
Comment épauler les enfants qui pleurent une amie ?
Samedi, la petite Melina Frattolin aurait été tuée par son père lors de leurs vacances aux États-Unis. La fillette de 9 ans ne retrouvera jamais les autres élèves de son école primaire de Montréal. Comment accompagner un enfant dans le deuil d'une amie, d'une voisine ou d'une camarade de classe ? Voici quelques pistes pour éclairer les parents.
Faut-il parler de la mort d'emblée ?
Oui. Retenir l'information ne protégera pas notre enfant. « Bien souvent, ça risque de causer plus de dégâts, parce que l'enfant peut entendre les informations [aux nouvelles ou auprès d'autres enfants] sans avoir un endroit sécurisant pour poser ses questions », explique Alexandra Gagnon, psychoéducatrice chez Deuil-Jeunesse, un organisme spécialisé dans l'accompagnement face au deuil. Pour aborder le sujet, elle recommande de choisir un lieu calme, où l'enfant se sent en sécurité, et aussi d'éviter d'inventer une histoire pour adoucir la réalité.
La présidente de l'Ordre des psychologues, Christine Grou, abonde aussi dans le même sens. « Éviter la peine, ce n'est pas réaliste. Il faut plutôt donner aux enfants des outils pour y faire face, dont une présence parentale rassurante qui leur donne un espace de parole. »
Comment l'expliquer ?
Les enfants d'âge primaire n'ont pas tous le même niveau de compréhension de la mort, tout dépendant de leur âge, de leur personnalité et des deuils qu'ils ont vécus. Et ils n'ont pas tous le même niveau de proximité avec la personne morte. « La meilleure conduite à tenir pour les parents, c'est de donner l'information, mais seulement l'information [qu'ils jugent] pertinente. Ce n'est pas nécessaire de donner tous les détails », précise Mme Grou.
« On n'a pas le choix de rester dans un vocabulaire qui est simple, concret, et qui est [ancré] dans la vérité. Puis après ça, on va aller voir s'il a des questions », dit Alexandra Gagnon. Cette étape permet de corriger le tir si l'enfant a mal compris nos propos.
Le contexte criminel doit-il changer notre façon d'intervenir auprès de notre enfant ?
Pour Alexandra Gagnon, créer un espace de discussion permet de rassurer l'enfant. « Nous, en tant qu'adultes, on se dit qu'un meurtre va nécessairement amener plus de réactions chez nos enfants. En fait, tous les types de décès ont leurs particularités, et ça fait partie de l'histoire », indique-t-elle. « Si on cache une partie de la vérité, le jeune va pouvoir aller la chercher, l'information. »
Grou. Dans le cas d'une affaire médiatisée, la présidente de l'OPQ suggère aussi d'accompagner l'enfant lorsqu'il regardera le bulletin de nouvelles ou qu'il lira un article de journal traitant de la situation.
Est-ce que l'école a un rôle à jouer ?
Selon les deux expertes, même si la mort est survenue pendant les vacances scolaires, le personnel de l'école devra aborder le sujet à la rentrée. « Il se peut qu'un enfant réagisse seulement quand il voit les impacts concrets [de l'absence] », souligne Alexandra Gagnon. « Nous, en tant qu'adultes, on le sait qu'à la rentrée, cette jeune-là ne rentrera pas à l'école. Mais l'enfant, ça se peut qu'il soit tellement dans le moment présent qu'il ne le réalise pas. »
L'école offre aux enfants un lieu qui leur permet de parler du deuil en groupe, avec un professionnel ou avec un adulte de confiance, mais aussi de comprendre que la vie continue, même si le quotidien a été bousculé par la mort d'un proche. « [Ça permet] d'expliquer aux enfants que même si [la défunte] n'est plus à l'école, elle ne disparaît pas dans leur mémoire, dans leur cœur et dans leurs sentiments », ajoute Christine Grou.
À partir de quel moment devrait-on s'inquiéter et consulter ?
« Vivre des deuils, même jeune, c'est presque un incontournable. C'est en faisant des deuils qu'on grandit et qu'on mature, soutient Christine Grou. Ce qu'on espère, pour les jeunes, c'est que ce ne seront pas des deuils trop traumatiques. » La psychologue rappelle qu'il est normal qu'un enfant soit affecté les premiers soirs. Elle recommande de porter plutôt attention aux changements de comportement qui dureraient plusieurs semaines sans s'estomper.
« Ce qu'il faut éviter aussi, c'est de laisser entendre à l'enfant qu'il devrait quasiment arrêter de fonctionner puis s'écrouler sous la peine, ajoute-t-elle. Je pense qu'il faut juste être vigilant, à l'écoute, présent et aimant, comme n'importe quel bon parent. Puis, en cas de doute, on peut s'informer auprès des professionnels. »
Alexandra Gagnon invite quant à elle les parents à solliciter un accompagnement s'ils ne savent pas comment gérer la situation. « Ils peuvent nous appeler s'ils ont des questions auxquelles ils ne savent pas répondre. Notre ligne téléphonique d'intervention spécialisée peut vraiment les outiller. Généralement, dans les 24 heures, vous avez une réponse d'un professionnel. »
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Au mois de mai dernier, la Drug Enforcement Administration (DEA) avait fait sourciller les autorités canadiennes en consacrant un paragraphe dans son « National Drug Assessment 2025 » (Évaluation de la menace posée par les drogues 2025) en faisant état de la « préoccupation grandissante des États-Unis » face aux « super laboratoires » de fentanyl canadiens après le démantèlement d'une telle installation par la GRC en octobre 2024. Préoccupation qui mentionnait tout de même que les saisies de fentanyl provenant du Canada pour toute l'année 2024 et le printemps 2025 se chiffraient à 22,7 kilos, comparativement aux 9,354 tonnes métriques saisies à la frontière mexicaine. Ce seul paragraphe dans un document de 80 pages qui ne fait aucune autre mention du Canada en matière de menace liée aux stupéfiants a provoqué une réponse plutôt irritée de la GRC : « Il n'y a peu ou pas de preuves ou de données des forces de l'ordre canadiennes ou américaines pouvant soutenir l'affirmation selon laquelle le fentanyl produit au Canada représente une menace grandissante. […] Le fentanyl produit au Canada est destiné principalement à la consommation domestique », écrivait un porte-parole de la police fédérale au bureau de La Presse Canadienne à Washington en réponse à ces prétentions. États-Unis : exportations massives au Canada Nous nous sommes concentrés d'abord sur les saisies de fentanyl, en raison de l'importance démesurée que lui a accordée le président Trump, mais aussi sur celles de cocaïne, de métamphétamines et de cannabis en raison de l'importance des quantités saisies et parce qu'elles offrent des données comparables à celles des Américains, qui ne sont pas compilées de la même façon. Ainsi, le véritable problème du Canada, ce sont – au-delà du fentanyl – les autres drogues qui arrivent des États-Unis, surtout la cocaïne et les métamphétamines. Rebecca Purdy, porte-parole de l'ASFC, résume ainsi la situation : « Au cours des cinq dernières années, la quantité de fentanyl saisie en provenance des États-Unis a augmenté de plus de 1600 %, celle de cocaïne des États-Unis a augmenté de plus de 290 %, celle de méthamphétamine de plus de 200 %. » Les données canadiennes obtenues par La Presse Canadienne pour les quatre premiers mois de 2025 montrent cependant une pause de la tendance haussière. Lorsqu'on analyse les quantités de cocaïne, métamphétamines et de cannabis, le volume (en kilos) de stupéfiants venant des États-Unis a connu une baisse d'environ 10 % entre les quatre premiers mois de 2024 et 2025. De manière plus spécifique, on note une baisse de 90 % du volume des entrées de métamphétamines, mais une augmentation de 125 % de celui des importations de cocaïne. Quant aux exportations canadiennes de stupéfiants, celles-ci ont connu une baisse de 4,6 %. Le cannabis est, de loin, la drogue la plus exportée par le Canada, représentant 98 % du volume des saisies canadiennes en 2024 et 90,5 % en 2025. Cependant, ce cannabis étant légal au Canada et dans 24 des 50 États américains, la quasi-totalité des quantités importantes de cannabis saisies était destinée principalement à des pays européens. Du côté américain, mises à part les données spécifiques sur le fentanyl et l'héroïne, la USCBS ne tient que des statistiques générales amalgamées montrant les quantités totales saisies de l'ensemble des drogues. À la frontière nord, celle du Canada, 607 kilos de stupéfiants ont été saisis durant les quatre premiers mois de 2024, contre 561 kilos de stupéfiants pour la même période de 2025, soit une baisse de 7,6 %. Cette réduction survient toutefois au même moment où l'on constate une baisse marquée du nombre de Canadiens entrant aux États-Unis, mais il est impossible d'établir un lien de cause à effet entre les deux. Pendant ce temps, aux autres points d'entrée (au Mexique, par mer et par avion), les quantités de stupéfiants entrant aux États-Unis atteignaient 10 660 kilos de janvier à avril 2024, soit 17,6 fois plus qu'à la frontière canadienne, et 9752 kilos durant la même période de 2025, soit une diminution de 8,5 %, mais toujours 17,4 fois plus qu'à la frontière nord. Le professeur Oscapella estime effectivement que « le Canada a un problème d'importation de drogue par la voie des États-Unis et on a surtout un problème d'importation d'armes des États-Unis lié au trafic de drogue », prend-il soin d'ajouter. Communications publiques des douaniers Un survol de la douzaine de communiqués publiés par l'ASFC durant les quatre premiers mois de 2025 montre notamment deux saisies totalisant deux tonnes métriques de cannabis en route vers l'Espagne et le Nigeria et des saisies de 148 kilos de métamphétamines destinés à Hong Kong et à l'Australie, mais rien à destination des États-Unis. 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6 hours ago
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Nixon, Trump… et les dangers du vilain mois d'août
Un montage demandant à l'administration Trump de rendre publics les dossiers du procès de Jeffrey Epstein défilait sur les écrans géants de Times Square, à New York, vendredi. Le 8 août, il y aura 51 ans que le président Richard Nixon démissionnait, mettant fin à presque deux ans de crise politique, à la suite d'une tentative ratée d'espionnage des conversations téléphoniques du Parti démocrate. Aujourd'hui, c'est une affaire beaucoup plus triviale qui nuit à la crédibilité de M. Trump : la promesse abandonnée de publier tous les dossiers de l'affaire Jeffrey Epstein, un ancien ami de M. Trump accusé de trafic sexuel de mineures avant d'être retrouvé mort en 2019 dans une prison de New York. Les deux affaires sont bien différentes, mais un demi-siècle plus tard, Donald Trump se retrouve un peu dans la même situation que Nixon. PHOTO ARCHIVES ASSOCIATED PRESS Richard Nixon, en novembre 1973, moins d'un an avant sa démission comme président des États-Unis Pas à cause de ce qui lui est reproché – qui, pour ce qu'on en sait, peut paraître assez bénin si on le compare au Watergate –, mais parce que lorsqu'on est président des États-Unis, le fait d'avoir l'air de cacher la vérité est plus grave que tout. It's not the crime, it's the cover-up (« Ce n'est pas le crime, c'est la tentative de le camoufler »), disait-on à l'époque de Nixon. En fait, la crédibilité des deux présidents a été largement abîmée par leurs propres actions : tous les deux ont donné l'impression qu'ils avaient quelque chose à cacher. Ce qui est la meilleure façon de perdre la confiance des électeurs. Mais dans ces affaires, toute évolution est lente et un président a de nombreux moyens de retarder les enquêtes, qu'elles soient ordonnées par des juges ou par des législateurs. De même, il y a toujours moyen de faire diversion. M. Nixon se servait de sa compétence reconnue en affaires internationales et multipliait les visites officielles pour montrer ses qualités de chef d'État, mais surtout pour échapper à l'air vicié de Washington. Donald Trump préfère s'en prendre aux démocrates – et surtout à son ennemi juré Barack Obama – qu'il accuse maintenant de haute trahison. Rien de moins… PHOTO RICHARD CARSON, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS Donald Trump serrant la main de Richard Nixon à Houston, au Texas, en 1989 Richard Nixon avait beaucoup de choses à cacher : il niait toute implication dans la tentative d'espionnage des bureaux du Parti démocrate situés dans l'édifice du Watergate, qui donnera son nom à ce scandale. Et il avait fait enregistrer toutes les conversations qui s'étaient déroulées dans le bureau Ovale et dans d'autres lieux qu'il utilisait. Un stratagème qui fut dévoilé grâce à une enquête du Sénat. Mais même une fois ce fait établi, M. Nixon a résisté plus d'un an avant d'être forcé de remettre les enregistrements par un jugement unanime de la Cour suprême en juillet 1974. Quelques jours plus tard, on trouvait un enregistrement, surnommé le « Smoking Gun », qui établissait hors de tout doute que M. Nixon était tout à fait informé de la tentative d'espionnage des démocrates et des tentatives de tout étouffer. Ses appuis, jusque-là indéfectibles, se sont effondrés. Il a démissionné quelques jours plus tard. Comme quoi, en politique, quand on fait tout pour reculer d'inévitables échéances, on perd nécessairement sa crédibilité. Et, tout aussi inévitablement, on finit par perdre l'appui de ses soutiens les plus fidèles. Ce qui commence à être inquiétant pour M. Trump. Jusqu'ici, il a pu compter sur l'appui indéfectible de sa base, le mouvement MAGA (Make America Great Again). Mais il y a des signes que cela est en train de changer. Un sondage récent de la réputée Université Quinnipiac montrait que 63 % des Américains désapprouvent la manière dont l'administration Trump gère l'affaire Epstein, contre seulement 17 % qui l'approuvent1. PHOTO JACQUELYN MARTIN, ASSOCIATED PRESS Le président des États-Unis, Donald Trump, vendredi, à Ayrshire, en Écosse Et la division s'installe au sein même de son parti : 40 % des républicains approuvent les actions du président, mais un nombre presque équivalent d'entre eux, soit 36 %, les désapprouvent. Une érosion substantielle de la base électorale du président Trump. Mais M. Trump ne peut s'en prendre qu'à lui-même. Il est totalement incapable de ne pas faire la promotion de toutes les controverses, bobards et autres faussetés qu'il croise. De Barack Obama qui n'était pas né aux États-Unis – et ne pouvait donc pas être légalement président – au prétendu vol par les démocrates de l'élection présidentielle de 2020… sans pouvoir donner la moindre preuve. De même, c'est lui qui a promis de faire toute la lumière sur le scandale Epstein, redonnant vie aux allégations selon lesquelles il y aurait une liste de ses clients et qu'on y découvrirait plusieurs grands noms de la politique et de la société américaine. Une preuve de corruption généralisée qui renforçait la promesse de M. Trump de « nettoyer le marécage » (drain the swamp), a-t-il répété maintes fois. Après avoir été informé que son nom se retrouvait dans les dossiers du procès Epstein, M. Trump est passé en mode « circulez, y a rien à voir », se fâchant même contre ses propres partisans (« mes anciens partisans », a-t-il écrit) qui voulaient qu'il tienne sa promesse. Des « anciens partisans » qui commencent à vaciller. Et malheureusement pour M. Trump, en août, il y a peu d'occasions de cacher les mauvaises nouvelles. Consultez le sondage (en anglais) Qu'en pensez-vous ? Participez au dialogue