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Jelly Roll, prédicateur d'une édition record

Jelly Roll, prédicateur d'une édition record

La Presse14 hours ago
Chapeaux de cowboys, vêtements de jeans et bottes de cuir étaient à l'honneur pour une deuxième journée de suite. Jelly Roll, en bon maître de célébration, presque en prédicateur, a projeté son âme et livré son message de rédemption sur le parc Jean-Drapeau, samedi à Montréal.
Il y a des moments qui résument parfaitement une personne : après avoir aperçu une affiche disant qu'un spectateur, présent avec sa fille, était sobre depuis près de 1400 jours, Jelly Roll lui a dédié une chanson sur la sobriété. Émotion garantie, larmes possibles.
Avec force et passion, l'Américain tatoué jusqu'au visage a emmené la foule là où il le souhaitait. Un ancien toxicomane et prisonnier, le late-bloomer du country s'est donné le rôle d'un pasteur – apprenant de ses propres erreurs pour guider les autres.
C'est ce qui fait sa marque de commerce, et qui l'a propulsé au sommet du country américain depuis trois ans.
La voix de Jelly Roll, forgée d'un soul qui ne peut découler que d'un rude passé, avait de quoi donner des frissons. Si la rédemption pouvait être personnifiée, alors c'est sa forme qu'elle prendrait.
L'ancien rappeur a également proposé des titres bien connus, en cover : Take Me Home, Country Roads de John Denver, Sweet Home Alabama de Lynyrd Skynyrd ou How You Remind Me de Nickelback, pour ne nommer que celles-là.
Son spectacle, qui mettait en vedette une dizaine de musiciens, était pensé pour la célébration, la fête, et la mise en valeur – même si vous n'êtes pas croyant ou religieux – d'une chorale pratiquement spirituelle.
Ceux qui ont joué
Avant Jelly Roll, c'était une deuxième prise à LASSO pour Riley Green. D'un prestant calme, l'Américain de 36 ans a servi une heure de country pur, assumant de ne pas se mélanger à d'autres styles comme plusieurs le font aujourd'hui.
Natif de l'Alabama, Green a tout d'un cowboy : une voix sudiste, qui vous embarque en roadtrip si elle est chantée, et qui vous laisse vous questionner sur la moitié de la phrase si elle est parlée. Une barbe de quelques jours, qui met l'accent sur une large moustache. Guitare acoustique. Et, bien sûr, le duo jeans et chemise cargo bien taillée.
PHOTO DOMINICK GRAVEL, LA PRESSE
Riley Green
Dasha, qui était montée sur les planches plus tôt dans la journée, est revenue pour l'accompagner, marquant des points sur la balade You Look Like You Love Me.
Tucker Wetmore, auteur-compositeur-interprète originaire de l'État de Washington, a offert un beau moment de musique aux spectateurs, samedi en début de soirée. Un joueur de piano autodidacte, l'Américain a troqué un instant son répertoire country pour chanter un morceau de Bohemian Rapsody, l'une des pièces musicales les plus influentes de tous les temps.
À la fin de sa performance, maillot de baseball « Montrey'all » sur le dos et armoires à bouteilles d'alcool fort en arrière-plan thématique, Wetmore a montré une visible reconnaissance au public, s'accroupissant et se tapotant la tête comme pour s'imbiber de l'amour qu'on lui lançait.
On doit aussi lever notre chapeau à Québec Redneck Bluegrass Project. Les artistes locaux jouent habituellement en après-midi, ou sur des scènes secondaires. Défiant cette norme en se produisant de 16 h 50 à 18 h 05 sur la scène principale, le groupe formé en 2006 a reçu des acclamations substantielles, et la foule suivait ses paroles.
Le quatuor s'est amusé à boire des bières coulées dans des bottes, le fameux « shooey », pour conclure son numéro, au grand bonheur des amateurs sur place.
Année record
Avec 24 000 festivaliers vendredi, puis 27 500 samedi, la quatrième édition du festival Lasso récupère du même coup le titre d'année record. Le total de 51 500 billets vendus dépasse celui de l'édition 2023, qui mettait en vedette Kane Brown et Chris Stapleton.
PHOTO DOMINICK GRAVEL, LA PRESSE
La foule était monstre samedi, battant le record de 2023.
Lorsque nous nous sommes assis avec Nick Farkas, vice-président principal, programmation, concerts et évènements chez evenko, samedi pour dresser un bilan, il n'avait que du positif à partager.
« On a eu un engouement qu'on voit rarement. J'ai rarement eu autant de commentaires positifs d'artistes, de gérants, de fans. Et c'est une impressionnante production bâtie pour un autre festival [Osheaga], qu'on est chanceux de pouvoir offrir à des fans de country. C'est du niveau top de l'industrie », se targue-t-il en entrevue.
Des trois festivals organisés par evenko, LASSO est celui dont la démographie est à la fois la plus locale et la plus variée en termes d'âge.
Les 25 à 49 ans sont le groupe majoritaire, alors qu'Osheaga et ÎleSoniq reçoivent davantage de vingtenaires et trentenaires. Puis, 80 % des clients sont du Québec, contre 20 % de l'extérieur. De ce pourcentage, environ la moitié vient de la région métropolitaine de Montréal (RMM), et l'autre moitié des régions.
À Nashville, le mot se passe. De nombreux membres de l'industrie étaient dans la métropole pour LASSO, et que par leur témoignage, la réputation de Montréal comme « ville de country » commence à s'implanter à Music City.
PHOTO DOMINICK GRAVEL, LA PRESSE
Nick Farkas, vice-président principal, programmation, concerts et évènements chez evenko
La réaction ici est tellement honnête. Les fans sont phénoménaux. Les artistes qu'on voit quasiment en train de pleurer, c'est parce qu'ils ont vécu une expérience spéciale.
Nick Farkas, vice-président principal, programmation, concerts et évènements chez evenko
On lui a posé, pour conclure, la question que tous les amateurs ont sur les lèvres : parmi les gros noms du country, il ne vous manque qu'à présenter Luke Combs et Morgan Wallen, n'est-ce pas ? Les verra-t-on bientôt à Montréal ?
Réponse : ce n'est pas par manque de volonté qu'ils n'ont pas encore été la tête d'affiche. Wallen avait même accepté de jouer deux fois, deux occasions qui ont été annulées avec la pandémie. Puis sa carrière a décollé vers la lune, et il coûte désormais très cher.
« J'espère qu'on va être en mesure d'avoir ces artistes, soutient Nick Farkas. Peut-être pas l'année prochaine, mais on va trouver une solution. Ce sont des incontournables et ils vont venir. »
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Une énigme six pieds sous terre à Montréal
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time2 hours ago

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La dame fut en son temps une vedette, et son nom refait surface bon an, mal an, au gré des biographies qui lui sont consacrées. Depuis 2008, deux livres-enquête (Bombay, Anna, publié en 2008 et Masked, the Lives of Anna Leonowens, en 2014) ont notamment tenté d'élucider ses véritables origines, un secret qu'elle protégeait jalousement. PHOTO TIRÉE DE WIKIPÉDIA Anna Leonowens en 1862 À la cour du roi de Siam Anna Leonowens, née Edwards (1831-1915) prétendait venir du pays de Galles alors qu'elle était en fait née en Inde, d'une mère moitié indienne, mensonge probablement destiné à faciliter son appartenance à l'élite coloniale du temps. « Les Britanniques avaient une très mauvaise opinion des Anglo-Indiens. S'ils avaient su qu'elle était métisse, ils l'auraient traitée comme une moins que rien », explique Lois K. York, archiviste de Halifax, qui travaille depuis des années sur le sujet et signe la notice de Mme Leonowens dans L'Encyclopédie canadienne. Mariée à un certain Leon Owens (d'où son nom), puis veuve, la voici à Singapour, où elle fonde une école pour les enfants d'officiers britanniques. Cette expérience lui vaut d'être embauchée par le roi Mongkut de Siam (Thaïlande) en 1862 pour enseigner l'anglais et la culture occidentale à son harem de 39 femmes/concubines et ses 82 enfants. Elle y passera six ans, au milieu des intrigues de palais et des enjeux politiques de la cour. Un privilège qu'aucun Occidental n'avait goûté avant elle, et dont elle fera son pain et son beurre par la suite. Retransplantée à New York en 1869, Anna Leonowens publie ses récits de voyage dans le magazine Atlantic Monthly, puis relate son expérience thaïlandaise plus en détail dans deux livres à succès : The English Governess at the Siamese Court (1870) et The Romance of the Harem (1873). Écrit d'un point de vue féministe, avec un biais résolument colonialiste, The English Governess se veut assez critique des mœurs royales à Siam et du roi Mongkut. 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Elle donne des conférences à McGill, préside le Montreal Foundling and Baby Hospital (hôpital pour bébés trouvés) et se fait tirer le portrait par le photographe William Notman. Elle est aussi grand-mère à plein temps, un emploi qui va s'alourdir avec la mort subite de sa fille en 1902, puis de son gendre en 1911. Devenue aveugle, elle s'efface progressivement et meurt dans un presque anonymat, le 19 janvier 1915, à 83 ans. Elle était devenue une ombre. Quand ils l'ont enterrée au cimetière du Mont-Royal, ils n'ont même pas écrit correctement les informations sur sa pierre tombale. Lois K. York, archiviste Une ombre ? Pas pour longtemps. Car le nom d'Anna Leonowens va continuer à flotter sur la culture populaire occidentale. En 1943, l'écrivaine Margaret Landon publie Anna and the King of Siam, adaptation romancée de ses récits thaïlandais. Le livre connaît un tel succès qu'Hollywood en tire un film trois ans plus tard, qui sera ensuite adapté à Broadway, sous le titre The King and I. Cette comédie musicale, mettant en vedette Yul Brynner et Deborah Kerr, sera jouée plus de 4000 fois sur scène et fera l'objet de deux autres adaptations au cinéma. Anna Leonowens sera aussi le sujet de quelques biographies, parfois critiques, tandis que des spécialistes de littérature anglaise du XIXe siècle la mentionnent dans leurs recherches. Pour Lois K. York, cet éternel retour témoigne de l'intérêt d'un personnage aux facettes multiples. Féministe sans être militante, aventurière au destin particulier, Anna Leonowens était une femme de tête, pour ne pas dire une insoumise, dont on n'aura jamais complètement fait le tour. « Elle était tellement énigmatique, tellement mystérieuse, conclut l'archiviste. Il y a tellement de niveaux à explorer. C'est comme éplucher un oignon, couche après couche après couche. Manifestement, elle refuse d'être oubliée. »

Québécois de nulle part
Québécois de nulle part

La Presse

time8 hours ago

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Québécois de nulle part

« Si on rit de moins en moins québécois, si on se divertit de moins en moins québécois, si on est de moins en moins ému québécois, si on rêve de moins en moins québécois… Ce sera quoi, être québécois, demain ? », se demande notre chroniqueur. Ces jours-ci, je me perds souvent dans mon téléphone. Dans ce qu'on appelle des « reels », ces petites vidéos disparates qu'on retrouve sur les réseaux asociaux, formidables pushers de dopamine. En 10 minutes, vous pouvez regarder 50 petites vidéos, souvent niaiseuses, parfois lumineuses. En 10 minutes, voilà, vous êtes diverti. Je dis « 10 minutes », mais c'est une façon de parler : je parlais de dopamine, c'est voulu. C'est l'hormone qui nous colle aux Instagram, Facebook, TikTok pendant des heures de temps. Jadis, devant la télé, on pouvait zapper à l'infini, une soirée de temps… Hein ? Déjà 22 h, mais qu'est-ce que j'ai fait dans le divan depuis que je m'y suis installé, à… On regardait notre montre : depuis 19 h 30. Réponse : rien, on avait zappé, à la recherche d'un « programme » intéressant pendant des heures, à la recherche de la dopamine que génère notre cerveau quand, enfin, on tombe sur un contenu stimulant. On fait désormais la même chose – on zappe – sur nos petits écrans de poche. Ce qui m'amène à la culture. La nôtre. Pour nous, nous les Québécois, la télé a été un formidable catalyseur culturel. La télé a raconté nos histoires, dans nos mots, dans nos décors. On zappait de MusiquePlus à Canal Z en passant par le canal 10 et Quatre Saisons. Les plus bilingues zappaient aussi en anglais. Ce fut un formidable liant culturel : nous avons adopté des références communes, de Et c'est le but ! à Sacrament, Ginette ! en passant par Ma belle brume, Manon pèse su'l'piton, Une tite frette mon Denis ? Et bien sûr l'inoubliable Cé tu wla gwassideurw 1… Je dis « des références communes » : pas partagées par tous, mais par suffisamment de gens pour que ces phrases n'aient pas besoin de longues mises en contexte. Vous me direz : c'est pas de la culture, ça, c'est du divertissement. C'est vrai, c'est vrai… Mais la culture, c'est (un peu, beaucoup) l'eau qui ruisselle quand vous tordez la débarbouillette du divertissement. Il y a beaucoup de notre culture qui n'existerait pas sans le divertissement. Et côté divertissement, ces jours-ci, les jeunes s'éloignent du contenu québécois, une autre étude le démontrait cette semaine du côté de l'Institut de la statistique du Québec. Je résume : plus vous êtes jeune, moins vous consommez québécois, culturellement parlant. C'est vrai pour la télé, le cinéma, les livres, la musique. Ça annonce quoi pour les 10, pour les 20, les 30 prochaines années ? Ça annonce une société qui partage moins de références communes. Ça annonce une société moins… québécoise ? Je ne veux pas jeter la pierre aux jeunes, ce serait con. Ils vivent dans leur époque et le canal 10 de leur époque, le Radio-Canada de leur époque, le CKOI de leur époque, c'est TikTok, Netflix et Spotify. Ils ont le monde au bout de leur doigt, le grand buffet du divertissement mondialisé dans leur petit écran. Je n'aurais pas été différent d'eux, à 15 ans. On peut bien parler de « découvrabilité », de l'idée de forcer les plateformes à mettre en valeur le contenu québécois, reste que chaque fois que j'entends « découvrabilité », j'entends ma mère qui me disait à 12 ans de manger mes brocolis parce que c'est bon pour la santé. Je veux de la crème glacée, m'man… Je regarde donc trop de « reels » ces jours-ci. Ça me divertit. Ça me calme. Comme la télé, jadis. Il y a du bon contenu québécois, aussi, sur les plateformes, il y a des trucs qui frôlent le génie. Mais c'est noyé dans un océan de contenu venu de partout. Si on rit de moins en moins québécois, si on se divertit de moins en moins québécois, si on est de moins en moins ému québécois, si on rêve de moins en moins québécois… Ce sera quoi, être québécois, demain ? J'écris cette chronique et me trotte en tête une phrase dont je me souviens sans en connaître tous les mots, phrase qui concluait, me semble-t-il, un portrait du groupe Simple Plan dans le magazine L'actualité, il y a, il y a… Merde, c'était en quelle année ? Je lance une recherche : il y a 20 ans. Simple Plan, groupe québécois composé de cinq francophones, fut (est ?) immensément populaire à l'échelle mondiale avec ses chansons anglaises qui auraient pu être créées à New York, Londres ou Vancouver… Je zappe tout l'article, je cherche la chute que j'avais confusément en tête tout au long de l'écriture de ce papier et c'est là, à peu près comme je m'en souvenais : Ils sont encore un peu sonnés, à 25 ans, d'avoir si souvent fait le tour de la planète. 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