Aussi impressionnant et implacable que Woods, Scottie Scheffler est bien le digne successeur du « Tiger »
Avec la froideur d'un équarrisseur au visage durci par une barbe taillée à la pince à épiler, qui laisse paraître de rares sourires et guère plus de grimaces quand une micropoussière vient chatouiller la mécanique de son swing, aussi implacable que peu académique, Scottie Scheffler a piétiné le parcours du Royal Portrush (- 7 total), écoeuré la meute de ses poursuivants (4 points d'avance) et réduit au silence tout un peuple qui s'était pris à rêver d'une improbable remontada de son héros, Rory McIlroy (7e à 7 coups). Par une douceur printanière sans un pet de vent, il n'y a pas eu une once de folie dimanche, et le triomphe attendu du numéro 1 mondial a ressemblé à s'y méprendre à ceux de ses trois Majeurs précédents, les Masters 2022 et 2024 et le PGA Championship il y a deux mois à Quail Hollow.
Ce n'est sûrement pas un hasard si ce golfeur phénoménal de 29 ans, qui en paraît presque dix de plus et s'impose déjà comme un des plus grands joueurs de fers de tous les temps, a remporté son premier British Open en empilant une 10e victoire de rang après avoir été en tête au matin du dernier tour, soit la plus longue série depuis les 37 succès d'affilée de Tiger Woods de cette manière.
Quatre fois Scheffler a été leader d'un Majeur au club-house le samedi soir, quatre fois il s'est imposé le lendemain. Ce taux de conversion maximal ne laisse guère de place aux palpitations cardiaques mais l'envoie sur l'orbite du « Tigre » et ses quatorze premiers Monuments conquis sans être revenu de l'arrière, lui qui a gardé le meilleur pour la fin, lors de sa dernière danse au Masters 2019.
« Tirer le meilleur de moi-même au quotidien, c'est ce qui m'amuse le plus »
Scottie Scheffler
On pourrait multiplier les comparaisons statistiques de tous ordres avec la légende du golf. Mais s'il se rapproche à grands pas de son écrasante domination, le champion olympique aux 147 semaines à la première place mondiale (contre 683 pour son aîné), fait face à une concurrence bien plus sauvage qu'au virage des années 2000. Comme Woods, Scheffler plante les drapeaux tel un joueur de PlayStation. Comme son prédécesseur au sommet du jeu, il avale les mètres de putts les yeux fermés dès qu'il se trouve dans la zone de vérité de 0 à 2,5 m (97 % de réussite à Portrush) ou dans celle des tueurs de sang-froid (78 % à moins de 5 m).
Ses progrès fulgurants sur des greens où il n'a pas toujours été si à l'aise, racontent un bourreau de travail, moins naturellement talentueux que Woods, mais obsédé par une quête de perfection maladive. « Je ne me soucie pas des victoires ou des défaites, dit-il. Je ne me pose pas en début de saison pour me dire que je veux gagner X fois tel ou tel Majeur ou tournoi. J'ai des rêves et des aspirations qui me tiennent à coeur, mais au bout du compte, j'essaie de rester dans le présent en m'entraînant dur chaque jour. Tirer le meilleur de moi-même au quotidien, c'est ce qui m'amuse le plus. Mais si je commence à me projeter trop loin dans le futur, je deviens un peu procrastinateur. C'est comme ça que j'étais à l'école. »
On imagine un élève studieux et imperturbable, comme dimanche quand McIlroy, parti juste devant lui, souleva les premières clameurs de la foule dès son birdie au 2. Le Texan d'adoption y riposta par un birdie d'entrée et ainsi de suite pour conserver une avance qui culmina à huit coups sur son poursuivant le plus proche, avant un double bogey au 8, son seul du tournoi, qui fit passer un semblant de frisson sous l'échine des amateurs de suspense. Un nouveau birdie chirurgical au 9 siffla la fin de la récré, tandis que le chahut venait du fond de la classe, de bien trop loin pour l'inquiéter, mais d'une brochette de G.I. déchaînés.
De Bryson DeChambeau, revenu de la 144e place jeudi soir après son 78, à la 10e dimanche (!) à la faveur d'un ébouriffant 64, meilleur score du jour, à Wyndham Clark et Rickie Fowler (65), en passant par Harris English (66), seul 2e devant le surprenant Chris Gotterup, les Américains s'en donnèrent à coeur joie, histoire de montrer à l'Europe qu'il faudra sortir les couteaux en Ryder Cup, à Bethpage fin septembre.
Là-bas dans la banlieue de New York, Scheffler sera au centre de l'attention d'un public qu'on annonce bouillant. Un rôle qui ne le séduit pas forcément. « Il ne se soucie pas d'être une superstar, dit son compatriote texan Jordan Spieth. Il ne transcende pas le jeu comme Tiger l'a fait. Il ne s'adresse pas nécessairement à un public autre que celui des golfeurs. Il ne veut pas faire les choses que beaucoup d'entre nous font et veut juste s'éloigner du jeu, en séparant sa vie personnelle de son métier. Sa particularité, c'est surtout sa différence de personnalité avec toutes les autres superstars de l'ère moderne et peut-être de tous les sports. Personne ne lui ressemble. »
À lire aussi
Scottie Scheffler, le dompteur de links
A McIlroy, rien d'impossible ?
Peur sur le 1 au Royal Portrush
Couvra, une précocité inédite pour le golf français
Hashtags

Essayez nos fonctionnalités IA
Découvrez ce que Daily8 IA peut faire pour vous :
Commentaires
Aucun commentaire pour le moment...
Articles connexes


L'Équipe
9 minutes ago
- L'Équipe
Lucas Paqueta devrait être blanchi dans l'affaire des paris truqués
Embourbé dans une affaire de paris truqués depuis mai 2024, Lucas Paqueta devrait être blanchi dans les prochains jours, annonce The Times. La Fédération anglaise de football, à l'origine des accusations, pourrait être chargée de rembourser plus d'un million d'euros de frais d'avocat au joueur. Sa carrière aurait pu s'arrêter brusquement après une affaire de paris truqués, dans laquelle il est embourbé depuis mai 2024. Mais Lucas Paqueta (27 ans) devrait être blanchi, avance The Times. La décision de justice devrait être annoncée la semaine prochaine. L'international auriverde (55 sélections, 11 buts) avait été accusé, par la Fédération anglaise de football (FA), d'avoir favorisé ses proches dans un scandale de paris. La FA reprochait à l'ancien Lyonnais d'avoir cherché « intentionnellement à recevoir un carton de l'arbitre » lors de plusieurs rencontres. Dans le même temps, plusieurs comptes domiciliés au Brésil et utilisés par des membres de la famille du joueur auraient reçu des fonds, liés à des paris massifs sur la possibilité que Paqueta soit averti. Lucas Paqueta et l'affaire des cartons jaunes, l'ombre brésilienne des paris truqués La fédération avait alors lancé une enquête, et avait maintenu, après neuf mois d'enquête, ses accusations contre le Brésilien. La FA en avait même ajouté deux supplémentaires, pour une absence de coopération du joueur dans les procédures. 1 million d'euros de frais à charge de la FA ? Le gaucher de West Ham, lui, avait clamé son innocence sur ses réseaux sociaux, en mai. « Je suis extrêmement surpris et en colère. Pendant neuf mois, j'ai coopéré à chaque étape de leur enquête et fourni toutes les informations que je possédais. Je nie entièrement ces accusations et je me battrai de toutes mes forces pour laver mon nom. » Toujours selon The Times, la FA pourrait être amenée à rembourser les frais d'avocat de Lucas Paqueta, s'élevant à plus d'un million d'euros. Ni la fédération, ni l'entourage de Paqueta n'ont, pour le moment, souhaité faire de commentaires.

L'Équipe
2 hours ago
- L'Équipe
Rugby À Xiii - Super League : Le résumé de Wigan Warriors
Face à Wigan, champion du monde en titre, les Dragons se sont inclinés à l'occasion de la 20ème journée de Super League (28-18). Les hommes de Joel Tomkins concèdent une cinquième défaite consécutive en Super League. À voir sur L'Équipe Le replay de Dragons Catalans - Hull KR (MT2) Le replay de Dragons Catalans - Hull KR (MT1) Le replay de Dragons Catalans - Hull KR Le résumé de Dragons Catalans - Hull KR Le replay de Dragons Catalans - Warrington Wolves Le résumé de Dragons Catalans - Warrington Wolves Le replay de Dragons Catalans - Warrington Wolves (MT2) Le replay de Dragons Catalans - Warrington Wolves (MT1) Le replay de Wakefield Trinity - Dragons Catalans Le replay de Wakefield Trinity - Dragons Catalans (MT2) Le replay de Wakefield Trinity - Dragons Catalans (MT1) Le résumé de Wakefield Trinity - Dragons Catalans Le replay de Dragons Catalans - Huddersfield Giants Les Dragons Catalans respirent enfin


L'Équipe
2 hours ago
- L'Équipe
Malgré sa bonne forme, Jonas Vingegaard a une nouvelle fois raté le coche sur la dernière étape de montagne du Tour de France 2025
Sa deuxième place au général actée, Jonas Vingegaard visait la victoire d'étape vendredi. Il a fini devant Tadej Pogacar mais a manqué le coche, battu par Thymen Arensman. Jonas Vingegaard a rejoint son bus rigolard, blaguant avec Krists Neilands (Israel-Premier Tech), tandis que, quelques minutes plus tôt, Sepp Kuss pouffait auprès de Victor Campenaerts : « Quand je t'ai entendu demander ''tu veux que je fasse le rythme ?'', je me suis dit ''oh, Viki est dans un bon jour !'' », lâchait l'Américain. Ambiance décontractée chez les Visma-Lease a bike, passés proches d'une victoire d'étape, ce qui prouve bien qu'ils ont déjà acté, et digéré, leur échec dans ce Tour. « Tadej (Pogacar) est extrêmement fort, le plus fort. Il mérite de gagner, il faut savoir l'accepter et, désormais, je l'accepte », avouait vendredi soir le Danois. La veille, il avait promis qu'il tenterait encore, mais la nuit a porté conseil aux Frelons, et le seul objectif, au départ d'Albertville, était de « tenter de gagner l'étape, expliquait Grischa Niermann, le directeur sportif. On savait que Tadej la voulait aussi, qu'UAE allait contrôler l'échappée, donc ça n'avait pas de sens d'attaquer tôt. Oui, on a vu Primoz Roglic faire ''all in'' dans la première ascension [en s'échappant, ndlr], on aurait pu faire pareil avec Jonas, il y avait peut-être 0,1 % de chance que ça fonctionne... On savait que ça n'allait pas passer, donc on a joué l'étape. » Vingegaard a préféré faire perdre Pogacar plutôt que de tenter de gagner Le maillot à pois (par procuration) a donc joué petit bras, profité du travail de son adversaire dans l'ultime ascension vers La Plagne. Et l'a suivi, quand le Maillot Jaune a attaqué. « On a vu que Jonas était encore très fort, se félicitait son directeur sportif. Il a pu rester dans sa roue, garder des forces, il a très bien manoeuvré mais, finalement, ils n'ont pas pu revenir sur (Thymen) Arensman et gagner l'étape. » Car si le plan de laisser rouler Pogacar a fonctionné, il y a eu un hic. Parti à 13 kilomètres du sommet, Arensman n'a jamais été repris, Vingegaard échouant à quelques mètres du Néerlandais d'Ineos. « Si Jonas avait lancé plus tôt, ils auraient pu le reprendre mais il y avait de grandes chances que Pogacar déborde Jonas ensuite », résumait Niermann. Faire perdre Pogacar plutôt que tenter de gagner, donc. « En Belgique, on dit que quand deux chiens se battent pour quelque chose, c'est souvent le troisième qui le prend », imageait Campenaerts. Le double vainqueur du Tour va ainsi quitter l'édition 2025 sans un os à ronger, puisque les deux dernières étapes ne lui conviennent pas. « Mais on n'est pas déçus, promettait le moustachu belge. Il y a un coureur plus fort, le meilleur du moment et peut-être de l'histoire, et nous, nous avons le deuxième meilleur. »