
L'« Alcatraz des alligators » reçoit ses premiers détenus
Le premier groupe d'immigrants est arrivé dans un nouveau centre de détention au cœur des Everglades en Floride, que les autorités ont surnommé « l'Alcatraz des alligators », a expliqué à l'Associated Press un porte-parole du procureur général républicain James Uthmeier.
Curt Anderson et Kate Payne
Associated Press
« Il y a des gens sur place », a indiqué le porte-parole Jae Williams, sans toutefois fournir de précisions sur le nombre de détenus ni sur leur date d'arrivée.
« Prochaine étape : retour d'où ils viennent », a écrit M. Uthmeier sur le réseau social X mercredi. Il est considéré comme l'architecte du projet des Everglades.
« Établie en un temps record sous la direction du @GovRonDeSantis et en coordination avec @DHSgov et @ICEgov, la Floride est fière de contribuer à la mission de @realDonaldTrump visant à faire respecter la loi sur l'immigration », a publié jeudi le compte de la Division de la gestion des urgences de Floride sur le réseau social X. Les demandes d'informations complémentaires adressées au bureau du gouverneur républicain Ron DeSantis et à la FDEM, qui construit le site, sont restées sans réponse jeudi après-midi.
Le centre, situé dans un aéroport utilisé pour la formation, aura une capacité initiale d'environ 3000 détenus, a expliqué Ron DeSantis. Construit en huit jours, le centre dispose de plus de 200 caméras de sécurité, de plus de 8500 mètres de barbelés et de 400 agents de sécurité.
PHOTO ANDREW CABALLERO-REYNOLDS, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE
Donald Trump avait visité les installations du nouveau centre de détention mardi.
Les immigrants arrêtés par les forces de l'ordre de Floride dans le cadre du « programme 287(g) » du gouvernement fédéral seront conduits dans ce centre, selon un responsable de l'administration du président Donald Trump. Ce programme, dirigé par l'Immigration and Customs Enforcement (IMDE), permet aux policiers d'interroger les immigrants mis sous leur garde et de les placer en détention en vue d'une éventuelle expulsion.
Jusqu'à 5000 lits début juillet
Le centre devrait être agrandi par tranches de 500 lits, jusqu'à atteindre une capacité estimée à 5000 lits début juillet. Un groupe de législateurs démocrates de Floride s'est rendu jeudi sur le site pour effectuer une « visite législative officielle », faisant part de leurs inquiétudes quant aux conditions de détention et à l'attribution de millions de dollars de contrats publics pour sa construction.
« En tant que législateurs, nous avons à la fois le droit légal et la responsabilité morale d'inspecter ce site, d'exiger des réponses et de dénoncer ces abus avant qu'ils ne deviennent un modèle national », ont indiqué les législateurs dans un communiqué conjoint avant la visite.
Les agences fédérales ont manifesté jeudi leur opposition à une action en justice intentée par des groupes environnementaux visant à faire cesser les activités du centre de détention. Bien que Donald Trump ait salué le centre lors d'une visite officielle en début de semaine, la plainte déposée au nom du département de la Sécurité intérieure (DHS) semble viser à distancier son administration du centre et indique qu'aucun financement fédéral n'y a été consacré à ce jour.
« Le DHS n'a ni mis en œuvre, ni autorisé, ni dirigé, ni financé le centre de détention temporaire de Floride. La Floride construit et exploite le centre avec des fonds publics sur des terres domaniales, en vertu de l'autorité d'urgence de l'État et d'une délégation générale préexistante de l'autorité fédérale pour la mise en œuvre des fonctions d'immigration », indique le document américain.
Des défenseurs des droits de la personne et des groupes autochtones ont également protesté contre le centre, affirmant qu'il représente une menace pour le fragile système des Everglades, qu'il serait cruel envers les détenus en raison de la chaleur et des moustiques, et qu'il se trouve sur une terre que les autochtones considèrent comme sacrée.
Il est également situé dans un endroit sujet à de fréquentes pluies torrentielles, ce qui a provoqué des inondations dans les tentes mardi, lors de la visite du président Donald Trump pour marquer son inauguration. Les autorités de l'État affirment que le complexe peut résister à un ouragan de catégorie 2, avec des vents de 154 à 177 km/h, et que des entrepreneurs ont travaillé toute la nuit pour consolider les zones inondables.
D'après des images partagées avec l'AP, dans la nuit de mercredi à jeudi, des ouvriers ont installé de nouveaux panneaux « Alligator Alcatraz » le long de la seule route menant au site et devant l'entrée de l'aérodrome, autrefois connu sous le nom d'aéroport de formation et de transition Dade-Collier. Les autorités de l'État ont saisi le terrain appartenant au comté où se trouve le centre, en vertu des pouvoirs d'urgence accordés par un décret du gouverneur.
PHOTO REBECCA BLACKWELL, ASSOCIATED PRESS
Des ouvriers ont installé de nouveaux panneaux « Alligator Alcatraz » le long de la seule route menant au site et devant l'entrée de l'aérodrome
Ron DeSantis et d'autres responsables de l'État affirment que l'implantation du centre dans les Everglades, une région sauvage et isolée de Floride, a un objectif dissuasif. Le nom de la célèbre prison fédérale d'Alcatraz, une prison insulaire connue pour ses conditions de détention brutales, vise à envoyer un message. C'est un autre signe que l'administration Trump et ses alliés recourent à des tactiques alarmistes pour tenter de persuader les personnes en situation irrégulière de quitter le pays volontairement.
Des responsables de l'État et du gouvernement fédéral ont vanté les mérites de ce projet sur les réseaux sociaux et sur les ondes conservatrices, partageant un mème représentant un complexe entouré de barbelés et « gardé » par des alligators portant des chapeaux siglés « ICE » (Immigration and Customs Enforcement). Le Parti républicain de Floride a commencé à collecter des fonds pour le centre de détention, en vendant des chandails et des canettes de bière à l'effigie du centre.
Curt Anderson a réalisé son reportage depuis St Petersburg, en Floride. Kate Payne a réalisé son reportage depuis Tallahassee, en Floride. Gisela Salomon, journaliste de l'Associated Press à Miami, a contribué à ce reportage.
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