Tim Merlier, sprinteur fabuleux et homme simple avec l'héritage en mémoire
Dans une petite maison blanche à la sortie de Ploegsteert, tout proche de la frontière française, bat le coeur d'une partie de l'histoire du cyclisme belge. Au bout de la rue, on aperçoit par temps clair le haut du beffroi d'Armentières. On est en pleine Flandre occidentale néerlandophone mais on y parle le français car cet endroit fait partie d'une enclave linguistique comme il y en a quelques-unes en Belgique.
Souvent, on aperçoit le maillot de champion d'Europe rouler dans le coin, le long de la Lys. Tim Merlier s'arrête dans cette petite demeure chez Jean-Jacques et Chantal, les parents de Frank Vandenbroucke. Il y a six ans, il rencontre Cameron, leur petite-fille, qui a longtemps vécu chez eux après le décès de son père. Ici, on l'appelle Tim, mais on tient à la prononciation flamande « Merlire ». Il est devenu l'enfant de la famille.
Le vélo, une histoire de (belle)-famille
Quelques jours avant le départ du Tour, le sprinteur de 32 ans est venu dîner à la maison avec Cameron et le petit Jules, âgé de deux ans. « J'essaie de ne pas le déranger en parlant toujours de vélo mais dans notre famille, c'est difficile d'y échapper, rigole Jean-Jacques. Je me souviens de Cameron quand elle m'a annoncé sa rencontre avec lui sur un cyclo-cross : "Papy, j'ai rencontré un garçon, mais bon il est cycliste." C'était inévitable chez nous. »
Il y a encore six ans, Tim Merlier ne s'imaginait pas faire une carrière sur route. Son hiver était consacré au cyclo-cross et l'été, c'était plutôt relâche. Mais René De Clercq, le frère de Mario, star du cyclo-cross dans les années 90, trois fois champion du monde, l'a découvert lors du Tour du Brabant flamand en Espoir et l'a vu batailler pour la... 18e place. « Je n'ai jamais vu quelqu'un sprinter comme ça », lâcha-t-il alors à son frère. Celui-ci lui confirma, quelques jours plus tard, que ce Tim Merlier méritait peut-être d'avoir sa chance sur la route.
Il s'entraînait alors avec Angelo De Clercq, le fils de Mario, et Massimo Van Lancker, le fils d'Eric, ancien champion des années 80 et 90. Mais il n'avait pas imaginé changer quoique ce soit à cette vie, à ses attaches à Wortegem près de Waregem où il a toujours vécu, dans le petit café Sint-Arnoldus't Pleintje tenu par sa mère, désormais devenu le lieu de rendez-vous de ses supporters qu'il retrouve parfois pour fêter ses victoires. Et il en a à fêter. Hier, il a engrangé la 62e de sa carrière, loin devant Jasper Philipsen (54) et Wout Van Aert (50). « Mais ça ne change rien à sa vie, raconte Jean-Jacques Vandenbroucke toujours aussi passionné. C'est un garçon tellement simple, il écoute bien plus mes conseils que ne le faisait Frank à l'époque. »
Au-dessus du bar de la cuisine, trône un portrait de Frank Vandenbroucke, champion disparu à 34 ans (le 12 octobre 2009). Un souvenir auquel Tim Merlier ne peut échapper. Chaque année, en juin, il participe à la cyclosportive « VDB for ever » en hommage au père de sa compagne. « Il nous pose des questions sur Frank, poursuit Jean-Jacques. Parfois quand il voit le petit Jules trotter, il rigole en disant que ça serait bien qu'il ait à la fois sa pointe de vitesse et le moteur du grand-père. »
Naissance d'un sprinteur redouté et aimé
Son parcours n'a pas toujours été aussi linéaire. Au début de la saison 2019, il s'était retrouvé sans équipe alors que Nick Nuyens, le patron de Verandas Willems-Crelan en conflit avec Wout Van Aert, avait mis la clé sous la porte. « Les frères Roodhooft (Philip et Christoph) l'avaient récupéré chez Coredon (devenu Alpecin) au mois de mai seulement, se souvient Chantal Vandenbroucke, il ne leur coûtait pas beaucoup d'argent. » Tim Merlier était censé alors se glisser dans la peau de poisson-pilote pour Jasper Philipsen.
Au bout d'un mois, il remportait un sprint royal à Bruges sur la semi-classique Elfstedenronde devant Fabio Jakobsen et le Limbourgeois, une semaine avant de décrocher le titre national devant Timothy Dupont, Wout Van Aert et Philippe Gilbert. « Tim n'était pas habitué à être au centre de l'attention, il a dû apprendre à parler devant les micros, sourit Jean-Jacques Vandenbroucke. Jusque-là, on ne faisait pas attention à lui, c'était juste un cyclo-crossman de deuxième zone. Il était sélectionné en équipe nationale mais il ne faisait jamais mieux qu'une 5e ou 6e place sur les Coupes du monde. »
Toujours en quête de héros flandriens, le public flamand s'est pris de passion pour ce garçon qui sortait (presque) de nulle part. « Parce qu'il colle à l'image qu'on se fait des champions flandriens, soutient son voisin Hugo Coorevits, ancien journaliste au quotidien flamand Het Nieuwsblad. Il est simple et vient de ce peuple de terriens qui se bat avec ses armes pour réussir. Il coche toutes les cases. »
C'est sans doute aussi pour cette raison qu'il continue à écouter les conseils de Jean-Jacques Vandenbroucke qui l'appelle deux fois par jour, le matin à 9 heures avant sa sortie d'entraînement et en début de soirée pour connaitre le déroulement de sa journée. Et si par malheur il ne répond pas, le grand-père contacte sa petite-fille Cameron avec inquiétude. « Tim est à l'écoute, bien plus que ne l'était Frank, rigole-t-il. Mais c'est surtout quand Patrick (Lefévère) est entré dans le jeu en l'embauchant en 2023 alors qu'il avait Fabio Jakobsen dans son équipe qu'il a changé de dimension. »
Sa timidité devant les micros tranche avec son caractère bien trempé au sein de l'équipe Soudal-Quick Step où il apparaît comme le modérateur, « celui qui est toujours optimiste, qui remonte le moral à tout le monde, confie un membre du staff. Vu de l'extérieur, il n'y paraît peut-être pas mais c'est lui, le moteur de la vie de l'équipe. »
À lire aussi
Van der Poel lance la rébellion
Privé d'Almeida, que perd Pogacar ?
«Chez les puncheurs, Vauquelin commence à arriver au meilleur niveau mondial»
Qui est le meilleur poisson-pilote ?
Hashtags

Essayez nos fonctionnalités IA
Découvrez ce que Daily8 IA peut faire pour vous :
Commentaires
Aucun commentaire pour le moment...
Articles connexes


Le Parisien
an hour ago
- Le Parisien
Tour de France : à quelle heure et sur quelle chaîne TV voir la 11e étape autour de Toulouse ?
Après une bonne journée de repos et avant de s'expliquer en montagne, les coureurs rouleront sur un tracé vallonné autour de Toulouse avec plusieurs difficultés comme la côte de Montgiscard (1,6 km à 5,3 %), la côte de Corronsac (900 m à 6,7 %), la côte de vieille Toulouse (1,3 km à 6,8 %) et surtout celle de Pech David (800 m à 12,4 %). Une étape qui pourrait profiter aux puncheurs ou aux sprinteurs en fonction de l'avancée d'une potentielle échappée. Après avoir chipé le maillot jaune à Tadej Pogacar le 14 juillet, Ben Healy voudra se montrer dans ces 156 km, tout comme Lenny Martinez, maillot à pois, qui aura encore l'occasion de glaner quelques points dans la course au meilleur grimpeur. La 11e étape entre Toulouse et Toulouse ce mercredi 16 juillet, sera à suivre à partir de 13 heures sur les antennes de France Télévisions (France 2 et France 3) et Eurosport 1 ainsi qu'en direct commenté sur notre site .

L'Équipe
5 hours ago
- L'Équipe
Changement de braquet avec les Pyrénées : cinq questions pour la deuxième semaine du Tour de France 2025
Après la première journée de repos, le Tour va prendre une autre dimension, mercredi autour de Toulouse puis dès jeudi dans les Pyrénées, où le Maillot Jaune Ben Healy entrera en résistance face à Tadej Pogacar et Jonas Vingegaard. En balade avec son teckel, comme le Maillot Jaune Ben Healy, ou en savourant un burger comme le champion du monde Tadej Pogacar, le peloton a profité d'une journée de repos bienvenue à Toulouse mardi, après dix étapes éreintantes et un transfert pesant, du Mont-Dore à la Ville rose, lundi. On leur souhaite d'avoir du jus, car la boucle autour de la Garonne, émaillée de bosses dans le final, mercredi, s'annonce piégeuse, avant trois jours sans répit à travers les Pyrénées, pour les premiers vrais cols du Tour 2025, qui amèneront de nombreuses réponses sur le niveau des favoris. Ben Healy peut-il garder son maillot jaune jusqu'au chrono ? Vingt-neuf secondes d'avance sur Tadej Pogacar, son dauphin au classement général : le pécule du leader Ben Healy est maigre, mais « j'ai très envie de me tester et voir ce dont je suis capable », a affirmé l'Irlandais mardi. L'étape de mercredi, une boucle autour de Toulouse où la très raide côte de Pech David (840 m à 12,4 %) fera exploser du monde, ne paraît pas insurmontable pour le puncheur. Mais c'est la première étape pyrénéenne, jeudi, avec l'enchaînement Soulor (11,8 km à 7,3 %) - Hautacam (13,5 km à 7,8 %), qui sera un tournant. Les Visma et les UAE devraient y maillocher, et on imagine alors mal le vainqueur de Vire s'accrocher assez longtemps pour sauver sa place. « Ce serait incroyable, improbable mais incroyable, qu'il arrive au contre-la-montre (vendredi) avec le Maillot Jaune, et c'est ce que nous allons tenter de réussir, positivait pourtant Jonathan Vaughters, le patron d'EF Education-EasyPost. J'ai appris à ne pas sous-estimer Ben quand il est sous pression, il arrive souvent que de grandes choses se produisent. » Healy pourrait-il tenter l'offensive en s'échappant ? Cette stratégie du quitte ou double ne lui fait pas peur, mais les UAE ont montré, lundi, qu'ils ne voulaient pas lui laisser trop de champ non plus. Qu'est-ce que Visma peut faire de plus ? On les a vus agressifs dès les premiers jours, encore à l'attaque lundi dans l'étape des puys. Les Visma-Lease a bike suivent leur plan, mais demeurent deux problèmes, quand même : Tadej Pogacar n'a jamais vacillé, et Jonas Vingegaard jamais attaqué. Pour le Slovène, cela ne dépend pas d'eux, et le staff néerlandais a promis qu'il « attaquerait tous les jours jusqu'à Paris ». Pour le leader danois, en revanche, les choses vont devoir changer. Terminé, les étapes punchy qui favorisent son rival. À partir de jeudi, vers Hautacam, puis samedi, avec Superbagnères, les Pyrénées seront là. Deux jours où le dauphin va devoir jouer les requins. Pour cela, il pourra compter « sur une équipe super forte », comme il le soulignait lundi. En particulier Matteo Jorgenson, 8e du dernier Tour, actuel 5e du général, et le seul qui force Pogacar à réagir. Mais les frelons vont aussi devoir utiliser Simon Yates. Jusqu'ici, le vainqueur du dernier Giro a gagné une étape, mais il n'a servi à rien pour son leader, soit trop devant (lundi ou vers Vire), soit lâché. Hors-jeu pour le général (à 20 minutes), le Britannique doit devenir un étage de la fusée Visma en haute montagne désormais, histoire de siphonner davantage le réservoir du champion du monde. Remco Evenepoel peut-il attaquer en montagne ? Le double champion olympique n'est pas un adepte de la langue de bois et mardi encore, lors de son point presse, il a listé ce qui lui faisait défaut pour pouvoir rivaliser avec Pogacar et Vingegaard et notamment « ce petit punch final qui (lui) manque encore par rapport aux autres années ». Ce qui ne l'empêche pas de garder en tête ses objectifs du début de Tour malgré le gros raté de la première étape, quand il avait été piégé dans le final par ses deux rivaux. « Les écarts sont ceux auxquels je m'attendais (3e à 1'29'' de Healy), même si Pogacar a un peu plus d'avance sur moi que prévu (1'), affirme-t-il avec toujours la même assurance avant de se projeter sur cette entame des Pyrénées. Parce que la véritable bataille pour le classement commencera là, dans deux jours ». Et ce qu'il a vu dans le final de l'étape de lundi, vers le puy de Sancy, lui a visiblement donné des raisons d'espérer. « Quand j'ai attaqué hier (lundi), Pogacar et Vingegaard n'ont pas réagi, c'est bon à savoir », analyse-t-il en espérant sans doute profiter de la rivalité entre les UAE et les Visma. « Des coureurs comme (Sepp) Kuss et (Matteo) Jorgenson finissent aussi par s'épuiser à un moment donné », même s'il connaît déjà le scénario, « ils essaient de faire la même chose que (Primoz) Roglic avec (Jonas) Vingegaard en 2022 mais si Pogacar peut les contrer, tous ces efforts seront inutiles au final. » Quelles opportunités pour les Français ? Elles seront rares, très rares, pas besoin de tourner mille ans autour du pot. Le niveau incroyable affiché par Tadej Pogacar et Jonas Vingegaard exclut forcément une victoire s'il y a bataille entre les favoris au sommet d'une bosse ou d'un col. Le salut français - 22 étapes sans victoire, la quatrième plus longue disette du pays dans son histoire sur le Tour, mais loin des 39 sans succès entre la 9e étape du Tour 1998 et la 6e du Tour 2000 - passera donc par une échappée victorieuse. Kévin Vauquelin (Arkéa-B & B Hotels), qui incarne peut-être la meilleure chance au regard de sa forme, est encore trop proche au général (6e à 2'26'') pour avoir un bon de sortie. Lenny Martinez (Bahrain Victorious), en montagne, dans sa quête d'une victoire et d'un maillot à pois, peut se retrouver en bonne posture à Hautacam (jeudi) ou Superbagnères (samedi). Mais il faudra vraiment être très fort, les membres des échappés ces derniers jours (Healy, Arensman, S. Yates) étant toujours de sacrés clients. Romain Grégoire, ce mercredi dans le final rugueux de Toulouse, peut avoir une carte à jouer en tant que puncheur. Mais, avec le chrono de vendredi à Peyragudes réservé aux cadors et l'étape de Carcassonne dimanche aux baroudeurs, la disette pourrait s'étendre... Doit-on s'attendre à de gros écarts sur le chrono ? C'est un retour vingt ans en arrière qu'offrira le contre-la-montre de Loudenvielle, avec l'ascension de Peyragudes jusqu'à l'altiport (8,1 km à 7,6 % sur une distance totale de 10,9 km). Le passé, marqué par les affaires de dopage, est à prendre avec des pincettes, mais pas le choix : le dernier chrono sur un vrai col remonte à 2004 et la victoire de Lance Armstrong (dont les résultats ont été annulés depuis) à l'Alpe-d'Huez. Sur cette 16e étape (ce sera la 13e en 2025), l'Américain avait dominé Jan Ulrich de 1'01'', quand le 3e, Andreas Kloden, terminait à 1'41''. Plus proche, la 18e étape du Tour 2016, entre Sallanches et Megève, proposait un dénivelé positif similaire (676m contre 645 samedi) sur une distance un poil plus longue (15,5 km), et Christopher Froome avait battu Tom Dumoulin de 21 secondes et Fabio Aru de 33. Le tableau de 2025, avec toutes les réserves possibles du fait des inconnues (état de fatigue physique et psychologique, écart entre les deux favoris au départ), laisse augurer de deux choses : Tadej Pogacar et Jonas Vingegaard devraient être assez proches l'un de l'autre, et distancer de loin (au-delà de la minute) la concurrence, qui ne pourra pas s'accrocher dans les roues, comme sur une étape en ligne. Le plus gros risque pèse sur les sprinteurs, qui devront se battre pour ne pas terminer hors délai (deux dans ce cas en 2004). À lire aussi Malgré Vauquelin et Martinez, les Français désarmés De Lie : « Le mental brûlait à feu doux » Une étape «sous contrôle» pour UAE Emirates Visma, un feu d'artifice sans bouquet final

L'Équipe
8 hours ago
- L'Équipe
Tour de France 2025 : Malgré les éclaircies Kévin Vauquelin et Lenny Martinez, les Français désarmés sur la première semaine
Si l'ambitieux Kévin Vauquelin et l'opportuniste Lenny Martinez ont su tirer profit de la concurrence ardue du Tour de France, les coureurs tricolores ont, lors de cette première semaine, avancé impuissants avec le peu d'armes qu'ils ont. La statistique tracasse, forcément : depuis le top départ du Tour de France, aucun Tricolore n'est grimpé sur un podium d'étape. On peut même en rajouter des couches, rappeler que l'année dernière, avant le premier jour de repos, les Bleus avaient déjà gagné trois fois ; ou ressasser la série en cours des 26 années d'affilée - soit depuis 1999 - avec au moins une victoire française par édition. Tout tristoune soit-il, ce constat est un peu décalé par rapport à la réalité. Parce que les Français ont débarqué dans un état conforme à leurs attentes et capacités, qu'ils n'ont pas lésiné sur leurs efforts, mais leurs velléités ont simplement été éteintes par des forces de la nature qui punissent sur n'importe quel terrain. Kévin Vauquelin est l'un de ceux qui surnagent, avec fraîcheur et légèreté, dans une nouvelle peau de postulant aux bouquets depuis ses deuxièmes places sur le Tour de Suisse, la Flèche Wallonne et sa victoire sur la 2e étape l'an dernier. Sauf que sa position est réversible, avec côté face de plus en plus de groupies - « J'ai vu une montgolfière avec ma gueule dessus, vous vous rendez compte ? » - mais côté pile un étiquetage encombrant. Dans le final onduleux de la 2e étape, le Normand de 24 ans a échoué dans ses quatre offensives. Trop intrépide, parfois mal placé, mais surtout bridé : « C'est normal que je sois marqué après ce que j'ai fait, on m'a beaucoup vu. » Les puncheurs en second rideau Trois fois dans le top 10, Vauquelin s'est réconforté avec le maillot blanc et une place sur le podium du général, désormais sous la coupe de Remco Evenepoel. Ses compatriotes puncheurs sont eux aussi charpentés, et leur audace décomplexée leur offre des résultats au rang de ceux ambitionnés, mais plus eût tenu d'une prouesse. « Ce sont des rock stars devant », nous a concédé Marc Madiot. Romain Grégoire (4e dans le Pas-de-Calais, 5e à Rouen), Aurélien Paret-Peintre ou Julian Alaphilippe (5e et 7e à Boulogne-sur-Mer) flottent avec les moyens du bord. Côté animation, les baroudeurs français se sont payé le plaisir de quelques bouffées d'air frais à l'avant, sans prétention - les copains de TotalEnergies Mattéo Vercher et Mathieu Burgaudeau sur la 8e étape ou Ewen Costiou en terre bretonne la veille - mais ont laissé passer, puisqu'il y en a eu, les vrais bons coups. Quand Ben Healy a triomphé au prix d'une longue cavalcade en solo vers Vire Normandie, s'extirpant de l'échappée à 42 km du bout, aucun Français n'est parvenu à s'insérer parmi les fuyards, réunis dans la côte de la Rançonnière après deux heures de bagarre. Deux jours plus tard, Lenny Martinez, avec Alex Baudin (EF Education - Easy Post) et Valentin Paret-Peintre (Soudal - Quick Step), s'immisçait cette fois dans le groupe de fugue gagnant. La possibilité d'un succès s'est effilochée avant le final au Mont-Dore pour le Cannois - il dira que « les coureurs devant étaient trop forts pour moi » - qui a, par contre, enfilé le maillot à pois, 47 ans après son grand-père Mariano, le jour du 14 juillet. Le petit modèle de Bahrain-Victorious (22 ans), trois fois vainqueur en WorldTour cette saison, a décelé la bonne brèche pour éclaircir son début de Tour ombrageux. Les sprinteurs neutralisés L'autre embellie bleue, et c'est plus inhabituel, est venue du contre-la-montre à Caen, avec la 4e place du champion de France Bruno Armirail (Décathlon-AG2R), à deux secondes du podium, et la 5e de Kévin Vauquelin, déchaîné par un public en pâmoison dans « sa » Normandie. Rayon sprints massifs, c'est niet. Même si les gros calibres français n'ont pas été vernis : sur la chaotique 3e étape vers Dunkerque, Émilien Jeannière (TotalEnergies) - qui jettera l'éponge le lendemain -, Bryan Coquard (Cofidis) et Paul Penhoët (Gropama-FDJ) se sont heurtés au bitume à l'entrée de la dernière ligne droite. Le Breton de 23 ans, une des seules jeunes pousses du sprint bleu blanc rouge, n'a pas été gâté par la chance, en crevant samedi à Laval à dix kilomètres de l'arrivée. Il se rattrapera avec un top 5 à Châteauroux. Quant au vétéran Coquard, il s'est fait piéger par le vent sur la 1re étape, avant d'être mêlé à deux incidents, dont un qui a mené bien malgré lui à l'abandon de Jasper Philispen (Alpecin-Deceuninck). « Je vais courir pour gagner une étape » Kévin Vauquelin Si des arguments, dont cette mauvaise fortune, se valent pour justifier cette défaillance - génération fantôme, fossé physique face aux mastodontes, effectif sous-dimensionné à l'heure où le pur sprinteur est en voie de disparition - Arnaud Démare, hors du coup cette année (13e au mieux à Châteauroux), reste le dernier Français vainqueur d'une arrivée massive sur la Grande Boucle (2018). Mais Paris est encore loin. Kévin Vauquelin, délesté du poids du podium - il est déjà redescendu à la 6e place après la première escapade en montagne - pourra remettre les watts sans retenue. « Je vais courir pour gagner une étape et on verra ce que ça donnera », a-t-il promis en point presse ce mardi. De toutes les façons, les Bleus risquent - et ça n'étonnera personne - de repartir sans honneur au général : Guillaume Martin-Guyonnet, 13e l'an dernier et toujours à l'affût d'un accessit au classement final, est 16e à plus de 10 minutes après avoir souffert au Mont-Dore (25e). Aussi, la meilleure situation est-elle celle de Jordan Jegat (TotalEnergies), le discret Morbihannais qui, pour son deuxième Tour de France, est 14e (+ 1'30''), à l'orée de la haute montagne pyrénéenne qui lui sied bien. À lire aussi De Lie : « Le mental brûlait à feu doux » Une étape «sous contrôle» pour UAE Emirates Visma, un feu d'artifice sans bouquet final Healy, l'un des pires compagnons d'échappée