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Clara Ysé : «Nous sommes obligés socialement de construire une identité fixe»

Clara Ysé : «Nous sommes obligés socialement de construire une identité fixe»

Le Figaro21 hours ago
INTERVIEW - Chanteuse et poétesse, elle est entrée dans la lumière avec un premier album, Oceano Nox, conjuguant au chant lyrique des nappes électro et des sonorités minérales. Avant son prochain album et son concert à l'Olympia le 9 septembre, la voici en tournée cet été.
Sa musique, traversée de cuivres et d'instruments d'Iran comme le doudouk, est une polyphonie de sons et son langage scénique est envoûtant. Clara Ysé s'apprête à enregistrer un nouvel album et se produira sur les scènes des festivals de l'été avant un concert à l'Olympia, le 9 septembre.
Madame Figaro. - Qu'est-ce qui porte votre musique ?
Clara Ysée. - Mon rapport à la musique est une sorte de quête du graal. Mon processus de composition est habité par l'envie de capturer un objet qui m'échappe. C'est une sensation illustrée par Lacan dans sa théorie sur le désir : il le décrit comme un objet fantomatique qui nous meut et qu'on ne peut jamais nommer. Oceano Nox est né d'une série d'intuitions et de la recherche d'un langage musical émotionnel qui a pris forme au fil de quatre ans de travail.
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Quels sont les éléments constitutifs de votre musique ?
Elle est faite des outils que j'ai assemblés au cours de ma vie de poétesse et de musicienne. On y retrouve, d'une part, mon rapport à la musique classique – le chant lyrique est présent dans mon parcours depuis mon enfance – et, de l'autre, mon attachement à la poésie. Elle habite mon écriture car c'est une langue qui échappe aux compromis. Les mélodies d'Oceano Nox sont aussi façonnées par les musiques traditionnelles d'Amérique du Sud et du Moyen-Orient, notamment d'Iran et de Grèce. J'ai toujours eu envie de démultiplier le champ des possibles à travers ma voix et de transmettre les acquis du passé, car la mémoire est fragile.
Pouvez-vous décrire votre personnage ?
Je suis quelqu'un d'entier, et en même temps, je ne crois pas aux personnalités figées. Nous sommes obligés socialement de construire une identité fixe, mais la musique et l'art sont là pour nous rappeler que nous sommes constitués de contradictions et de paradoxes.
Parler de vous en promo est-ce une corvée ?
Absolument pas. Ce qu'on appelle de la «promo» est pour moi une façon très intéressante de dialoguer autour d'un objet, d'éveiller la réflexion et donc de s'inspirer. C'est en mettant des mots sur notre pensée que l'on s'aperçoit si elle est claire et construite, et où sont les failles.
La tenue idéale pour une interview ?
Sur scène, j'adore les jeux de métamorphoses, mais lors d'un entretien, j'aime porter des vêtements simples, que j'oublie. Robe ou jean et tee-shirt, ma tenue doit être confortable et discrète.
J'ai fait deux cents concerts en un an et demi. Je me suis rendu compte de la façon dont ma voix et les sons des instruments changent selon le paysage et l'architecture qui nous entourent Clara Ysée
La question que vous redoutez ?
Les questions trop personnelles, car je ne vois pas l'intérêt de connaître la vie privée d'un artiste, sauf pour les éléments qui auraient un lien direct avec l'objet créatif qu'il présente. On parle beaucoup de santé mentale aujourd'hui et raconter nos expériences est intéressant, mais il faut que l'on partage les fruits d'une véritable élaboration.
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Votre charge mentale du moment ?
J'ai fait deux cents concerts en un an et demi. Je me suis rendu compte de la façon dont ma voix et les sons des instruments changent selon le paysage géographique et l'architecture qui nous entourent. Les interactions génèrent des résultats à chaque fois différents.
Ce que vous allez faire après cette interview ?
Je suis en train de composer les chansons de mon prochain album. Je réalise avec plus d'acuité qu'on peut travailler la voix pour qu'elle ait une amplitude de plus en plus riche, pour qu'elle soit claire et adroite comme un pinceau. Mais aucune technique ne pourra la dompter complètement, car elle est le reflet des paysages qui l'ont habitée, des visages des passants qui se sont gravés dans l'esprit, des sons qui s'inscrivent en elle par mimétisme. Elle est façonnée de tout ce qu'on traverse et, finalement, elle raconte bien plus que ce qu'on voudrait.
Clara Ysé se produit sur les scènes des festivals cet été (dates disponibles sur clarayse.com). Concert à Paris, à l'Olympia, le 9 septembre.
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Thomas Moralès : «Après la mort de Thierry Ardisson, la télé s'habille en noir»
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Le Figaro

time41 minutes ago

  • Le Figaro

Thomas Moralès : «Après la mort de Thierry Ardisson, la télé s'habille en noir»

FIGAROVOX/TRIBUNE - L'écrivain Thomas Morales évoque l'«étrange Monsieur Ardisson», entre fascination pour la provocation et héritage d'une pop culture déjantée, l'animateur aura été, selon lui, l'un des derniers spasmes d'une liberté d'expression en voie de disparition à la télévision. Thomas Morales est écrivain. Il est notamment l'auteur de Tendre est la province (Les Équateurs, 2024). À découvrir PODCAST - Écoutez le club Le Club Le Figaro Idées avec Eugénie Bastié L'homme en noir avait créé un style. C'est peu, et beaucoup à la fois. Une patte télévisuelle. Une narration totalement reformatée de l'interview, entre mise en scène et climax, entre érotisme feint et confessions, entre blagues potaches et vieilles dentelles. Hors du cadre de la promo habituelle, il avait réinventé un genre. En rupture, d'une efficacité commerciale redoutable et d'une démagogie rieuse. Toujours sur le fil. Cette provocation maîtrisée fut aussi, avouons-le, le dernier spasme d'une liberté d'expression en voie de disparition. Après lui, la télé ennuya par tant de sermons et de prudences assassines. Son double-jeu anima, enchanta même nos samedis soir par ses éclats et ses ruses. Il était futé, il connaissait nos faiblesses de téléspectateur, l'attrait pour le scandale et les exhibitions. Publicité L'homme en noir ne s'aimait pas physiquement et il passa sa vie à l'antenne. Il s'habillait pour se cacher et on ne voyait que lui. Il n'était pas à un paradoxe près. Boomer au comportement ombrageux, il aurait voulu être écrivain ou cinéaste, rock star ou artiste maudit, il restera pour toujours l'animateur de notre jeunesse en fuite. Des descentes de police aux salons littéraires, du 93, faubourg Saint-Honoré aux lunettes noires, de Paris Dernière à Rive Droite, il nous ouvrait la porte des boîtes de nuit et des appartements de l'entre-soi. Il avait le génie du m'as-tu vu et de l'esclandre carnavalesque. On était à la fête. Au Luna Park. Il ne reculait devant aucune mascarade. Il coupait, montait, dialoguait ses émissions comme l'artisan bourrelier façonne le cuir. La télé était un jeu de miroirs, nous étions ses complices. Il achetait des voitures anciennes et n'avait pas le permis de conduire. Il était né dans la Creuse et passa sa jeunesse au soleil du Midi. Thierry Ardisson savait faire parler de lui mieux que les autres. Romanesque et roublard, il a créé son propre personnage à son image fantasmée. Il était, à bien des égards, l'archétype savoureux de son époque. L'enfant ambitieux des Trente Glorieuses qui se jeta, à corps perdu, dans les paradis illicites, les métiers clinquants, les fêtes sans fin et la « pop culture ». Sa génération est accusée de tous les maux, elle longe les murs. Ils auraient été « coupables » d'avoir trop profité, d'avoir érigé l'individualisme hédoniste en religion d'état et d'avoir abattu les anciennes structures du pays. Ne les caricaturons pas ! Ils ont été les gentils agents perturbateurs du système ; des anars de droite résilients quand la télé commença à se frigorifier sur le plan des idées. Ils n'étaient pas des saints, ni des procureurs, plutôt des amuseurs inspirés par l'inconsistance de leurs contemporains. Aujourd'hui, les enfants de la télé ont pourtant perdu leur père tentateur, un jésuitisme de la boule à facettes. Parce qu'avec Ardisson, en trente ans, on en a vu des dingueries, des séquences mémorables que l'on se racontait le lundi dans les cours de récréation, des futilités qui ne s'oublient pas Les hommes célèbres sont des leurres ; cachottiers, ils nous montrent seulement ce qu'ils ont décidé d'exposer au grand public. Ardisson, secret, pudique à l'excès, un autre de ses paradoxes, toujours sur ses gardes, avait tous les tics et les tocs des années 1980. Ce pubard du Palace avait pressenti que son avenir se dessinerait dans la lucarne. Dans les marges. C'est là qu'il fera fortune, la littérature payait trop mal, il s'y était essayé non sans talent, mais il préférait les autoroutes du succès aux chemins chaotiques des créateurs sous pentes. Il avait besoin d'espace, de grands cottages en Normandie et de hauteur sous plafond. Son monarchisme d'atmosphère et son cabriolet Peugeot 404 prouvaient qu'il n'avait pas totalement rompu les ponts avec le passé. Contrairement à tous les présentateurs du présent, shootés à l'actualité, Ardisson ne pouvait s'empêcher de regarder dans le rétroviseur. Il ne vénérait personne, surtout pas les gens de son métier, mais face aux artistes, aux vrais, notamment aux écrivains, son œil ne trompait pas. Il n'était pas indifférent à leur déglingue flamboyante. 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Il a fait partie de l'aventure « Salut les Terriens ! », animé par Thierry Ardisson, décédé ce lundi à 76 ans , durant quatre saisons, entre 2015 et 2019. L'humoriste Tom Villa y tenait notamment la chronique du « stagiaire ». « Ardisson, c'était toute mon adolescence, je regardais Tout le monde en parle chez mon voisin. Et puis Paris Dernière . J'avais l'impression de regarder un truc fou, totalement nouveau, un vrai truc d'adultes. Il invitait des gens hyper populaires et réussissait à faire passer de la culture, à faire découvrir des écrivains, des politiques. C'était une bonne stratégie. » « Bosser pour lui, c'était mon rêve ultime, poursuit-il. Il y en a qui rêvent de côtoyer Zidane, Pesquet... Moi, c'était Ardisson. En télé pure, c'est mon plus beau souvenir. J'ai eu la chance de vraiment le voir de l'intérieur pendant quatre ans, d'aller en montage avec lui. Rien ne sortait sans qu'il ne l'ait vu. C'est toujours difficile de rencontrer ses idoles, il y a une chance sur deux pour être déçu, moi j'ai été subjugué. Il savait te dire quand ça n'allait pas. Mais aussi te féliciter quand ça allait. » Un souvenir d'une émission en particulier ? « Il m'avait laissé un jour faire sa propre interview. J'avais joué à Ardisson face à Ardisson. Et j'avais réussi à provoquer chez lui ce fameux Oh mais comment vous savez ça ! Je lui avais parlé de la fois où il avait failli mourir en voiture, et avait eu le réflexe alors qu'il dormait à côté sa conductrice qui s'endormait aussi, de braquer le volant alors qu'il avait un camion face à eux. » Tom Villa avait encore échangé des messages avec Thierry Ardisson, « la semaine dernière ». « Il me disait qu'Audrey (Crespo-Mara, sa compagne) s'occupait bien de lui. » « C'est tout un morceau de télévision. » L'humoriste belge Alex Vizorek a tenu une chronique pendant deux saisons dans l'émission « Salut les Terriens ! ». « Ardisson, c'est le summum de la télé que j'avais aimé, gosse. Et c'est la meilleure place pour un humoriste, c'est celui qui nous mettait le mieux en valeur. » En 2017, Alex Vizorek, alors au micro à la radio sur France Inter, avait ainsi remplacé Stéphane Guillon sur C8. « Je crois qu'il était content d'avoir un Interiste dans son équipe. En fait, ça l'amusait d'avoir des gens différents de lui. Quand je faisais des blagues un peu rêches , il adorait. Il me disait Celle-là, tu la fais pas pour Inter, tu la gardes pour moi ! » Sur le plateau de « Salut les Terriens ! », Vizorek a vu défiler de nombreux invités. « Je me souviens notamment de Pierre Arditi qui passe toute ma chronique à dire Oh mais c'est consternant (rires). Mais en fait, c'était Ardisson, la vraie vedette. Il tenait tellement son plateau. Quand il disait Maintenant, on écoute Vizo , personne ne mouftait ! C'était le roi en son royaume. » « C'était un mathématicien, il avait le souci du moindre détail, il gérait le montage, coupait les 10% de blagues qui tombaient à côté. Alors quand il a dit On met Vizo à la fin, les gens partent pas avant qu'il parle , j'étais tellement fier. » Le chroniqueur prenait des nouvelles par texto à son ancien chef à chaque buzz. « Il me répondait avec son smiley lunettes noires : T'inquiète, Vizo, je gère toujours ! Malgré son âge et la réussite de sa carrière, il voulait encore créer, lancer des idées neuves, comme un newcomer (nouveau venu). »

Mort de Thierry Ardisson : « Il transformait ses interviews en spectacle », réagit Léa Salamé
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Mort de Thierry Ardisson : « Il transformait ses interviews en spectacle », réagit Léa Salamé

Léa Salamé, future présentatrice du 20 heures et héritière de la case du samedi soir, celle-là même où Ardisson a connu son plus grand succès avec « Tout le monde en parle », revient pour nous sur le décès de l'homme en noir ce lundi à 76 ans . Vous avez souvent dit que Thierry Ardisson était un de vos modèles professionnels. Vous êtes particulièrement peinée, aujourd'hui ? LÉA SALAMÉ. Je suis bouleversée car je l'admirais. J'ai deux modèles dans ce métier : Anne Sinclair et Thierry Ardisson. J'ai grandi avec lui. Quand j'étais plus jeune, on ne sortait pas le samedi, ou alors très tard, car il fallait regarder Tout le monde en parle . Le titre était particulièrement bien choisi car, oui, tout le monde en parlait. Il aimait dire que sa recette pour qu'il se passe quelque chose sur son plateau, c'était de mettre un homme politique à côté d'un écrivain, d'un cardinal et d'une porn star. Et, effectivement, grâce à lui on a découvert de grands écrivains américains comme Bret Easton Ellis, mais aussi des Français comme Michel Houellebecq ou Christine Angot. Il réussissait à parler à tout le monde, aux intellos comme aux classes populaires, dont il venait lui-même. Il était excessif, provocateur mais pas seulement. Ce grand érudit nous a fait grandir intellectuellement. Vous l'avez reçu à plusieurs reprises sur France 2 et sur France Inter. Vous saviez qu'il était malade ? Pas du tout car nous n'étions pas intimes. J'ai été prévenue il y a quelques jours seulement. Il est venu en mai dernier pour son livre (son premier roman, L'Homme en noir ) et il n'avait rien dit, rien laissé paraître. Cet ouvrage, c'est comme l'album « Blackstar » de David Bowie, sorti deux jours avant son décès. Ardisson a pensé sa mort comme personne. C'est très ardissonnien comme geste… Il était très ému face à vous durant cette promotion… Oui, il semblait plus à fleur de peau que d'habitude. Enlaçant longuement Nicolas Demorand en entrant dans le studio, qu'il ne connaissait pas. Mais il a dit avoir été « explosé » par son livre ( dans lequel le matinalier d'Inter révèle sa bipolarité ) . J'aimais quand le masque de l'homme en noir se fissurait. Au fond, Ardisson était un mec ultrasensible. Il fallait voir son regard quand il écoutait parler sa femme, Audrey Crespo-Mara (la présentatice de JT sur TF 1) . J'ai rarement vu un homme avec autant de tendresse dans les yeux. On se souviendra de ses concepts et de ses interviews ? Les questions qu'il posait étaient folles. Tout le monde est capable de poser des questions. Mais, lui, il transformait ses interviews en spectacle . Quelques punchlines pour détendre l'atmosphère, la promo vite expédiée et il partait sur ses entretiens à thème, sorte de questionnaires de Proust adaptés à l'époque. Évidemment on se souviendra de « est-ce que sucer c'est tromper ? » (question posée à Michel Rocard) mais il n'y avait pas que ça. C'était un créateur insensé . Vous vous souvenez que pour lancer leur promo, les invités devaient faire les marionnettes sur un jingle ? Eh bien il a réussi à faire faire ça à Mikhaïl Gorbatchev ! Autant d'impertinence, aujourd'hui, c'est impossible. C'est rare de voir quelqu'un qui avait une aussi grande liberté. Ce qui me manquera le plus, c'est sa liberté.

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