
État de choc
Séoul — Six heures du matin, mardi matin. Le téléphone me réveille. C'est Montréal. La Presse :
– Ben Johnson positif !
– C'est une farce ?
C'était pas une farce. Enfin si, dans un sens, c'en était une. Partout au Canada on savait. Ici, à l'intérieur de la bulle olympique on ne savait rien. On dormait. Bien au chaud dans le rêve olympique.
Le temps de m'habiller, j'étais à la porte de la mission canadienne. L'attaché aux médias, Bill Hersh, en caleçon, répondait à deux ou trois confrères…
« Je viens de l'apprendre comme vous », disait-il. La nouvelle n'est pas confirmée. Personne ne répond au village des athlètes, je ne sais pas » … Puis s'adressant plus spécifiquement à moi : « La nouvelle est sortie en français paraît-il ? » … J'ai cru y discerner un reproche, comme si les mauvaises nouvelles arrivent toujours en français ?
Je réussis à rejoindre Jean-Paul Baert, l'instructeur des lanceurs de l'équipe canadienne. Sait-il par chance dans quel hôtel habite Ben Johnson ? Ben est au Hilton, avec sa mère et sa suite.
Il est toujours six heures du matin. Il fait toujours nuit. Le village de presse est toujours désert, mais dans la tour 107 cela commence à s'agiter. Je croise quelques confrères hagards. Faute de mieux on s'interview les uns les autres… Un mot résume le sentiment général : consternation.
Moi aussi je suis consterné mais pour d'autres raisons. Il va falloir reparler de la dope. Redire ce qui a été dit vingt fois depuis le début de ces jeux quand les haltérophiles se sont fait évincer de l'équipe…
Fonce au Hilton. Là aussi on se réveille. Pas de sécurité spéciale. Rien que cela me dit que l'oiseau s'est déjà envolé. On refuse de me dire s'il a déjà habité ici. J'insiste. Un flic en civil me prie fermement de déguerpir.
Direction le centre principal de presse, presque une demi-heure de taxi. Le chauffeur regarde ma carte de presse. « Oh Canada ! Ben Johnson ! » il a l'air désolé pour moi. Je lui demande comment il sait. Il pointe sa radio.
Au centre principal de presse, on attend la conférence du Comité international olympique. Fébrilité, bousculade, tout ce qui est canadien est aussitôt interviewé.
– Vous connaissez Ben Johnson ? Depuis quand savez-vous la nouvelle ? Qu'est-ce qu'on dit au Canada ? Que pensez-vous des accusations de sabotage de Charlie Francis ?
J'ai la chance de repérer Abby Hoffman, directrice de « Sport Canada ». Du solide, une ancienne athlète, pas le genre à paniquer, pas le genre à dorer la pilule non plus.
– C'est une tragédie pour le sport, dit-elle, très calme, très droite. À la délégation canadienne on sait depuis hier, poursuit-elle. On est en état de choc. Les excuses de Charlie Francis n'arrangent rien…
– Abby vous avez couru assez longtemps sur toutes les pistes, vous êtes très près des athlètes, vous savez qu'ils en prennent tous ou presque…
– Je ne peux pas dire ça, s'il vous plaît, ne m'embarquez pas sur ce terrain-là, un autre jour si vous voulez, pas ce matin, ce n'est pas « fair » …
Un peu plus loin, on fait cercle autour du confrère James Christie du Globe and Mail. James a écrit un livre sur Ben Johnson, un livre qui vient de sortir en librairie…
– Mauvais timing James ! Y'a-t-il un chapitre sur la dope dans votre livre ?
– Pas un chapitre, mais on en parle un peu. Ben dit qu'il n'a jamais touché à ça. Pouvait-il dire autre chose ?
Dans la salle où va se donner la conférence de presse, je suis assis derrière Gaétan Boucher, triple médaillé olympique, maintenant journaliste. Mais ici, c'est l'athlète qui parle : « C'est un drame pour le sport canadien. Trop souvent on aborde les grandes compétitions avec une mentalité de looser. Les succès de Ben Johnson montraient qu'on pouvait faire aussi bien que les autres. Avec cette histoire, retour à la case départ. Les gens vont dire : on sait bien maintenant pourquoi il gagnait ! »
Chut, on nous demande le silence. Ces messieurs du Comité olympique international viennent d'entrer. Le prince de je ne sais trop quoi, le docteur je ne sais pas trop qui et un gros chauve qui nous menace de ne pas commencer si on se tait pas…
Je peux m'en aller je sais ce qu'ils vont dire. Ils vont dire que c'est pour le bien du sport, et qu'ils iront jusqu'au bout.
Aveugles ou épais ?
Savent-ils, au moins, que la moitié des médailles de ces Jeux seront gagnées par des athlètes qui auront pris de la dope dans le courant de l'année ? Ils l'auront prise un peu plus tôt que Johnson voilà tout. Ben devait prendre des risques après Zurich, quand il a vu qu'il ne marchait pas. Mais cinq semaines c'était un peu juste pour que son système l'élimine…
Y a-t-il une personne sérieuse dans l'athlétisme qui ignorait que Ben chargeait ? Allons donc. Moi je le savais et je suis pas sérieux…
Alors des sourds ou des épais ?
Les deux je crois.
Des vieilles pendules en tout cas qui donnent l'heure un siècle en retard.
Wake up les boys. On n'est plus au temps des chevaliers. Regardez dans quel monde vous vivez. Pourquoi le sport serait différent ?
Réveillez-vous. Le rêve est fini.

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