
Des élus républicains se plaignent de la fumée canadienne
Des élus républicains accusent le Canada de mal gérer ses incendies de forêt, dont la fumée empêche leurs électeurs du Midwest de profiter pleinement de la saison estivale. Un discours où le rôle des changements climatiques est soigneusement ignoré.
Six élus se plaignent
Dans une lettre adressée à Kirsten Hillman, ambassadrice du Canada aux États-Unis, les représentants du Congrès américain Tom Tiffany, Brad Finstad, Glenn Grothman, Michelle Fischbach, Pete Stauber et Tom Emmer, élus du Wisconsin et du Minnesota, se plaignent de « la fumée suffocante des incendies de forêt canadiens qui envahit l'air en ce début d'été ».
« Alors que nous entrons dans la période la plus intense de la saison des incendies, nous aimerions savoir comment votre gouvernement compte atténuer les incendies de forêt et la fumée qui se propage vers le sud », écrivent-ils. Dans leur missive datée du 7 juillet, les élus soulignent que leurs « concitoyens ont été limités dans leur capacité à sortir et à respirer en toute sécurité en raison de la qualité dangereuse de l'air causée par les incendies de forêt ».
Une préoccupation légitime, mais…
« Dans nos régions, les mois d'été sont la meilleure période de l'année pour passer du temps à l'extérieur, profiter de moments en famille et créer de nouveaux souvenirs, mais la fumée des incendies de forêt rend toutes ces activités difficiles », mentionnent notamment les élus.
Selon le Census Bureau des États-Unis, environ 37 millions d'Américains ont d'ailleurs été exposés à une mauvaise qualité de l'air en juin en raison des incendies au Manitoba et en Saskatchewan. « La fumée est nocive pour la santé humaine. La préoccupation est donc légitime », soutient Mike Flannigan, professeur à l'Université de l'Alberta et spécialiste des incendies de forêt. Mais il insiste : les causes à l'origine de cette fumée, ce sont les changements climatiques causés par l'humain.
« La fumée ne connaît pas les frontières », précise-t-il, signalant que des vents du sud poussent actuellement la fumée des incendies qui sévissent au Manitoba et en Ontario jusqu'en Europe. En 2020, le panache de fumée provoqué par des incendies de forêt en Californie et en Oregon s'était répandu jusqu'au Canada ainsi que dans l'est des États-Unis, touchant entre autres New York.
Des incendies de plus en plus importants
Les élus américains rappellent dans leur lettre que le Canada a connu en 2023 « la pire année jamais enregistrée en matière d'incendies de forêt » et que les deux années suivantes sont parmi les pires. Depuis le début de l'année, près de 3000 incendies de forêt au pays ont en effet brûlé une superficie de 4,7 millions d'hectares. Le Manitoba et la Saskatchewan ont été particulièrement touchés cette année, forçant l'évacuation de milliers de personnes.
PHOTO NICK INGRAM, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS
La fumée des feux de forêt canadiens obscurcit partiellement la ligne d'horizon du centre-ville de Kansas City, le mercredi 4 juin 2025.
La tendance est néanmoins similaire aux États-Unis, où les incendies de forêt brûlent des superficies de plus en plus importantes depuis 10 ans. Selon l'Agence américaine de l'environnement (EPA), la saison des incendies commence dorénavant plus tôt et s'étend sur une plus longue période.
Un argument cher à Donald Trump
L'un des signataires de la lettre, l'élu du Wisconsin Glenn Grothman, a déjà affirmé qu'il ne croyait pas au réchauffement planétaire. Le message à l'ambassadrice du Canada ne fait d'ailleurs aucune mention des impacts des changements climatiques sur les incendies de forêt. Les auteurs affirment plutôt que « l'un des principaux facteurs à l'origine du problème est le manque de gestion active des forêts ».
Les élus reprennent ainsi un argument cher au président Donald Trump, qui a accusé la Californie de mal gérer ses forêts lors des incendies qui ont touché Los Angeles plus tôt cette année. « Le président Trump a souvent dit qu'il fallait ramasser les feuilles mortes et le problème disparaîtrait, rappelle Mike Flannigan. Mais le problème, ce n'est pas la gestion des forêts, affirme-t-il. Le problème, c'est que nous avons des conditions météorologiques extrêmes propices aux incendies : nous avons de plus en plus de journées chaudes, sèches et venteuses qui favorisent les incendies. » L'expert ajoute que la gestion des incendies au Canada est parmi les meilleures au monde.
Encore plus d'incendies causés par l'humain aux États-Unis
« Nous avons également constaté que des incendies criminels ont aussi contribué à déclencher plusieurs grands incendies de forêt au Canada », affirment les représentants républicains.
PHOTO TIM EVANS, ARCHIVES REUTERS
Le smog dû à la fumée des feux de forêt canadiens à Minneapolis, Minnesota, le 3 juin 2025
En réalité, le portrait est beaucoup plus nuancé : environ la moitié des incendies au Canada sont d'origine humaine, mais ceux provoqués par la foudre font plus de dégâts avec près de 70 % des superficies brûlées, selon Ressources naturelles Canada. Ceux-ci surviennent généralement dans les zones inhabitées. Aux États-Unis, près de 90 % des incendies sont causés par l'humain. En Californie, cette proportion grimpe à 95 %, selon l'agence Cal Fire.
Des arguments climatosceptiques ?
Curieusement, les arguments des élus républicains ressemblent à ceux avancés par plusieurs comptes propageant de la désinformation climatique sur les réseaux sociaux. Dans une analyse couvrant la période allant d'avril à juin 2025, le groupe Climate Action Against Disinformation, qui réunit plusieurs organisations environnementales, signale que les « récits » les plus populaires affirment que les incendies sont d'origine criminelle ou encore qu'ils sont attribuables à une mauvaise gestion des forêts par le gouvernement canadien et non aux changements climatiques.
Lisez le rapport du Climate Action Against Disinformation (en anglais)
Le rapport indique également qu'une nouvelle théorie émerge sur les réseaux sociaux voulant que les incendies, dont la fumée se propage jusqu'aux États-Unis, soient intentionnellement provoqués par le gouvernement canadien dans un contexte de tensions grandissantes entre les deux pays.
Une recette éprouvée
Ce n'est pas la première fois que les incendies de forêt canadiens provoquent de telles réactions au sud de la frontière. Le 7 juin 2023, le commentateur de Fox News Jesse Watters avait blâmé le premier ministre du Canada pour la fumée des incendies de forêt qui s'était propagée jusqu'aux États-Unis. « Ce que nous savons, c'est que 100 millions d'Américains respirent la fumée canadienne. Et [Justin] Trudeau n'a pas présenté d'excuses », avait-il déclaré sur les ondes du réseau américain.
La réponse de l'ambassade du Canada
« Je peux vous assurer que le Canada prend très au sérieux la prévention, la lutte et l'atténuation des incendies de forêt. Je peux confirmer que la lettre a été reçue par l'ambassade et transmise aux organismes canadiens concernés. Nous y répondrons en temps opportun », a indiqué à La Presse Tarryn Elliott, porte-parole de l'ambassade du Canada à Washington.
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