« J'ai 200 drapeaux à mettre, ça me prend quatre heures » : le drôle de monde des supporters sponsorisés et même pas payés du Tour
On les voit régulièrement le long du parcours, avec des centaines de drapeaux qui ne représentent aucune star du vélo. Ils se lèvent tôt pour décorer leur parcelle, et ils partent en fin d'après-midi pour prendre le chemin de la prochaine étape. Ils forment une joyeuse communauté dont les codes peuvent surprendre le profane : ce sont les camping-caristes fans de drapeaux de marques.
« Les sponsors nous donnent des drapeaux, on les installe et on les désinstalle, ça nous occupe », explique Sylvie Martel, 21 Tours avec son mari Patrice, qui a vu grimper l'intérêt des entreprises : « Au départ, il n'y avait rien. Tout a commencé avec Cofidis qui nous a fait des kits complets. Les autres se sont dit qu'ils allaient les imiter. On a eu un premier drapeau, qui a appelé le deuxième, et ainsi de suite. Maintenant, on fait partie d'un club de supporters Leclerc. » La chaîne de supermarchés n'a pourtant pas d'équipe, elle s'affiche seulement sur le maillot à pois. Mais elle a compris l'intérêt de cette visibilité gratuite, comme Cofidis avant elle.
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Les marques peuvent payer le champagne
« Ça ne se voit pas énormément à la télé, mais ça fait partie de l'ambiance du Tour. La relation avec les camping-caristes va au-delà de juillet, souffle Florent Poleyn, responsable communication sponsoring de la société de crédit en ligne. On leur envoie de nouveaux éléments quand le design change, on parle avec eux sur la route, on les invite à des événements. » Il faut les soigner, car ils sont très convoités, à l'image d'Olivier Biron, voisin de Patrice et Sylvie depuis le départ de Lille. « C'est un Belge, mais il est gentil. On est déjà tombés sur des Flamands, l'horreur... », précise Sylvie, qui a goûté la veille à la potion emblématique d'Olivier : la Chimay, bière trappiste. « Mon fils m'a dit que j'allais passer une bonne nuit, mais pas du tout ! » Elle tape un peu, surtout quand il fait chaud. Olivier indique que « Chimay me donne plus de mille bouteilles que je distribue pendant le Tour. »
Dans son frigo, il a pourtant quelques packs du concurrent Jupiler : « Je les ai payés, c'est pour moi. Jupiler m'a contacté, j'ai refusé. Je suis bien avec les moines, je ne retourne pas casaque. » Olivier est un fidèle, mais il sait négocier : « Les marques nous donnent des drapeaux, la moindre des choses est de les montrer. Mais je suis dur au début, à eux de montrer ce dont ils sont capables. Si on est aussi invités à gauche à droite, OK je les mets. Chimay m'a sollicité après m'avoir vu à la télé. Ils contribuent à certains frais, 500 euros pour mon carburant et une partie de la location du motor-home. Ils me demandent juste de mettre des banderoles. Avec certains, on fait du troc : je te donne une trappiste, tu me donnes un bob. » Présent toute l'année, il aimante du beau monde : « Je suis supporter de Wout Van Aert. Adri, le papa de Mathieu Van der Poel, vient nous voir sur les cyclocross. Quand je vois passer Wout, je crie, et quand je vois son gamin, je ne crie pas. Mais il vient boire un coup, c'est comme ça chez nous. »
« On participe à la communication des marques, bénévolement et avec amour »
Philippe, fan de Cochonou
Les charmes de la microcélébrité, que d'autres attirent avec leur costume. Gaël Viot se déguise en druide, mais il est boucher chez Leclerc, et il est l'un des membres fondateurs du fan-club : « Mon patron a vu mon camping-car et m'a proposé de ne faire que du Leclerc, c'était parti. On a des numéros du club sur nos véhicules. Je devais être le 1 mais je n'ai pas voulu, ça peut poser des problèmes, les gens peuvent se demander pourquoi c'est le druide, le 1... On est 500 caravanes, et 40 sur le Tour. J'ai 200 drapeaux à mettre, ça me prend quatre heures. Leclerc a investi énormément dans ce projet. »
Comment les coureurs cohabitent-ils dans des chambres de deux durant le Tour ?
Quatre banquets sont prévus entre Lille et Paris, champagne compris pour les invités, mais certains n'ont pas besoin de ça pour afficher leur marque préférée. Philippe, ou plutôt Sauci'fan, est fou de Cochonou. Ça se voit, même si ça ne lui rapporte rien : « On participe à la communication des marques, bénévolement et avec amour. Je me suis spécialisé Cochonou après une rencontre sur internet. Je faisais la collection de 2 CV miniatures, j'avais des Cochonou, et Daminou se mêle à la discussion. Lui, c'est le plus vieux caravanier du Tour. On se retrouve tous les ans, et il m'a donné des choses pour enrichir ma collection. J'ai des jeux de société Cochonou de 1970 ! On loue un garage pour tout stocker... »
Ce n'est pas gratuit. « On achète mais à des prix raisonnables, il n'a jamais eu de contact avec la marque, précise sa femme Sabine. Il est amoureux de Cochonou et du Tour, il ne peut pas choisir entre les deux. » OEcuménique, il n'écarte pas les drapeaux des autres marques pour faire « la plus belle installation possible ». Une volonté partagée par Didier Bayel, qui agrémente sa mosaïque avec des blasons de sa Normandie. « On ne nous donne pas de drapeaux d'équipe, alors que les marques en offrent dès le matin, raconte le retraité, qui montre un énorme amas de fanions sous son matelas. On est obligés d'en donner, sinon on repart avec soixante nouveaux drapeaux. J'en retire la plupart au passage des coureurs, pour éviter un accident en cas de coup de vent. Je ne veux pas les faire tomber, car j'adore avant tout le cyclisme. »
Les gendarmes veillent et les marques sensibilisent aussi les camping-caristes, car il n'est pas question qu'un logo soit impliqué dans une chute. La route recèle déjà assez de dangers, et les Martel ont d'ailleurs zappé les Pyrénées. « Depuis qu'on s'est fait accrocher un rétro là-bas, Patrice ne veut plus y aller », confie Sylvie, qui a retrouvé le Tour lundi à Montpellier, jour de repos et de banquet Leclerc.

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