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Genève: un Airbus a frôlé le crash dans le Léman

Genève: un Airbus a frôlé le crash dans le Léman

24 Heures2 days ago
Atterrissage raté à Genève

À quelques mètres du Léman, un Airbus a frôlé le crash à Versoix
Un an après un incident similaire avec un avion Easyjet, un vol d'Aegean Airlines a failli finir dans le lac. L'événement, survenu en novembre 2024, n'est rendu public que maintenant.
Marc Renfer
C'est cet avion – immatriculé SX-NET – qui a frôlé l'accident en atterrissant à Genève.
Nolan Jungo - GVA Spotter
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En bref : Un avion d'Aegean Airlines est descendu dangereusement à 80 mètres au-dessus du Léman.
Les systèmes d'alerte automatiques ont averti l'équipage d'un danger imminent, qui a remis les gaz.
Deux incidents similaires ont eu lieu en un an.
Le 27 novembre dernier, à 10 h, le vol A3854 d'Aegean Airlines en provenance d'Athènes s'approche de Cointrin. Ce matin-là, la météo est calme: plafond nuageux bas, mais visibilité correcte. Rien ne laisse présager la situation critique qui va suivre.
Les passagers se souviennent peut-être de ce moment surprenant: alors que l'avion s'apprête à se poser après une rapide descente, il remet soudainement les gaz et reprend de l'altitude. Ce qu'ils ignorent sans doute, c'est qu'ils se trouvaient tout proches d'un impact avec la surface du Léman.
La procédure de remise de gaz en soi n'a rien d'inhabituel. Ce qui l'est, ce sont les circonstances dans lesquelles elle s'est produite. Selon une analyse des données de vol publiquement disponibles menée par la «Tribune de Genève», l'appareil est descendu jusqu'à environ 80 mètres au-dessus du Léman, à un endroit, juste en face de Port-Choiseul, où il aurait dû voler environ 300 mètres plus haut, lors d'une descente standard.
À quelques secondes d'un drame
Livré à la compagnie quelques semaines plus tôt, cet Airbus A320neo flambant neuf aurait pu percuter le Léman dix secondes plus tard et heurter l'eau à environ 500 mètres des rives et des habitations de Versoix s'il n'avait pas corrigé sa trajectoire. Sachant qu'un moteur met environ cinq secondes à atteindre sa poussée maximale. La marge de sécurité était quasi nulle.
La trajectoire du vol.
Jusqu'ici, seuls les professionnels directement impliqués connaissaient l'existence de cet incident. Il a été rendu public le 24 juillet 2025 sur le site du Bureau d'enquêtes et d'analyses français (BEA), qui précise que l'enquête est menée par les autorités suisses. Au moment de publier ces lignes, aucune information n'a été diffusée sur le site du Service suisse d'enquête de sécurité (SESE).
Contacté, le SESE explique que la publication par le BEA fait suite à une notification formelle transmise par ses soins à l'autorité française, conformément aux règles internationales. La France, en tant qu'État constructeur de l'appareil, est en effet autorisée à participer à l'enquête.
«Ce n'est que dans une étape ultérieure qu'un rapport préliminaire sera publié en Suisse, ce qui sera fait prochainement», indique Daniel W. Knecht, chef du domaine aviation. Il souligne également qu'«il n'est pas inhabituel que l'enquête préliminaire (…) prenne plusieurs mois». Le SESE «ne peut pas donner plus d'informations et de détail sur cet incident grave».
Un précédent chez Easyjet
L'événement du vol Aegean rappelle un précédent récent: le 5 novembre 2023, un A320neo d'Easyjet en provenance d'Édimbourg s'était aussi dangereusement approché du Léman, descendant à moins de 230 mètres d'altitude au-dessus du lac, alors qu'il aurait dû se situer à plus de 750 mètres.
Là aussi, une alerte avait été déclenchée par la tour de contrôle genevoise, et l'équipage avait immédiatement réagi en remettant les gaz à 12 kilomètres de la piste. L'incident avait marqué les esprits: de mémoire de contrôleur, du jamais-vu à Genève. Personne n'imaginait qu'un an plus tard un scénario similaire – et plus critique – allait se reproduire.
Un pilote de ligne familier des approches genevoises affirme que le cas Aegean a été «très proche de la catastrophe». «Ils ont dû transpirer, aussi bien dans le cockpit que dans la tour», résume-t-il en ajoutant que «la marge était nettement plus faible que dans le cas Easyjet».
Trop haut, puis «passé à travers»
Les données de vol confirment qu'après un virage au-dessus des Alpes, l'appareil grec s'est aligné sur l'axe de la piste, mais trop haut par rapport au plan de descente.
En clair, l'appareil n'était pas correctement aligné pour rejoindre l'ILS, un système de guidage qui agit comme un corridor invisible vers la piste. Pour que l'approche automatisée s'enclenche, l'avion doit être parfaitement positionné, tant en hauteur qu'en direction.
C'est en face de Port-Choiseul que l'airbus a frôlé le Léman.
Magali Girardin
Selon les premiers éléments à disposition qui nous ont été rapportés, la tour de contrôle aurait alors proposé deux options: reprendre de l'altitude pour se repositionner, ou poursuivre la descente en corrigeant l'approche. Le commandant opte pour cette deuxième option. Pour rejoindre le plan de descente, l'équipage engage alors un taux de descente particulièrement élevé. Trop élevé.
Résultat: l'avion rate son interception, «passe à travers» et continue de plonger sous le plan de descente. C'est ce que résume la seule ligne de commentaire officiel publiée à ce jour par le BEA: «En approche […], l'avion descend bien en dessous du plan de descente et l'équipage procède à une remise de gaz.»
Les alarmes retentissent
Quelques secondes plus tard, les garde-fous automatiques se déclenchent. Dans le cockpit, l'alarme d'avertissement de proximité du sol retentit: «Terrain! Terrain! Pull up! Pull up! (ndlr: Sol! Sol! Remontez immédiatement!)» Au même moment, la tour de contrôle reçoit une alerte de basse altitude dangereuse, confirme Skyguide, l'aiguilleur du ciel helvétique.
Les contrôleurs demandent à l'équipage de reprendre de l'altitude sans délai. Pendant d'interminables secondes, aucun retour ne parvient au contrôleur. Un silence qui laisse craindre le pire – avant que l'Airbus ne réapparaisse, moteurs hurlants.
L'appareil reprend de l'altitude, contourne le bassin lémanique et revient se poser sans encombre dix-huit minutes plus tard. Selon nos informations, l'avion est resté cloué au sol, et des enquêteurs venus de Berne ont immédiatement saisi les enregistreurs et interrogé l'équipage.
Une tour de contrôle sous le choc
Par souci de sécurité et comme le prévoit le protocole après un événement à forte charge émotionnelle, Skyguide a relevé et remplacé l'équipe de contrôle.
Sollicitée, Aegean Airlines indique par écrit: «Nous avons récemment été informés par les autorités suisses qu'une enquête avait été lancée concernant le vol A3854 du mois de novembre 2024.» La compagnie précise qu'elle avait déjà engagé une enquête interne et qu'elle coopère pleinement avec les autorités compétentes et a transmis toutes les informations nécessaires. En revanche, elle n'a pas répondu à nos questions sur le nombre de passagers, ni sur d'éventuelles mesures prises à l'égard de l'équipage.
La survenue de deux incidents classés graves, sur la même approche et à moins d'un an d'intervalle, étonne. «Deux cas ne font pas une série, tempère un expert du secteur, mais cela reste très préoccupant.»
Des approches raccourcies
Les enquêtes devront déterminer les causes précises et établir d'éventuelles responsabilités. Mais un point commun ressort déjà: dans les deux cas, les avions suivaient des trajectoires courtes en approche finale de la piste de Cointrin.
Ces approches «raccourcies», bien que conformes et régulièrement pratiquées, nécessitent une réelle maîtrise technique, notamment en raison du relief.
«Vu le Jura et les Alpes, ça descend fort, et ça demande de savoir gérer à la fois la décélération et la pente», explique un pilote de ligne. «Et si, en plus, on arrive trop haut, qu'on tente de rattraper l'axe, le risque de finir sous le plan est réel. Les équipages basés à Genève la connaissent par cœur. Pour d'autres, habitués à des terrains plus plats, elle peut vite devenir piégeuse», ajoute-t-il.
«Pas de problème systémique»
Contacté, l'Office fédéral de l'aviation civile (OFAC), qui valide les procédures d'approche en Suisse, indique avoir bien été informé des deux événements. Mais il écarte l'idée d'un problème structurel ou systémique: «L'évaluation initiale des informations disponibles n'a pas permis d'identifier une relation entre les deux cas, ni d'élément remettant en cause la procédure d'approche utilisée», indique l'autorité.
L'OFAC précise que le nombre d'incidents recensés à Genève est conforme à celui attendu pour un aéroport international accueillant plus de 130'000 mouvements par an. Il indique également que la procédure d'approche actuelle ne fait pas l'objet d'une révision ou d'une analyse de risque. «Si l'enquête du SESE devait indiquer des résultats différents, l'OFAC est prêt à revoir sa position», annonce toutefois son porte-parole, Antonello Laveglia.
Reste que le cas Aegean, l'incident Easyjet d'Édimbourg, mais aussi un troisième événement survenu en novembre 2023 – un Airbus Easyjet au bord de la panne de carburant après plusieurs tentatives d'atterrissage avortées – ressemblent à une série noire, heureusement sans conséquence. À ce jour, aucun rapport final n'a été publié pour les deux incidents impliquant Easyjet. L'enquête sur le vol Aegean, elle, ne fait que commencer.
Marc Renfer est journaliste à la rubrique genevoise depuis début 2022. Auparavant, il a travaillé dix ans à la RTS, en partie comme datajournaliste. Plus d'infos
@marcrenfer
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