
« Ça n'a jamais été facile pour moi » : Clinton Mata, le recalé des centres de formation devenu indispensable à l'OL
À bientôt 33 ans, Clinton Mata doit prochainement prolonger son contrat avec l'Olympique Lyonnais, où il s'est fait une place comme partout où il est passé au cours de sa carrière. Jamais considéré au départ comme un titulaire, il finit toujours par l'être, mais pas forcément au poste attendu. En France, arrivé en 2023 comme latéral droit, voire défenseur axial, dans un système à trois, il s'est affirmé, la saison passée, en charnière d'un système à quatre, avec Moussa Niakhaté. Jeudi dernier, pendant le stage de l'OL en Autriche, il est revenu pour nous sur son parcours particulier.
« Est-ce que, à 32 ans, on se gère différemment en préparation ?Non, je suis quelqu'un qui a du mal à gérer, j'ai toujours été quelqu'un qui se donnait à fond. Donc pour moi, gérer c'est un peu tricher.
Et pourtant vous évoluez maintenant à un poste où on est plus dans la gestion.Oui, mais ça demande encore plus de concentration puisque derrière moi il n'y a personne. Vous devez être vigilant, toujours parler avec les coéquipiers, avoir du leadership aussi.
« J'étais le joueur qu'on attendait le moins de ma génération en Belgique et voilà ! »
Clinton Mata
C'est un peu à l'image de votre carrière. D'abord milieu puis ailier droit, latéral et axial dans une défense à trois puis à quatre...Ça n'a jamais été facile pour moi. Je n'ai pas fait de centre de formation, le chemin était plus long par rapport aux autres. Et je pense que c'est aussi un exemple pour tous les jeunes. Quand on vous dit en centre de formation : "OK, tu n'as pas le niveau, on te met dehors", il faut avoir le mental et la sagesse de pouvoir vous dire : OK, ce n'est pas grave, j'irai quelque part pour pouvoir rebondir. Il y en a qui tombent en dépression, qui craquent et qui arrêtent complètement le foot. Je n'ai pas eu ce parcours-là. Mais au final, j'y suis quand même arrivé (il a fait ses débuts en D1 belge à quelques jours de ses 22 ans). J'étais le joueur qu'on attendait le moins de ma génération en Belgique et voilà !
Justement, comment ça se passait quand vous étiez jeune, à naviguer entre les clubs et à essuyer pas mal de refus ?J'étais appelé en jeune pour les détections au Standard (Liège) notamment, où on m'a recalé quand même trois ou quatre fois.
Qu'est-ce qu'il vous manquait ?Ils disaient que j'étais trop fébrile, que je n'avais pas le niveau, alors que c'est eux qui me demandaient de venir aux détections, je n'étais pas demandeur.
« Etre dur avec moi-même, c'est ça qui m'a permis d'accéder au haut niveau et de pouvoir y rester »
Vous le viviez comment ?Dire que je m'en foutais, ce serait mentir, c'était quand même une déception. J'avais moins de qualités que les autres, j'y suis arrivé au travail, à la discipline surtout. Être dur avec moi-même, c'est ça qui m'a permis d'accéder au haut niveau et de pouvoir y rester.
À 16 ans, comment voyiez-vous votre avenir ?Dans ma tête, le foot c'était juste m'amuser avec mes potes, mais tout en me disant pourquoi pas. Je ne me mettais pas la pression en fait. Quand je compare avec la jeunesse d'aujourd'hui, où je vois qu'on met beaucoup de pression sur les réseaux sociaux, etc. C'est beaucoup pour les jeunes aujourd'hui. Laissez-les d'abord s'amuser, prendre du plaisir. Ça ne sert à rien de commencer à mettre la pression au niveau familial. Parce qu'après si le gamin ne devient pas pro, ça veut dire quoi, qu'il est mauvais ? Il faut faire attention.
Vos parents ne vous mettaient pas la pression ?Mon père a été international angolais comme gardien, et il croit plus en moi que moi-même. Mais il me disait toujours : "Ce n'est pas parce que les autres sont déjà devant que tu ne pourras pas les rejoindre." Il m'avait donné un exemple, que je garderai toute ma vie, alors que je voyais les autres en Première Division et que j'étais toujours en Troisième Division jeune. Il m'avait dit : "Tu sais, des fois, il y a le train qui passe, mais ce n'est peut-être pas ton train. Les autres vont monter dans le train, mais à un moment donné, ils auront des embouteillages ou le train va s'arrêter. Mais le prochain train qui viendra, tu vas monter dedans et faire tout le trajet au vert." Et c'est vraiment ce qui s'est passé. C'est une grâce, je me sens béni. C'est quand même quelque chose de fort. J'étais un jeune joueur qui rêvait juste de pouvoir faire sa petite carrière en Belgique, et aujourd'hui, je fais une carrière à l'étranger. Ce n'est que du bonus.
« C'est fou de se dire que je devrais être maçon »
Si vous n'aviez pas percé, vous auriez travaillé dans quel secteur ?Dans la construction. J'aime beaucoup l'art, l'architecture, etc. J'ai toujours aimé la construction. C'est fou de se dire que je devrais être maçon. Des fois quand je le dis, il y en a qui rigolent, qui n'en reviennent pas, mais c'est réel, c'est mon histoire. Parfois on en rigole avec des amis avec qui j'étais à l'école : "Tu t'imagines, on était en construction ensemble, à monter des murs, aujourd'hui regarde où tu te retrouves !" C'est une belle histoire, je trouve.
Vous vouliez être maçon ?J'aurais bossé dans la maçonnerie, c'est sûr. Dans ma tête c'était construire des bâtiments, des appartements et commencer à louer. Après le métier de maçon est extrêmement dur, donc je pense que j'aurais bien vite arrêté et que j'aurais beaucoup de problèmes de dos aujourd'hui, hein !
À Lyon aussi, le parcours a été sinueux.J'arrive en 2023 à Lyon grâce au coach Laurent Blanc pour aider Saël (Kumbedi), lui faire prendre de l'expérience et aussi le concurrencer. Puis j'en suis venu à jouer quelques matches en défense centrale et je m'y plais bien.
Pourquoi avoir choisi de prolonger ?Déjà pour le projet qu'ils ont installé, un projet où on va plus faire confiance aux jeunes, à la formation, je suis un peu dans le même rôle qu'à Bruges ou Genk. En fait, c'est ce que j'ai fait tout au long de ma carrière, avec Joakim Maehle, qui est à Wolfsburg maintenant, Max de Cuyper, qui est parti à Brighton, je peux vous en citer plein.
« Je ne suis pas Français et d'un point de vue extérieur, Lyon reste un grand club, une institution »
Ça ne vous a pas fait peur, tout ce qui s'est passé cet été ?J'étais vraiment tranquille, les gens m'envoyaient des messages : waouh, Ligue 2 ! Je ne répondais même pas. Je ne suis pas Français et d'un point de vue extérieur, Lyon reste un grand club, une institution. Peut-être que vous, Français, vous le voyez différemment. Mais pour nous, même si ce n'est plus le même Lyon que dans les années 2000, je savais qu'en aucun cas Lyon descendrait.
Et les contraintes financières qui pèsent sur le mercato ?L'effectif a perdu en qualité. Mais on va pouvoir donner la chance à la formation. Ça fait combien d'années que Lyon n'a plus sorti de jeune ? Alors que, encore une fois, de l'extérieur, pour moi, le centre de formation de l'OL, surtout avant, c'était du même style que le Barça ou l'Ajax, des écoles où tu savais que tu avais des pépites qui sortaient à chaque fois.
Vous en voyez, des pépites, dans les jeunes qui ont intégré le groupe pour la préparation ?S'ils sont là, c'est qu'ils ont des qualités. Maintenant, le plus important, c'est de les encadrer, les prendre sous notre aile et les faire grandir, avec Moussa (Niakhaté), Nema (Matic), Coco (Tolisso)... Les mettre sur le droit chemin quand il le faut, et être doux aussi de temps en temps avec eux. Parce que tu ne peux pas toujours être dur. Il faut aussi les comprendre, c'est une nouvelle génération. Pour la nôtre, des fois tu ne jouais pas, le coach ne te parlait pas, tu étais dans ton coin, c'était normal. Ce n'est pas possible aujourd'hui. De plus en plus, les joueurs ont besoin d'explications. Aujourd'hui, pour être coach, il faut être un psychologue. Tu es obligé d'expliquer le pourquoi.
Malgré la perte de ses meilleurs éléments, l'OL peut-il faire mieux avec moins ?
Ce serait quoi une bonne saison pour l'OL ?Ce serait déjà de pouvoir remettre le club où il se doit d'être. Prendre une qualification européenne, Ligue Europa ou Ligue des Champions. On reste ambitieux. Vous en pensez quoi, vous ?
Qu'avec une masse salariale divisée par deux ce serait une grosse performance.Mais c'est ça, justement ! J'ai vu une vidéo il y a quelques heures, la coureuse de 400 mètres (Floria Gueï, qui avait remonté trois adversaires pour gagner la finale du 4X400 m lors des Championnats d'Europe en 2014). Tu me fais penser au commentateur qui était déjà en train de l'enterrer. Elle, pendant que les autres l'enterraient, elle s'est fiée à son sentiment, à sa vision et à ses objectifs. Là, c'est exactement le même scénario, votre réaction. Nous, on a notre vision, notre ligne de conduite et on va tout faire pour la garder. »
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