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«La sécurité de l'Ukraine ne peut reposer sur de simples promesses»

«La sécurité de l'Ukraine ne peut reposer sur de simples promesses»

24 Heures2 days ago
Trump, Zelensky et les gouvernements européens tentent de tracer une voie vers la paix. Mais cessez-le-feu et souveraineté ukrainienne divisent toujours, explique Camille Grand. Publié aujourd'hui à 17h11
Après sa rencontre avec Vladimir Poutine en Alaska samedi 16 août, Donald Trump accueille les dirigeants européens à Washington.
keystone-sda.ch
En bref:
Le président russe entrera-t-il en matière sur les garanties sécuritaires que veut l'Europe? Ou l'avenir de l'Ukraine se jouera-t-il sur les concessions territoriales que pourrait accepter Volodymyr Zelensky? Au lendemain des négociations qui se sont tenues à la Maison-Blanche, le flou demeure sur les intentions de Vladimir Poutine, qui n'a pour l'instant que proposé une rencontre bilatérale à Moscou.
Chercheur au Conseil européen pour les relations internationales à Bruxelles et ancien secrétaire général adjoint de l' OTAN, Camille Grand décrypte les scénarios à venir.
Selon Camille Grand, des garanties de sécurité sont essentielles pour rassurer le peuple ukrainien.
IMAGO/Reporters
Quelles mesures concrètes sont envisagées pour protéger l'Ukraine?
La sécurité de l'Ukraine à long terme reste à construire: elle ne peut reposer sur de simples promesses et déclarations – des États-Unis, de l'Europe ou même de la Russie – mais dépend de mesures concrètes, de vraies garanties de sécurité. Les Ukrainiens espèrent une adhésion à l'OTAN, ce qui constituerait une garantie ultime de protection. Mais cette option reste politiquement compromise: Poutine ne veut pas en entendre parler, et Trump a cédé sur ce point avant même que la négociation ne commence.
Une assistance militaire soutenue et régulière de la part des pays occidentaux serait envisageable, même si leur volonté de maintenir cet engagement sur le long terme reste limitée. Une dernière alternative serait que l'Europe et éventuellement les États-Unis se déploient sur place et soient prêts à intervenir directement en cas d'attaque, transformant tout conflit en affrontement avec l'Occident. Jusque-là, beaucoup de pays, dont les États-Unis, étaient réservés sur cette option, mais leur position semble évoluer. Dans tous les cas, les contours exacts de ces garanties restent largement à définir.
En termes d'effectifs européens, qu'est-ce que cela représenterait?
Les chiffres avancés au printemps dernier parlaient de 15'000 à 25'000 soldats européens en Ukraine. Ils seraient appuyés par des moyens navals et aériens, sans que ceux-ci soient nécessairement déployés sur le sol ukrainien. Ce sont des estimations réalistes: l'effectif serait suffisamment important pour être crédible militairement, sans pour autant constituer un substitut à l'armée ukrainienne. Il ne représenterait pas non plus une menace directe pour la Russie. Ces forces relèvent d'un cadre de garanties de sécurité entre l'Ukraine et ses amis et n'impliquent pas forcément de négociations avec Moscou: la Russie peut en être informée, mais elle ne doit pas avoir de veto.
Dans ces garanties, l'Europe peut-elle peser, ou Trump décide-t-il seul?
Les Européens jouent un rôle important: ils mettent les garanties de sécurité sur la table des négociations. Pendant longtemps, les États-Unis leur ont demandé «que faites-vous pour l'Ukraine?» alors même que l'Europe assurait déjà la majeure partie du soutien économique. Désormais, ils garantissent également la part la plus importante du soutien militaire, tandis que l'aide américaine se limite plus ou moins aux reliquats de l'administration Biden. Les Européens se disent prêts à aller plus loin, mais ils veulent que les discussions se fassent en concertation avec les États-Unis, afin de définir un cadre clair à proposer à l'Ukraine.
Quelles limites les Européens ont-ils voulu imposer à Trump dans les négociations avec Poutine?
Les Européens refusent de transiger sur un principe fondamental: la souveraineté et l'intégrité des frontières européennes ne peuvent être remises en cause par la force. Dans ce cadre, les gouvernements du Vieux-Continent pourraient sans doute juger acceptables certaines demandes de Poutine, comme la place de la langue russe en Ukraine, par exemple. Ils ont cependant insisté sur le fait que d'autres requêtes étaient totalement déraisonnables, notamment celles visant à limiter la souveraineté de l'Ukraine ou à démilitariser le pays. Car une paix durable ne peut passer que par le maintien d'une armée ukrainienne robuste, qui soit en mesure de défendre ses frontières.
Pourquoi la proposition de cessez-le-feu ne fait-elle pas l'unanimité?
C'est une question qui divise profondément. Sous l'influence de Poutine, le président américain plaide désormais pour une «paix globale», estimant que le compromis territorial proposé par le président russe n'est pas si mauvais. Pour les Européens et l'Ukraine, un cessez-le-feu immédiat et sans condition est essentiel pour créer les bases d'une négociation réelle. Le débat est difficile, car Poutine, qui croit encore pouvoir gagner sur le terrain, n'est pas réellement intéressé par la paix. Il n'acceptera des négociations avec Zelensky, et à plus forte raison un accord de paix, qu'aux conditions qu'il impose, et qui sont sans doute inacceptables.
Une solution intermédiaire existe-t-elle?
On peut imaginer que l'Ukraine accepte qu'une partie de son territoire soit occupée, dans un scénario de conflit gelé – soit avec une ligne de contrôle plutôt qu'une frontière internationale et des réclamations territoriales toujours en suspens. Le cœur du débat demeure le maintien de la souveraineté ukrainienne: un cessez-le-feu ne peut pas reconnaître comme définitive la perte de territoires ukrainiens, ni légitimer l'annexion de la Crimée et du Donbass par la Russie.
Si Zelensky cède des territoires, aura-t-il encore une légitimité en tant que président?
Cela dépendrait fortement des conditions. De nombreux Ukrainiens, qui ont fait preuve de courage et d'efficacité tout au long du conflit, refusent de céder les territoires pour lesquels ils se battent depuis trois ans. Toutefois, face à la lassitude de la guerre et à l'impossibilité actuelle de reconquérir certains territoires par la force, certains commencent à envisager une solution alternative reposant sur une négociation. Une partie de la population ukrainienne accepterait sans doute de vivre avec une situation où l'Ukraine ne contrôlerait pas intégralement son territoire pendant une période indéterminée, mais pas de voir le territoire national définitivement amputé sous pression.
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