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L'heure du verdict approche

L'heure du verdict approche

La Presse5 days ago
Sept ans après les faits allégués, un an et demi après que les cinq accusés se soient rendus à la police, six semaines après la conclusion du procès, la juge Maria Carroccia rendra son verdict, jeudi, dans le dossier des cinq hockeyeurs d'Équipe Canada junior accusés d'agression sexuelle. Pour y voir plus clair, La Presse a discuté avec Me Simon Roy, professeur titulaire à la faculté de droit de l'Université de Sherbrooke.
Comment en sommes-nous arrivés là ?
Rappel des faits : en juin 2018, Hockey Canada (HC) tient un évènement à London pour souligner la conquête de la médaille d'or cinq mois plus tôt au Championnat du monde junior. C'est pendant cette soirée que la victime alléguée, désignée par les initiales E. M., affirme avoir été agressée sexuellement par Michael McLeod, Carter Hart, Alex Formenton, Dillon Dube et Callan Foote, tous membres de l'équipe championne. La police de London et Hockey Canada mènent chacun leur enquête, sans y donner suite. En avril 2022, la victime alléguée poursuit Hockey Canada pour 3,55 millions de dollars, poursuite que HC réglera à l'amiable. Dans les semaines qui suivent, le journaliste Rick Westhead, de TSN, découvre l'existence de cette entente, ce qui provoquera une crise chez HC. En février 2024, la police de London annonce que la découverte de nouvelles preuves permet de rouvrir l'enquête. Les cinq joueurs se rendent alors aux autorités. Chacun est accusé d'agression sexuelle, tandis que McLeod est également accusé de complicité d'agression sexuelle.
Comment s'est déroulé le procès ?
Ce fut pour le moins compliqué. La juge Maria Carroccia a décidé de présider seule le procès après que le jury eut été dissous deux fois plutôt qu'une, la dernière fois parce que des membres du jury avaient l'impression d'être ridiculisés par les avocats de la défense, ce qui aurait pu compromettre la partialité du jury. « Deux avortements de procès, et une suite sans jury, c'est du jamais vu. Hollywood aurait fait un film avec ce scénario et on ne l'aurait pas cru !, lance Me Simon Roy. Mais ça démontre le climat du procès : il y a beaucoup de suspicion et ça joue sur les perceptions. »
Un procès sans jury, ça change quoi dans ce dossier ?
De façon générale, un tel dénouement n'avantage pas les accusés, estime Me Roy. « Comme avocat de la défense, tu aimes toujours mieux un procès devant un jury, car ça te prend juste un juré qui te trouve sympathique, qui comprend mal le dossier, et ton client est acquitté, puisqu'un verdict doit être unanime », rappelle-t-il. Maintenant, l'affaire reposera entièrement sur ce que la juge Carroccia a interprété des plaidoiries. « On est très chanceux que ce soit devant juge seul, car on aura aussi les motifs du jugement, au lieu de juste un verdict, ajoute Me Roy. Je ne m'attends pas à un jugement de 12 pages. Je m'attends à un jugement-fleuve de 75, 100 pages. »
Sur quoi le procès se jouera-t-il ?
« En termes de droit, c'est un dossier hyper simple, estime Me Roy. Des cas d'agression sexuelle collective, il y en a eu des centaines, malheureusement. Et la seule vraie question, c'est la crédibilité. Il n'y a pas de question de légitime défense ou de troubles mentaux. La juge ne se demande pas : qui dit vrai ? Elle se demande s'il y a un doute raisonnable. Ce doute peut venir de la preuve de la défense ou de la Couronne. Si elle les acquitte, ce n'est pas parce qu'elle ne croit pas la dame, ou parce qu'elle croit les gars. C'est qu'elle aura eu un doute raisonnable. La question, c'est : la Couronne a-t-elle une preuve hors de tout doute raisonnable qu'un crime a été commis ? »
Quels sont les scénarios pour jeudi ?
La juge Carroccia aura le loisir de lire l'entièreté de son jugement ou simplement un résumé. Pour les six chefs d'accusation, elle déclarera les accusés coupables ou non coupables, tout simplement. « Ce n'est pas comme un meurtre, où tu peux aussi avoir un verdict d'homicide involontaire », rappelle Me Roy. Les peines peuvent aller jusqu'à 10 ans, mais Me Simon Roy rappelle que l'ancien hockeyeur Noah Corson, également dans une affaire d'agression sexuelle, a écopé de deux ans moins un jour. Le juriste est par ailleurs convaincu qu'en cas de culpabilité, les hockeyeurs interjetteront appel. « Comme c'est devant un juge seul, c'est beaucoup plus facile d'interjeter appel, car on a les motifs de la décision », rappelle-t-il. De son côté, la Couronne pourrait elle aussi en appeler d'un verdict de non-culpabilité, « sur des éléments du processus, comme le fait que les textos entre joueurs n'ont pas été retenus dans les preuves admissibles », suggère Me Roy.
S'ils sont innocentés, les joueurs reviendront-ils dans la LNH ?
En cas de non-culpabilité, il est théoriquement possible que les cinq joueurs poursuivent la victime au civil, considérant les sommes qu'ils ont perdues maintenant que leur carrière est en suspens. « Mais là, les cinq devraient témoigner. Je serais très surpris qu'ils le fassent, croit Me Roy. S'ils sont acquittés, ils vont probablement juste vouloir passer à autre chose. » Un retour dans la LNH serait pour le moins complexe, car une organisation qui ouvrirait la porte à un des cinq joueurs se lancerait dans une tempête de relations publiques. Restera toujours la KHL, là où on a peu semblé faire de cas des accusations, puisque trois des cinq accusés (Foote, Dube et McLeod) y ont joué la saison dernière.
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Acquittement : le raisonnement de la juge
Acquittement : le raisonnement de la juge

La Presse

timean hour ago

  • La Presse

Acquittement : le raisonnement de la juge

Des manifestants se sont rassemblés au palais de justice de London jeudi, brandissant des pancartes de soutien à la plaignante. La juge Maria Carroccia était rendue à la lecture du neuvième paragraphe de sa décision dans la saga des cinq joueurs de hockey accusés d'avoir agressé sexuellement une jeune femme, en 2018, à London, quand elle a affiché ses couleurs : « Je considère que la preuve déposée par la plaignante E. M. n'est ni crédible ni fiable. » Ce fut, instantanément, le déclenchement d'un tsunami de réactions outrées, d'un océan à l'autre. C'était jeudi dernier. La juge avait encore 694 paragraphes de sa décision à détailler. Au Québec, ailleurs au pays, des milliers de femmes – mais pas seulement – ont dit leur colère pendant et après la lecture de la décision de la juge ontarienne. Variation sur un même thème, en anglais et en français : « Encore une fois, le système ne croit pas les victimes. » Ayant suivi de loin l'affaire, j'en connaissais les grandes lignes, les controverses originelles : la genèse qui fut une crise politique quand TSN a révélé en 2022 que Hockey Canada avait payé une jeune femme pour régler sa poursuite civile contre des joueurs d'Équipe Canada Junior 2018. Le PM Trudeau qui s'est indigné de ce paiement confidentiel1 à même un fonds prévu spécialement pour le règlement d'affaires d'inconduites sexuelles, la suspension des fonds publics. L'éjection des dirigeants de Hockey Canada. La réouverture de l'enquête policière qui n'avait pas débouché sur des accusations en 2018. Le procès de Carter Hart, Alex Formenton, Cal Foote, Dillon Dubé et Michael McLeod en contenait un autre, celui d'une culture machiste dans le hockey d'élite canadien, ébranlé par plusieurs histoires sordides d'agressions sexuelles ces dernières années. L'histoire du règlement confidentiel entre E. M. et Hockey Canada est sortie dans un contexte où beaucoup de questions se posaient – et se posent encore – sur le rapport de joueurs de hockey d'élite face aux femmes : d'autres joueurs de niveau junior ont été reconnus coupables2 ces dernières années3 de faits similaires4, sans oublier la violence – notamment sexuelle – entre joueurs juniors5. Mais avant d'écrire sur cette décision de la juge Carroccia, j'ai voulu la lire. À plus de 700 paragraphes sur 90 pages, c'est une lecture costaude. Ce qui y est décrit montre des comportements douteux et immoraux de la part de jeunes hommes qui trouvent normal de se faire inviter dans une chambre d'hôtel pour y participer à un trip à trois avec une inconnue, tout cela en mangeant des ailes de poulet et de la pizza. Choquant, dégueulasse. En effet. Mais est-ce que ces comportements, le 19 juin 2018, étaient criminels ? Pour la juge Carroccia, la réponse est limpide : non. D'où le tsunami de colère, jeudi dernier. E. M. a 20 ans en 2018. Elle dit avoir été agressée sexuellement dans la chambre 209 par des athlètes destinés à la LNH, après une relation sexuelle consentie avec un de ces joueurs, Michael McLeod, rencontré dans un bar de London. Mais elle dit qu'elle n'a pas consenti à ce que McLeod envoie un message à tous ses coéquipiers pour leur demander qui voudrait participer à un trip à trois, elle dit ne pas avoir consenti à ce qu'ils lui réclament des gestes à caractère sexuel. PHOTO NICOLE OSBORNE, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE Alex Formenton, Callan Foote, Michael McLeod, Dillon Dubé et Carter Hart Si elle s'est exécutée, si elle a fait des fellations, si elle a accepté des pénétrations, dira-t-elle au tribunal, c'était par autoprotection, pour ne pas être violentée. Dans sa décision, la juge Carroccia commence par décortiquer ce qui s'est passé dans ce bar de London, le Jack's, rue Dundas, l'endroit où E. M. a rencontré Michael McLeod. Ce n'est pas un détail chronologique : d'immenses pans de ce que E. M. a raconté sur ce qui s'est passé dans cet établissement ont été contredits par de la preuve vidéo et numérique. E. M. dira que les joueurs l'ont soûlée en lui payant des verres à répétition. Les images de caméra de surveillance présentées au procès montrent que c'est faux : E. M. a payé elle-même ses consommations, sauf une. Aucune image ne montre un joueur lui payant un verre, sauf McLeod, qui lui refile une bière. E. M. dira aussi que, sur la piste de danse, McLeod lui a pris la main et l'a posée sur son entrejambe, ce qui l'a rendue inconfortable. La vidéo montrera que c'est le contraire : c'est la plaignante qui a mis sa main sur l'entrejambe de McLeod, sans l'aide de l'homme. Elle dira au tribunal que McLeod ne la lâchait pas dans le bar. Qu'elle sentait une pression pour être avec lui. Que les joueurs l'ont isolée de son groupe d'amis. Ce fut aussi contredit par les caméras de surveillance. Dans le bar, un ami, V. H., lui écrit : « Veux-tu que je t'aide à larguer le gars (get u from the guy) ? » E. M. répond : « Je suis ok pour l'instant. » PHOTO GEOFF ROBINS, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE Michael McLeod arrivant au palais de justice de London, en mai dernier Dans le bar, cet ami l'appellera ensuite une fois et lui écrira six fois. Les images de surveillance montrent E. M. qui voit les communications, sans répondre : « Elle est restée avec M. McLeod, écrit la juge Carroccia. Cette preuve est incompatible avec sa prétention qu'elle s'est fait 'séparer' de ses amis. » La juge écrit que la plaignante a nié avoir « texté » avec son ami V. H., tout en notant que ce fut pourtant capté sur vidéo. Explication de E. M. au tribunal : Je ne textais pas, je communiquais par Facebook Messenger. La juge note aussi que E. M., tout en disant avoir voulu « échapper » à McLeod, le suit vers le taxi qui les attend, après leur sortie du bar. Il est devant elle et E. M. « court presque » pour le rattraper, pour qu'ils prennent ce taxi vers l'hôtel Delta. Bien sûr, le fait que le récit de la soirée de E. M. au bar Jack's ait été largement contredit par des images de caméras de surveillance ne signifie pas qu'elle n'a pas subi, à l'hôtel, des gestes sexuels non consentis. Mais la juge cite plusieurs décisions de la Cour suprême balisant l'évaluation de la crédibilité d'une plaignante, comme les arrêts R. c. Kruk et surtout Ewanchuk (paragraphes 29 et 30) où « la prétention de non-consentement est un enjeu de crédibilité qui doit être apprécié à la lumière de toute la preuve, incluant les mots et les gestes du plaignant avant et pendant l'incident, incluant toute conduite ambiguë ou contradictoire ». Ce qui s'est réellement passé au bar Jack's avant les évènements de la chambre 209 contredit la version de la plaignante, quant à la genèse de sa rencontre avec McLeod et ses coéquipiers. La juge le souligne. Évidemment, une plaignante peut avoir des souvenirs complètement erronés d'une soirée où elle rencontre des hommes dans un bar… Et être quand même agressée par ces mêmes hommes, plus tard, dans une chambre d'hôtel. Mais la juge a entièrement rejeté la version des évènements de E. M. quant à ce qui s'est passé dans la chambre 209. Elle a jugé crédibles, à peu de choses près, les témoignages des joueurs présents, dont deux étaient des témoins de la Couronne (Brett Howden et Tyler Steenbergen). Et ces joueurs – même les témoins de la Couronne – ont tous raconté la même chose, en des mots différents, à des moments différents (à l'enquêteur de la police de London en 2018, au procès en 2025) : c'est E. M. qui était sexuellement entreprenante avec les joueurs qui étaient présents dans la chambre de McLeod, après qu'elle a eu une relation sexuelle consentie avec ce dernier. Tous les joueurs ont affirmé que E. M. les incitait à « venir la f**** » (come fuck me), ajoutant qu'ils étaient des « moumounes » (pussies) parce qu'ils ne répondaient pas. Cela, E. M. ne le nie pas. Elle ne dira jamais : Je n'ai jamais dit ça, je ne les ai pas invités. La juge s'étonne des réponses de la plaignante, à propos de ce que les joueurs décrivent comme des invitations de la femme : « E. M. a souvent répondu que ça ne ressemblait pas à quelque chose qu'elle aurait dit. Elle n'a pas nié avoir dit ces choses. Elle a aussi dit ne pas se souvenir de grand-chose qu'elle aurait pu dire dans la chambre 209, et à certains points a concédé qu'elle a pu les dire. » Pour la juge, c'est clair : « Sur la base de toute la preuve, je considère comme un fait que la plaignante a exprimé qu'elle voulait s'engager dans des actes sexuels avec ces hommes, en disant 'Est-ce que quelqu'un va me f**** ?' et en se masturbant devant eux. » E. M. dira au tribunal que si elle s'est livrée à des actes sexuels avec certains joueurs, c'est qu'elle avait peur qu'on la violente. Elle ne peut citer aucune menace, aucun geste menaçant de la part des hommes dans la chambre de McLeod. Après s'être rhabillée à la toilette, elle aurait pu quitter la chambre dont la porte était voisine de celle de la toilette. Pourquoi ne l'a-t-elle pas fait, pourquoi est-elle revenue vers le centre de la chambre, avec les hommes ? « Je n'ai pas pensé à ça », dira-t-elle à la Cour. E. M. dit au tribunal avoir eu peur, avoir été terrorisée pendant ces heures dans la chambre 209. Pourtant, dans ses trois déclarations à la police en 2018, jamais elle ne mentionne avoir eu peur. Elle dit avoir été embarrassée, irritée. E. M. ne parlera de sa peur qu'en 2022, dans sa poursuite civile contre Hockey Canada. Avant ? Elle n'en a jamais parlé à qui que ce soit, note la juge Carroccia. En 2018, elle dira à l'enquêteur de police qu'elle ne pensait pas que les hommes l'auraient physiquement empêchée de quitter la chambre 209. Elle a dit à la Cour, au procès, que personne n'a tenté de l'empêcher de partir. Quand elle appelle une amie, en pleurs, en sortant de l'hôtel Delta, E. M. lui parle de sa « honte », de son « embarras » face à ce qui venait de se passer. À son amie, elle ne dit pas avoir été agressée, forcée : elle dit à son amie que McLeod était gentil, au bar, mais que finalement, c'était un « abruti » (jerk). À la Cour, elle dira avoir été bouleversée en fin de soirée parce que McLeod lui a demandé si elle avait des infections transmissibles sexuellement (ITS) et qu'il lui a demandé : « Penses-tu que tu t'en vas bientôt ? » E. M. dira aussi qu'elle s'attendait à dormir dans la chambre de McLeod après sa première relation sexuelle avec lui. E. M. dira au tribunal qu'à l'époque, elle avait un ami de cœur et qu'elle se sentait coupable de l'avoir trompé avec McLeod. Elle dira en 2022 dans son recours civil que les évènements de la chambre 209 ont eu un impact sur sa relation avec son conjoint. Elle dira au procès que la considérant comme victime, son chum la traitait avec sympathie. Là où E. M. affirme que son consentement était impossible à cause de son ivresse, la juge souligne au paragraphe 625 que E. M. a pourtant admis avoir consenti à la première relation sexuelle avec McLeod. Elle n'a pas bu par la suite. Comment pouvait-elle consentir malgré l'alcool et ne pas consentir, ensuite, à cause de l'alcool ? La juge doute aussi du témoignage de E. M. quant à son niveau d'ivresse. La plaignante dit avoir eu de la difficulté, dans le bar, à se tenir debout tellement elle avait bu. Mais la juge souligne que la preuve vidéo la contredit : « Pour moi, la plaignante a exagéré sa consommation d'alcool. » PHOTO NICOLE OSBORNE, LA PRESSE CANADIENNE Cal Foote quittant le palais de justice de London, jeudi Autre incohérence, selon la juge : E. M. jure qu'un des joueurs, Cal Foote, a fait le grand écart au-dessus de son visage, nu, touchant de ses parties génitales le visage de E. M… Mais en 2018, souligne la juge, elle n'a pas mentionné que Foote était nu, à la police. Réponse de E. M. au tribunal, sur cette contradiction entre ses versions de 2018 et 2025 : « C'était difficile pour moi de dire ça », en 2018. Réaction de la juge : « La raison pour laquelle E. M. parlait avec le détective Newton [en 2018] était pourtant de décrire des agressions sexuelles alléguées, et elle avait déjà décrit d'autres hommes exposant leur pénis. Cette explication n'a aucun sens. » Ce ne sont là que quelques-unes des incohérences soulevées par la juge à l'égard du témoignage de E. M. La juge rappelle qu'une incohérence n'est pas fatale en soi pour la crédibilité d'un témoin, que ses souvenirs n'ont pas à être parfaits. Elle cite une décision de la Cour d'appel de l'Ontario sur la crédibilité de témoins : « Certaines incohérences sont mineures, d'autres pas. Certaines incohérences concernent parfois des éléments centraux, parfois périphériques. Là où une incohérence touche un élément central à propos duquel il est peu probable qu'un témoin honnête se trompe, l'incohérence peut démontrer une négligence face à la vérité qui devrait préoccuper le juge. » Clairement, la juge a trouvé que E. M. a eu trop d'incohérences, de trous de mémoire et de contradictions, sur trop d'éléments centraux de ses affirmations, pour en faire abstraction : « À cause de tous les problèmes de crédibilité et de fiabilité de la preuve de la plaignante, je conclus que je ne peux pas m'y fier. » Je souligne ici que la juge a choisi de croire, pour l'essentiel, les versions des hommes présents dans la chambre 209. Deux joueurs non accusés (Brett Howden, Tyler Steenbergen) ont témoigné pour la Couronne, un joueur accusé (Carter Hart) a témoigné et les déclarations d'autres accusés à la police en 2018 ont été présentées en preuve, de même que des textos échangés entre les joueurs dans les heures ayant suivi la nuit du 18 au 19 juin 2018. La Couronne a affirmé que les joueurs avaient synchronisé leurs versions, sans pouvoir fournir de preuve qui aurait ébranlé la juge Carroccia à cet égard. Elle a rejeté cette prétention. ILLUSTRATION ALEXANDRA NEWBOULD, LA PRESSE CANADIENNE Croquis d'audience de la juge Maria Carroccia rendant sa décision, jeudi La juge a estimé que, dans le groupe texto, les joueurs – dont McLeod – ont pour l'essentiel rappelé l'importance de dire la vérité, de ne rien inventer. Un témoin non accusé, Brett Howden, a eu des trous de mémoire suspects, dans son témoignage6. Il n'a pas répété en Cour ce qu'il avait dit précédemment et la juge a exclu des textos envoyés par Howden à propos de Dillon Dubé giflant les fesses de la plaignante, tranchant que c'était du ouï-dire, donc inadmissible en preuve. Cela n'a pas affecté la vision globale de la juge : les joueurs de la chambre 209 – accusés et témoins –, dans l'ensemble, avec les limites des années qui ont passé et de l'alcool ingéré, ont offert des témoignages crédibles, selon Maria Carroccia. Plus que ceux de la plaignante, E. M. D'où ce quintuple acquittement. À partir d'aujourd'hui, la Couronne a 26 jours pour porter la décision de la juge Maria Carroccia en appel. On verra pour la suite. Notons que ce fut un procès controversé, deux jurys ont reçu leur congé. Le procès s'est terminé devant la juge seule7. Je reviens sur le choc et la stupeur qui ont accueilli la décision de la juge Carroccia, dès la lecture de son neuvième paragraphe, quand elle décrit la preuve soumise par E. M. comme n'étant « ni crédible ni fiable ». Un, Hockey Canada a commis une bourde de calibre olympique en créant un fonds secret pour dédommager discrètement des plaignants ou plaignantes dans des affaires d'inconduite sexuelle impliquant des hockeyeurs d'élite. Partant de là, collectivement, quand les cinq accusés revenaient dans les manchettes, un mot apparaissait dans la tête de milliers de Canadiens : « Coupables ». Coupables de mauvais jugement, de machisme, de stupidité, de misogynie ? Il y a beaucoup de tout ça dans ce qui a été décrit au tribunal, à London. Mais coupables sous le prisme du Code criminel ? C'est un autre cas où il faut rappeler la présomption d'innocence. PHOTO CARLOS OSORIO, REUTERS Une manifestante brandissant une pancarte de soutien à la plaignante, jeudi Deux, les injustices du système de justice dans son traitement des affaires d'agression sexuelle ont créé un ressac qui sacralise désormais la parole des victimes. La phrase « Je te crois » est devenue un article de foi : on ne peut pas douter, jamais, de la parole de quelqu'un qui se plaint d'une agression sexuelle. Il est vrai que les « fausses » accusations sont rares. Mais ça existe. Et en Cour, comme le rappelle la juge Carroccia, « Je te crois » est contraire au droit, où l'accusé est présumé innocent. Un juge qui « croirait » d'emblée un plaignant ou une plaignante renverserait le fardeau de la preuve. Mais il y a des personnes qui exagèrent, qui omettent. Qui ne disent pas la vérité. Parmi ces personnes, oui, des fois : des plaignants et plaignantes dans des causes d'agression sexuelle. Et c'est le travail du système de creuser pour voir s'il y a des preuves qu'une personne (ou deux, ou cinq) a commis un crime, au-delà du doute raisonnable. Et des fois, le système dit : après examen des faits, ce que raconte le plaignant, la plaignante ne résiste pas à l'analyse. C'est ce qu'a décrété la juge Maria Carroccia. Des fois, un accusé est acquitté avec un immense bémol… Comme Rozon8. Et à l'ère de « Je te crois », cette décision de la juge Carroccia est évidemment accueillie comme une gifle. Et c'est dénoncé comme tel par des milliers de gens, dont beaucoup de femmes qui ont eu de mauvaises expériences avec le système judiciaire. Je dis simplement ceci : quand j'ai lu la décision de la juge Carroccia, il m'a été difficile de ne pas douter de la crédibilité de la plaignante et de la fiabilité de son témoignage. Trop d'incohérences, de contradictions, d'omissions, sur des points essentiels. Je sais que cette chronique sera accueillie avec une brique et un fanal. Elle sera critiquée, justement parce qu'elle ne se range pas entièrement du côté de la plaignante, contre le système. Je n'ai qu'une réponse : lisez la décision de la juge. 1. Lisez « Crise à Hockey Canada : Trudeau hausse le ton, d'autres partenaires coupent les ponts » 2. Lisez « D'anciens joueurs des Voltigeurs accusés d'agression sexuelle » 3. Lisez « Deux ans et demi de prison pour les ex-joueurs des Tigres de Victoriaville » 4. Lisez « Gabriel Gagné coupable sur toute la ligne pour une agression sexuelle » 5. Lisez « De nouvelles atrocités émergent dans la poursuite contre la LHJMQ » 6. Lisez « Judge rules Howden text message inadmissible at London hockey trial » (en anglais) 7. Lisez « Le procès des hockeyeurs se poursuivra devant juge seule » 8. Lisez « Gilbert Rozon acquitté des accusations de viol et d'attentat à la pudeur »

Victoire dramatique d'Andreescu, suite incertaine
Victoire dramatique d'Andreescu, suite incertaine

La Presse

time8 hours ago

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Victoire dramatique d'Andreescu, suite incertaine

La Canadienne Bianca Andreescu pleure apres sa victoire face à la Tchèque Barbora Krejcikova, lors de leur match de premier tour, sur le court central du stade IGA, à l'Omnium Banque Nationale 2025. Il n'y a jamais de bon moment pour se blesser. Difficile, toutefois, de penser à un pire moment que celle de Bianca Andreescu dimanche : avec une balle de match en main. C'est ce qui est arrivé à la Canadienne à son match de premier tour à l'Omnium Banque Nationale, dimanche. Mais les bons soins des thérapeutes ont fait effet, si bien qu'Andreescu a pu reprendre l'action et confirmer sa victoire de 6-3, 6-4. La suite est toutefois incertaine. Andreescu n'a pas rencontré les médias, mais les organisateurs de l'OBN ont transmis aux médias une retranscription d'une entrevue accordée dans le salon des joueuses. « Je devrai attendre à [lundi] matin pour voir quel est le diagnostic et on évaluera la suite des choses. J'espère que ce n'est rien de grave », peut-on lire dans cette retranscription. PHOTO OLIVIER JEAN, LA PRESSE La Canadienne Bianca Andreescu se blesse la cheville lors affronte la Tchèque Barbora Krejcikova, lors de leur match de premier tour, sur le court central du stade IGA, à l'Omnium Banque Nationale 2025. Les circonstances de sa blessure sont rocambolesques. Andreescu venait de servir ce qui était sa deuxième balle de match. C'est en renvoyant le retour de service de sa rivale que sa cheville gauche a tourné d'une façon que tout podiatre contre-indiquerait. Krejcikova a retourné la balle en jeu pour le point et ramené le jeu à égalité, avant d'accourir vers sa rivale, en douleur et visiblement en détresse. La Tchèque lui a ensuite apporté un sac de glace, pendant que l'arbitre se levait de sa chaise pour s'enquérir de la situation. Andreescu a finalement eu droit à un temps d'arrêt médical, pendant lequel sa cheville gauche a été enrubannée. PHOTO OLIVIER JEAN, LA PRESSE La Tchèque Barbora Krejcikova a apporté un sac de glace à sa rivale pendant que l'arbitre se levait de sa chaise pour s'enquérir de la situation. À la reprise du jeu, la foule a rugi, et la favorite locale a remporté les deux échanges, les deux sur des deuxièmes balles de service. Il aurait été intéressant de demander à Krejcikova dans quel état d'esprit elle abordait ces échanges, mais la WTA ne l'a pas invitée en salle de conférence. « J'ai un peu joué de chance. Elle a raté ses deux retours, donc ça m'a évidemment aidé », lit-on dans la retranscription fournie par l'OBN. Andreescu s'est tout de même pliée à l'entrevue d'après-match sur le terrain après sa victoire. Elle était encore émotive quand elle s'est adressée à la foule. « Ce qui s'est produit est malheureux, évidemment. Je ne sais pas quoi dire », a-t-elle d'abord répondu, avant d'éclater en sanglots. « J'ai réussi grâce à vous. Merci tellement !, a-t-elle lancé aux spectateurs, avant de poursuivre en français. Merci beaucoup ! » PHOTO OLIVIER JEAN, LA PRESSE La Canadienne Bianca Andreescu retourne un coup de la Tchèque Barbora Krejcikova, lors de leur match de premier tour, sur le court central du stade IGA, à l'Omnium Banque Nationale 2025. Il faudra voir dans quel état sera Andreescu pour poursuivre le tournoi, elle qui doit affronter la Russe Mirra Andreeva, 4e tête de série. L'Ontarienne tente de retrouver son rythme après une année 2024 au cours de laquelle elle n'a disputé que 21 matchs. Dans un savant article, le non moins savant confrère Nicholas Richard calculait qu'Andreescu avait raté 36 mois d'action en raison de blessures depuis 2019, année de son triomphe aux Internationaux des États-Unis. Lisez l'article « La difficile quête du lâcher-prise » Ces absences lui ont valu une lente chute au classement. La voici au 188e rang, ce qui signifie qu'elle doit désormais passer par les qualifications pour participer aux tournois du grand chelem. À Wimbledon comme à Roland-Garros, elle a perdu au 2e tour des qualifs. PHOTO OLIVIER JEAN, LA PRESSE Bianca Andreescu Mboko commence du bon pied On remarque vite Victoria Mboko quand on consulte le classement mondial sur le site de la WTA. Elle et l'Argentine Solana Sierra sont les deux seules joueuses du top 90 sans photo officielle à la gauche de leur nom. C'est plutôt une silhouette générique mauve qui fait office de photo. Mboko sourit quand on le lui fait remarquer. La Canadienne se doute bien que c'est le genre de truc qui arrive quand une joueuse de 18 ans est en pleine éclosion. « On n'a pas encore fait ma photo !, lance-t-elle. Ça ne me dérange pas, je suis là quand même, c'est mon profil, ça ne m'importe pas vraiment. » PHOTO OLIVIER JEAN, LA PRESSE La Canadienne Victoria Mboko célèbre un point remporté face à l'Australienne Kimberly Birrell Mboko est toutefois bel et bien sortie de l'anonymat et des performances comme celle qu'elle a livrée dimanche. Elle a vaincu l'Australienne Kimberly Birrell, 76e au monde, en deux manches de 7-5, 6-3, en 94 minutes. Elle s'est imposée dans une démonstration de puissance. Puissance qui venait parfois avec des bévues, des balles envoyées dans le filet, mais aussi avec 15 as et de nombreux coups droits imparables. PHOTO OLIVIER JEAN, LA PRESSE La Canadienne Victoria Mboko retourne un service de l'Australienne Kimberly Birrell « Je me suis surprise moi-même, a admis la gagnante. Je voulais surtout avoir un très bon pourcentage de première balle, mais je ne savais pas que je servirais aussi bien. Mais ça m'a donné souvent l'avantage. Ça a été un gros facteur dans le match, au moment où j'avais besoin de points. » Les bons mots de Gauff De toute façon, victoire ou pas, Mboko est déjà bien connue d'au moins une des meilleures au monde. PHOTO OLIVIER JEAN, LA PRESSE Victoria Mboko Ses oreilles ont en effet dû siler avant même le début de son match, lors du point de presse de Coco Gauff. L'Américaine et 2e raquette mondiale avait affronté Mboko en mai dernier, à Rome, un match gagné par Gauff, non sans laisser filer une manche à sa rivale. « Elle est une super bonne joueuse et une très bonne personne. Je lui ai parlé un peu depuis. J'espère jouer avec elle en double un jour, a lancé Gauff. Elle est excellente, elle a un excellent service et bouge très bien. Quand je l'ai affrontée à Rome, je l'approchais comme une joueuse qui fera partie des meilleures. Elle est déjà parmi les mieux classées. Je suis sûr qu'on s'affrontera souvent à l'avenir et elle connaîtra beaucoup de succès. » PHOTO GRAHAM HUGHES, LA PRESSE CANADIENNE Coco Gauff en conférence de presse Mboko compte déjà à son actif des présences au troisième tour et au deuxième tour en grand chelem cette année (Roland-Garros et Wimbledon). La voici pour une troisième fois au deuxième tour dans un tournoi WTA 1000. À son prochain match, Mboko rencontrera l'Américaine Sofia Kenin, 27e au monde. Une première depuis Seles ? PHOTO OLIVIER JEAN, LA PRESSE Jessica Pegula C'est dans les chaussures de double championne en titre de l'Omnium Banque Nationale que Jessica Pegula débarque à Montréal. L'Américaine s'est imposée dans la métropole en 2023, puis à Toronto l'an dernier. Les mauvaises langues diront que les championnats dans la famille Pegula doivent impérativement passer par elle-son richissime père est propriétaire des Sabres et des Bills de Buffalo-mais nous n'irons pas là. Toujours est-il qu'elle pourrait devenir la première à remporter trois éditions de suite depuis les quatre titres d'affilée de Monica Seles (1995-1998). « Tout le monde dit m'en parle. Mais c'est encore loin ! Mais j'espère retrouver ma magie des dernières années ici au Canada », a fait valoir la joueuse de 31 ans.

La tournée d'adieu de Vasek Pospisil est déjà terminée
La tournée d'adieu de Vasek Pospisil est déjà terminée

La Presse

time9 hours ago

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La tournée d'adieu de Vasek Pospisil est déjà terminée

(Toronto) La tournée d'adieu de Vasek Pospisil à Toronto a été de courte durée. La Presse Canadienne Le vétéran, qui avait annoncé la semaine dernière que l'Omnium Banque Nationale serait son dernier tournoi sur le circuit professionnel, a été éliminé dès le premier tour 6-2, 3-6, 6-3 par l'Argentin Facundo Bagnis, dimanche, au stade Sobeys. « Dix-huit ans de tennis professionnel. J'ai hâte de jouer devant vous une dernière fois, Toronto », avait écrit Pospisil sur X avant son duel. Le Canadien de 35 ans a été classé aussi haut qu'au 25e rang mondial en simple et qu'au quatrième rang en double au cours de sa carrière. Avec son partenaire Jack Sock, il a remporté Wimbledon en 2014 et le Tournoi d'Indian Wells en 2015. Il a également atteint les quarts de finale en simple à Wimbledon en 2015. Contre Bagnis, Pospsil a frappé 17 coups gagnants, 39 fautes directes, six as et cinq doubles fautes. Le vainqueur a pour sa part claqué 20 coups gagnants, 25 fautes directes, 11 as et deux doubles fautes. Avant ce duel, le Canadien Nicolas Arseneault, joueur invité de 18 ans, a causé la surprise en éliminant le Français Valentin Royer, joueur qualifié, 6-3, 7-6 (4) en 1 heure et 45 minutes. PHOTO TIRÉE DU DE L'OMNIUM BANQUE NATIONALE Nicolas Arseneault Royer a cumulé plus de coups gagnants (21-14) qu'Arseneault, mais a commis plus de fautes directes (48-23). Le Canadien a réussi cinq as et commis quatre doubles fautes. Il a affiché un pourcentage de première balle de service de 68 % et a converti cinq de ses 11 balles de bris. Royer a pour sa part frappé trois as et commis six doubles fautes. Il a montré un pourcentage de première balle de service de 61 % et a converti quatre balles de bris sur neuf. Au prochain tour, Arseneault affrontera l'Australien Alexei Popyrin, 18e tête de série.

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