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Un camion de vivres se renverse sur la foule, tuant 20 personnes, selon la Défense civile

Un camion de vivres se renverse sur la foule, tuant 20 personnes, selon la Défense civile

La Presse14 hours ago
Des personnes inspectent les dommages subis par la clinique Sheikh Radwan al-Taba de l'UNRWA après un bombardement de l'armée israélienne dans la ville de Gaza, le 6 août 2025.
Un camion de vivres se renverse sur la foule, tuant 20 personnes, selon la Défense civile
(Gaza) La Défense civile de Gaza a fait état de la mort de vingt personnes dans l'accident d'un camion de vivres qui s'est retourné sur la foule dans la nuit de mardi à mercredi.
Agence France-Presse
« Le camion s'est renversé alors que des centaines de civils attendaient de l'aide alimentaire dans la zone de Nousseirat, dans le centre de la bande de Gaza », a déclaré à l'AFP le porte-parole de la Défense civile, Mahmoud Bassal.
« Le camion avait été contraint par l'armée israélienne d'emprunter des routes dangereuses, qui avaient auparavant été bombardées » et étaient en mauvais état, a-t-il expliqué.
« Malgré la récente autorisation limitée de quelques camions d'aide », Israël « entrave délibérément le passage sûr et la distribution de cette aide. Elle oblige les conducteurs à emprunter des itinéraires surchargés de civils affamés qui attendent depuis des semaines les produits de première nécessité », a accusé mercredi le gouvernement de Gaza, sous l'autorité du Hamas.
Ce « comportement délibéré et criminel se solde souvent par des foules désespérées qui se ruent sur les camions et s'emparent de leur contenu par la force », a expliqué le gouvernement, faisant lui aussi état de 20 civils tués et de dizaines de blessés.
Interrogée par l'AFP, l'armée israélienne a indiqué vérifier ces informations.
PHOTO JEHAD ALSHRAFI, ASSOCIATED PRESS
Des Palestiniens portent le corps d'une personne qui a été tuée alors qu'elle tentait d'atteindre des camions d'aide entrant dans le nord de la bande de Gaza.
Une responsable de Médecins sans frontières (MSF) à Gaza, Caroline Willemen, a décrit mercredi une situation humanitaire « dévastatrice pour les habitants » du territoire, avec une « multiplication par quatre des patients dans notre programme de malnutrition depuis mai ».
« En plus de cela, nous continuons de voir des patients se faire tirer dessus ou écraser sur les sites de distribution d'aide », a déploré Mme Willemen, dans un message sur les réseaux sociaux.
« Nos équipes reçoivent un nombre croissant de patients malnutris alors qu'elles-mêmes peinent à trouver suffisamment de nourriture. Parmi les dépistages réalisés dans les établissements de MSF en juillet, 25 % des enfants âgés de 6 mois à 5 ans et des femmes enceintes ou allaitantes étaient malnutris », a-t-elle détaillé.
Toujours la « crise de la faim »
« La crise de la faim persistante à Gaza ne sera pas résolue par des modèles de distribution d'aide contrôlés par l'armée. Une réponse humanitaire de principe, dirigée par l'ONU, doit être rétablie immédiatement », a plaidé la coordinatrice de MSF.
Depuis le début de la guerre, Israël assiège plus de deux millions de Palestiniens entassés dans un territoire de 365 km2. Il a assoupli fin mai le blocus humanitaire total qu'il avait imposé début mars, mais n'autorise l'entrée que de quantités très limitées.
La bande de Gaza, totalement dépendante de l'aide humanitaire, est désormais menacée d'une « famine généralisée », selon l'ONU, qui estime qu'au moins 1373 Palestiniens ont été tués, la plupart par des tirs israéliens, depuis le 27 mai « alors qu'ils cherchaient de la nourriture ».
Human Rights Watch décrit le système de distribution d'aide humanitaire mis en place par l'armée israélienne avec le soutien des États-Unis comme un « piège mortel » pour les civils.
La fondation GHF, un organisme privé qui met en œuvre ce système depuis mai, a souligné mercredi qu'elle n'a « jamais été conçue pour remplacer l'ONU ».
« C'était leur choix d'abandonner lorsque les choses devenaient difficiles. Nous sommes heureux qu'ils soient de nouveau opérationnels, mais les pillages généralisés de leurs convois persistent », a affirmé la GHF, se disant prête « à les aider de toutes les manières possibles ».
Selon le COGAT, organisme dépendant de la défense israélienne, plus de 300 camions d'aide ont pénétré dans Gaza mardi, pour le deuxième jour consécutif, soit plus que la moyenne de ces derniers jours.
Selon le Hamas, « seulement 853 camions » d'aide sont entrés dans la bande de Gaza au cours des 10 derniers jours, « soit une moyenne de 85 camions par jour ».
Les agences de l'ONU estiment à au moins 600 le nombre de camions nécessaires pour venir en aide aux populations du territoire.
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Dans son dernier rapport annuel, le Service canadien du renseignement de sécurité indique avoir reçu plus de 538 000 demandes de contrôle de sécurité de la part des agents de l'immigration et des services frontaliers en 2024. Les avocats en immigration dénotent un nombre élevé de contrôles de sécurité (Ottawa) Le Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS) affirme traiter un nombre croissant de demandes de contrôle de sécurité en matière d'immigration, ce qui entraîne de longs délais pour les avocats spécialisés en immigration. David Baxter La Presse Canadienne Dans son dernier rapport annuel, l'agence de renseignement indique avoir reçu plus de 538 000 demandes de contrôle de sécurité de la part des agents de l'immigration et des services frontaliers en 2024. Une augmentation significative du nombre de demandes a commencé à être constatée en 2023, avec plus de 493 200 demandes reçues. Auparavant, le SCRS avait reçu environ 300 000 demandes de contrôle de sécurité par an au cours des cinq années précédentes. Le dernier rapport du SCRS indique que, même si le volume de demandes en attente de contrôle de sécurité demeure élevé, l'agence de renseignement prendra le temps nécessaire pour les traiter. Ali Abuhannoud, un réfugié jordanien qui demande la citoyenneté canadienne, a raconté qu'il attendait le résultat de son contrôle de sécurité depuis mai 2024, après avoir déposé sa demande en juillet 2023. « Je ne sais pas ce qu'ils contrôlent, mais vous pouvez imaginer le stress et l'anxiété que cela me cause », a-t-il affirmé à La Presse Canadienne depuis Halifax. M. Abuhannoud a indiqué que c'était la troisième fois qu'il se soumettait au processus de contrôle de sécurité. Il a expliqué avoir été contrôlé une première fois à son arrivée au Canada en tant que réfugié en 2018, puis une seconde fois lorsqu'il a demandé la résidence permanente. Il a expliqué avoir fui au Canada à cause de sa « famille homophobe » et de craintes pour sa vie. L'augmentation des demandes de contrôle est en partie due à la hausse du nombre de demandeurs d'asile arrivant au Canada, qui doivent tous être contrôlés. Les agents de l'immigration et des frontières peuvent demander au SCRS d'effectuer un contrôle de sécurité dans le cadre d'une demande de visa ou de citoyenneté. Le ministère fédéral de l'Immigration prend une décision finale d'admissibilité en fonction de ce contrôle. Des avocats spécialisés en immigration en Colombie-Britannique et en Ontario ont déclaré à La Presse Canadienne que de plus en plus de leurs clients subissent des retards prolongés en raison des contrôles de sécurité, sans que personne n'en explique la raison. « Le gouvernement nous répète sans cesse que des vérifications d'antécédents par des tiers sont nécessaires et qu'elles prennent du temps, ce que nous comprenons », a souligné Adrienne Smith, avocate spécialisée en immigration à Toronto. « Mais notre problème est que nous ne voyons pas quelles mesures le gouvernement prend pour justifier ce retard. » Will Tao, avocat spécialisé en immigration à Burnaby, en Colombie-Britannique, a rapporté que son cabinet avait commencé à recevoir un afflux d'appels concernant des demandes d'immigration retardées par les contrôles de sécurité en janvier 2024. « Les demandes soumises à des contrôles de sécurité plus rigoureux provenaient de pays que je qualifierais de proches géopolitiques d'une préoccupation pour le Canada », a expliqué M. Tao. Il a précisé que ces pays comprennent des pays du Moyen-Orient, comme la Jordanie, ainsi que l'Ukraine, la Russie, la Chine, l'Iran et, « dans certains cas », l'Inde. « Les règles du jeu ont changé. Nous le savons, car des demandeurs, par exemple, qui étaient résidents permanents au Canada il y a des années, ou qui avaient des visas depuis de très nombreuses années, allant et venant pendant 15, 20 ou 30 ans, se retrouvent soudainement pris dans cette situation », a dénoté M. Tao. Le SCRS a décliné une demande d'entrevue. La porte-parole du SCRS, Magali Hébert, a déclaré dans un courriel que le programme de filtrage est une « fonction essentielle de la sécurité nationale du Canada ». Mme Hébert a indiqué que le SCRS travaille « avec diligence » pour évaluer le volume élevé de demandes de filtrage. « Le SCRS et ses partenaires en matière de filtrage de sécurité continuent de prendre le temps nécessaire, compte tenu des informations disponibles à ce moment-là, pour traiter chaque dossier avec sérieux et assurer la sécurité du Canada et de ses citoyens, conformément au mandat de filtrage de sécurité prévu par la Loi sur le SCRS », a ajouté Mme Hébert. Un « manque de motivation » dénoncé Le rapport 2024 du SCRS indique que la nécessité de filtrer toutes les demandes provenant de Gaza en raison de la présence du Hamas dans cette région a « entraîné une augmentation significative » de la demande de services et de ressources en personnel de filtrage. Le SCRS affirme avoir également « priorisé de manière proactive » les demandes en provenance du Liban, en prévision d'une éventuelle escalade du conflit entre le Hezbollah et Israël. Le SCRS, Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada et l'Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) examinent actuellement le processus de contrôle de l'immigration après que le SCRS a soumis un père et son fils, Ahmed et Mostafa Eldidi, à un contrôle de sécurité avant qu'ils ne soient accusés d'infractions liées au terrorisme de l'État islamique en juillet 2024. Le rapport indique que le SCRS a effectué le contrôle de sécurité sur la base des informations reçues à l'époque. M. Tao a mentionné qu'avec la volonté du gouvernement fédéral de réduire le nombre d'immigrants permanents et temporaires arrivant au Canada, il ne pense pas qu'il soit enclin à résorber l'arriéré des demandes de sécurité. « Je constate un […] manque de motivation pour traiter ce dossier », a indiqué M. Tao. M. Abuhannoud a dit avoir vu des amis qui avaient déposé leur demande après qu'il ait obtenu la citoyenneté avant lui. « J'ai l'impression d'être puni par quelque chose que je n'ai même pas pu choisir. 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Au Québec, tout semble s'inscrire dans le corridor qui relie la métropole à la capitale. Mais il existe un autre axe, perpendiculaire, que traverse l'autoroute 55, des environs de Sherbrooke jusqu'à ceux de Shawinigan. Un monde de l'à-mi-chemin que racontent des auteurs réunis dans l'« école de la 55 », comme l'a baptisée notre collaborateur Mathieu Bélisle ⁠1 . Cet été, nous explorons ce coin de pays à travers leurs mots. Au regard des cartes et de l'histoire, le parallèle entre la Mauricie et la Mésopotamie antique est, vous en conviendrez, évident. Le Saint-Maurice et le Saguenay, le Tigre et l'Euphrate, des mégalopoles rivales établies le long de leurs rives, des rois et des reines dirigeant des Royaumes millénaires… Les airs de famille sont si criants que je n'insiste pas davantage ; j'ai quasiment envie de vous dire que je n'invente rien. Joël Bégin Auteur et professeur de philosophie, collaboration spéciale Introduisons-nous un instant dans le mince filet de réel qui subsiste quand on superpose le Québec et l'Irak. Approchons-nous, oui, de la plus prodigieuse cité que le monde ait connue, là où les rois paradent dans des chariots tirés par des bêtes fabuleuses (regardez passer le maire Joseph Edmond Thibodeau – je n'invente rien !), ville de toutes les splendeurs et de l'arrogance qui vient avec, capitale universelle du péché et de la luxure… je parle, bien entendu, de Shawinigan (ou de son équivalent mésopotamien, Babylone ; ou serait-ce plutôt Shawibylone, voire Babynigan ?). Tendons l'oreille : dans un appartement ouvrier de l'avenue Broadway, un grand-père s'apprête à raconter la naissance du monde à ses petits-enfants. IMAGES TIRÉES DE GOOGLE EARTH À gauche, le Saint-Maurice et le Saguenay, au Québec. À droite, l'Euphrate et le Tigre, en Irak, dans une région qui s'appelait autrefois la Mésopotamie. « Au commencement, tout était plat, dit-il. C'était bien avant les centrales et les usines de coton, les tavernes et les foires d'exposition ; Avant que le frère Marie-Victorin ne fonde le jardin botanique suspendu ; Avant que le premier roi ne meure et qu'on vide les carrières de Lanaudière pour lui faire un tombeau gigantesque, vous savez, la montagne coiffée d'une grande croix qu'on peut voir, par temps clair, jusqu'à Sorel ; C'était même avant ma naissance à moi, figurez-vous donc. » PHOTO FOURNIE PAR LE FONDS D'ARCHIVES RENALD BORDELEAU « Là où les rois paradent dans des chariots tirés par des bêtes fabuleuses… » Joseph-Edmond Thibodeau, maire de Shawinigan de 1915 à 1917. Les yeux des enfants s'agrandirent, parce que c'était inconcevable : leur grand-père était au moins aussi vieux que le chemin. « C'était si plat, reprit Pépère, que l'eau savait pas dans quel sens couler. Les deux grandes rivières s'étaient pas encore couchées dans leur lit, elles gigotaient sur le roc comme de gros vers de terre, si bien qu'on pouvait s'endormir les pieds dans l'eau et se réveiller les cheveux mouillés. « Les dieux finirent par se tanner de planer au-dessus du vide. Ils façonnèrent les humains à partir de gadoue printanière pour leur propre amusement. Ils les regardaient s'aimer et se trahir comme ils le faisaient eux-mêmes. Parmi l'assemblée du ciel, deux jeunes dieux, saint Tite et sainte Thècle, brûlaient d'un amour secret et interdit. Pendant un souper de Noël, on les prit en train de… » Mémère sortit la tête du cadre de porte et fit un regard mauvais à Pépère, qui voulait dire de surveiller son langage et pis ses images. « … on les prit à se gratter les oreilles, compléta Pépère. La parenté était en beau joualvert, comprenez-vous. Alors le couple prit la fuite. 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Pépère, lui, continuait de parler à son public endormi, enivré par le plaisir démiurgique de raconter une fois de plus l'histoire du monde et, surtout, de bercer leurs rêves, des rêves qui, à la manière de notre grand pays lavé par les eaux, seraient oubliés au petit matin. Qui est Joël Bégin ? Joël Bégin est né à Louiseville. Après plusieurs années à Québec et à Saguenay, il retourne en Mauricie pour enseigner la philosophie au cégep de Trois-Rivières. Il est l'auteur, chez VLB, de Plessis (prix Robert-Cliche du premier roman 2022 ; finaliste au Rendez-vous du premier roman 2022-2023, Prix des nouvelles voix de la littérature 2024 du Salon du livre de Trois-Rivières). Il aime la philosophie du langage, la littérature de genre et l'histoire politique du Québec, savoirs et influences qu'il tente de fondre en de nouveaux alliages au creuset de la fiction. 1. Lisez la chronique « L'école de la 55 » de Mathieu Bélisle Qu'en pensez-vous ? Participez au dialogue

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