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100 % couvert, mais pas 100 % gratuit

100 % couvert, mais pas 100 % gratuit

La Presse27-07-2025
Au Québec seulement, on estime que 3 millions de personnes sont admissibles au Régime canadien de soins dentaires.
Une bonne idée mal expliquée. C'est ainsi qu'on pourrait résumer le Régime canadien de soins dentaires (RCSD). De nombreux assurés ont compris qu'ils n'auraient pas un sou à verser pour un plombage ou une nouvelle prothèse. Mais en réalité, ce n'est pas gratuit. Même quand le service est couvert à 100 %.
Depuis environ deux mois, tous les Canadiens – peu importe leur âge – sont couverts par une assurance dentaire. Soit par le privé, soit par le régime public.
Au Québec seulement, on estime que 3 millions de personnes sont admissibles.
Pour tous ceux qui n'avaient pas les moyens d'obtenir des soins dentaires ou de nouvelles prothèses, ce régime est une vraie bénédiction.
Le hic, c'est que la couverture offerte provoque de la confusion. Tout ça parce que les lettres d'Ottawa n'étaient pas assez détaillées. Résultat, elles ont induit des assurés en erreur.
Tellement qu'alors que je sortais de chez mon dentiste, il y a quelques jours, la réceptionniste m'a fortement suggéré d'écrire une chronique sur le RCSD. Elle n'en peut plus d'expliquer aux patients assurés qu'ils devront sortir leur carte de crédit ou de débit. Même s'ils sont couverts à 100 %, en théorie, par le régime public.
J'ai contacté trois autres cliniques dentaires. Leurs réceptionnistes m'ont toutes raconté la même chose : les clients ne comprennent pas pourquoi ils doivent payer une partie de la facture. « C'est toujours une surprise, m'a dit Catherine. Il faut expliquer et réexpliquer. Il y a beaucoup de patients qui sont fâchés. »
Bref, l'assurance dentaire ne fonctionne pas comme l'assurance maladie. Ceux qui croient l'inverse ne peuvent pas être blâmés.
Santé Canada, quand ils ont fait la première communication, ça disait que c'était gratuit. Qu'il n'y avait pas de frais. C'est ça que les gens ont compris au début. Et il y a encore des gens qui croient ça.
La Dre Marie-Claude Desjardins, présidente de l'Association des chirurgiens dentistes du Québec
Le « problème de communications » se fait évidemment sentir d'un océan à l'autre, se désole Aaron Burry, DG de l'Association dentaire canadienne. « On entend ça toute la journée, de tous les cabinets au Canada. Ils passent en moyenne entre 30 et 40 minutes par patient pour expliquer que ce n'est pas 100 % gratuit. » Même si c'était deux fois plus court, ce serait encore beaucoup. Surtout dans le contexte où la clientèle est beaucoup plus nombreuse.
Ce n'est pas différent pour les denturologistes. En fait, c'est peut-être même pire parce que les aînés – plus nombreux à avoir des prothèses dentaires – ont été les premiers à adhérer au régime, au moment où il était inconnu.
« Les patients nous obstinent. Ils nous disent que c'est écrit 100 % sur leur carte [de membre]. Il faut toujours se justifier, c'est lourd », m'a confié la denturologiste Linda Gaudreault, qui possède un cabinet à Chicoutimi-Nord. Pas moins de 95 % de ses clients sont assurés par le public, ce qui lui demande un temps fou. « J'ai pris trois semaines de vacances parce que j'étais au bout du rouleau et je pense revenir à quatre jours. »
En réalité, le régime couvre jusqu'à 100 % des frais admissibles, selon vos revenus familiaux. Le mot « admissible », ici, change tout.
Ottawa a établi une grille tarifaire pour chaque service couvert : examen, radiographie, anesthésie, dentier, couronne… Mais les dentistes utilisent une autre liste avec des prix plus élevés. « Nous, ce qu'on dit, c'est que la facture peut être couverte jusqu'à 80 % », raconte la Dre Desjardins. En d'autres mots, l'écart – de 20 % en moyenne – sort directement des poches du patient assuré à 100 %.
Pour deux prothèses, par exemple, la facture peut grimper à 800 $ ou même 1000 $ selon les régions du Québec.
L'autre problème, avec le régime public, ce sont les réponses surprises. Au privé, la liste de ce qui est couvert est détaillée. C'est noir ou blanc. Avec le RCSD, « 50 % du temps c'est refusé, ce n'est pas couvert, mais les raisons ne sont pas toujours claires », rapporte Aaron Burry. Santé Canada a affirmé à Radio-Canada que 52 % des demandes qui nécessitaient une préautorisation avaient été rejetées entre novembre 2024 et juin 2025.
Pourtant, la liste des documents et des radiographies devant être soumis à l'assureur (Sun Life) pour une préapprobation du devis est longue. Trop, au goût des professionnels.
Il faut tout justifier comme jamais ! C'est pas compliqué : on s'est transformés en agents d'assurance.
Linda Gaudreault, denturologiste
Les dentistes ont réussi à faire alléger leur fardeau, mais ils souhaitent encore des améliorations.
L'incompréhension des patients, la paperasse à gérer, le temps de réponse qui se compte en semaines, voire en mois, les décisions en apparence aléatoires… tout ça est un fardeau épuisant, poursuit la professionnelle du Saguenay. « Le plus difficile, c'est la frustration des clients. C'est très lourd pour les professionnels. On est tous au bout du rouleau. » Santé Canada soutient pourtant que 80 % des demandes sont traitées en sept jours.
Le programme est relativement nouveau. On peut lui pardonner de ne pas avoir été parfait le premier jour, mais il serait grand temps que des communications plus claires soient transmises aux personnes concernées. Cela éviterait d'énormes pertes de temps. Quand on parle de la productivité stagnante au Canada depuis 20 ans, voilà une belle occasion d'amélioration qui ne coûterait pas une fortune.
Je vous laisse – avant de partir en vacances – sur une réflexion soumise par Geneviève, mère d'un jeune adulte qui étudie au doctorat. Puisqu'il a accès à des assurances à l'université par ses frais de scolarité (près de 300 $ par année), il ne peut bénéficier du régime public. Or, les assurances du fédéral sont gratuites et le taux de couverture est supérieur, ce qui lui fait dire que « c'est injuste ». Qu'en pensez-vous ?
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