« Ce titre veut dire beaucoup de choses » : Jannik Sinner est devenu à Wimbledon un champion tout-terrain
Cinq semaines plus tard, les mauvais souvenirs sont définitivement ensevelis. Dimanche, Jannik Sinner a fait bouillir à grandes eaux les noires pensées qui devaient, forcément, loger encore dans un coin reculé de sa tête. Lessivées, expulsées les tristes réminiscences de trois balles de match d'affilée tombées dans le vide, un soir de folie douce en finale de Roland-Garros. Pour Carlos Alcaraz, l'éclat et la légende. Pour Sinner, ce soir-là, la douloureuse meurtrissure. « Émotionnellement, la défaite à Paris a été très dure », reconnaissait au milieu du court le héros du jour. « Mais finalement, peu importe comment tu perds. Il faut se remettre au travail, comprendre ce qui n'a pas fonctionné, pourquoi tu as perdu et accepter la défaite. Ce titre veut dire beaucoup de choses. Il représente beaucoup pour moi. »
Pour son premier dimanche de fin de grand-messe à Wimbledon, Sinner a régné en maître absolu, en patron d'un treizième duel avec l'Espagnol, qui annonce une grande, très grande portée dans les années à venir, entre les deux puissants de la galaxie, qui semblent ne plus ou ne pas avoir aujourd'hui de rivaux à leur mesure. Depuis l'Open d'Australie 2024, les deux jeunes loups de 23 et 22 ans se sont adjugé les sept Grands Chelems disputés, quatre pour l'Italien désormais, trois pour l'Espagnol. Série en cours.
Alcaraz inconstant
Ce n'est plus une domination, c'est une emprise totale, bicéphale, presque annoncée, dans la magie nocturne d'un quart de finale irréel à New York en 2022. Mais dimanche, des deux têtes de gondole du tennis mondial, c'est la tignasse rousse de Sinner qui s'est élevée le plus haut. Et de loin. Incontestable et plus fort en tout. L'Italien a mieux servi, mieux retourné, notamment les deuxièmes balles de « Carlitos » qu'il a cherché à agresser sans cesse. Son revers long de ligne a fait mal, son agressivité, son audace, sa volonté de gagner du terrain et de venir finir au filet furent des marqueurs bien plus visibles, très étonnamment, que dans le jeu du Murcien, délesté dimanche de sa créativité habituelle.
Jamais vraiment stable, jamais vraiment ancré, pas vraiment inspiré, Alcaraz. Une inconstance doublée, en l'occurrence, d'une certaine impuissance, presque surprenante dans les deux dernières manches. « C'est toujours difficile de perdre une finale de Grand Chelem », convenait le quintuple galonné qui... n'en avait encore pas perdu jusque-là. « Dans ce match, j'ai eu des moments où je me suis senti bien, d'autres parfaitement bien et d'autres où je ne savais pas quoi faire. J'ai eu des moments de frustration qui m'ont un peu bloqué mentalement. Je sentais que je ne lui faisais pas mal de fond de court. Il a joué un tennis plus complet que moi. » Plus jeune joueur de l'ère Open à disputer quatre finales de Majeur d'affilée, Sinner vient chercher sur gazon un blason manquant. Mais surtout, il prouve avec éclat qu'il est, lui aussi, un champion tout-terrain, même si l'herbe a quitté depuis belle lurette le cycle des années folles.
Un numéro un mondial incassable
Après l'Open d'Australie glané dans les remous, les suspicions et les remugles de son contrôle positif au clostébol en début d'année, l'Italien prouve surtout, une fois de plus, qu'il peut se relever de tout. D'un sacre à Roland-Garros touché du doigt, d'un Majeur britannique gagné sans préparateur physique ni physio attitrés. Après Iga Swiatek, sacrée samedi, les deux stars rattrapées par la patrouille antidopage en 2024 sortent donc de Wimbledon en pleine lumière.
Et Sinner caracole aujourd'hui en tête du classement. Loin devant tout le monde, avec 3 430 points d'avance sur « Carlitos ». Les autres existent à peine. Et il faudra être sacrément fort pour se faire une place entre ces deux jeunes hommes-là, qui n'aiment rien d'autre que de couper la poire en deux, même si Sinner tempère encore quand on évoque la rivalité naissante et les élogieuses comparaisons avec un trio qui fit, vingt ans durant, la belle gloire du tennis mondial.
Dimanche, devant ses parents et son frère, Sinner a rappelé avec férocité et talent que le vent de l'histoire pouvait tourner. Premier Italien sacré au All England, quand Matteo Berrettini (2021) et Jasmine Paolini (2024) avaient, eux, échoué en finale, le numéro 1 mondial a mis un violent coup de serpe dans le flanc du Murcien. Alcaraz visait le hat-trick à « Wim », la 25e victoire de suite. Il surfait sur cinq succès de rang dans cette confrontation suprême et sa confiance paraissait inébranlable. Mais le Transalpin a tout piétiné d'un coup de botte.
Et pourtant... En huitièmes de finale, l'Italien était mené deux sets à zéro et allègrement dominé par Grigor Dimitrov, avant que le pectoral droit du Bulgare ne cède. À quelques jeux d'être emporté par la bourrasque. Sans ce coup du sort, le vent de l'histoire n'aurait sans doute pas tourné. Mais lundi, Sinner est debout et c'est lui que Wimbledon a fêté.
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