
Karim Berbra, avocat : «Ce que je trouve fort, c'est ce sentiment d'utilité à l'égard des personnes que l'on défend»
LE FIGARO ETUDIANT- Comment êtes-vous devenu avocat ?
Karim BERBRA- La profession d'avocat n'était pas particulièrement une vocation pour moi. À l'issue de mon Master 2 « Droits des affaires », sur les conseils de mes proches, j'ai tenté l'examen d'entrée de l'École d'avocats (EDA) de Versailles que j'ai réussi du premier coup. J'ai intégré cette école et ai effectué un stage de six mois en entreprise. Ce stage m'a ouvert des portes. J'ai pu ensuite intégrer un cabinet d'avocats spécialisé en droit du travail, à Paris, puis un cabinet de Rouen où j'ai exercé en tant que juriste, le temps de prêter serment, en 2010. En novembre 2014, j'ai intégré le cabinet rouennais Le Caab dans lequel je suis aujourd'hui associé et où j'exerce en tant qu'avocat en droit du travail, principalement axé sur la défense des salariés et des représentants du personnel. Récemment, j'ai également obtenu un diplôme universitaire en prévention des risques psychosociaux ; une spécialité essentielle car en tant qu'avocat, on ne défend pas un dossier, on défend des personnes qui sont souvent en souffrance.
Qu'est-ce qui vous plaît dans votre métier d'avocat ?
Ce que je trouve particulièrement fort dans ma pratique, c'est la dimension humaine. C'est ce sentiment d'utilité à l'égard des personnes que l'on défend et que l'on représente. On ne fait pas simplement du droit. Lorsqu'une personne en difficulté me consulte, il faut savoir l'écouter, l'accompagner, choisir les bons mots, créer un espace de confiance et de réassurance pour recueillir les informations nécessaires à l'avancée du dossier. Cela suppose de faire preuve de beaucoup de psychologie, de tact, de pédagogie, au-delà de la compétence et du raisonnement juridique. Il y a souvent une vraie relation humaine qui se crée.
Même avec l'expérience, je ne vais jamais à une plaidoirie sans une petite boule au ventre Karim Berbra
Le temps de la plaidoirie est un moment qui me passionne. C'est un art qui requiert talent et agilité. C'est un moment vraiment magique dans la vie du dossier. Même avec l'expérience, je ne vais jamais à une plaidoirie sans une petite boule au ventre. Pour autant, je ne répète pas, je n'apprends pas par cœur. Souvent, je ne sais pas exactement quelle va être mon accroche avant de prendre la parole. Cela dépend de ce que l'on veut mettre en avant dans le dossier. Cela dépend aussi de ce qui se passe dans la salle, de ce qu'on ressent.
À quelles contraintes un avocat débutant doit-il faire face ?
Première chose ; il ne faut pas avoir peur de l'entrepreneuriat. L'avocat, c'est en effet un chef d'entreprise qui exerce à 95% en tant que libéral. Il faut donc avoir le goût de l'indépendance. Après avoir prêté serment, on est en général collaborateur au sein d'un cabinet. Dans ce cas, on est soumis à une rétrocession mensuelle d'honoraires. Ensuite, on peut s'associer ou exercer à titre individuel. Si on s'installe, il faut gérer soi-même ses cotisations sociales, ses charges, ses impôts… Beaucoup de jeunes avocats découvrent la gestion financière et administrative car dans nos études de droit, nous ne sommes pas formés à la gestion d'entreprise, voire au management. Il faut donc savoir anticiper cette réalité.
Faut-il choisir une spécialité quand on devient avocat ?
La profession est très concurrentielle et la tendance de la jeune génération est, semble-t-il, de s'installer le plus rapidement possible, afin d'être indépendant. Aussi parce qu'il est parfois difficile de débuter comme collaborateur dans un cabinet. De ce fait, beaucoup de jeunes avocats font le choix d'être généralistes. Mais cela requiert une grande agilité intellectuelle et de bien connaître toutes les spécialités : le droit du travail, le droit de la famille, le droit de la consommation etc. C'est pourquoi, au préalable, il est essentiel de prendre le temps de se former et, dès le lycée, de faire des stages pour tester ses affinités. Cela permet d'affiner ses choix professionnels et découvrir différentes façons d'exercer, auprès d'avocats, mais aussi de magistrats, de notaires, de commissaires de justice…
Avec le recul, je retiens qu'on ne peut pas exercer ce métier dans la durée sans prendre soin de soi Karim Berbra
Quels conseils donneriez-vous aux jeunes avocats ?
Je dirais aux jeunes : c'est une profession passionnante, exigeante, mais sachez préserver votre santé mentale. La durée, la complexité du travail et la charge de travail sont des facteurs de risques psychosociaux très importants chez les avocats, comme le montre l'étude que j'ai menée en 2024 : L'exposition des avocats du Barreau de Rouen aux risques psychosociaux. Avec le recul, je retiens qu'on ne peut pas exercer ce métier dans la durée sans prendre soin de soi. Pendant des années, j'ai enchaîné 60 à 70 heures par semaine, 7 jours sur 7. Je conseille donc aux jeunes de bien se connaître et de réfléchir au choix de leur spécialité, à leur organisation de travail, au nombre et au type de dossiers qu'ils sont en capacité de traiter. Il est essentiel de garder une vie sociale, un équilibre entre sa vie personnelle et professionnelle, car la passion du métier ne protège pas de l'épuisement.
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