
Les droits de douane pèsent encore lourdement malgré la diversification
(Ottawa) Les efforts du Canada pour élargir ses échanges commerciaux au-delà des États-Unis semblent porter leurs fruits, mais des économistes préviennent qu'il faudra beaucoup de temps avant que les exportateurs canadiens s'accommodent d'un nouveau statu quo.
Craig Lord
La Presse Canadienne
Statistique Canada a annoncé jeudi que le déficit commercial de marchandises du pays – la différence entre les exportations et les importations – s'est réduit à 5,9 milliards en mai, grâce à la hausse des exportations d'or.
Ce résultat est à comparer au déficit commercial de 7,6 milliards enregistré en avril — un niveau record, qui, selon Statistique Canada, a été révisé à la hausse par rapport aux estimations initiales de 7,1 milliards.
Les exportations canadiennes ont connu une hausse au début de 2025, les entreprises s'étant empressées de devancer les droits de douane américains, mais cette action précipitée a été suivie d'un ralentissement de l'activité en avril et en mai. Après un début d'année relativement solide, les chiffres du produit intérieur brut réel de Statistique Canada indiquent une baisse de 0,1 % en avril et les premières estimations prévoient la même baisse en mai.
« Malgré ce que les chiffres révèlent sur une base mensuelle, le contexte commercial demeure un défi », a déclaré Shelly Kaushik, économiste principale à la BMO.
Si l'on exclut la hausse des produits minéraux métalliques et non métalliques, les exportations totales ont diminué de 1,2 % en mai, tandis que les exportations vers les États-Unis ont reculé de 0,9 %.
Statistique Canada a indiqué que les exportations vers les États-Unis ont diminué pour un quatrième mois consécutif en mai, en raison du conflit commercial en cours. Les importations ont également diminué pour un troisième mois consécutif.
Une réorientation qui ne se fait pas du jour au lendemain
L'organisme fédéral a affirmé que la part des exportations canadiennes à destination des États-Unis se situait à 68,3 % en mai, en baisse par rapport à la moyenne mensuelle de 2024 de 75,9 %.
Mme Kaushik a déclaré jeudi dans une note à ses clients que la proportion des exportations à destination du sud de la frontière avait atteint son plus bas niveau depuis 1997, à l'exception des années de pandémie.
Représentant encore plus des deux tiers des exportations canadiennes, les États-Unis demeurent le principal marché d'exportation du Canada, et cela ne changera probablement pas dans un avenir prévisible, a souligné Mme Kaushik.
Malgré l'existence de divers droits de douane, notamment sur les industries de l'acier et de l'aluminium, Mme Kaushik a affirmé que de nombreuses entreprises trouveront toujours plus avantageux de vendre leurs produits de l'autre côté de l'immense frontière terrestre canado-américaine plutôt que de les expédier à l'étranger, voire à l'intérieur du Canada.
« C'est simplement parce qu'ils sont notre plus grand voisin, mais aussi la plus grande économie du monde, a-t-elle déclaré. Si cette volonté de diversification au-delà des États-Unis se maintient, cela prendra encore plusieurs mois, voire plusieurs années. »
En contrepartie, Statistique Canada a indiqué que les exportations vers des pays autres que les États-Unis ont augmenté de 5,7 % au cours du mois, atteignant un sommet historique.
Les exportations totales ont augmenté de 1,1 % en mai pour atteindre 60,8 milliards, les exportations de produits en métal et de produits minéraux non métalliques ayant progressé de 15,1 %. Cette variation est attribuable à une hausse de 30,1 % des exportations d'or, d'argent et de métaux du groupe du platine sous forme brute et de leurs alliages, une catégorie composée en grande partie d'or brut.
Cette progression est principalement imputable à la hausse des expéditions physiques d'or vers le Royaume-Uni, selon Statistique Canada.
Le commerce total de marchandises avec les pays autres que les États-Unis a atteint 47,6 milliards en mai, ce qui, selon l'organisme fédéral, constitue un troisième sommet historique consécutif.
Outre l'or destiné au Royaume-Uni, Statistique Canada a indiqué que la hausse des expéditions de pétrole brut vers Singapour et d'aluminium sous forme brute et de produits pharmaceutiques vers l'Italie a été contrebalancée par la baisse des exportations vers la Chine.
Carney et Trump : qu'est-ce qui s'en vient ?
Andrew DiCapua, économiste principal à la Chambre de commerce du Canada, a déclaré jeudi que les gains en matière de diversification commerciale sont « encourageants », mais que les obstacles à la frontière américaine ne seront pas levés de sitôt.
« Le pire est peut-être derrière nous, mais le chemin du retour sera probablement semé d'embûches », a-t-il affirmé dans une déclaration écrite.
Lors du Sommet du G7 à Kananaskis, en Alberta, le mois dernier, le premier ministre Mark Carney et le président américain Donald Trump ont convenu d'une échéance du 21 juillet pour en venir à un accord sur les relations commerciales entre les deux pays.
PHOTO MARK SCHIEFELBEIN, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS
Le premier ministre canadien, Mark Carney, et le président américain, Donald Trump, au Sommet du G7 à Kananaskis
Mme Kaushik a souligné que les échéances précédentes dans le conflit commercial ont été repoussées et que peu de clarté s'est concrétisée depuis ce qu'elle a qualifié de « sommet » d'incertitude en avril.
Bien que les statistiques sur le commerce en mai marquent une amélioration par rapport à avril, Mme Kaushik a indiqué que les données mensuelles peuvent être volatiles.
Et bien que la BMO s'attende à une plus grande certitude sur le plan commercial au fil de l'année, elle a déclaré que les exportateurs canadiens continueront d'éprouver des difficultés.
« Je pense que le tableau général montre clairement que le commerce restera très difficile dans ce contexte très incertain, a affirmé Mme Kaushik. Cela continuera de peser lourdement sur l'économie canadienne. »
Par ailleurs, les importations totales ont diminué de 1,6 % en mai pour s'établir à 66,7 milliards, les importations de produits en métal et de produits minéraux non métalliques ayant chuté de 16,8 %. Les importations d'or, d'argent et de métaux du groupe du platine sous forme brute ont chuté de 43,2 %.
En volume, les exportations totales ont augmenté de 0,7 % en mai, tandis que les importations totales ont diminué de 0,6 % pour le mois.
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