
Accords Suisse-UE: des eurodéputés sortent du silence pour dire oui
Ignazio Cassis et le commissaire européen Maros Sefcovic ont fixé les modalités de la coopération entre la Suisse et l'UE, pour la période allant jusqu'à l'entrée en vigueur souhaitée du paquet d'accords bilatéraux.
OLIVIER MATHYS/EPA
En bref:
Lorsque les politiques de Bruxelles parlent de la Suisse, l'accident n'est jamais loin. Seul Beat Jans (PS/BS) ose agir, a récemment déclaré Andreas Schwab au «Südkurier» de Constance. Tous les autres conseillers fédéraux auraient «la trouille». Quand le «Blick» a repris cette déclaration, le député européen allemand a été inondé de courriers hostiles en provenance de Suisse. Pourtant, il voulait simplement dire que le Conseil fédéral devait s'engager davantage en faveur des nouveaux accords avec l'UE pour obtenir l'adhésion populaire.
Andreas Schwab et Christophe Grudler sont les deux parlementaires qui se soucient le plus de la Suisse au sein de l'UE. On peut les qualifier sans exagération d'amis de la Suisse. L'un est allemand et âgé de 52 ans, l'autre français et âgé de 60 ans.
Le député européen allemand Andreas Schwab (CDU) suit les négociations avec la Suisse depuis de nombreuses années.
IMAGO
Tous deux ont grandi près de la Suisse: Andreas Schwab dans la ville de Rottweil, non loin du lac de Constance, et Christophe Grudler à Belfort, au pied du Jura. L'un est membre de la CDU, l'autre, d'un parti du centre appelé Mouvement démocrate. Christophe Grudler est le coordinateur de la Commission Industrie, Recherche, Énergie au Parlement européen et rapporteur permanent pour les relations avec la Suisse. Andreas Schwab est l'auteur d'un ouvrage politique publié en 2022.
Christophe Grudler est membre de la délégation pour la coopération nordique et pour les relations avec la Suisse et la Norvège.
MARTIN BERTRAND/IMAGO
«Oui», explique Christophe Grudler, «quand on évoque la Suisse à Bruxelles en tant que Français ou Allemand, cela provoque souvent des réactions disproportionnées en Suisse, sans rapport avec l'importance réelle du sujet».
Andreas Schwab reconnaît qu'il lui est parfois difficile de s'adresser à ses électeurs de manière claire sans heurter la sensibilité des Suisses. Pour l'instant, il s'agit d'apaiser les tensions, estime le Français. Il se rendra régulièrement en Suisse ces prochains mois pour présenter la position de l'UE concernant les accords avec la Suisse . Mais six mois avant la votation, il ne mettra plus les pieds dans le pays. Tous deux considèrent que Berne devrait s'impliquer davantage dans ces accords. L'avenir du pays est en jeu.
Christophe Grudler était à Berne avec le président français, Emmanuel Macron . Il a conseillé au Conseil fédéral d'éviter toute manœuvre tactique et de s'engager pleinement en faveur des accords qu'il négocie. «Seuls les combats que l'on ne mène pas sont perdus d'avance.» Tous deux se félicitent que le ministre des Affaires étrangères, Ignazio Cassis, ait récemment affiché davantage de fermeté. Mais faut-il encore le croire? se demande le politicien allemand. La Suisse a obtenu beaucoup lors des négociations
Après le traumatisme de 2021, lorsque le Conseil fédéral a brutalement abandonné un accord-cadre négocié pendant des années avec l'UE, les nouvelles négociations ont agréablement surpris les deux hommes politiques. Le Français estime que la Suisse a obtenu beaucoup de choses. Par exemple, la directive sur les droits des citoyens de l'Union européenne ne s'appliquera qu'en partie en Suisse. Le Tribunal arbitral réunira des juges suisses et européens, la Cour de justice européenne n'y tenant qu'un rôle secondaire.
Avec la clause de sauvegarde pour la gestion de l'immigration, l'UE a par ailleurs accordé à la Suisse un instrument qu'elle avait refusé à la Grande-Bretagne avant le référendum sur le Brexit en 2016.
Selon Christophe Grudler, la migration est un sujet si sensible qu'il convient d'anticiper les craintes qu'elle suscite. Interrogé sur l'état d'esprit de l'UE envers la Suisse, maintenant que les accords sont sur la table, Andreas Schwab répond sans détour qu'il n'y en a pas.
De nombreux politiciens européens s'intéressent peu à notre pays. Dans sa région natale du Bade-Wurtemberg, les uns estiment que l'Allemagne devrait s'inspirer de la Suisse: payer moins et profiter davantage. Les autres estiment que la Suisse doit se conformer aux règles qui s'appliquent à toute l'Europe. «La Suisse ne doit pas être une vache à lait pour l'UE»
La Suisse est appréciée, souligne Andreas Grudler, mais la jalousie se fait sentir. Lorsque le Parlement européen votera sur les accords avec la Suisse en 2026, le résultat ne sera pas acquis d'avance. Une Estonienne, un Grec ou un Espagnol veulent simplement savoir si la Suisse paie suffisamment pour accéder au marché unique. «Exigez le double!», demandent certains. «La Suisse ne doit pas être une vache à lait pour l'UE», ajoute le politicien. «Elle doit payer le juste prix.» Il parle des accords autour de lui.
Ce que le Français souhaite avant tout du débat en Suisse, c'est qu'il soit «honnête». «Je m'inquiète de voir des arguments populistes détruire quelque chose qui est vital pour l'avenir de la Suisse.»
Pour tous les deux, l'honnêteté implique de reconnaître que le monde est devenu plus exigeant et plus dangereux. L'Europe en souffre, certes, mais l'union fait la force. Cela vaut aussi pour l'Allemagne ou la France, et encore plus pour un petit État comme la Suisse. Face à l'intensification de la concurrence économique sino-américaine et aux puissances agressives comme la Russie, la Suisse et l'UE deviennent de plus en plus interdépendantes. Quand adaptabilité rime avec succès pour la Suisse
Pour Christophe Grudler, seuls ceux qui s'adaptent s'en sortiront. Cela vaut autant pour l'UE que pour la Suisse, pays avec ses propres spécificités, innovant et travailleur. Le sentiment d'être capable de rivaliser avec le monde entier fait partie de son ADN. Mais parfois, sa conviction d'être si unique la pousse à commettre des erreurs.
Un oui du peuple suisse aux nouveaux accords avec l'UE serait une opportunité et un grand soulagement. «J'aime la Suisse, je veux l'aider. Je pense qu'une coopération plus étroite avec l'UE lui serait utile.» Andreas Schwab adopte une position plus pragmatique. «Un oui ne constituerait pas un énorme bond en avant, mais plutôt une garantie que tout demeure en l'état, ou du moins ne se détériore pas.»
En revanche, tous deux considèrent le non comme une occasion qu'on aurait manquée. «Elle ne se représentera pas», affirme l'Allemand. C'est maintenant ou jamais. Un refus entraînerait le dépérissement progressif des accords bilatéraux existants , qui ne pourraient plus évoluer selon les nouvelles exigences. Alors que les problèmes s'accumulent en Europe, la Suisse n'est pas épargnée.
Traduit de l'allemand par Emmanuelle Stevan
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Autres newsletters Dominique Eigenmann est correspondant en Allemagne, plus précisément à Berlin, depuis 2015. Après des études de germanistique et de philosophie à Zurich et Paris, il a commencé à écrire pour le «Tages-Anzeiger» en 1994. Plus d'infos @eigenmannberlin
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