
Comment Marie-Christine Chartier a appris à échouer
« You can tell me when it's over, if the high was worth the pain », chante Taylor Swift. À l'approche de ses 30 ans, Emma Thériault en avait assez que ses highs ne compensent jamais la douleur que lui faisaient endurer ses amours. Et c'est ainsi qu'elle s'est engagée sur ce long fleuve tranquille prénommé Louis, un proverbial bon gars lui procurant zéro papillon.
« Ça arrive qu'on ait envie d'une pause, d'une personne safe, qui ne nous fera pas vivre des montagnes russes, mais avec qui on ne sera jamais dévasté non plus », pense l'autrice à succès Marie-Christine Chartier (L'allégorie des truites arc-en-ciel), dont les livres se sont écoulés à plus de 100 000 exemplaires. « Mais quand t'as une personnalité qui ne fleurit pas dans le neutre, tu ne peux pas y rester tout le temps. »
À l'instar de la narratrice d'Oasis, son huitième roman depuis 2018, l'écrivaine ne fleurit pas, elle non plus, dans le neutre. Ancienne championne de tennis, un sport qu'elle a pratiqué à partir de ses 5 ou 6 ans jusqu'au début de la vingtaine, Marie-Christine Chartier garde de son passé d'athlète un amour de la compétition, avec lequel elle renoue depuis deux ans et demi en tant qu'humoriste.
C'est là où se chevauchent son histoire et celle d'Emma, dont le couple duveteux, mais un peu plate, s'enlise de plus en plus à mesure que la fera léviter le stand-up, de même que Rhéaume, un humoriste bien connu avec qui elle nouera une relation – d'abord strictement platonique. Quantité de papillons auprès de lui ? Beaucoup.
« L'attachée de presse chez Hurtubise [sa maison d'édition] finit encore ses courriels avec un 'P. S. C'est qui Rhéaume ?'… », s'amuse la drôle de femme de lettres, fière de son coup. Malgré ses sympathiques suppliques, l'auteur de ces lignes se sera heurté au même mutisme.
Le sport du rire
L'anecdote est véridique et est reprise presque telle quelle dans Oasis : après avoir participé durant la pandémie à un talk-show sur le web, où elle aura fait preuve de plus de répartie que ce qu'on attend d'une romancière, Marie-Christine se voit proposer de tenter sa chance lors d'une soirée d'humour.
« La vraie raison pour laquelle j'ai accepté, c'est que lorsque je jouais au tennis, j'avais extrêmement peur de perdre, au point où ça me faisait rater des opportunités », confie celle qui a vécu six ans aux États-Unis après avoir reçu une bourse pour étudier à la Iowa State University.
PHOTO MARCO CAMPANOZZI, LA PRESSE
Les livres de Marie-Christine Chartier ont été vendus à plus de 100 000 exemplaires.
Quand j'ai commencé ma deuxième vie, dans l'écriture, j'ai décidé que j'allais dire oui le plus souvent possible, même aux affaires qui me font peur, que j'allais oser me planter.
Marie-Christine Chartier
Ce qui a commencé par un premier cinq minutes « payé en bière » sur la scène d'un bar s'est aujourd'hui transformé en des présences régulières au Bordel et au Terminal, ainsi que par le prestigieux mandat d'assurer la première partie de Mariana Mazza. « J'ai continué en humour parce que ça me rappelle beaucoup le tennis. C'est l'art le plus proche du sport. »
Assouvir une curiosité
Une des grandes réussites d'Oasis tient à ses galvanisantes descriptions de ces moments d'euphorie que procurent les projecteurs, lorsque 50, 100 ou 1000 personnes rient à l'unisson d'un même trait d'esprit.
Au contraire de Haute démolition (2021) de Jean-Philippe Baril Guérard, qui dépeignait le monde de l'humour en vivier pour personnes brisées, Marie-Christine Chartier décrit un monde sur lequel règne une saine camaraderie. « Il faut dire que lorsque je suis arrivée, le gros ménage post-#metoo avait pas mal été fait », précise-t-elle.
Cette première autofiction se présentait donc non seulement comme une occasion de puiser dans son propre parcours sentimental, ainsi que dans sa propre démarche psychothérapeutique, mais aussi d'inviter le grand public dans les coulisses d'un microcosme qui fascine.
« Tu sais, mes amies ne m'ont jamais trop posé de questions sur comment ça se passe dans les salons du livre, avec les autres écrivains, lance-t-elle en riant. Mais dès que j'ai commencé en humour, on me demandait : 'Connais-tu tel humoriste ? Est-ce qu'il est fin ? Comment ça se passe dans les loges ?' »
Vivre le moment présent
Compte tenu du milieu dans lequel est planté son décor, Oasis pourrait bien être le roman permettant à Marie-Christine Chartier de conquérir un plus vaste lectorat masculin, elle dont l'œuvre a jusqu'ici beaucoup interpellé les jeunes femmes, ce dont elle se dit « très fière », parce que ses lectrices sont « très dédiées ». Elle ne détesterait pas pour autant qu'on cesse de penser que ce qui concerne d'abord les femmes ne peut que les intéresser elles.
Son alter ego Emma rabroue d'ailleurs un collègue humoriste qui lui suggère d'aborder au micro des thèmes au potentiel plus universel, c'est-à-dire moins féminins. Une perception qui s'étend au domaine de la littérature et qui désole Marie-Christine : une femme qui écrit sur l'amour, « c'est facile », mais un homme, « ah, là, c'est donc ben merveilleux, parce que ça veut dire qu'il est sensible ».
Marie-Christine Chartier ne sait pas si le stand-up continuera longtemps de faire partie de sa vie ou s'il ne s'agira que d'une mémorable amourette. « Un soir, je vais faire un show et c'est magique. Puis le lendemain, ça ne va pas bien et je me demande pourquoi je fais ça », avoue-t-elle.
Chose certaine : il n'y a rien comme d'aller monologuer sur scène pour endiguer son monologue intérieur. « Dans la vie, je pense trop à toute tout le temps, mais en stand-up, comme dans le sport, pendant 10, 15 minutes, je ne pense à rien d'autre, confie l'autrice-humoriste. Je suis juste dans le moment présent et j'arrive même à oublier que je peux me planter. »
Hashtags

Essayez nos fonctionnalités IA
Découvrez ce que Daily8 IA peut faire pour vous :
Commentaires
Aucun commentaire pour le moment...
Articles connexes


La Presse
3 hours ago
- La Presse
Le country à Montréal pour y rester
Bailey Zimmerman, Sheryl Crow, Shaboozey et une pléiade d'artistes québécois se sont produits dans un parc Jean-Drapeau où le country était à l'honneur, vendredi à Montréal. À sa quatrième édition, le festival LASSO a rempli le site, et tout indique qu'il poursuivra sur sa lancée dans les années à venir. Bailey Zimmerman, du haut de ses 25 ans, a été accueilli en vedette dès les premières minutes de sa présence sur scène. Rapidement, la camisole blanche sur laquelle on pouvait lire « Montréal » a été balancée au public, entre deux langues tirées et deux amples mouvements de danse. Il a plus tard continué à jouer les héros du peuple en portant un chandail personnalisé du Canadien de Montréal. Zimmerman est un savant mélange d'énergie, de cœur et de confiance en soi. Il aime se faire aimer, puis le fait avec une dose d'arrogance bien placée – le genre qui fonctionne seulement lorsqu'on tourne, comme lui, partout en Amérique du Nord. PHOTO DOMINICK GRAVEL, LA PRESSE Bailey Zimmerman Si vous ne pouvez pas le deviner au sourire sur mon visage, je ne voudrais être nulle part ailleurs au monde en ce moment. Bailey Zimmerman À plusieurs reprises, l'Américain a parlé quelques minutes au public. Il a notamment livré un témoignage sur la santé mentale, révélant avoir perdu un ami récemment et invitant le public à en parler, avant d'interpréter une chanson écrite pour celui-ci. Vous ne connaissiez pas Zimmerman ? On vous confirme qu'il se comporte en tête d'affiche et que les festivaliers se sont déplacés pour lui. Menu principal Sheryl Crow, à 63 ans, incarnait l'expérience. « Je viens à Montréal depuis 1993, alors que certains d'entre vous n'étaient pas nés », s'est-elle amusée à dire. Autrice et interprète douée pour plusieurs instruments, à commencer par la guitare, la native du Missouri a réjoui une colline principale noire de monde avec une franchise impeccable. PHOTO DOMINICK GRAVEL, LA PRESSE Sheryl Crow a été l'avant-dernière à monter sur la double scène du parc Jean-Drapeau. L'Américaine, qui surfe entre la pop, le soft rock et le country, a été vivement acclamée à quelques reprises, particulièrement après All I Wanna Do. Elle nous a aussi offert If It Makes You Happy et Real Gone, entre autres. Avant elle, Shaboozey, qui s'est dit « reconnaissant de jouer au plus grand festival de country au Canada », était de passage pour la deuxième fois à Montréal depuis le début du mois d'août. Deux semaines après avoir fait le coup à Osheaga, voilà que le chanteur de Virginie a remis ça : à deux reprises plutôt qu'une, il a livré A Bar Song (Tipsy), son succès incontesté. PHOTO DOMINICK GRAVEL, LA PRESSE Shaboozey brandit sa casquette « Montrey'all », vendue un peu partout sur le site vendredi. C'est peut-être le plus grand show que j'ai joué de ma vie ! Shaboozey Sous l'impulsion des « olé olé olé » et des applaudissements sentis à la fin de son set, celui qui mélange country, pop et rap n'a pu s'empêcher de verser quelques larmes de joie, contemplant sous la forme de dizaines de milliers de spectateurs son ascension vers le sommet des classements musicaux. La chaleureuse simplicité du country Il existe des tonnes de festivals à Montréal. Mais LASSO est le seul qui se distingue à ce point par sa saine simplicité. Ce que représente le country, cette musique que le sud des États-Unis nous a donnée au XXe siècle, c'est une célébration des choses simples que la vie nous offre. Et ça se sent. PHOTO DOMINICK GRAVEL, LA PRESSE Chapeaux de cowboy. On aurait pu croire qu'ils étaient obligatoires, tant il y en avait. C'est pour cela que, sans qu'on puisse prétendre que les chansons ou les artistes sont interchangeables, on peut être assuré d'y retrouver les thématiques de la famille, de l'amour, de la ville natale (ou devrions-nous dire le village), de la chasse, de la pêche, de la bière et souvent, chez nos voisins américains, du patriotisme et de la foi. Difficile, quand on se balade sur le site du parc Jean-Drapeau, d'y trouver la moindre goutte de négativité. Quand bien même on le voudrait, on chercherait longtemps. La communauté country a cette particularité de dégager une atmosphère d'authenticité, de sincérité, même de chaleur. À voir ce que Montréal devient durant LASSO, on peut l'affirmer sans se tromper : le country est un genre musical où on ne se prend pas la tête, conçu pour faire naître chez l'auditeur un sourire satisfait. Danse en ligne et chanteurs d'ici Au chapiteau de danse en ligne, qui accueille quelques centaines de personnes en marge de la scène secondaire du Ranch, on observe un rassemblement aussi dansant que spontané. On a beau ne pas connaître ses partenaires, chanson après chanson, les jupes tournent, le cuir des bottes cogne les planches et les mains se tapent dans un mouvement étonnamment synchronisé. PHOTO DOMINICK GRAVEL, LA PRESSE Un chapiteau spécialement consacré à la danse en ligne attirait des centaines de curieux. Mutuellement, les participants se comprennent. Il faut dire que l'option, depuis qu'elle est offerte, est populaire. De quelques gestes de la main, on leur indique où se diriger. Il y a quelque chose de beau à regarder tous ces gens qui échangent sans même se parler. La scène Sirius XM, une plus petite scène à saveur locale où se sont produits trois artistes du Québec, attirait aussi quelques centaines de spectateurs en après-midi. PHOTO DOMINICK GRAVEL, LA PRESSE Rick Duff, vendredi à la scène Sirius XM. Rick Duff, chanteur originaire de Lanaudière, s'est fait un plaisir évident en interagissant avec son public, en lançant des t-shirts à bout de bras et en interprétant son grand succès, Ford Ranger. Ayant débuté sa carrière en 2024, il pourrait être l'une des recrues montantes country à suivre dans la province. PHOTO DOMINICK GRAVEL, LA PRESSE Une foule plus intime à la scène du Ranch, devant le spectacle de la Québécoise Savannah Jade, vendredi après-midi Chloé Leclerc et Cindy Bédard, deux autres chanteuses d'ici, sont aussi montées à la scène Sirius XM. Savannah Jade et Vince Lemire ont aussi fait partie de la programmation de vendredi, où visiblement, l'intention était de donner une place au Québec. Ainsi, à la question « Comment ça va, Montréal ? », lancée par plusieurs artistes au cours de la journée vendredi, on peut résumer et répondre : bien. Les gens à LASSO vont bien, ils ne font pas semblant, et ils reviendront.


La Presse
12 hours ago
- La Presse
Gilles Proulx poursuit Marie-Claude Savard en diffamation
L'animateur Gilles Proulx poursuit en diffamation la productrice et animatrice Marie-Claude Savard pour 140 000 $. Il lui reproche de l'avoir accusé d'avoir volé 90 000 $ à l'ex-boxeur Alex Hilton. Des accusations fausses et « extrêmement graves », selon Gilles Proulx. « [Marie-Claude Savard] a commis une faute grave en relayant des allégations de détournement de fonds sans preuve, ni vérification, et en les amplifiant à travers de multiples canaux médiatiques de premier plan », allègue-t-on dans une poursuite en diffamation déposée jeudi au palais de justice de Montréal. Cette affaire découle du documentaire Être un Hilton diffusé sur la plateforme Crave en octobre 2024, et rediffusé sur des chaînes de Bell. Ce documentaire produit et animé par Marie-Claude Savard présente la rédemption de l'ex-boxeur Alex Hilton. Un pan majeur est consacré à la disparition d'un pécule de 90 000 $ amassé par l'athlète en fin de carrière, alors que Gilles Proulx était son agent. En entrevue sur les ondes de Radio-Canada pour faire la promotion du documentaire, Marie-Claude Savard a déclaré que ces 90 000 $ ont « été volés par un animateur de radio bien connu, qui a accepté de faire le documentaire. Faque c'était Gilles Proulx ». Des propos « diffamatoires et calomnieux », insiste M. Proulx dans sa poursuite. Dans le documentaire, Marie-Claude Savard orchestre un « récit accusatoire » qui laisse « faussement entendre » que Gilles Proulx aurait détourné 90 000 $ à Alex Hilton, et ce, sans la moindre preuve, outre les dires de l'ex-boxeur, affirme le clan Proulx dans la poursuite. « En procédant ainsi, [Marie-Claude Savard] a sciemment tourné le dos à toute objectivité, dirigeant ses propos à l'aide de questions suggestives ; elle a fabriqué un récit à charge faisant passer [Gilles Proulx] pour un voleur, sans jamais lui offrir un véritable droit de réponse », peut-on lire dans la poursuite déposée par Me John T. Pepper Jr. « [Marie-Claude Savard] a volontairement abandonné toute rigueur, se présentant comme narratrice omniprésente, intervenante partisane, et même, selon ses propres mots, 'avocate' de Monsieur Hilton, adoptant ainsi une posture accusatoire plutôt qu'informative », indique-t-on dans la requête. Selon la poursuite, Gilles Proulx avait recommandé à l'époque à Alex Hilton de déposer ses bourses dans un compte à la Caisse Desjardins. Or, un autre homme, Jean-Léon Gélinas, a « plutôt incité » Alex Hilton à investir les fonds par l'entremise de Victor Lacroix. Mais tout le magot s'est envolé, en même temps que ce Victor Lacroix. La Presse était revenue sur cette affaire en novembre 2024. En entrevue, Gilles Proulx avait juré n'avoir « jamais volé Alex Hilton ». Il expliquait avoir été « naïf » d'investir l'argent du boxeur vers 2004, mais qu'il avait agi comme un « grand frère ». Les conséquences sur sa réputation ont été majeures, affirme Gilles Proulx. Les propos « diffamatoires et calomnieux » ont été diffusés à « grande échelle » sur Crave, Noovo, Canal D, Radio-Canada et De plus, plusieurs articles ont été publiés sur cette affaire. Gilles Proulx affirme avoir subi une perte « importante » de contrats professionnels, dont sa participation à QUB Radio en janvier 2025. Il a aussi été visé par des propos haineux sur les réseaux sociaux, en plus d'être harcelé à plusieurs reprises dans des lieux publics. « Il endure une souffrance psychologique constante, liée à cette campagne de salissage injustifiée, humiliante et profondément blessante », indique-t-on dans la poursuite. C'est pourquoi Gilles Proulx réclame 105 000 $ en dommages moraux et 35 000 $ en dommages punitifs. Il demande aussi des excuses publiques de Marie-Claude Savard et une rétractation complète. Joints par La Presse, Gilles Proulx et Marie-Claude Savard ont refusé de commenter en raison du processus judiciaire en cours.


La Presse
12 hours ago
- La Presse
Le SPVM enquête sur des cas d'intoxications à ÎleSoniq
Le corps policier invite les victimes et les témoins à contacter le 9-1-1 ou leur poste de quartier. (Montréal) Le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) enquête sur des cas d'intoxications qui seraient survenues à l'insu des victimes lors du festival de musique électronique ÎleSoniq, le week-end dernier à Montréal. La Presse Canadienne Le SPVM se penche sur six cas qui ont été rapportés au corps policier, qui seraient survenus les 9 et 10 août derniers à l'évènement au parc Jean-Drapeau. « Dans l'ensemble d'entre eux, les victimes auraient ressenti une forte piqûre dans la partie arrière du corps alors qu'elles se trouvaient parmi la foule. Par la suite, certaines des victimes, qui sont des femmes et des hommes, se seraient senties étourdies », précise le SPVM, par voie de communiqué. Le corps policier invite les victimes et les témoins à contacter le 9-1-1 ou leur poste de quartier. Le SPVM précise qu'il est aussi possible d'effectuer un signalement de façon anonyme avec Info-Crime Montréal, au 514-393-1133 ou sur le site web d'Info-Crime. Des récompenses allant jusqu'à 3000 $ peuvent être remises par Info-Crime Montréal pour des informations menant à l'arrestation d'un suspect. « À ce stade-ci, il est prématuré de fournir des précisions additionnelles sur l'enquête en cours ou de confirmer si les évènements rapportés seraient reliés. À noter que les responsables de la sécurité du festival ÎleSoniq et d'evenko collaborent étroitement avec le SPVM afin de faire progresser l'enquête », affirme le corps policier.