Laborantin, décharge et passion dévorante : Gaëtan Barlot, une surprise comme capitaine des Bleus
À quoi tient un destin ? Aux mots prévenants d'un entraîneur qui regarde à côté du cadre. Celui avec la foi du professeur qui se fout que le coloriage déborde un peu parce qu'il est appliqué avec énergie et surtout passion. Gaëtan Barlot, 10 sélections, 28 ans, sera le 100e capitaine de l'histoire de l'équipe de France, samedi : « J'ai pensé à toutes les bonnes années, à toutes les personnes qui m'ont permis d'en arriver là. »
Justement là où d'autres ne pensaient peut-être jamais le voir, il y a une paire d'années, lui, l'aspirant pro. « Il y a huit ans jour pour jour, j'étais dans le bureau du coach de Colomiers et on discutait pour savoir si j'allais en Fédérale ou si je m'accrochais en Espoirs alors que c'était compliqué, rembobine-t-il. Et là, je deviens capitaine de l'équipe de France... » Un immense sourire barre son visage. Pincez-le, il rêve ? Non, pas du tout. Parce que ce fou de rugby jusqu'à la déraison a toujours eu confiance en lui.
Retour dans le bureau du coach de Colomiers. On est en 2017, il a 20 ans, a fini ses études, et il n'y a plus de contrat Espoirs disponible : « Je touchais 200 € à cette époque et je me disais : "Qu'est-ce que je vais faire l'année prochaine ?" Parce que 200 €, pour vivre... J'ai dit à mon coach que j'allais aller en Fédérale pour pouvoir travailler à côté. » Fabien Berneau, son entraîneur d'alors, refuse l'idée. « Il m'a dit : "Non, vraiment, accroche-toi ! Tu peux le faire !" »
« De 8 heures à midi, j'étais au centre de formation, et de 14 heures à 18 heures, au labo. Puis le soir, je retournais en Espoirs pour disputer mes matches le week-end »
Gaëtan Barlot
Barlot (qui quittera Castres cet été pour l'UBB) doit travailler malgré tout, mais poursuit en Espoirs sur la base de triples journées : « J'ai été technicien de laboratoire pendant un an à Toulouse, au centre de recherche sur les analyses de sang, d'urine. De 8 heures à midi, j'étais au centre de formation, et de 14 heures à 18 heures, au labo. Puis le soir, je retournais en Espoirs pour disputer les matches le week-end. »
Une abnégation payante puisqu'il accrochera ses premières feuilles en Pro D2 avant d'être repéré par Pierre-Henry Broncan à Castres. « Je le connaissais car un vieux dirigeant de Colomiers m'avait dit de venir voir deux gamins en Espoirs : lui et Bastien Vergnes-Taillefer. J'ai réussi à convaincre (le président) Pierre-Yves Revol de le prendre, se souvient l'ex-manager du CO. Il a une histoire de dingue. Il n'a pas été gardé par Clermont en Crabos. Il arrive à Colomiers pour jouer en Espoirs, mais sans être au centre de formation. Comme il est intelligent, il avait ce double projet et a rejoint la région de Toulouse pour poursuivre ses études. Il a obtenu un diplôme de laborantin. Ce qui est fou, c'est que Colomiers ne voulait pas le garder, et puis il y a eu des blessures, des suspensions au talonnage, il a eu sa chance et il a joué en Pro D2. »
«Ce n'est pas un expansif, mais c'est un courageux, un garçon qui a été opéré des cervicales et qui doit signer une décharge pour jouer au rugby »
Pierre-Henry Broncan, son ancien entraîneur à Castres
En Top 14, Broncan le fait jouer immédiatement. Malgré un gabarit moins imposant que la concurrence (1,84 m, 107 kg), ses qualités sont nombreuses : « C'est un gamin que les entraîneurs adorent. Il ne râle jamais, il travaille dur. Sur le terrain, il a une grosse activité, il plaque beaucoup, il avance tout le temps, et en mêlée, il est costaud », énumère son ex-entraîneur au CO avant d'évoquer un défaut rédhibitoire au poste : « En revanche, il ne savait pas lancer ! Avant qu'il arrive à Castres, j'ai donc appelé William Servat. Je lui ai demandé s'il pouvait s'en occuper, lui faire travailler la touche. »
L'ex-talonneur des Bleus, aujourd'hui adjoint dans le staff de Fabien Galthié, ne se fait jamais prier pour aller faire quelques lancers, même la nuit tombée. « Gaëtan est un taiseux, un fils d'agriculteur. Ce n'est pas un expansif, mais c'est un courageux, un garçon qui a été opéré des cervicales et qui doit signer une décharge pour jouer au rugby, il est classé G2 (*), poursuit Broncan. Je suis content de ce qui lui arrive. Il le mérite. »
Quand le sélectionneur lui a annoncé son capitanat, Barlot a instinctivement pensé à celui qui l'avait extrait de la Pro D2 pour le Top 14 : « Je suis arrivé comme jeune joueur. En première ligne, c'est toujours un peu difficile, mais il m'a donné beaucoup de confiance. » Il pense à ses éducateurs, et surtout à ses parents : « Ils t'emmènent à l'école de rugby, ils ont fait tellement de trajets. Maintenant que j'ai des enfants, je m'en rends compte. Et quand je gagnais 200 €, ils m'aidaient financièrement. Même pour eux, c'est une grande fierté. »
« Petit, j'aurais aimé qu'un gars comme ça vienne me coacher »
Gaëtan Barlot, au sujet de son cousin de 21 ans qui entraîne les jeunes
Un débit mitraillette, le regard plongé dans le vôtre, le nouveau Bordelais apprécie à sa juste valeur la reconnaissance de l'encadrement tricolore : « Je ne suis pas le plus capé sur cette tournée, mais cela me touche et c'est une récompense. À chaque fois que j'ai porté ce maillot, j'ai tout donné. »
Abonné aux tournées d'été (Australie 2021, Argentine 2024) et sur la photo mais en costard des Grands Chelemards 2022, il prend tout. Justement parce qu'il sait d'où il vient et revient, lui qui regarde la Pro D2 les jeudis et vendredis soir avec sa femme, mordue elle aussi, puis s'infuse encore le Top 14 en plus de son match à lui. Et si vous traînez le dimanche autour des mains courantes de Fédérale, vous aurez encore une chance de le croiser. « En vrai, c'est ma passion, j'adore ça. Je parle ici à des mecs qui sont moins rugby que moi (il se marre). Mais toute ma famille vit rugby, mon cousin a 21 ans et entraîne. Il me demande des conseils, quand je peux je file un coup de main. Je me régale. Et petit, j'aurais aimé qu'un gars comme ça vienne me coacher. »
« Je ne vais pas me prendre la tête. Et puis c'est l'équipe de France, je joue avec quelques bons joueurs »
Samedi (9h05), il disputera donc le second test avec ses nouveaux galons. Une responsabilité qui ne le tétanisera pas. « Je ne vais pas me prendre la tête. Et puis c'est l'équipe de France, je joue avec quelques bons joueurs, glisse-t-il dans un sourire. Dans le vestiaire, je prendrai la parole pour rappeler les points clés de comment jouer les Blacks. Un petit rappel, mais rien de plus. » Après la courte défaite de Dunedin (31-27, samedi dernier), une certitude l'anime : « On va les respecter, mais on va les agresser. On va être là samedi. Je le sais. Je le sens. » Parole de centurion.
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