
Leaders européens : Keir Starmer
Des rumeurs persistantes collent à la peau du premier ministre britannique, Keir Starmer, depuis des années.
Selon la légende, l'ancien avocat spécialisé en droits de la personne, qui, avant de se lancer en politique, a défendu la veuve et l'orphelin contre les grandes sociétés pétrolières et le géant McDonald's, aurait inspiré un des personnages les plus connus de la comédie romantique Le Journal de Bridget Jones, Mark Darcy.
Taciturne, un peu coincé, Mark Darcy, joué par Colin Firth, est le bon gars qui défend des causes justes à travers le monde tout en ne laissant jamais tomber la Londonienne maladroite, et ce, même si cette dernière lui brise le cœur à répétition. Il est l'incarnation de l'homme droit.
L'auteure de la série à succès, Helen Fielding, a toujours entretenu le flou sur l'origine du personnage, mais n'a pas hésité récemment à comparer Keir Starmer au personnage fictif. « [Keir Starmer] est un homme bon, honnête et intelligent, mais il est tellement coincé. J'ai toujours envie de lui dire de desserrer sa cravate », a dit l'auteure le mois dernier.
Ces jours-ci, Keir Starmer doit s'accrocher à cette comparaison largement flatteuse. Élu il y a un an à la tête d'un véritable raz-de-marée travailliste après 14 ans de règne tumultueux du Parti conservateur, l'actuel locataire du 10, Downing Street est aujourd'hui le premier ministre le moins populaire de Grande-Bretagne depuis que les sondages de popularité existent.
Selon le site YouGov, qui a publié ses derniers résultats le 16 juillet, tout juste 23 % des Britanniques sondés voient d'un œil favorable le premier ministre, soit 20 points de moins qu'à la même date l'an dernier. Une majorité d'électeurs considèrent que le gouvernement qu'il dirige est tout aussi chaotique, sinon plus, que les gouvernements des tories qui l'ont précédé.
Les dernières semaines ont été particulièrement ardues pour le premier ministre qui s'est cassé les dents en tentant de faire passer une réforme de l'aide sociale qui aurait amputé de 5 milliards de livres sterling les allocations aux personnes handicapées. La mesure d'austérité a créé une véritable levée de boucliers et d'épées dans les rangs du Parti travailliste – qui regroupe à la fois des élus centristes et de gauche – et ébranlé le leadership du chef du parti. En tout, 47 députés d'arrière-ban se sont opposés à la mesure.
Cette semaine, Keir Starmer a tenté de rétablir son autorité, montrant la porte du caucus à quatre députés rebelles et en dépouillant trois autres d'une tâche honorifique. « Ridicule », « petit ». « vengeur » et « faible » ont été parmi les qualificatifs attribués à M. Starmer par les députés éconduits, qui se sont confiés aux journalistes qui couvrent Westminster. Certains songeraient déjà à le remplacer à la tête du gouvernement.
S'il a la vie dure à la maison, Keir Starmer mise davantage sur la scène internationale. Depuis son arrivée au pouvoir, il a enchaîné 32 voyages à l'étranger. Il a notamment été le premier dirigeant mondial à conclure une entente commerciale avec l'administration Trump alors que les autres s'arrachent les cheveux. Il a aussi réchauffé passablement les relations entre le Royaume-Uni post-Brexit et l'Union européenne.
« Beaucoup de gens se demandent cependant si vous ne passez pas trop de temps avec vos amis Donald [Trump], Volodymyr [Zelensky] et Emmanuel [Macron], et pas assez avec [vos amis en Grande-Bretagne] », a dit Nick Robinson, de la BBC, à Keir Starmer lors d'une entrevue marquant sa première année au pouvoir. « C'est important d'avoir une bonne relation avec le président Trump. C'est dans l'intérêt national », a répondu le premier ministre, affirmant que l'amitié personnelle qu'il a avec le chef de la Maison-Blanche a aidé son pays.
Cette amitié entre les deux hommes en sidère plus d'un. Fils d'un ouvrier et d'une infirmière, ayant gravité dans les cercles socialistes et défendu des accusés en Afrique pour leur éviter la peine de mort, Keir Starmer n'a à première vue pas grand-chose en commun avec le magnat de l'immobilier américain, né de la cuisse de Jupiter.
« Nous sommes des gens très différents, mais je comprends ce qui ancre le président Trump. La première fois que je lui ai parlé, on venait de lui tirer dessus. Je voulais savoir comment ça avait affecté sa famille. L'an dernier, j'ai perdu mon frère le jour du Boxing Day [26 décembre] et il m'a appelé le surlendemain », fait valoir le premier ministre qui dit partager les « valeurs familiales » de l'élu américain.
Beaucoup de critiques, notamment parmi ses anciens collègues du milieu des droits de la personne, lui reprochent plutôt de sacrifier ses véritables valeurs sur l'autel de la vanité de Donald Trump afin d'éviter les droits de douane et de démontrer que la Grande-Bretagne est le principal allié des États-Unis.
« En se précipitant pour conclure un 'accord' commercial avec les États-Unis – sans doute dans l'intérêt immédiat de l'industrie britannique –, le Royaume-Uni a semblé cautionner une violation majeure du système commercial mondial », note Jill Rutter, une analyste senior à l'Institute for Government de Londres. « De même, en refusant de dénoncer la rhétorique du 51e État de l'administration Trump concernant le Canada, le Royaume-Uni a failli à son devoir de soutien envers l'un de ses plus proches alliés », continue l'ancienne haute fonctionnaire.
On se rappellera notamment que lorsqu'un journaliste a interrogé Keir Starmer sur les menaces d'annexion que le président américain fait planer sur le Canada, le premier ministre britannique l'a accusé de vouloir « trouver une division [entre lui et le président américain] qui n'existe pas ». Et tant pis pour la souveraineté canadienne !
Mark Carney, qui a dirigé la Banque d'Angleterre avant de devenir premier ministre, n'a pas été impressionné non plus quand son vis-à-vis britannique, par l'entremise du roi Charles III, a convié le président américain à une seconde visite d'État qui doit avoir lieu en septembre. Et tant pis pour la solidarité au sein du Commonwealth.
Keir Starmer a peut-être des traits du Mark Darcy de Bridget Jones, mais il n'a décidément pas grand-chose en commun avec un autre personnage légendaire de la plus célèbre des comédies romantiques britanniques. Dans Love Actually, le premier ministre du Royaume-Uni, incarné par Hugh Grant, envoyait promener le président américain qui débordait d'arrogance. Et voyait sa popularité grimper d'un coup.
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