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Une option payante… mais risquée

Une option payante… mais risquée

La Presse10 hours ago
Les autoroutes 25 et 30 sont les seules sur lesquelles on trouve actuellement des péages au Québec.
La question vaut la peine d'être soulevée, notamment quand on constate que l'expérience du pont de l'A25 est plutôt satisfaisante.
C'est avec l'ouverture en 2011 de ce lien reliant Montréal et Laval que les péages ont refait leur apparition dans la province. Celui-ci a été réalisé en partenariat public-privé (PPP), a été livré dans les délais et est généralement reconnu comme étant un exemple de réussite de ce modèle.
Les péages ne connaissent pas systématiquement un aussi grand succès, mais leur logique présente plusieurs avantages, selon Jean-Philippe Meloche, professeur à l'École d'urbanisme et d'architecture de paysage de l'Université de Montréal (UdeM).
D'abord, ils permettent une meilleure planification des infrastructures, puisqu'avant de démarrer, par exemple, un projet de pont, il faut se demander combien de temps les automobilistes économiseront en l'utilisant et à quel point ils seront prêts à payer.
« On regarde ensuite combien coûte le pont et si on rentre dans notre argent. On fait une planification fondée sur des données tangibles qui permettent d'avoir un élément de rentabilité, pas juste de savoir si ça nous fera gagner des élections », dit-il, faisant notamment référence au troisième lien.
PHOTO ALAIN ROBERGE, ARCHIVES LA PRESSE
Jean-Philippe Meloche, professeur à l'École d'urbanisme et d'architecture de paysage de l'Université de Montréal
Ensuite, une fois l'infrastructure construite, les péages permettent de gérer son utilisation. « Sur le pont de l'autoroute 25, les tarifications vont varier en fonction de l'horaire de la journée, de manière à renvoyer le plus de trafic possible dans les périodes hors pointe », ce qui ralentit aussi la dégradation de l'infrastructure, souligne le professeur.
Malgré ces arguments, on retrouve aujourd'hui un seul autre péage routier au Québec, sur une portion de l'autoroute 30.
Il n'y en a pas sur le pont Samuel-De Champlain, pourtant tout neuf, et il n'y en aura pas non plus pour emprunter le pont-tunnel Louis-Hippolyte-La Fontaine une fois sa réfection terminée. La ministre des Transports, Geneviève Guilbault, a laissé planer la possibilité qu'un type de péage soit instauré sur un potentiel pont à Tadoussac ou encore sur le troisième lien, mais on est loin d'une certitude.
Moins de péages, plus de votes
En fait, on observe plutôt une tendance inverse dans les discours politiques au Canada. Durant la dernière campagne électorale, autant Mark Carney que Pierre Poilievre ont promis de réduire ou d'éliminer le péage pour passer sur le pont de la Confédération, qui relie l'Île-du-Prince-Édouard au Nouveau-Brunswick. Carney en a d'ailleurs fait passer le péage moyen de 50,25 $ à 20 $ depuis le début du mois d'août.
PHOTO FRANÇOIS ROY, ARCHIVES LA PRESSE
Avant d'être élu premier ministre du Canada, Mark Carney a promis qu'il réduirait de moitié le péage du pont de la Confédération.
« C'est une pratique assez courante en politique de regarder s'il y a un péage à enlever quelque part, puis d'aller gagner des votes en proposant de le retirer », remarque Jean-Philippe Meloche, donnant en exemple le premier ministre ontarien, Doug Ford, qui a enlevé au cours des dernières années des péages sur des autoroutes.
Pour dépolitiser le dossier, un mécanisme pourrait être enchâssé dans une loi fédérale. Par exemple, en Norvège, pour qu'un pont ou un tunnel obtienne du financement gouvernemental, il faut automatiquement qu'une certaine portion du projet soit payée par les usagers sur une période donnée, souligne Jean-Philippe Meloche.
Cela dit, l'installation de péages sur des infrastructures soulève aussi des questions, surtout quand les infrastructures ne sont pas toutes tarifées ou qu'il n'y a pas de solution de rechange efficace en transports en commun.
« En soi, une tarification, c'est moins équitable qu'un impôt puisque l'impôt est progressif tandis que la tarification est fixe, ce qui pénalise les gens qui ont moins de revenus ou de patrimoine », souligne Danielle Pilette, professeure spécialisée en gestion municipale au département de stratégie, responsabilité sociale et environnementale de l'ESG-UQAM.
Et au centre-ville de Montréal ?
New York a instauré au début de l'année un péage pour les voitures circulant à Manhattan. Serait-ce une bonne idée de faire quelque chose de similaire au centre-ville de Montréal ?
« Les villes qui l'ont fait uniquement au centre-ville ne sont pas très nombreuses. On parle de New York, Londres, Stockholm… ce sont des villes de catégorie mondiale. On s'entend pour dire que Manhattan, Wall Street ou Londres, ce sont des lieux hyper attractifs où tout le monde veut aller. Il n'y a pas d'enjeux de compétitivité avec d'autres secteurs », mentionne d'emblée Christian Savard, directeur général de Vivre en Ville.
À Montréal, la tendance actuelle est plutôt que les banlieues font compétition au centre-ville en se développant de façon mixte.
« Je ne suis pas certaine que la ville de Montréal est compétitive pour ce qui est de l'attraction des travailleurs. Il y a beaucoup de télétravailleurs [qui restent chez eux], de bureaux qui ont maintenant des satellites à Brossard, à Laval, un peu partout sur la Rive-Sud et la Rive-Nord… », évoque Danielle Pilette. Et dans ces banlieues, le stationnement est gratuit, ajoute-t-elle.
PHOTO ALAIN ROBERGE, ARCHIVES LA PRESSE
Danielle Pilette, professeure spécialisée en gestion municipale au département de stratégie, responsabilité sociale et environnementale de l'ESG-UQAM
Avec en plus l'incertitude créée par la guerre commerciale et l'introduction de l'intelligence artificielle dans le monde du travail, il faut faire attention à ne pas ajouter d'autres bâtons dans les roues au centre-ville, souligne Danielle Pilette.
En plus, les spécialistes à qui La Presse a parlé le rappellent : la congestion à Montréal ne se trouve pas spécialement au centre-ville, mais plutôt dans des arrondissements aux alentours, comme Le Plateau-Mont-Royal, Rosemont–La Petite-Patrie ou encore Côte-des-Neiges–Notre-Dame-de-Grâce.
Moins d'infrastructures, tout simplement
Dans le contexte actuel où les infrastructures coûtent des sommes faramineuses, les gouvernements devraient employer toutes les mesures à leur disposition pour s'assurer d'avoir à en construire le moins possible, affirment les spécialistes consultés par La Presse.
PHOTO FRANÇOIS ROY, ARCHIVES LA PRESSE
Christian Savard, directeur général de Vivre en Ville
En ce moment, l'urgence au Québec est de prioriser l'entretien des infrastructures actuelles et d'en construire le moins possible de nouvelles.
Christian Savard, directeur général de Vivre en Ville
« On entre vraiment dans une phase au Québec où il va falloir se concentrer sur le maintien d'actifs », souligne Christian Savard.
Un avis partagé par Jean-Philippe Meloche. « L'idée, ce n'est pas de se retenir et de ne pas avoir d'activité économique, c'est d'avoir des activités économiques qui sont les plus sobres possibles en infrastructures. Multiplier les ponts et faire de l'étalement urbain, c'est beaucoup plus dommageable économiquement aujourd'hui que ça l'était il y a 30 ans. C'est vrai aussi pour les transports en commun – je dis toujours que ça coûte beaucoup moins cher de construire des immeubles de logements le long de la ligne verte que de la prolonger », dit-il.
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La souveraineté n'est pas une « baguette magique », clame Pablo Rodriguez
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timean hour ago

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La souveraineté n'est pas une « baguette magique », clame Pablo Rodriguez

(Québec) À un peu plus d'un an des prochaines élections, on voit déjà se dessiner à l'horizon un affrontement entre le Parti québécois (PQ) et le Parti libéral du Québec (PLQ), où la souveraineté sera au cœur des débats. Le chef libéral Pablo Rodriguez veut d'ailleurs s'attaquer à l'indépendantisme qui est en montée chez les jeunes. Thomas Laberge La Presse Canadienne « Le PQ présente souvent la souveraineté comme si c'était une baguette magique, comme une solution à tout », lance le chef libéral en entrevue avec La Presse Canadienne. Mais ce n'est pas en se séparant qu'on va régler la pénurie de logements. Ce n'est pas en se séparant que nos jeunes vont avoir accès plus facilement à une première maison. Ce n'est pas en faisant la souveraineté que Donald Trump ou que l'inflation va disparaître et qu'on ne sentira pas les effets des changements climatiques Pablo Rodriguez Le chef libéral tenait à faire une sortie publique après la publication d'un article dans La Presse indiquant une montée du souverainisme chez les jeunes. Les données provenant d'un sondage CROP, et dont La Presse Canadienne a obtenu copie, montrent que 56 % des 18-34 ans sont favorables à la souveraineté du Québec. Toutefois, le même coup de sonde indique que seuls 47 % des jeunes voteraient Oui lors d'un référendum. L'enquête a été menée en juillet et en août auprès de 1000 répondants. François Legault « l'allié objectif du PQ » Mais comment freiner cette montée ? Les Québécois doivent tout d'abord congédier le gouvernement caquiste, clame le chef fédéraliste. « François Legault est un peu l'allié objectif du PQ en blâmant toujours le Canada et en passant son temps à démoniser le Canada plutôt que de trouver des solutions », affirme-t-il. Pablo Rodriguez évite toutefois de blâmer le Parti libéral fédéral – son ancienne formation politique – pour la montée de l'indépendantisme même si ce dernier est vertement critiqué par le PQ et la CAQ pour sa centralisation, ses politiques empiétant sur les champs de compétence des provinces et le fait qu'il n'en fait pas suffisamment dans le dossier de l'immigration. « Le fait qu'on ait cessé d'être un leader au sein du Canada est un problème parce que, à mes yeux, le Québec ressort toujours gagnant lorsqu'il assume un rôle de leader au sein du Canada plutôt que de suivre la parade et c'est pas ça qu'on a vu, sous le gouvernement de la CAQ », dit l'ancien ministre fédéral sous Justin Trudeau. Outre rappeler sa proposition de la chefferie de doubler le crédit d'impôt pour l'achat d'une première maison, Pablo Rodriguez avait peu d'idées tangibles à mettre de l'avant lors de l'entrevue pour séduire les jeunes et contrer la montée de l'indépendantisme. « Il y a une série de mesures qu'on va proposer », a-t-il assuré. « Le téléphone sonne » Le prochain rendez-vous électoral aura lieu en octobre 2026. Le PQ se maintient en tête des sondages depuis la fin de 2023, mais on a vu une remontée des libéraux depuis l'élection de Pablo Rodriguez en juin dernier. Le gouvernement Legault, pour sa part, a considérablement baissé dans les intentions de vote. L'agrégateur de sondages Qc125 indique même que la CAQ pourrait se retrouver sans aucun siège. « Je pense qu'on se dirige vers une élection plus traditionnelle entre fédéralistes et souverainistes ; entre le Parti québécois et le Parti libéral du Québec », soutient Pablo Rodriguez. La situation du PQ va favoriser le recrutement de candidats. L'ex-candidate vedette de Québec solidaire, la Dre Mélissa Généreux, par exemple, a indiqué à La Presse Canadienne qu'elle était déjà en discussion avec le parti en vue d'une éventuelle candidature. Qu'en est-il pour le PLQ ? « Le téléphone sonne », assure Pablo Rodriguez, reprenant une expression popularisée par son prédécesseur Marc Tanguay. « On a énormément de noms connus et moins connus dont vous allez entendre parler […] Je ne serai pas souvent à la maison ces temps-ci parce que j'ai beaucoup de soupers et de lunchs avec des gens qui sont intéressés à faire partie de l'équipe », dit-il. Le chef libéral rencontre les jeunes militants de son parti lors du congrès de la Commission-Jeunesse qui se tient en fin de semaine à Gatineau.

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Une dernière chance
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La Presse

time6 hours ago

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Une dernière chance

C'était durant la pandémie, il y a environ un siècle… Même quand il reculait ou changeait d'idée, François Legault était salué. C'était, concluait-on, une preuve d'écoute et d'humilité. En mai 2020, 81 % des Québécois avaient une opinion favorable du chef caquiste. Les mois suivants avaient été difficiles. Mais au début de son deuxième mandat, en décembre 2022, le taux de satisfaction à son égard avoisinait les 60 %. Cela en faisait le premier ministre le plus populaire au pays. Mais le temps, cet agent corrosif, a fait son œuvre habituelle. Le gouvernement Legault est rendu présumé coupable de tout ce qui va mal, à en juger par les sondages qui se suivent et se ressemblent. Quand il change d'idée, on ne salue pas son pragmatisme. On critique son incohérence. M. Legault n'a qu'une année pour renverser cette tendance lourde. Après de longues rencontres de son conseil des ministres et de son caucus, cette semaine, M. Legault prépare un vaste remaniement. Comment regagner la confiance ? Dans son entourage, on met en garde contre les réactions nerveuses ou la quête du remède miracle. Le troisième lien a montré ce risque. Dans cette saga, les caquistes ont humecté leur index puis l'ont tendu vers le ciel. Ils voulaient se laisser porter par le vent, mais ils ont eu l'air d'une girouette. M. Legault s'est lui-même mis de la pression en annonçant à l'avance un remaniement majeur. Il n'a plus le choix de déplacer au moins quelques poids lourds. Un remaniement sert habituellement à lancer de nouveaux chantiers. Dans ce cas-ci, l'objectif sera davantage de recentrer l'action autour d'un nombre limité de priorités. Car de toute façon, le temps manquera. Mais tout n'est pas que stratégie partisane. M. Legault pense aussi à son héritage. En économie, il veut accélérer le développement d'Hydro-Québec. Il aimerait conclure l'entente avec Terre-Neuve-et-Labrador sur Churchill Falls, idéalement avec une aide financière du fédéral. La nomination de Michael Sabia, ex-PDG d'Hydro-Québec, comme greffier du Conseil privé à Ottawa, ne nuira pas. L'aspect économique de la transition énergétique est sa nouvelle passion. Son approche est interventionniste. Il a injecté de grosses sommes dans un nombre limité de sociétés. Le risque n'a pas toujours été payant, comme le prouvent Northvolt et Lion Électrique. La plus récente aventure : le rachat par Investissement Québec de parts de 500 millions dans Innergex Énergie Renouvelable. Étonnamment, cette annonce n'a presque pas été vendue à la population. Les petites et moyennes entreprises se sentent laissées de côté. Elles souffrent en même temps des droits douaniers de Washington ainsi que du resserrement de l'immigration temporaire imposé par Québec et par Ottawa. Le contexte budgétaire ne permettra probablement pas des allégements fiscaux. Mais un allégement de la paperasse diminuerait leur grogne. Les minéraux critiques sont un dossier délicat. La demande bondit, pour la transition énergétique et maintenant pour l'industrie militaire. Mais personne ne veut voir de mine pousser dans sa cour, et cela se comprend. La hausse massive des dépenses militaires du fédéral profitera à une multitude d'entreprises. M. Legault se réjouira des contrats. Mais dans les milieux économiques, on s'étonne de voir que Québec insiste encore sur les créations d'emploi, alors que la main-d'œuvre manque. PHOTO CHARLES WILLIAM PELLETIER, ARCHIVES COLLABORATION SPÉCIALE L'hôpital Maisonneuve-Rosemont, dans l'est de Montréal, où les travaux d'agrandissement et de modernisation se font attendre Autre défi : les infrastructures. Les investissements atteignent des records, et pourtant, les sommes manquent pour compléter des projets essentiels comme des agrandissements d'hôpitaux ou des réfections d'écoles. Un dilemme qui se reproduit aussi dans les dépenses des missions sociales. La marche vers l'équilibre budgétaire est déjà douloureuse, et elle commence à peine. En santé, un dernier gros morceau occupera M. Legault : l'entente avec les médecins omnipraticiens. Le syndicat médical ne s'y oppose pas. Mais il refuse que leur salaire soit lié à des indicateurs de performance. Sa logique : on ne peut pas punir les médecins pour des problèmes qui échappent en partie à leur contrôle. En coulisses, le débat sera technique. En public, il se résumera à une question plus simple : les patients font-ils plus confiance au gouvernement ou aux médecins ? L'immigration sera un autre grand rendez-vous de l'automne. À l'Assemblée nationale, les partis se sont habitués à promettre un chiffre sur le nombre d'immigrants permanents accueillis chaque année. Ils affichent leur ouverture à l'immigration ou leur volonté de la contrôler. Cette posture omet un problème complexe : que faire avec les gens déjà sur le territoire qui attendent que leur statut soit régularisé ou officialisé ? À quoi bon instaurer un plafond artificiel de 40 000 immigrants permanents si des dizaines de milliers d'autres individus restent sur le territoire, dans l'incertitude et la précarité, ce qui les empêche de contribuer à la société ? M. Legault a déjà adouci son message. Il a d'ailleurs demandé au fédéral d'accorder un droit acquis aux travailleurs temporaires (sauf à Montréal et à Laval) qui sont menacés par la révision du programme canadien. Le gouvernement caquiste essaiera en contrepartie de convaincre les libéraux, les solidaires et le patronat de faire preuve de réalisme. Car il y a un revers à la médaille décrite ci-haut : les nouveaux arrivants exercent une pression importante sur les services publics. Par exemple, le personnel manque dans les écoles, tout comme les logements. Certes, l'immigration n'est pas la seule cause de cette rareté, qui s'observe depuis longtemps. Mais elle aggrave tout de même ce problème. Sur le front identitaire, trois rendez-vous sont déjà inscrits au calendrier : le rapport d'experts sur la laïcité à l'école, le dépôt d'un projet de constitution et les plaidoiries à la Cour suprême sur la loi 21 sur la laïcité. Ce rendez-vous pourrait être explosif. Mais malheureusement pour M. Legault, le contexte a changé. En 2016, la CAQ était coincée entre les péquistes et les libéraux. L'indépendance et les signes religieux pourraient repolariser la population. Le danger pour la CAQ : être écartelée. Ou même perdue au centre dans le vide. La rentrée s'annonce coriace. Les péquistes sont gonflés à bloc par leur victoire impressionnante dans Arthabaska, et les libéraux seront menés en Chambre par une nouvelle cheffe parlementaire, la redoutable Marwah Rizqy. M. Legault joue son avenir. Et il joue aussi la place qui lui sera consacrée dans l'histoire.

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