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Keith Richards n'aimait pas «Satisfaction»… et pourtant le riff est entré dans l'histoire

Keith Richards n'aimait pas «Satisfaction»… et pourtant le riff est entré dans l'histoire

24 Heures4 days ago
Le riff le plus abrasif des Rolling Stones est venu en rêve à son auteur, qui l'imaginait joué par des cuivres. La version finale est une démo. Publié aujourd'hui à 16h59
Keith Richards en concert avec The Rolling Stones en mars 1965. Le riff de «Satisfaction» naîtra deux mois plus tard des limbes de sa caboche.
imago images/TT
Ce matin londonien du 7 mai 1965, Keith Richards se réveille sans gueule de bois et avec un enregistreur à cassettes de la marque Phillips dont la touche record est enfoncée. Sur la bande, qu'il a la bonne idée de rembobiner, il entend deux minutes de guitare acoustique suivies de quarante minutes de ronflements – les siens. Le cofondateur des Rolling Stones , 22 ans, se remémore alors cette inspiration qui le saisit au milieu de la nuit et qu'il immortalisa sur cassette avant de verser à nouveau dans les bras de Morphée. Bien lui en a pris.
Peu de chansons aussi universellement célèbres que «(I Can't Get No) Satisfaction» auront couru autant de risques de ne jamais voir le jour. Il fallait que l'idée se faufile dans les rêves de Keith Richards, déjà. Qu'il la happe et la juge suffisamment digne d'intérêt pour justifier qu'il sorte de son lit, saisisse sa guitare et la sauve sur un magnétophone. Et pense à l'écouter au réveil. Non rock
Surtout, cette ritournelle se prédestinait à une orchestration à l'opposé de la forme sèche et abrasive qui allait devenir l'hymne d'une jeunesse en combustion. Le fan de Donovan l'imaginait en effet folk, lente, avec une section de cuivres pour jouer le riff principal. Qu'il enregistre le 11 mai à Hollywood, alors en tournée américaine, à l'aide d'un petit effet rigolo appelé fuzz que la marque Gibson vient d'inventer. «La pédale tombait à pic, ça donnait une forme à ce que les cuivres joueraient ensuite», se souvient-il dans ses mémoires («Life», p. 232).
The Rolling Stones en 1965.
imago images/TT
Trois semaines plus tard, The Rolling Stones sont sur une autoroute du Minnesota quand la radio passe «notre putain de morceau! On n'était même pas au courant que notre manager avait sorti le disque. J'étais mortifié: dans mon esprit, c'était juste une maquette. Et soudain on est numéro 1 aux States!»
C'était tellement une maquette que la chanson iconique, si on l'écoute attentivement, trahit l'imprécision hâtive du guitariste, qui rate même sa rentrée à 1'35! Comme quoi, la perfection numérique actuelle n'est pas le plus sûr moyen de rester dans l'histoire. Idem pour cet effet fuzz accidentel, qui deviendra illico l'arme atomique des groupes de garage, puis de punk, dans leur marche vers le son énervé.
À ce stade, vous trouverez des contenus externes supplémentaires. Si vous acceptez que des cookies soient placés par des fournisseurs externes et que des données personnelles soient ainsi transmises à ces derniers, vous devez autoriser tous les cookies et afficher directement le contenu externe.
Longtemps, Keith Richards n'aimera pas «(I Can't Get No) Satisfaction». Sans doute la somme de ses aléas lui donnait-elle l'impression d'avoir été composée par un autre. Plus prosaïquement, sa rugosité sonore était particulièrement difficile à reproduire en concert. Trop bien jouée, avec de trop beaux effets, elle devenait boiteuse. Soixante ans plus tard, sa forme la plus écoutable reste celle d'un malentendu.
D'autres beaux ratés, pas toujours très rock
François Barras est journaliste à la rubrique culturelle. Depuis mars 2000, il raconte notamment les musiques actuelles, passées et pourquoi pas futures. Plus d'infos
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Odieuse, excentrique et flamboyante, elle régna non sans panache sur la cuisine britannique pendant vingt ans. Publié aujourd'hui à 14h12 Fanny Cradock, un physique loin des rassurants canons de la cuisinière télévisuelle. DR Non, toutes les marmitonnes télévisuelles ne sont pas rassurantes et rebondies. Preuve en est Fanny Cradock, la star culinaire de la BBC des sixties. Maquillage de clown névrosé, regard fiévreux, voix rauque et visage osseux, elle vous file les miquettes cette femme-là. Il faut la voir pincer nerveusement la peau d'une pauvre dinde avant de la cribler de coups de fourchette assassins pour imaginer ce qu'elle put faire subir à ses proches et collègues. Le pire, raconte-t-on. Pourtant l'Angleterre l'adora. Et saliva devant ses recettes extravagantes, mais économiques, nappées de sauces louches et pleines de colorants alimentaires qui, en 2025, paraissent un brin… obsolètes. Il n'est pas impossible de penser que l'Albion d'alors avait des papilles en titane et une tendresse pour les Carabosse cabossées. À ce stade, vous trouverez des contenus externes supplémentaires. Si vous acceptez que des cookies soient placés par des fournisseurs externes et que des données personnelles soient ainsi transmises à ces derniers, vous devez autoriser tous les cookies et afficher directement le contenu externe. Fanny est née en 1909 dans le Sussex. Le père, marchand de maïs et joueur invétéré, doit déménager sans cesse pour échapper à ses créanciers. La mère, volage, l'abandonne un an après sa naissance. À 17 ans, elle épouse un pilote de la RAF, qui s'en va crasher son avion quatre mois plus tard, la laissant veuve et enceinte. Bigame, elle se remariera deux fois en bidouillant son état civil. Et abandonnera maris successifs et enfants avant de rencontrer l'amour de sa vie, Johnnie Cradock, un major dans l'artillerie royale. Shows culinaires Entre-temps, elle fait du porte-à-porte à Londres pour vendre des aspirateurs. Vivote de petits boulots. Puis entrevoit enfin la lumière grâce au «Daily Telegraph», qui l'embauche pour écrire des chroniques mode, beauté et cuisine. À la fin des années 40, elle et Johnnie se lancent dans des shows culinaires burlesques, en cuisinant live dans des théâtres avant de partager leurs recettes avec le public. Fanny joue l'épouse despotique; Johnnie, le mari nigaud et ivrogne. Gros succès. Ils remplissent le Royal Albert Hall en 1956. Voilà comment Fanny glisse un orteil à la BBC, pour en devenir la diva culinaire deux décennies durant. Avec son Johnnie d'amant, elle se pavane en Rolls, se défonce aux médocs, se montre imbuvable avec ses collaborateurs. Snob, toxique et tonitruante, elle chute un soir de 1976 quand elle humilie en direct une humble ménagère lors d'un concours de cuisine amateur. Le public se braque. La télé la vire. Bye-bye la gloire. Désargentée et solitaire, elle meurt d'un AVC en 1994 dans un modeste home du Sussex. Peau de vache sans doute, gâte-sauce peut-être, Fanny laisse le souvenir outre-Manche d'une flamboyance jamais égalée dans la télé culinaire. La Cruella du pudding a encore des fans soumis. Pionniers de la télé culinaire Newsletter «Gastronomie & Terroirs» «24 heures» suit depuis toujours l'actualité gastronomique et culinaire. Recevez, chaque vendredi, une sélection d'articles sur la restauration, la cuisine, les produits du terroir et le vin. Autres newsletters Jérôme Estèbe dirige la rubrique culturelle et le supplément du week-end. Il couvre, en particulier, les sujets gastronomiques et œnologiques. Il est titulaire du prix du journalisme local de la Berner Zeitung millésime 2002. Plus d'infos Vous avez trouvé une erreur?Merci de nous la signaler.

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