
Les négociations sur le traité plastique s'embourbent à mi-parcours, voici pourquoi
« Beaucoup de questions sont restées en suspens », a reconnu samedi soir Luis Vayas Valdivieso, ambassadeur d'Équateur en Grande-Bretagne, qui préside cette négociation. Commencée il y a près de trois ans, elle doit s'achever le 14 août avec la publication d'un traité. Mais tout reste à faire. Arrivée à une « étape cruciale », la négociation a besoin d'une « vraie avancée » pour aboutir dans les délais impartis, a-t-il effectivement expliqué, lors d'une séance de bilan à mi-parcours.
La nouvelle session, ajoutée au calendrier onusien après l'échec des discussions en Corée du Sud fin 2024, est destinée à rédiger un traité « juridiquement contraignant » qui régulerait au niveau mondial la production, la consommation et la fin de vie du plastique.
Chaque année, 22 millions de tonnes de déchets plastique sont rejetées dans l'environnement, empoisonnant sols et océans, et menaçant la biodiversité et la santé humaine par accumulation de microplastiques dans l'organisme.
1500 parenthèses
« Des progrès ont été faits, mais ne sont pas suffisants », a dit Luis Vayas Valdivieso. Les travaux ont débouché sur un texte de 35 pages au lieu de 22 initialement. Et surtout le nombre de parenthèses, c'est-à-dire de sujets sur lesquels aucun accord n'a été trouvé, a gonflé à près de 1.500 contre 371 dans la version initiale du texte.
Principale fracture : un groupe de pays pétroliers (pays arabes, Russie, Iran, Malaisie…) continue de s'opposer à ce que le traité fixe des objectifs de réduction de production de plastique. Or, si rien n'est fait, elle triplera d'ici 2060, selon l'OCDE.
Les États-Unis et d'autres s'opposent aussi au champ d'application initialement prévu : ils refusent le terme « sur toute la durée de vie du plastique », depuis l'extraction du pétrole qui sert à le fabriquer jusqu'à sa transformation en déchet.
En face, une coalition de pays dits « exigeants », dont les 27 pays de l'Union européenne, le groupe des petites îles et plusieurs pays africains et latino-américains, demande que le texte comporte bien un objectif de réduction de la production, seul moyen de juguler la pollution en aval.
La plupart des participants admettent que le processus de négociation est trop lent. « Nous risquons l'échec », a estimé le délégué des îles Fidji.
« Microplastiques dans notre sang »
Malgré le « brouillard » actuel, il reste « une chance de quitter Genève avec ce traité », a néanmoins estimé samedi Inger Andersen, directrice exécutive du Programme des Nations Unies pour l'environnement, la branche de l'ONU qui organise les discussions. Luis Vayas Valdivieso a incité les diplomates à « accélérer » le mouvement.
Une source diplomatique a indiqué à quelques journalistes que de nombreuses réunions informelles auraient lieu dimanche, journée où aucune réunion officielle n'est prévue. « Il faut passer à la vitesse supérieure », a-t-elle dit, évoquant une « négociation par paquet ».
L'arrivée de plusieurs ministres de l'Environnement ou hauts représentants d'administration à Genève en début de semaine pourrait aussi mettre de l'huile dans les rouages, espère-t-elle. Le Koweit a proposé de « tomber d'accord sur ce qui peut nous rassembler plutôt que d'exacerber » les différences. Proposition reprise par plusieurs autres pays.
Mais pour Eirik Lindebjerg, de l'organisation environnementale WWF, cette proposition est une « tentative de transformer le traité en simple accord pour la gestion des déchets ». Ces pays souhaitent « interdire aux négociateurs la possibilité de parler de l'élément central du traité, l'élimination des produits chimiques les plus problématiques, réduire les volumes de plastique et changer la conception des produits plastique », a-t-il dit à l'AFP.
« Une chose nous unit, (...) ce sont les microplastiques dans notre sang, dans nos poumons, notre corps, (...) il ne s'agit pas de recycler (le plastique) simplement. Il ne s'agit pas de mettre un emplâtre sur une jambe de bois », a plaidé le représentant du Panama, Juan Monterrey Gomez dans une intervention très applaudie.
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Le Figaro
2 days ago
- Le Figaro
Traité plastique : à Genève, les négociations restent embourbées
À mi-parcours, la nouvelle session de négociations engagée depuis mardi à Genève entre 184 pays pour tenter d'élaborer le premier traité mondial contre le fléau de la pollution plastique reste embourbée dans les divisions, malgré le volontarisme de ses organisateurs. «Beaucoup de questions sont restées en suspens», a reconnu Luis Vayas Valdivieso, ambassadeur d'Équateur en Grande-Bretagne, qui préside cette négociation. Commencée il y a près de trois ans, elle doit s'achever le 14 août avec la publication d'un traité. Arrivée à une «étape cruciale», la négociation a besoin d'une «vraie avancée» pour aboutir dans les délais impartis, a-t-il ajouté, lors d'une séance de bilan à mi-parcours. La nouvelle session, ajoutée au calendrier onusien après l'échec des discussions en Corée du Sud fin 2024, est destinée à rédiger un traité «juridiquement contraignant» qui régulerait au niveau mondial la production, la consommation et la fin de vie du plastique. Chaque année, 22 millions de tonnes de déchets plastique sont rejetées dans l'environnement, empoisonnant sols et océans, et menaçant la biodiversité et la santé humaine par accumulation de microplastiques dans l'organisme. Publicité 1500 parenthèses «Des progrès ont été faits, mais ne sont pas suffisants», a dit Luis Vayas Valdivieso. Les travaux ont débouché sur un texte de 35 pages au lieu de 22 initialement. Et surtout le nombre de parenthèses, c'est-à-dire de sujets sur lesquels aucun accord n'a été trouvé, a gonflé à près de 1.500 contre 371 dans la version initiale du texte. Principale fracture : un groupe de pays pétroliers (pays arabes, Russie, Iran, Malaisie..) continue de s'opposer à ce que le traité fixe des objectifs de réduction de production de plastique. Or, si rien n'est fait, elle triplera d'ici 2060, selon l'OCDE. Les États-Unis et d'autres s'opposent aussi au champ d'application initialement prévu : ils refusent le terme «sur toute la durée de vie du plastique», depuis l'extraction du pétrole qui sert à le fabriquer jusqu'à sa transformation en déchet. En face, une coalition de pays dits «exigeants», dont les 27 pays de l'Union européenne, le groupe des petites îles et plusieurs pays africains et latino-américains, demande que le texte comporte bien un objectif de réduction de la production, seul moyen de juguler la pollution en aval. La plupart des participants admettent que le processus de négociation est trop lent. «Nous risquons l'échec», a estimé le délégué des îles Fidji. «Microplastiques dans notre sang» Malgré le «brouillard» actuel, il reste «une chance de quitter Genève avec ce traité», a néanmoins estimé samedi Inger Andersen, directrice exécutive du Programme des Nations Unies pour l'environnement, la branche de l'ONU qui organise les discussions. Luis Vayas Valdivieso a incité les diplomates à «accélérer» le mouvement. Une source diplomatique a indiqué à quelques journalistes que de nombreuses réunions informelles auraient lieu dimanche, journée où aucune réunion officielle n'est prévue. «Il faut passer à la vitesse supérieure», a-t-elle dit, évoquant une «négociation par paquet». L'arrivée de plusieurs ministres de l'Environnement ou hauts représentants d'administration à Genève en début de semaine pourrait aussi mettre de l'huile dans les rouages, espère-t-elle. Le Koweït a proposé de «tomber d'accord sur ce qui peut nous rassembler plutôt que d'exacerber» les différences. Proposition reprise par plusieurs autres pays. Mais pour Eirik Lindebjerg, de l'organisation environnementale WWF, cette proposition est une «tentative de transformer le traité en simple accord pour la gestion des déchets». Ces pays souhaitent «interdire aux négociateurs la possibilité de parler de l'élément central du traité, l'élimination des produits chimiques les plus problématiques, réduire les volumes de plastique et changer la conception des produits plastique», a-t-il dit à l'AFP. Publicité «Une chose nous unit, (...) ce sont les microplastiques dans notre sang, dans nos poumons, notre corps, (...) il ne s'agit pas de recycler (le plastique) simplement. Il ne s'agit pas de mettre un emplâtre sur une jambe de bois», a plaidé le représentant du Panama, Juan Monterrey Gomez dans une intervention très applaudie. Plusieurs observateurs d'ONG se sont désolés que l'intervention de la déléguée chinoise - qui semblait vouloir offrir des pistes - ait été interrompue par Luis Vayas Valdivieso. «Il aurait été important d'entendre ce qu'a à dire le premier pays producteur de plastique du monde», a déclaré à l'AFP Bjorn Beeler, directeur exécutif de l'ONG IPEN.


Le HuffPost France
2 days ago
- Le HuffPost France
Les négociations sur le traité plastique s'embourbent à mi-parcours, voici pourquoi
POLLUTION - Toujours pas d'avancée, ou si peu. À mi-parcours, la nouvelle session de négociations engagée depuis mardi 5 août à Genève entre 184 pays pour tenter d'élaborer le premier traité mondial contre le fléau de la pollution plastique reste embourbée dans les divisions, malgré le volontarisme de ses organisateurs. « Beaucoup de questions sont restées en suspens », a reconnu samedi soir Luis Vayas Valdivieso, ambassadeur d'Équateur en Grande-Bretagne, qui préside cette négociation. Commencée il y a près de trois ans, elle doit s'achever le 14 août avec la publication d'un traité. Mais tout reste à faire. Arrivée à une « étape cruciale », la négociation a besoin d'une « vraie avancée » pour aboutir dans les délais impartis, a-t-il effectivement expliqué, lors d'une séance de bilan à mi-parcours. La nouvelle session, ajoutée au calendrier onusien après l'échec des discussions en Corée du Sud fin 2024, est destinée à rédiger un traité « juridiquement contraignant » qui régulerait au niveau mondial la production, la consommation et la fin de vie du plastique. Chaque année, 22 millions de tonnes de déchets plastique sont rejetées dans l'environnement, empoisonnant sols et océans, et menaçant la biodiversité et la santé humaine par accumulation de microplastiques dans l'organisme. 1500 parenthèses « Des progrès ont été faits, mais ne sont pas suffisants », a dit Luis Vayas Valdivieso. Les travaux ont débouché sur un texte de 35 pages au lieu de 22 initialement. Et surtout le nombre de parenthèses, c'est-à-dire de sujets sur lesquels aucun accord n'a été trouvé, a gonflé à près de 1.500 contre 371 dans la version initiale du texte. Principale fracture : un groupe de pays pétroliers (pays arabes, Russie, Iran, Malaisie…) continue de s'opposer à ce que le traité fixe des objectifs de réduction de production de plastique. Or, si rien n'est fait, elle triplera d'ici 2060, selon l'OCDE. Les États-Unis et d'autres s'opposent aussi au champ d'application initialement prévu : ils refusent le terme « sur toute la durée de vie du plastique », depuis l'extraction du pétrole qui sert à le fabriquer jusqu'à sa transformation en déchet. En face, une coalition de pays dits « exigeants », dont les 27 pays de l'Union européenne, le groupe des petites îles et plusieurs pays africains et latino-américains, demande que le texte comporte bien un objectif de réduction de la production, seul moyen de juguler la pollution en aval. La plupart des participants admettent que le processus de négociation est trop lent. « Nous risquons l'échec », a estimé le délégué des îles Fidji. « Microplastiques dans notre sang » Malgré le « brouillard » actuel, il reste « une chance de quitter Genève avec ce traité », a néanmoins estimé samedi Inger Andersen, directrice exécutive du Programme des Nations Unies pour l'environnement, la branche de l'ONU qui organise les discussions. Luis Vayas Valdivieso a incité les diplomates à « accélérer » le mouvement. Une source diplomatique a indiqué à quelques journalistes que de nombreuses réunions informelles auraient lieu dimanche, journée où aucune réunion officielle n'est prévue. « Il faut passer à la vitesse supérieure », a-t-elle dit, évoquant une « négociation par paquet ». L'arrivée de plusieurs ministres de l'Environnement ou hauts représentants d'administration à Genève en début de semaine pourrait aussi mettre de l'huile dans les rouages, espère-t-elle. Le Koweit a proposé de « tomber d'accord sur ce qui peut nous rassembler plutôt que d'exacerber » les différences. Proposition reprise par plusieurs autres pays. Mais pour Eirik Lindebjerg, de l'organisation environnementale WWF, cette proposition est une « tentative de transformer le traité en simple accord pour la gestion des déchets ». Ces pays souhaitent « interdire aux négociateurs la possibilité de parler de l'élément central du traité, l'élimination des produits chimiques les plus problématiques, réduire les volumes de plastique et changer la conception des produits plastique », a-t-il dit à l'AFP. « Une chose nous unit, (...) ce sont les microplastiques dans notre sang, dans nos poumons, notre corps, (...) il ne s'agit pas de recycler (le plastique) simplement. Il ne s'agit pas de mettre un emplâtre sur une jambe de bois », a plaidé le représentant du Panama, Juan Monterrey Gomez dans une intervention très applaudie.


Le HuffPost France
3 days ago
- Le HuffPost France
Contrex et Hépar épinglés par Mediapart pour leurs taux « incommensurables » et « nuisibles » de microplastiques
SANTE - Nestlé toujours plus dans la tourmente. Des taux de pollution de microplastiques « incommensurables » ont été retrouvés dans les eaux Contrex et Hépar, selon le magistrat chargé de l'enquête préliminaire dans le cadre des poursuites contre Nestlé Waters concernant des décharges sauvages de déchets polluants dans les Vosges, révèle ce samedi 9 août Mediapart. Nestlé Waters est poursuivi pour avoir stocké des déchets et maintenu quatre décharges sauvages à Contrexéville, They-sous-Montfort, Saint-Ouen-Les-Parey et Crainvilliers, représentant un volume cumulé de 473 700 mètres cubes, l'équivalent de 126 piscines olympiques. Le procès, décidé après une enquête du pôle régional environnement du parquet de Nancy, se tiendra du 24 au 28 novembre. Nestlé est notamment poursuivi pour avoir, autour de ces décharges, « laissé s'écouler dans les eaux superficielles et souterraines » des « particules de microplastiques » à des concentrations « rendant toute vie aquatique impossible et ayant des effets nuisibles sur la santé, la flore et la faune ». Des « effets nuisibles sur la santé humaine » Les révélations de Mediapart, qui a contribué avec Le Monde et Radio France aux révélations sur les traitements illégaux utilisés par le passé par Nestlé Waters sur ses eaux, indiquent que les décharges de plastique « sont (à) l'origine » de taux élevés de microplastiques retrouvés à la sortie des forages des eaux ensuite embouteillées sous les marques Contrex et Hépar. Le média s'appuie notamment sur une enquête de l'Office français de la biodiversité (OFB) et de l'Office central de lutte contre les atteintes à l'environnement et à la santé publique (Oclaesp). « Une analyse chiffrée illustre que les proportions sont incommensurables s'agissant de l'introduction de microplastiques dans les sols vosgiens par Nestlé aux lieux des décharges, sur les terres et les eaux situées en aval », indique le magistrat chargé de l'enquête, selon Mediapart, alertant sur « leurs effets nuisibles sur la santé humaine ». Les taux de microplastiques sont de 515 particules de microplastique par litre (mp/L) pour Contrex, et 2 096 pour Hépar, soit des concentrations 51 000 à 1,3 million de fois supérieures à celles retrouvées dans des lacs, fleuves et rivières par deux études sur lesquelles s'appuient les enquêteurs. Et de 5 à 2 952 fois supérieurs aux taux moyens dans les nappes phréatiques du monde, selon d'autres études. Ces taux sont également supérieurs à ceux retrouvés dans d'autres eaux en bouteille par des chercheurs. « La dégradation est substantielle en ce qu'ils sont fragmentés en micro voire nanoplastiques, imprégnés et diffusés dans les sols et les réseaux d'eaux souterraines, de sorte qu'aucune dépollution n'est envisageable », ajoutent les enquêteurs. Nestlé Waters dément Contacté par Mediapart, Nestlé Waters affirme « qu'aucune pollution n'est avérée aux termes des analyses environnementales partagées avec les autorités. Toutes nos eaux peuvent être bues en toute sécurité ». Le média indique avoir consulté une note confidentielle dans laquelle Nestlé affirme en 2022 que les décharges pourraient avoir « un impact sur la qualité des eaux ». Selon l'entreprise, les décharges incriminées datent des années 1960, avant qu'elle ne soit propriétaire des terrains pollués. Les taux de microplastiques dans les eaux minérales naturelles ne sont pas réglementés. Omniprésentes dans l'environnement, ces substances sont au cœur des négociations en cours à Genève pour élaborer un traité contre la pollution plastique.