monde. PHOTO FRANÇOIS ROY, LA PRESSE Avec du fil, du métal et du plastique, l'usine de Montréal fabrique son produit de A à Z. PHOTO FRANÇOIS ROY, LA PRESSE Les employés de l'usine viennent d'un peu partout dans le monde. Quand un nouveau arrive, le drapeau de son pays est hissé dans l'usine. C'est la plus multiculturelle des installations de YKK dans le monde. PHOTO FRANÇOIS ROY, LA PRESSE Toute la machinerie qui sert à la production est fabriquée par YKK au Japon. Bon an mal an, l'usine investit 3 % de son chiffre d'affaires pour améliorer son fonctionnement. 1 /7 À l'entrée de l'usine et dans le bureau du président, une banderole déploie les valeurs de l'entreprise en caractères japonais. Traduction libre : « Une entreprise ne peut pas prospérer si elle n'aide pas d'autres entreprises à prospérer. » « Ici, c'est le contraire de toutes les autres compagnies pour lesquelles j'ai travaillé avant au Canada », dit le patron de l'usine. Les profits ne sont pas entièrement rapatriés par la société mère et servent plutôt à l'amélioration continue des opérations, illustre-t-il. Les machines sont remplacées avant la fin de leur vie utile et les mises à pied sont rarissimes. Marché en évolution Avant de prendre la direction de YKK Canada, Hugues Charbonneau était un de ses clients. Il travaillait dans l'industrie de la mode et du vêtement. Le plus important fabricant de fermetures à glissière au monde n'était pas son fournisseur préféré. Trop gros, pas assez à l'écoute des besoins des clients. Mais le marché a changé. Il s'est ouvert à la concurrence internationale, chinoise surtout, et bas de gamme. Le secteur de la mode et du vêtement, qui a fait pendant des années la fierté de Montréal et qui avait attiré YKK au Québec, est en décroissance. Le fabricant japonais, qui a déjà contrôlé 80 % du marché mondial des fermetures à glissière, a aujourd'hui une part de marché plus près de 60 %, selon Hugues Charbonneau. La nécessité de se spécialiser s'est imposée à la société mère de Chiyoda, dans le cœur économique et politique de Tokyo. « Aujourd'hui, on produit moins en volume et plus en valeur », résume le président de YKK Canada. YKK France, par exemple, fabrique les fermetures des sacs Hermès à plusieurs dizaines de milliers de dollars pièce. « Toutes les marques de luxe sont des clients », dit Hugues Charbonneau. PHOTO FRANÇOIS ROY, LA PRESSE L'entreprise a décidé de se spécialiser dans des produits à valeur ajoutée afin de se démarquer de la concurrence. Mais si la France a besoin de fermetures à l'épreuve des températures extrêmes, c'est l'usine de Montréal et ses 150 employés qui l'approvisionneront. L'usine de Montréal a développé des produits à valeur ajoutée pour ses clients au nombre desquels figurent les vedettes actuelles du secteur canadien du vêtement : Canada Goose, ArcTéryx, Lululemon et Moose Knuckles. YKK Canada a aussi investi le marché industriel avec des fermetures à l'épreuve de l'eau, mais aussi du feu, de la corrosion et des températures extrêmes pour des clients comme Hydro-Québec, les sociétés papetières et l'armée canadienne. « La croissance est là, tandis que le secteur du vêtement est à un plateau », précise le président. Deux dirigeants non japonais L'usine de Montréal fait partie de la division des Amériques de la multinationale japonaise. Sur les 120 dirigeants de filiales de YKK dans le monde, 2 seulement ne sont pas japonais, Hugues Charbonneau à Montréal et son homologue d'Atlanta. Les deux ont appris le japonais, pas parce qu'ils étaient obligés, mais pour mieux comprendre ce qui se passe au sein de leur entreprise, à qui ils rendent des comptes quatre fois par année au Japon. YKK est l'entreprise privée qui a la plus importante capitalisation au Japon. Son contrôle est toujours aux mains de la famille du fondateur Tadao Yoshida. Son chiffre d'affaires annuel est estimé à 10 milliards US, toujours en croissance, jamais en recul, dit Hugues Charbonneau. Les grands patrons sont loin, mais quand même très près des opérations. Le fonctionnement des machines sophistiquées est suivi en temps réel dans toutes ses usines. Si bien qu'un problème peut parfois être détecté au Japon avant que la direction de l'usine locale en ait eu connaissance.


La Presse
6 hours ago
- La Presse
Un projet controversé se place à l'abri des créanciers
Un projet de condos de prestige de Mont-Tremblant qui dépend d'un ascenseur à autos pour résoudre une querelle de voisins s'est placé à l'abri de ses créanciers, plombé par des coûts astronomiques et les problèmes qui s'accumulent. Érigé sur le site de l'ancien Hôtel du lac Tremblant, le projet Lago, qui compte 69 appartements de luxe, promet depuis son lancement en 2020 une « vue imprenable » sur la montagne, avec spas, piscine extérieure et quai privé réservé à ses résidants. Il a trouvé 37 preneurs pour l'instant, dont la plupart ont payé près d'un million pour leur propriété. Le projet est cependant devenu insolvable, après des modifications majeures que le promoteur, Cédric Grenon, a été obligé de faire à la suite d'un litige avec deux voisins qui détiennent des servitudes de non-construction sur lesquelles le complexe empiétait. Ces changements « ont généré des dépassements de coûts de construction estimés à 12 millions », indique un document déposé en cour pour suspendre les recours contre l'entreprise en vertu de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies. PHOTO OLIVIER JEAN, ARCHIVES LA PRESSE Le projet Lago promet depuis son lancement en 2020 une « vue imprenable » sur la montagne. Le promoteur et son entreprise, Habitations Luma, n'ont « plus accès à du financement additionnel ni aux capitaux nécessaires pour compléter le Projet Lago », ajoute le document. Un compte bancaire de l'entreprise a été saisi par le ministère du Revenu, l'entrepreneur étant incapable d'acquitter ses impôts, ajoute le document. M. Grenon n'a pas répondu à notre demande d'entrevue. L'origine du litige Dès les premières pelletées de terre, le projet a fait face à un bras de fer juridique l'opposant à deux voisins nantis établis depuis longtemps aux abords du lac Tremblant, Annette Pankrac et Mark Hantho, qui bénéficient de servitudes de non-construction protégeant leurs terrains. La Cour supérieure du Québec a catégoriquement interdit au promoteur de construire une route qui aurait empiété sur ces servitudes pour accéder au stationnement souterrain du nouveau complexe. Pour contourner le problème, le promoteur a fait concevoir des plans pour un ascenseur à autos, creusé et dynamité à flanc de falaise, une solution inusitée pour laquelle la Régie du bâtiment exige un opérateur spécialisé présent 24 heures sur 24. PHOTO OLIVIER JEAN, ARCHIVES LA PRESSE Cette photo, prise en avril 2024, montre la cavité creusée à côté des condos qui devait accueillir un ascenseur à autos. La Ville de Mont-Tremblant a mis plusieurs mois à délivrer les permis nécessaires à sa construction, et la Régie du bâtiment a ensuite bloqué le concept pendant plus d'un an, soulignant « l'absence de voie d'accès » pour les véhicules du service incendie. Le Syndicat de copropriété de Lago, qui représente au total une vingtaine d'acheteurs, affirme qu'il n'a pas été consulté par le promoteur lors de l'élaboration de cette solution. Les propriétaires craignent que le concept génère une explosion de coûts d'entretien et que de nouvelles poursuites intentées par les voisins continuent de paralyser les travaux. « Nous sommes préoccupés et espérons qu'une décision des autorités soit prise pour faire avancer favorablement le projet tout en respectant les servitudes des voisins. Nous avons acheté ces propriétés parce que nous cherchions la quiétude, et on n'a pas ce qu'on nous a promis », déplore le Syndicat. Encore à ce jour, l'ascenseur est loin d'être achevé. Construction Kingsboro, un sous-traitant qui soutient ne pas avoir été payé pour des travaux de coffrage du puits d'ascenseur, a grevé en avril dernier toutes les unités du projet Lago d'hypothèques légales totalisant plus de 614 000 $. Pas de permis pour la piscine et les spas Pour ajouter aux malheurs du promoteur, la municipalité de Mont-Tremblant refuse de délivrer un permis pour l'aménagement d'une piscine extérieure promise dans les brochures promotionnelles du projet. Évoquant la judiciarisation du dossier, la municipalité a refusé de répondre aux questions de La Presse à ce sujet. PHOTO OLIVIER JEAN, ARCHIVES LA PRESSE Le projet Lago, qui compte 69 appartements de luxe, est érigé sur le site de l'ancien Hôtel du lac Tremblant. Ces litiges ont « entraîné un fort mécontentement » des acheteurs et « plombé le momentum des ventes des unités », indique le document judiciaire. Au moins six personnes qui ont fait des dépôts de plusieurs centaines de milliers de dollars pour des promesses d'achat réclament un remboursement devant les tribunaux, parce que la piscine, les spas et le chemin d'accès au stationnement sont inexistants. Selon le contrôleur nommé par le Tribunal pour trouver une entreprise prête à relancer le projet, Pierre Marchand, la recherche de nouveaux investisseurs devrait s'étendre jusqu'au début de l'automne. « Je pense que le promoteur [Cédric Grenon] souhaiterait vendre [et se retirer du projet] », indique M. Marchand. L'organisme Les amis de Mont-Tremblant, qui milite pour conserver le caractère rustique de la municipalité, estime que le projet Lago « n'aurait jamais dû être autorisé ». « Il s'agit d'un complexe de condos à haute densité, obtenu sous couvert de zonage hôtelier, qui est très mal intégré à son environnement », affirme son porte-parole Daniel Cook. « De plus, le complexe ne respecte pas les exigences de sécurité de la Régie du bâtiment du Québec. Un tel projet n'a pas sa place à Mont-Tremblant. »


La Presse
2 days ago
- La Presse
Nouvelle piste pour ceux qui trouvent les billets d'avion trop chers
« En ce moment, Montréal est pris en otage parce que l'aéroport international Montréal-Trudeau déborde », écrit notre éditorialiste. Québec Air, Transworld, Northern, Eastern, Western et Pan American… N'essayez pas de réserver un vol sur l'une des compagnies aériennes que Robert Charlebois énumérait en 1968 dans sa mythique chanson Lindberg. Elles ont été achetées, fusionnées ou carrément fermées. On pourrait reprendre le même refrain avec tous les transporteurs qui sont disparus du ciel canadien depuis les années 1980 : Canadien international, Royal Aviation, Canada 3000, JetsGo, CanJet, Swoop, Jetlines et Lynx Air… Oh non, il n'est pas facile de se tailler une place durable dans l'industrie canadienne du transport aérien. Le marché intérieur reste dominé par Air Canada et WestJet, malgré l'expansion de Porter et de Flair. Les voyageurs font les frais du manque de concurrence. Depuis 10 ans, les tarifs ont augmenté de 38 %, davantage que l'inflation générale (29 %), selon Statistique Canada. Heureusement, il existe une piste prometteuse pour offrir plus de choix et de meilleurs prix aux voyageurs du Grand Montréal. L'idée est d'offrir à la métropole un autre aéroport international, comme on en trouve à Toronto (Billy Bishop, Aéroport international John C. Munro d'Hamilton) et à Vancouver (Aéroport international d'Abbotsford). Rassurez-vous, il n'est pas question de rouvrir Mirabel ! Il s'agit plutôt de donner de l'élan à l'Aéroport métropolitain de Montréal (MET), l'ancien aéroport de Saint-Hubert. En ce moment, Montréal est pris en otage parce que l'aéroport international Montréal-Trudeau déborde. Le manque de portes d'embarquement aux heures de pointe limite l'implantation de nouveaux acteurs. Cela est dommage, car le Bureau de la concurrence constate que l'arrivée d'un nouveau transporteur fait baisser les tarifs de 9 %1. Par ailleurs, la congestion routière aux abords de l'aéroport décourage les voyageurs. On a même vu des passagers coincés dans un embouteillage se précipiter hors du taxi avec leurs bagages pour courir attraper leur vol. Avec l'augmentation prévue de nombre de voyageurs, la situation deviendra de plus en plus compliquée. D'ici 20 ans, Montréal-Trudeau risque de frapper un mur, démontre le professeur de HEC Montréal Jacques Roy dans son livre La saga des aéroports de Mirabel et Dorval2. En fait, les deux pistes de YUL pourraient atteindre, dès 2043, leur capacité maximale de 310 000 mouvements par année (décollages et atterrissages). Et d'ici là, il faudra faire des investissements majeurs pour que l'aérogare puisse accueillir 40 millions de passagers, presque le double de sa capacité actuelle (22,4 millions en 2024). 22,4 millions Nombre de passagers qui ont transité par Montréal-Trudeau en 2024. Il s'agit d'une hausse de 10 % par rapport au record de 2019. Durant la décennie qui a précédé la pandémie, le nombre de voyageurs était passé de 12,2 millions en 2009 à 20,3 millions en 2019. Source : Aéroports de Montréal À court terme, Aéroports de Montréal (ADM) prévoit dépenser 4 milliards de dollars pour désengorger ses installations et augmenter sa capacité de 4 millions de passagers d'ici quatre ans. Ultimement, ce sont les passagers qui paieront la facture. Or, la facture est beaucoup moins élevée du côté de l'Aéroport métropolitain qui est en train de construire un terminal qui desservira éventuellement 4 millions de nouveaux passagers. Montant de l'investissement : 200 millions (500 millions en incluant la construction d'un hôtel et d'un centre de dégivrage ainsi que des travaux sur les pistes et les voies de circulation). Porter Airlines a l'intention d'offrir des vols intérieurs au MET. D'autres transporteurs pourraient s'ajouter. Mais l'Aéroport métropolitain pourrait servir de soupape à Montréal-Trudeau en offrant aussi des vols internationaux. Les gens de la Rive-Sud ne seraient plus forcés de traverser le pont pour s'envoler vers les États-Unis ou les destinations soleil. Pour cela, il faudrait mettre à la corbeille la clause d'exclusivité qui accorde à Aéroports de Montréal le monopole sur les vols internationaux jusqu'à la fin de son bail avec le gouvernement fédéral, en 2072. ADM est contre. L'organisme qui gère Montréal-Trudeau estime notamment qu'un deuxième aéroport dédoublera les coûts d'exploitation. Mais avec un peu de concertation, il y aurait moyen d'optimiser les infrastructures. Le MET pourrait viser les vols nolisés, ce qui permettrait à Dorval de se concentrer sur les destinations plus payantes, sur Doha plutôt que sur Punta Cana, par exemple. C'est ce qui se passe à Londres où quatre aéroports secondaires (Gatwick, Stanstead, Luton et Londres City) permettent au grand aéroport de Heathrow, complètement saturé, de se concentrer sur les vols internationaux avec correspondance. Un deuxième aéroport international dans la région de Montréal serait une formule gagnante pour les voyageurs. Ils paieraient moins cher leur billet d'avion, car l'Aéroport métropolitain prévoit offrir des tarifs globaux de 25 % à 50 % inférieurs à ceux de Montréal-Trudeau. Et les frais aéroportuaires représentent environ 20 % du prix du billet, encore plus pour les transporteurs à bas coûts. De 15 à 45 $ C'est le montant des frais aéroportuaires, par passager, au Canada. Aux États-Unis, ces frais sont de seulement 6,14 $, en moyenne. Source : Conseil national des lignes aériennes du Canada De plus, un nouvel aéroport pourrait favoriser l'arrivée de transporteurs à bas coût qui ont du mal à percer notre marché, à cause des frais aéroportuaires jusqu'à sept fois plus élevés qu'aux États-Unis. Selon un sondage Léger, les trois quarts des résidants (77 %) de la Rive-Sud élargie voient d'un bon œil le MET, pour les retombées économiques et la facilité d'accès à un aéroport. Certains résidants redoutent le bruit. Mais les avions qui s'élèvent rapidement dans le ciel les dérangeront sûrement moins que les écoles de pilotage qui décollent et atterrissent à répétition, en restant à faible altitude. Soyons réalistes. Même avec des investissements, Montréal-Trudeau ne pourra pas répondre éternellement aux besoins croissants de Montréal qui est un important pôle touristique, universitaire et d'affaires. Alors, retirons les obstacles qui empêchent les aéroports secondaires de prendre leur envol, comme le recommande le Bureau de la concurrence. C'est la piste à suivre. 1. Lisez l'Étude de marché sur l'industrie du transport aérien au Canada Jacques Roy. La saga des aéroports de Mirabel et Dorval : des leçons à tirer maintenant et pour l'avenir. JFD Éditions, 2023, 149 pages.