
La robe en feu, de Gabrielle Filteau-Chiba
« Ça vaut la peine de se battre pour que les choses tournent dans le bon sens », peut-on lire dans la très juste postface signée par l'essayiste Étienne Beaulieu. Comme dans son premier recueil, Gabrielle Filteau-Chiba invoque ici avec sensibilité la flore, la faune, la lumière et les vents : bref, tout ce que répertorient ses sens. Et elle est toujours aussi farouchement engagée pour la protection de la forêt. Mais dans La robe en feu, l'énonciatrice se tient encore plus clairement debout comme le plus beau des vieux arbres. Elle tient tête à la destruction avec une bouffée puissante d'espoir.
« Si vous m'avez appris une chose / vous forêts vastes / monts sauvages / tête dans les nuages / c'est qu'il viendra pour chaque brûlis / un baume / et qu'aucune perte ne résiste / à la randonnée », écrit l'autrice.
Bien sûr, il faut un intérêt pour les choses de la nature pour goûter au meilleur de cette œuvre écoféministe. Mais il est franchement dur de résister à une si belle démonstration de joie militante. La robe en feu est sensuel, voire érotique, et donne à voir tout le pouvoir régénérateur d'être dans le bois.
Audrey-Anne Blais, La Presse
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Mes excuses aux violoneux québécois
Au retour d'un voyage dans les Maritimes, notre chroniqueur se demandait pourquoi il ne semblait pas y avoir plus de « veillées de danse » au Québec… Sur scène, « Uncle » Tom McSwiggan, 90 ans, raconte des blagues entre deux coups d'accordéon. À ses côtés, Andy Doucette joue du violon avec une telle vigueur qu'on pourrait considérer sa performance comme du sport. Michael Pendergast et son fils Shane l'accompagnent respectivement au clavier et à la guitare. Veronica Murray débarque ponctuellement pour marteler la scène de ses souliers à claquettes. PHOTO PHILIPPE MERCURE, LA PRESSE Andy Doucette, Shane Pendergast, « Uncle » Tom McSwiggan et Michael Pendergast lors d'un ceilidh à Malpeque, à l'Île-du-Prince-Édouard Je vous raconte ici l'un des beaux souvenirs ramenés de mes vacances à l'Île-du-Prince-Édouard : une soirée dans un « ceilidh » (prononcez ké-li). Concert de musique traditionnelle écossaise et irlandaise, spectacle d'humour dans lequel on raconte des blagues et des légendes, occasion de socialiser : un ceilidh, c'est un peu tout cela à la fois. Ces soirées conçues pour rappeler les partys de cuisine se perpétuent de génération en génération. À la porte du centre communautaire de la municipalité de Malpeque où nous étions, on avait affiché une note rédigée au crayon-feutre. « Désolé, complet ». L'assistance était formée autant d'enfants qui dansaient et sautaient que de vieillards tapant des mains, sans compter les ados venus passer du bon temps. Et à la pause, il y avait distribution de fraises et de crème glacée ! Bref, un sacré party, à la fois endiablé et bon enfant. Je suis revenu des Maritimes en me demandant pourquoi on n'avait pas de telles soirées au Québec, pourtant une terre de fêtards, de violoneux et de joueurs de cuillère. Dans la voiture, au retour, ma famille a dû endurer mes envolées sur notre supposée perte de patrimoine. J'ai fini par me calmer et appeler Gilles Pitre, chargé de projet au Conseil québécois du patrimoine vivant. Il m'a poliment fait comprendre que j'étais assez magistralement dans le champ. « Pour avoir côtoyé plusieurs musiciens de l'Île-du-Prince-Édouard, on sait que c'est très dynamique là-bas. Mais la perception que c'est moins vivant ici est erronée, selon moi », m'a-t-il lancé. À ses heures, M. Pitre est lui-même un « calleur de danse » – vous savez, ces animateurs qui prodiguent des instructions aux danseurs, du genre « changez de côté, vous vous êtes trompés ». Les « veillées de danse » dans lesquelles il officie sont beaucoup moins anecdotiques que je l'imaginais. « Pendant la haute saison, d'octobre à avril, on répertorie de quatre à sept veillées de danse par semaine au Québec », m'apprend-il. C'est partout : Saint-Casimir, Victoriaville, Saint-Jérôme, Joliette, Gatineau, Ripon, la Gaspésie – c'est très fort, en Gaspésie. Gilles Pitre, chargé de projet au Conseil québécois du patrimoine vivant Un phénomène de régions ? Pas uniquement. L'organisme Espace TRAD organise par exemple les Veillées du Plateau, en plein cœur de Montréal. Pour les intéressés, le Réseau des veillées de danse du Québec tient un calendrier des évènements partout dans la province1. PHOTO FOURNIE PAR LE CONSEIL QUÉBÉCOIS DU PATRIMOINE VIVANT Une veillée de danse à Lévis « C'est en pleine effervescence », jure M. Pitre, qui dit assister à un regain après une « baisse de régime » dans les années 1980 et 1990. Lors de ces soirées, les participants exécutent des danses traditionnelles comme des sets carrés, des quadrilles et des cotillons, au son d'un groupe de trois à cinq musiciens. « Il y a toujours un intermède de gigue – une ronde de gigue où les gens vont montrer leur savoir-faire », explique-t-il. 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Gilles Pitre s'anime au bout du fil. « Voilà une question très intéressante ! », s'exclame-t-il. « La musique instrumentale traditionnelle québécoise, avec son accordéon, son violon, son piano et sa guitare, a aussi des origines irlandaises et écossaises, m'apprend-il. Ces communautés sont présentes au Québec depuis longtemps et ont eu une forte influence. » PHOTO FOURNIE PAR LE CONSEIL QUÉBÉCOIS DU PATRIMOINE VIVANT Une danse traditionnelle en Outaouais Les Québécois d'antan se sont toutefois approprié ces musiques et les ont fait évoluer. « On ne les joue plus comme en Écosse ou en Irlande », dit Gilles Pitre. Les musiciens québécois qui vont faire des festivals là-bas reconnaissent les airs, mais ne les jouent pas de la même façon. Gilles Pitre, chargé de projet au Conseil québécois du patrimoine vivant Évidemment, les paroles francophones, elles, proviennent de la France. « Si on parle de chanson, l'influence est franchement et totalement française. Ça provient de la Bretagne, du Poitou, de la Picardie, de la Normandie », explique M. Pitre. Tout cela s'est métissé pour donner la musique traditionnelle québécoise, unique au monde. « La Bolduc est un bon exemple, souligne Gilles Pitre. On sent les influences celtiques dans la musique, mais les mots sont en français. » En bref, ça swingue pas mal plus que je ne le croyais côté trad au Québec. Une preuve qu'on profite souvent des voyages pour s'ouvrir aux autres cultures… en oubliant de regarder ce qui se fait chez nous. À ma décharge, Gilles Pitre admet que la scène québécoise est « méconnue » et soupçonne l'Île-du-Prince-Édouard de mousser davantage ses « ceilidhs » auprès des touristes qu'on le fait chez nous pour les veillées de danse. Ça m'apparaît clair… et bien dommage. On aurait tout intérêt à mieux connaître ce pan de notre culture (moi le premier) et à le faire découvrir aux visiteurs. Mes excuses à tous les violoneux et calleurs de danse du Québec, donc. Et si je peux me permettre une suggestion : les fraises et la crème glacée en milieu de soirée, c'est vraiment pas mal. Appel à tous Mes recherches pour cette chronique m'ont fait découvrir jusqu'à une fête de Mi-Carême queer organisée à Rimouski – un bel exemple de tradition servie à la sauce moderne ! Vous connaissez encore mieux ? Vous fréquentez des soirées traditionnelles ? Où se déroulent les plus endiablées ? Quels sont vos meilleurs souvenirs ? Écrivez-nous ! 1. Consultez le Réseau des veillées de danse du Québec


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