
Le jour où le stalker de Jodie Foster tenta d'assassiner Ronald Reagan
Jodie Foster s'est retrouvée malgré elle au centre d'une affaire qui a presque coûté la vie à Ronald Reagan.
Imago-Montage Tamedia-F.G.
En bref:
Les États-Unis ont tremblé au printemps 1981. Deux mois à peine après sa première investiture présidentielle, Ronald Reagan est victime d'un attentat devant un hôtel Hilton à Washington. Il frôle la mort. Le tireur, un déséquilibré nommé John Hinckley, est arrêté sur place. On retrouve sur lui des photos de l'actrice Jodie Foster ainsi qu'un badge de John Lennon. Tout sauf une coïncidence, car le macabre chemin qu'a suivi l'auteur du fait était semé de rêves, de désespoir, de rock'n'roll et surtout du film «Taxi Driver». Récit de cette collision historique. Un passé trouble
Contrairement au cliché, John Hinckley passe une enfance plutôt paisible. Élevé dans une famille bourgeoise au Texas et au Colorado, le jeune homme suit sa scolarité dans des établissements élitistes de ces régions. Son passage à l'université est cependant de courte durée. Il échoue à finaliser ses études supérieures à la Texas Tech University. En 1975, âgé de 20 ans et amateur de rock, il plaque tout pour aller vivre à l'ouest, à Los Angeles, se voyant devenir un auteur-compositeur accompli.
Autoportrait de John Hinckley, avant l'attentat.
imago/UPI Photo
Cette entreprise se solde par un nouvel échec. Frustré et fauché, John Hinckley doit subir l'humiliation de rentrer chez ses parents. La colère gronde. De retour dans le Colorado, gavé d'antidépresseurs et de tranquillisants, John Hinckley rejoint le Parti nazi américain avant de se faire renvoyer du groupuscule pour «nature violente». C'est dire. Durant cette période, «Taxi Driver», de Martin Scorsese , sort au cinéma. En le visionnant, Hinckley développe une fascination bicéphale: les armes, et Jodie Foster. Travis Bickle et Jodie Foster
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Palme d'or au Festival de Cannes 1976, «Taxi Driver» narre les pérégrinations d'un chauffeur de taxi solitaire et noctambule, Travis Bickle, interprété par Robert De Niro. Au fil de ses courses, il égrène New York la nuit et est témoin de la violence qui y gît. Durant cette errance, il fait la rencontre d'Iris Steensma, une prostituée de 12 ans, incarnée par Jodie Foster, une jeune enfant star de 13 ans. Dans le film, Travis Bickle tente de l'aider, et parallèlement, nourrit des projets d'assassinat envers un sénateur. John Hinckley visionne le film à quinze reprises.
Travis Bickle (Robert De Niro) dans «Taxi Driver», index sur la tempe, un cliché pour l'éternité.
imago images/Ronald Grant
Hanté par la vision d'Iris, habité par le personnage de Travis Bickle, John Hinckley se met en tête de rencontrer la jeune actrice, quoi qu'il en coûte, afin de lui faire part de son amour. Nous sommes alors en 1980, et c'est donc un homme à l'esprit détraqué qui se lance aux trousses de Jodie Foster, âgée de 19 ans. Jimmy Carter et John Lennon
Apprenant dans un magazine people que la jeune actrice entre à l'Université de Yale, il fait croire à ses parents qu'il a été sélectionné pour un stage d'écriture dans le même établissement. Arrivé sur place, il la suit, la traque, glisse des mots sous la porte de son dortoir, la harcèle au téléphone.
Durant quatre jours, Jodie Foster vit un enfer, mais résiste: «Sérieusement, ce n'est pas juste. Faites-moi plaisir et ne me rappelez pas. D'accord?» Hinckley: «Et demain, alors?» Foster: «Oh, mon Dieu. Oh, sérieusement, ça commence vraiment à m'énerver. Ça vous dérange si je raccroche?» Hinckley: «Jodie, s'il vous plaît.»
Jodie Foster, âgée de 13 ans, pendant le tournage de «Taxi Driver».
imago stock&people
Devant ces refus, l'homme jette provisoirement l'éponge et retourne au foyer familial. L'histoire ne s'arrête malheureusement pas là. Car John Hinckley reste convaincu que Jodie Foster et lui sont faits l'un pour l'autre. En s'inspirant de Travis Bickle, il va désormais tout faire pour qu'elle le remarque. Détournement d'avion, meurtre ou même suicide, il passe en revue les moyens de prouver son amour. À l'automne 1980, il commence alors à s'intéresser au président en fonction, Jimmy Carter, qu'il suit sans relâche au fil de ses meetings. Après l'élection du mois de novembre 1980, John Hinckley jette son macabre dévolu sur le président-élu, Ronald Reagan. À nouveau, la traque recommence. Il surveille les allées et venues du Républicain en se postant devant la Maison-Blanche.
Mais voilà qu'un autre événement vient chambouler l'affaire. Décembre 1980, John Lennon est assassiné par un fan devant son immeuble à New York. John Hinckley, qui idolâtre l'ex-chanteur des Beatles, est anéanti, et enregistre sa peine sur un magnétophone dans la nuit du Nouvel An 1981: «John Lennon est mort. Le monde est fini. Oubliez ça. Ça va être la folie, si j'arrive à passer les premiers jours… Je regrette encore de devoir continuer en 1981… Je ne sais pas pourquoi les gens veulent vivre. John Lennon est mort… Je pense encore… Je pense encore à Jodie tout le temps. C'est tout ce à quoi je pense, vraiment. Ça, et la mort de John Lennon. Ils étaient en quelque sorte liés… Jodie est la seule chose qui compte désormais. Tout ce que je pourrais faire en 1981 serait uniquement pour le bien de Jodie Foster.» Passage à l'acte
Au début du mois de mars, il saute dans un car à destination de Washington. Installé dans un motel miteux, il passe deux semaines à écrire des lettres et des poèmes à destination de Jodie Foster, en réaffirmant son amour pour elle.
L'ultime correspondance envoyée à l'actrice, le matin même du 30 mars, est sans équivoque: «Il est tout à fait possible que je sois tué en tentant d'atteindre Reagan. C'est précisément pour cette raison que je t'écris cette lettre aujourd'hui. Comme tu le sais déjà, je t'aime très fort. Je suis très heureux que tu connaisses au moins mon nom et ce que je ressens pour toi. En sacrifiant ma liberté et peut-être même ma vie, j'espère te faire changer d'avis à mon sujet.»
Apprenant que Reagan donne une conférence au centre-ville, Hinckley se rend sur les lieux. À 14 h 27, le Républicain sort de l'Hôtel Hilton. Comme la distance entre le parvis et son véhicule est très courte, il ne porte pas de gilet pare-balles. John Hinckley sort son revolver et tire six coups en l'espace de deux secondes. Les deux premières atteignent le porte-parole de la Maison-Blanche, James Brady, et un policier. La troisième se perd mais la quatrième touche un agent spécial qui s'est jeté devant le président. La cinquième et la sixième finissent sur la limousine présidentielle. Or, cette dernière balle ricoche et atteint Ronald Reagan sur le flanc gauche. Mais comme celui-ci se fait pousser par la sécurité dans la voiture, il ne le remarque pas tout de suite.
Dans la foule, c'est le chaos. Une marée de badauds se jette sur John Hinckley, et la police doit intervenir pour éviter un lynchage public, comme ce fut le cas près de vingt ans plus tôt avec l'assassin de John Fitzgerald Kennedy, Lee Harvey Oswald. Hinckley est maîtrisé et arrêté sur-le-champ.
Chaos dans la foule. Un agent spécial et le porte-parole de la Maison-Blanche gisent à terre.
IMAGO/GRANGER Historical Picture Archive
En l'espace de trois minutes, les États-Unis oscillent sur la balance du destin. Ronald Reagan, en direction de la Maison-Blanche, s'aperçoit qu'il a quand même pris une balle. Il commence à cracher du sang et présente des difficultés respiratoires. Ni une ni deux, l'itinéraire est dévié, et la limousine se dirige à tombeau ouvert au George Washington Hospital. Les infirmières ont deux minutes pour libérer l'accès des urgences et se préparer à recevoir l'homme d'État le plus puissant du pays.
Le président arrive à l'hôpital à 14 h 30 tapantes. Il présente alors des symptômes de crise cardiaque. Il est mis sous assistance respiratoire et envoyé dans la foulée en chambre d'opération. La chirurgie est rassurante: la balle s'est certes nichée à quelques centimètres de son cœur, mais n'a pas fait beaucoup de dégâts. Reagan passera deux semaines à l'hôpital avant de rentrer à la Maison-Blanche. Procès médiatisé
Mugshot de John Hinckley.
IMAGO/ZUMA Press
Un an plus tard, l'un des procès les plus importants et médiatisés du XXe siècle se tient aux États-Unis. En théorie, il est prévu par la loi qu'un individu ayant essayé d'assassiner un président soit enfermé à perpétuité. Mais la défense fait valoir les troubles psychotiques du prévenu. À travers les médias et dans l'opinion publique, le débat fait rage. Après deux mois d'audience, le verdict tombe. John Hinckley est déclaré non coupable de chacune des charges de l'accusation au motif d'une aliénation mentale le touchant. Tollé au tribunal. Hinckley est alors envoyé dans un hôpital psychiatrique en attendant de ne plus être un danger pour la société.
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Au début des années 2000, il est autorisé à sortir de l'hôpital pour des visites surveillées ou non avec sa famille. Ce privilège lui est retiré lorsque des photos de Jodie Foster sont retrouvées dans sa chambre. Il faudra attendre 2022 pour que John Hinckley soit inconditionnellement libéré. gé aujourd'hui de 70 ans, il entretient régulièrement sa page YouTube en postant des vidéos de lui en train de jouer de la musique.
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Andrea Di Guardo est journaliste RP à la Tribune de Genève depuis mars 2024. Attaché à la rubrique culturelle (pôle Vibrations), il écrit également pour 24 Heures et Le Matin Dimanche. Il s'intéresse aussi aux sujets locaux et internationaux. Il est titulaire d'un Master en journalisme et communication et d'un Bachelor en sciences politiques. Plus d'infos
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24 Heures
7 hours ago
- 24 Heures
1MDB: un Picasso offert à DiCaprio mis en vente par les Etats-Unis
Trajectoire sulfureuse – Un Picasso offert à DiCaprio est mis en vente par les États-Unis La justice américaine met aux enchères une série d'œuvres prestigieuses, acquises frauduleusement. Le produit de la vente bénéficiera aux victimes du scandale 1MDB. Catherine Cochard «Tête de taureau et broc» également connu sous le titre de «Nature morte au crâne de taureau». Le tableau signé Pablo Picasso est à l'encan jusqu'au 4 septembre. Gaston & Sheehan Abonnez-vous dès maintenant et profitez de la fonction de lecture audio. S'abonnerSe connecter BotTalk En bref : La toile «Tête de taureau et broc» de Picasso est mise aux enchères jusqu'au 4 septembre. Le tableau fut offert à Leonardo DiCaprio par Jho Low, financier impliqué dans l'affaire 1MDB. Les recettes de la vente seront versées aux victimes de la corruption en Malaisie. La toile signée «Picasso 28.1.39» ne présente «aucune trace de retouche ou d'ajout au dessin original». Voilà ce que promet le rapport de neuf pages qui atteste des conditions de conservation du tableau «Tête de taureau et broc». «Une seule fine fissure verticale (d'environ 2,5 cm de long) dans la couche de peinture est visible sous lumière UV», mais elle «n'affecte pas l'intégrité de l'œuvre, ne nécessite aucune intervention de conservation et n'est pas visible sous un éclairage normal». Le document officiel conclut que l'état général de la toile est de «bon à excellent». Mais il ne dit pas un mot de la trajectoire rocambolesque de ce Picasso, offert en cadeau à Leonardo DiCaprio par Jho Low, le financier malaisien cerveau de l'affaire 1MDB, l'un des plus gros scandales de kleptocratie de l'histoire récente. Seule une phrase en rouge, tout en haut de la première page du rapport, trahit l'aura sulfureuse du chef-d'œuvre: «Actif placé sous la garde du gouvernement des États-Unis le 12 décembre 2017 et conservé depuis, dans un environnement contrôlé en termes de climat et d'humidité». Ce tableau de Pablo Picasso est proposé aux enchères jusqu'au 4 septembre prochain par le département américain de la Justice. De l'atelier du maître espagnol aux Ports Francs de Genève en passant par les acteurs les plus importants du marché de l'art, l'affaire suit un itinéraire sinueux et fascinant. Réponse à la chute de Barcelone Le marché de l'art n'est pas un modèle de transparence. Les acheteurs demeurent en général discrets. Quant aux marchands et maisons de vente aux enchères, ils ont tout intérêt à préserver l'anonymat de leurs clients et la confidentialité des transactions. Pour pister la toile, nous avons épluché les rapports, documents de justice, articles de presse, résultats d'enchères et images d'archive sur lesquelles elle apparaît. Également connu sous le titre de «Nature morte au crâne de taureau», le tableau «Tête de taureau et broc» porte, à côté de la signature de Picasso, la date du 28 janvier 1939. Ce n'est pas un détail. Deux jours plus tôt, le 26 janvier, la ville de Barcelone, le cœur de la Catalogne si chère à l'artiste, s'est rendue à l'armée du général Franco. Cette toile constitue la réponse de Picasso à cette capitulation. Le crâne de taureau – emblème de l'Espagne – symbolise ici la mort de la nation et la brutalité des conflits. Comme dans «Guernica», sa peinture de 1937 qui dénonçait le bombardement de la ville basque ordonné par les nationalistes espagnols et effectué conjointement par l'Allemagne nazie et l'Italie fasciste. Les premières années de son existence, le tableau suit une trajectoire classique. Comme en atteste l'étiquette écornée encore présente au dos du châssis, il est pris en charge à Paris par la Galerie Louise Leiris, du nom de la fille de Daniel-Henry Kahnweiler, le marchand de Picasso dès ses débuts qui a repris les affaires de son père. La toile y apparaît le 9 janvier 1960, lors d'une vente aux enchères caritative. La vente aux enchères, le 9 janvier 1960 à la Galerie Charpentier à Paris, du tableau de Pablo Picasso «Tête de taureau et broc» au profit des sinistrés de la rupture du barrage de Malpasset. Getty Images/Keystone-France/Gamma-Rapho Le tableau traverse ensuite l'Atlantique. Une deuxième indication, elle aussi encore présente au dos du cadre, en témoigne: «Saidenberg Gallery 10 East 77 Street New York 21, NY». C'est la galerie qui représente l'artiste espagnol aux États-Unis jusque dans les années 70. En 1971, la toile fait du reste partie des œuvres présentées lors de l'exposition «Homage to Picasso» organisée conjointement avec la galerie Marlborough à l'occasion des 90 ans du peintre. Le Picasso refait surface en 2007 Puis le tableau semble disparaître des radars pendant des décennies. Il refait surface en mai 2007 chez Christie's à Londres. On le voit sur plusieurs photos prises durant l'exposition qui précède la soirée d'enchères à New York. Mais sur le portail internet de la société, il ne reste plus aucune trace du tableau et de prix de son adjudication. «À l'époque, nous ne gardions sur notre site que les résultats des œuvres qui s'étaient vendues avec succès», explique la maison Christie's. Dix ans plus tard, en 2017, le Picasso réapparaît dans une plainte de 250 pages déposée par le Département de justice américain contre notamment Low Taek Jho, le nom civil de Jho Low, le financier et principal instigateur du scandale 1MDB. La division antiblanchiment indique la confiscation des actifs obtenus en détournant l'argent du fonds souverain malaisien. Le contenu qui place des cookies supplémentaires est affiché ici. À ce stade, vous trouverez des contenus externes supplémentaires. Si vous acceptez que des cookies soient placés par des fournisseurs externes et que des données personnelles soient ainsi transmises à ces derniers, vous devez autoriser tous les cookies et afficher directement le contenu externe. Autoriser les cookies Plus d'infos La liste des biens et valeurs frauduleusement acquis est longue. On y trouve notamment le superyacht «Equanimity» (long de plus de 300 pieds…), une affiche du film muet de 1927 «Metropolis», des appartements de luxe à New York, les droits et intérêts relatifs au film «Dumb and Dumber 2», des diamants, des bijoux, des œuvres de Jean-Michel Basquiat, une photo de Diane Arbus… et le tableau du maître espagnol, localisé en Suisse. Au fil des pages, il est aussi fait mention de l'entrepôt, aux Ports Francs de Genève, où Jho Low stockait ses œuvres d'art. Un cadeau à 3,28 millions de dollars Revenons au tableau qui nous intéresse. La plainte détaille: «Aux alentours du 2 janvier 2014, environ 3'280'000 dollars détournés […] ont été utilisés pour acquérir une peinture intitulée «Nature Morte au Crâne de Taureau» de Pablo Picasso […], une huile sur toile mesurant 65,5 x 92,5 cm». Il est ensuite expliqué comment l'argent nécessaire à l'achat de la toile a été blanchi. Du compte personnel de Jho Low, il a été transféré «via deux comptes de transit sur une période de trois jours» pour enfin être viré à un marchand d'art de Monaco pour payer l'œuvre. Leonardo DiCaprio et Jho Low à la première du film «Le Loup de Wall Street» à Paris en 2013. Bertrand«Ce même mois (ndlr: début 2014), la peinture de Picasso a été offerte en cadeau à DiCaprio», déroule la plainte, qui reproduit une petite note accompagnant l'œuvre et signée des initiales de Jho Low. «Cher Leonardo DiCaprio, joyeux anniversaire en retard! Ce cadeau est pour toi!» Leonardo DiCaprio rend ses cadeaux En 2017, la star américaine a rendu les cadeaux de Jho Low aux autorités. L'acteur a ensuite fait savoir par voie de presse qu'il les «avait reçus et acceptés dans le but de les inclure dans une vente aux enchères caritative annuelle au profit de sa fondation». Leonardo DiCaprio indiquait également avoir «restitué un Oscar initialement remporté par Marlon Brando» qui lui avait été donné sur le tournage du «Loup de Wall Street» par la société de production Red Granite, financée en partie avec les fonds détournés par le fraudeur malaisien. Depuis le 16 juillet dernier, le Picasso est proposé aux enchères, sur internet, par Gaston & Sheehan, une société qui agit sur mandat du gouvernement américain. Rapidement dépassée, la mise de départ était de 850'000 dollars. Une paille par rapport à la valeur réelle du tableau, estiment les experts. Le Picasso n'est pas la seule pièce à être proposée au plus offrant. Trois autres œuvres, également confisquées par le gouvernement américain dans le cadre du scandale 1MDB, figurent au catalogue de cette vente très spéciale. Une photo de Diane Arbus, «Exasperated Boy with Handgrenade in Central Park, N.Y.C. 1962», ainsi que «Self Portrait» et «Red Man One», tous les deux signés Jean-Michel Basquiat. «Exasperated Boy with a Toy Hand Grenade in Central Park, N.Y.C. 1962», la photo de l'artiste américaine Diane Arbus. Gaston & Sheehan Seul l'autoportrait n'a pas été donné en cadeau à Leonardo DiCaprio par Jho Low. Ce tableau n'appartenait du reste pas au financier malaisien mais à Joey McFarland, producteur et cofondateur de la société de production Red Granite, à qui l'on doit notamment «Le loup de Wall Street». Il a lui aussi rendu l'œuvre aux autorités américaines lorsque le scandale a éclaté. «Red Man One», le tableau de 1982 signé Jean-Michel Basquiat. Gaston & Sheehan Au profit des personnes lésées Le produit des saisies fédérales est généralement reversé au Trésor américain. Pas cette fois-ci: les fonds de la vente des actifs liés à l'affaire 1MDB bénéficieront aux personnes qui ont été lésées par la corruption en Malaisie, a promis le Ministère de la justice. Les enchères sont ouvertes jusqu'au 4 septembre. Combien pourraient-elles rapporter? Selon les documents de justice, la photo de Diane Arbus avait été achetée 750'000 dollars, le collage de Basquiat plus de 9 millions de dollars et le Picasso plus de 3 millions. Quant à l'autoportrait de Basquiat, il pourrait lui aussi partir pour plusieurs millions de dollars. À moins que les acheteurs ne soient rebutés par l'aura sulfureuse acquise par la proximité des œuvres avec le scandale du siècle… Également de 1982 et signé Jean-Michel Basquiat, un autoportrait: «Self Portrait». Gaston & Sheehan Cet article vous a plu? Découvrez davantage de contenus dans l'édition actuelle de l'e-paper «Le Matin Dimanche» et dans nos archives. Chaque dimanche matin, retrouvez également votre journal en caissettes près de chez vous. Vous pouvez aussi vous inscrire à notre newsletter. Newsletter «Dernières nouvelles» Vous voulez rester au top de l'info? «24 heures» vous propose deux rendez-vous par jour, pour ne rien rater de ce qui se passe dans votre Canton, en Suisse ou dans le monde. Autres newsletters Se connecter Catherine Cochard est journaliste à la rubrique vaudoise et s'intéresse aux sujets de société. Elle produit également des podcasts. Auparavant, elle a notamment travaillé pour Le Temps ainsi qu'en tant que réalisatrice indépendante pour l'Université de Zurich. Plus d'infos @catherincochard Vous avez trouvé une erreur?Merci de nous la signaler.


24 Heures
13 hours ago
- 24 Heures
Ces 6 explorateurs de l'Antiquité qui ont dessiné la carte du globe
Accueil | Savoirs | Histoire | À l'occasion de l'exposition «Tours du Monde» à Prangins, focus sur ces antiques pionniers du voyage ayant repoussé les horizons. Publié aujourd'hui à 10h35 On pense souvent à Marco Polo (ici dessiné dans un atlas catalan de 1375 avec sa caravane de chameaux) lorsqu'on évoque les tout premiers voyageurs intercontinentaux. Mais dès l'Antiquité, des explorateurs ont jeté des ponts entre les différentes régions du monde. IMAGO/GRANGER Historical Picture Archive En bref: Si l'on sait depuis l'Antiquité grecque au moins que la Terre est une sphère, il a fallu des siècles et des siècles pour que l'humanité ait une vision d'ensemble, cohérente et réaliste, du contour des continents. De leurs proportions aussi. Au fil des millénaires, des dizaines de voyageurs affamés d'horizons inconnus ont ainsi, comme on complète un puzzle bien plus grand que soi, apporté chacun leur bout de connaissances pour dessiner la carte du monde telle que nous la voyons aujourd'hui sur les planisphères ou les globes. Au Château de Prangins, l'exposition «Tours du monde. De Jules Verne aux premiers globetrotters» , à découvrir jusqu'au 26 octobre 2025, présente ainsi ces femmes et ces hommes pionniers de l'aventure, ces bourlingueurs qui, dès le XIXe siècle, ont fait de l'immensité de notre planète leur proche banlieue en allant y poser le pied pour la raconter, la peindre, la décrire méthodiquement. À ce stade, vous trouverez des contenus externes supplémentaires. Si vous acceptez que des cookies soient placés par des fournisseurs externes et que des données personnelles soient ainsi transmises à ces derniers, vous devez autoriser tous les cookies et afficher directement le contenu externe. Mais bien avant que le Philéas Fogg de Jules Verne refile le virus de la circumnavigation à toute une génération de rêveurs et de savants, avant même Marco Polo, Ibn Battuta, Magellan, Colomb ou Cook, des voyageurs pour la plupart beaucoup moins connus ont malgré tout contribué à l'élaboration des cartes dès l'Antiquité. Des scientifiques souvent, des militaires parfois, des inconscients presque toujours, qui sont allés titiller le bord du monde connu – plutôt restreint, à l'époque. Panorama de six de ces premiers explorateurs de l'histoire ayant donné une forme aux contrées de notre planète. Henou, un Égyptien aux portes de l'océan Indien Le noble Henou est représenté dans un bas-relief figurant sur les parois de sa tombe, à Deir el-Bahari, en Égypte. imago/Artokoloro Vers 2000 avant notre ère, le pharaon Mentouhotep III, de la onzième dynastie, cherche à savoir quelles régions s'étendent au sud de l'Égypte , d'où proviennent des denrées précieuses. Il charge alors un noble nommé Henou d'aller découvrir ces contrées encore inconnues. Celui-ci, accompagné de pas moins de 3000 hommes, remonte alors le Nil, traverse le désert pour rejoindre la côte puis descend la mer Rouge. L'expédition exploratoire – l'une des toutes premières documentées dans l'histoire de l'humanité – atteint alors le mythique Pays de Pount, une zone qui correspondrait grosso modo aujourd'hui au golfe d'Aden et comprendrait l'est du Soudan , l'Éthiopie, Djibouti et le nord de la Somalie. Impressionné par les paysages verdoyants, le voyageur appelle cette ultime destination «Le Grand Vert». Selon les abondantes inscriptions rupestres qui narrent le voyage d'Henou, notamment retrouvées dans sa tombe de la nécropole thébaine, la mission aurait permis de rapporter de nombreux produits, des aromates jusqu'à des blocs de pierre pour les édifices prestigieux. «Je construisis les navires et les chargeai de toutes sortes de choses, et leur offris une grande offrande de bétail, de bœufs et de gazelles, peut-on lire parmi les inscriptions faisant état de l'expédition. À mon retour du Grand Vert, j'exécutai ce que Sa Majesté avait ordonné: je lui rapportai tout ce que je trouvai sur les rivages de la Terre de Dieu.» La route commerciale qu'Henou venait d'ouvrir permit ainsi au royaume égyptien de retrouver une certaine prospérité. Hannon le Navigateur, un Carthaginois chez les gorilles Hannon le Carthaginois, venant de s'échouer, dans une œuvre de 1882. Album / Prisma Au VIe siècle avant notre ère, Carthage (près de l'actuel Tunis) rayonne déjà sur la Méditerranée. Et la civilisation punique entend bien étendre sa domination au-delà des horizons connus. Vers le sud de l'Afrique notamment. Selon un texte miraculeusement parvenu jusqu'à nous, «Le périple d'Hannon», un navigateur du même nom serait parti avec une flotte d'une soixantaine de navires pour explorer les côtes occidentales africaines et y fonder des comptoirs, quelque part entre le VIe et le Ve siècle av. J.-C. À ce stade, vous trouverez des contenus externes supplémentaires. Si vous acceptez que des cookies soient placés par des fournisseurs externes et que des données personnelles soient ainsi transmises à ces derniers, vous devez autoriser tous les cookies et afficher directement le contenu externe. Franchissant les Colonnes d'Hercule, aujourd'hui le détroit de Gibraltar, la mission aurait foncé vers le sud, longeant les côtes marocaines , abordant les Canaries, voire le Cap-Vert, avant d'explorer le fleuve Sénégal. À en croire les descriptions – des forêts tropicales denses, une chaleur étouffante, des montagnes – Hannon aurait même pu pousser l'expédition dans le golfe de Guinée, allant en dessous de l'équateur pour sillonner les rives du Cameroun et du Gabon. C'est là que les voyageurs auraient rencontré ce que le texte qualifie de «Gorilles», des êtres velus semblables aux humains. «Le périple d'Hannon» narre-t-il la première rencontre avec ces grands primates ou utilise-t-il une image pour décrire les populations inconnues de ces régions? Quoi qu'il en soit, l'œuvre évoque des contacts avec des habitants dont personne, sur les navires, ne connaissait la langue, semblant confirmer le fait qu'Hannon et ses équipiers ont bien dépassé la côte sénégalaise. Pourtant, quelques historiens mettent en doute la véracité des événements décrits par le texte, voyant là un mélange entre voyage réel au sud du Maroc et récit mythique inspiré par «L'Odyssée» d'Homère. Hannon, pionnier des grands explorateurs ou héros légendaire concurrençant Ulysse? L'énigme risque de durer… Pythéas, un Marseillais sur la banquise Pythéas s'émerveillant devant les premières glaces annonçant la banquise, imaginé par Richard Cortambert dans «Nouvelle histoire des voyages et des grandes découvertes» de 1880. imago images/KHARBINE-TAPABOR Qu'y a-t-il tout au nord de l'Europe? Des gens habitent-ils ces contrées mystérieuses? Au IVe siècle avant notre ère, un scientifique grec se pose sérieusement la question. Au point de vouloir s'y rendre personnellement pour vérifier tout ça. Ce curieux de nature qui va marquer l'Antiquité par ses découvertes, c'est Pythéas . À la fois astronome, philosophe et mathématicien, il est l'un des personnages historiques les plus célèbres de Massalia, l'antique Marseille. Décidé à explorer les régions «hyperboréennes» comme on les nomme à l'époque, il prend le large, entre -360 et -300 – l'année précise de son début de périple demeure inconnue – depuis la cité phocéenne. Les conditions de son voyage sont toujours aussi mystérieuses. Alexandre le Grand aurait pu lui confier une flotte pour aller rechercher des gisements de matières précieuses, comme l'étain. Problème: aucune source ne le qualifie vraiment de navigateur. Selon d'autres auteurs, il serait parti en tant que simple passager de bateaux de commerce, embarquant au fil des ports pour remonter vers le nord, dans une démarche de scientifique pur, avec un œil d'ethnologue et d'astronome. La rotondité de la Terre est déjà connue, les latitudes aussi, et les savants imaginent que les nuits estivales doivent logiquement être quasi inexistantes vers le pôle. Dans son ouvrage «De l'océan», dont le texte, malheureusement perdu, est cependant cité par fragments par une dizaine d'auteurs de l'Antiquité parmi lesquels Strabon et Pline l'Ancien, il nous apprend ainsi être passé par le sud de la Bretagne française, puis par la Cornouaille anglaise, avant de mettre le cap vers ce qui serait les Orcades en Écosse. La suite de son voyage est plus difficile à tracer: il dit avoir atteint l'île de Thulé, une région où il observe le fameux soleil de minuit ainsi qu'un mystérieux «poumon marin» sur l'océan, qui ne serait autre que le début de la banquise. Pour nombre de chercheurs, Pythéas aurait donc dépassé le cercle arctique, accostant à un endroit qui serait l'Islande ou la Norvège. Grâce à ses explorations, le Marseillais a donné un contour aux régions nordiques sur les cartes de l'époque et fut le premier à comprendre l'influence de la lune sur les marées. Néarque, un Crétois met l'Inde à portée de bateau Vue d'artiste du navigateur Néarque dans une gravure du XIX e siècle. Album / LANMAS Crétois de naissance mais installé en Macédoine, ami de jeunesse d'Alexandre le Grand, Néarque fait partie des compagnons de route les plus proches du monarque lors de sa vaste campagne en Asie, qui commence vers 334 avant notre ère. Alors que l'expédition a permis de fonder de nombreuses nouvelles villes en Perse et bien au-delà au fil des ans, le célèbre conquérant demande à Néarque d'aller explorer les côtes de l'océan Indien afin de mieux connaître ces régions et, peut-être, permettre de développer une route maritime exploitable entre l'Inde et la Mésopotamie pour transporter perles, encens et autres écailles de tortues. En 325, tout juste devenu navarque – c'est-à-dire capitaine de vaisseau de guerre dans la Grèce antique –, le fidèle compagnon quitte l'embouchure de l'Indus, près de l'actuel Karachi au Pakistan , à la tête d'une flotte de 120 navires solidement construits et 10 000 hommes. Un plongeon dans l'inconnu pour ces voyageurs, qui n'ont aucune idée de la géographie qu'ils traversent et des populations qu'ils peuvent rencontrer. Longeant le rivage tout en demeurant à une certaine distance pour éviter les attaques de tribus locales, l'expédition explore la mer d'Arabie sur 1300 km, puis pénètre dans le golfe Persique, qu'elle remonte ensuite jusqu'à l'embouchure de l'Euphrate. De retour à Suse en 324 après une épopée de six mois qui a vu les équipages souffrir de soif et de faim, Néarque et son assistant rédacteur écrivent un ouvrage décrivant le périple. Un livre qui s'avérera fondamental pour dessiner de nouveaux contours à l'Asie et que nombre d'auteurs antiques – dont Arrien – utiliseront pour décrire l'Inde. Comme Alexandre le Grand et plusieurs de ses proches officiers, le navigateur épousa une membre de la noblesse persane en 324, une année avant la mort précoce du roi à Babylone. Hérodote, un Grec chez les nomades de la steppe Gravure de l'auteur Hérodote, grand voyageur antique. imago images/KHARBINE-TAPABOR C'est sans aucun doute le carnet de voyage le plus ancien de l'histoire, et aussi le plus fascinant de toute l'Antiquité. «L'enquête», rédigée vers 445 avant notre ère par Hérodote, est un savant mélange entre récit d'exploration, étude ethnographique, précis géographique, analyse politique et synthèse des connaissances de l'époque sur les régions méditerranéennes et ses marges. Une somme nourrie par d'innombrables lectures, mais surtout plusieurs longs voyages lors desquels il va couvrir presque tous les secteurs connus par la civilisation grecque. C'est après son exil de la ville qui l'a vu naître, Halicarnasse, en Anatolie, qu'il va parcourir la Méditerranée , découvrant l'Égypte, la Libye, la Syrie, poussant jusqu'en Grèce, s'aventurant en Perse et sur le territoire des redoutables nomades Scythes, vers l'Ukraine et la Géorgie actuelles. Un parcours inouï de diversité pour l'époque. Si quelques historiens ont remis en doute la véracité de ses pérégrinations, on estime aujourd'hui qu'Hérodote s'est effectivement rendu dans nombre de ces zones. Il a même fait montre d'un regard étonnant de modernité, inventant l'approche anthropologique tout en sachant abreuver le lecteur d'anecdotes savoureuses et de rebondissements dans le texte pour ne jamais devenir ennuyeux. Grâce à lui, le monde a pris forme aux yeux de ses contemporains et de toute l'Antiquité. Eudoxe de Cyzique, un Grec autour de l'Afrique Stèle funéraire retrouvée à Cyzique, la ville natale du navigateur Eudoxe. Wikipedia Commons Faire le tour de l'Afrique en bateau? La question taraude de nombreux explorateurs durant l'Antiquité. Alors que certains pensent que le fleuve Sénégal et le Nil se rejoignent, laissant imaginer un continent d'une taille raisonnable, d'autres craignent que l'Afrique puisse être bien plus immense que prévu. Au deuxième siècle avant notre ère, un voyageur grec natif d'Anatolie, l'actuelle Turquie, va bientôt être confronté à cette interrogation. Après une première expédition vers l'Inde depuis la mer Rouge entre 118 et 116, cherchant à ouvrir une route sûre vers cette région riche en épices et en gemmes, Eudoxe de Cyzique repart vers les contrées indiennes, décidé à mieux comprendre comment naviguer dans ces zones régies par l'indomptable phénomène des moussons, qui désespère même les marins les plus expérimentés. À son retour, comme il le craignait, l'explorateur perd le contrôle du cap et se retrouve poussé par les vents vers le sud-ouest, au point d'accoster vers la Corne de l'Afrique . C'est là qu'il découvre les restes d'un bateau au style étrange. Le rapportant avec lui en Méditerranée, il comprend vite que ce vestige n'est autre que celui d'un navire punique, qui serait venu jusqu'ici en contournant le continent depuis l'actuel Maroc. Son obsession devient alors de tenter ce même trajet, jamais réussi de mémoire d'homme. Il effectue un premier voyage depuis l'Anatolie, rejoignant l'actuelle Cadix, avant de partir au sud. Ses descriptions permettent de supposer qu'il serait allé jusqu'aux côtes du Congo, voire de l'Angola, décidant ensuite de faire demi-tour par manque de provisions. À Cadix, il organise un nouveau périple, choisit des bateaux plus récents, amasse les denrées puis se lance pour la seconde fois le long des rivages ouest-africains. Plus personne n'entendit jamais parler de lui. Il fallut attendre les navigateurs portugais de la fin du Moyen ge pour que le voyage soit tenté à nouveau. Avec succès cette fois. Des explorateurs et des voyages Newsletter «Dernières nouvelles» Vous voulez rester au top de l'info? «24 heures» vous propose deux rendez-vous par jour, pour ne rien rater de ce qui se passe dans votre Canton, en Suisse ou dans le monde. Autres newsletters Nicolas Poinsot est journaliste à la rubrique culture et société. Auparavant, cet historien de l'art de formation a écrit pendant plus de dix ans pour le magazine Femina et les cahiers sciences et culture du Matin Dimanche. Plus d'infos Vous avez trouvé une erreur?Merci de nous la signaler.


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Retour sur l'atroce assassinat de Sharon Tate et le cauchemar de 1969
Horreur pendant l'été de l'amour. L'actrice Sharon Tate, enceinte de 8 mois, est brutalement assassinée chez elle par les fidèles de Charles Manson. Publié aujourd'hui à 10h46 L'assassinat de Sharon Tate par «La Famille» de Charles Manson a traumatisé l'Amérique des années 60. Montage Tamedia-F.G. En bref: Été 1969. Après une décennie marquée par les assassinats de John Fitzgerald Kennedy et Martin Luther King, l'entrée en guerre des États-Unis au Vietnam, la révolution des droits civiques et la naissance de la contre-culture hippie, le temps de l'hédonisme est là. En tout cas à Los Angeles, où les stars du moment errent de fête en fête à coups de marijuana, pendant que la radio joue les Beatles, Creedence ou encore les Bee Gees. Mais horreur et stupeur le 9 août de cette année-là, il y a cinquante-six ans jour pour jour. L'étoile montante du cinéma Sharon Tate, mariée à Roman Polanski, ainsi que trois de ses amis sont retrouvés morts – un euphémisme – dans la maison du couple. Récit de cette affaire terrifiante et innommable. Un raté violent Tout démarre par la folie d'un seul homme, Charles Manson, né Charles Maddox en 1934 dans l'Ohio. On peut dire que sa vie entière ne fut qu'un long traumatisme infligé à l'Amérique de la seconde moitié du XXe siècle. Après une enfance difficile marquée par l'absence de son père, qu'il n'a jamais connu, le petit Charles Manson flirte très tôt avec la criminalité. Dès ses 14 ans, il commet de petits larcins comme des vols et des méfaits plus graves comme des agressions sexuelles, ce qui lui vaut de faire des allers-retours réguliers dans des maisons de correction. Diagnostiqué d'«agressivement antisocial» à l'âge de 16 ans, il finit par se marier en 1955, à 19 ans, et devient même père d'un premier enfant dans la foulée. Majeur, Manson zigzague entre son foyer et la prison, avant que sa femme ne le quitte définitivement quatre ans plus tard. Proxénète à ses heures perdues, il se passionne pour la musique lors d'un séjour carcéral et développe une fascination dévorante pour les Beatles au milieu des années 60. Ambitionnant une carrière dans la chanson, son manque de talent ne lui permet que de se produire comme un musicien itinérant sur la côte ouest. Frustré et dérangé, il attire l'attention de quelques hippies errants, qui deviendront ses premiers fidèles. Rencontre avec les Beach Boys Charles Manson en prison, avec une croix gammée sur le front. IMAGO/United Archives Durant cette période, Charles Manson débarque un beau jour chez Dennis Wilson, le batteur des Beach Boys, pour lui faire part de son admiration. D'abord suspicieux, le musicien se lie finalement d'amitié avec le futur gourou. L'aidant ici et là à composer – une musique des Beach Boys s'inspire d'ailleurs d'un texte de Charles Manson – Dennis Wilson lui ferme définitivement sa porte lorsque Manson le menace de mort après qu'il n'a pas reçu d'argent pour son prétendu travail de compositeur. À ce stade, vous trouverez des contenus externes supplémentaires. Si vous acceptez que des cookies soient placés par des fournisseurs externes et que des données personnelles soient ainsi transmises à ces derniers, vous devez autoriser tous les cookies et afficher directement le contenu externe. Est-ce que la bascule du destin intervient après cette nouvelle déception? Pour Dennis Wilson, marqué à vie par le rôle qu'il a joué malgré lui dans ce fait divers avant de disparaître tragiquement en 1983, sans doute. Quoi qu'il en soit, Charles Manson s'installe avec ses fidèles dans un vieux ranch utilisé pour le tournage de westerns, avec l'accord du propriétaire, George Spahn. Leurs journées sont rythmées par un service de balade à cheval proposé aux touristes, puis par des leçons du gourou qui s'incarne désormais comme le Christ ressuscité pour sa secte naissante, «La Famille». On notera d'ailleurs que l'acteur Bryan Cranston («Malcolm», «Breaking Bad») a notamment rencontré Manson en louant l'un de ses chevaux, à l'âge de 12 ans. Couple de vedettes La naissance du couple Tate-Polanski est un événement populaire à Hollywood. IMAGO/TT De l'autre côté de la société, dans le quartier huppé de Benedict Canyon , vivent heureux l'actrice Sharon Tate et le réalisateur franco-polonais Roman Polanski. S'étant rencontrées lors du tournage du «Bal des vampires» en 1967, les deux vedettes défraient la chronique people de Hollywood. Après Marilyn Monroe, Audrey Hepburn, Elizabeth Taylor ou encore Grace Kelly, la Cité des Anges s'est trouvé une nouvelle icône en la personne de Sharon Tate. Le magazine «Playboy» décrit d'ailleurs 1967 comme «l'année de l'arrivée de Sharon Tate». Moins confirmée et institutionnalisée que ses illustres prédécesseuses, l'actrice de 24 ans n'a fait que quelques apparitions au cinéma. Ces dernières sont tout de même très remarquées: «Le mystère des treize» (J. Lee Thompson), «La vallée des poupées» (Vincente Minnelli) et, bien sûr, «Le bal des Vampires» (Roman Polanski). Une poignée de succès qui fait jouir l'actrice d'une immense notoriété. Douce, gentille, magnifique; Sharon Tate est adorée par ses proches. Photo de Sharon Tate dans «Le mystère des treize» de J. Lee Thompson. imago images/Everett Collection Son mari, Roman Polanski, rescapé du ghetto de Varsovie, s'est rapidement forgé une solide réputation de metteur en scène dès le milieu des années 60, avant d'atteindre la consécration avec «Rosemary's Baby», en 1968. Sa relation naissante avec Sharon Tate est un événement populaire entre l'Amérique et l'Europe occidentale. Marié à Londres au cours d'une somptueuse réception qui réunit tout le gratin de l'époque, le couple s'installe donc au début de l'année 1969 à Benedict Canyon, au numéro 10050 du désormais tristement célèbre Cielo Drive. Alors que l'été approche, Roman Polanski part au Royaume-Uni pour préparer le tournage d'«Un animal doué de raison». Sharon Tate, enceinte jusqu'au cou, tue le temps en compagnie de son ex-compagnon, Jay Sebring, coiffeur de star, et égrène les soirées huppées de l'intelligentsia américaine. «Piggies» Depuis son ranch situé à moins de 40 minutes en voiture de la maison de Sharon Tate, Charles Manson prêche donc sa nouvelle doctrine. «La Famille» compte alors près d'une vingtaine de membres, essentiellement des jeunes femmes, et vit de trafic de drogues et de vol. Depuis que Charles Manson a écouté l'«Album blanc» des Beatles, et plus particulièrement la chanson «Helter Skelter», il est convaincu de l'imminence d'une guerre raciale, discernant à sa convenance un sens caché dans les paroles du morceau. À ce stade, vous trouverez des contenus externes supplémentaires. Si vous acceptez que des cookies soient placés par des fournisseurs externes et que des données personnelles soient ainsi transmises à ces derniers, vous devez autoriser tous les cookies et afficher directement le contenu externe. Sa prophétie apocalyptique selon laquelle la «race blanche» va être annihilée par la «race noire» prend forme, et il convainc aisément ses suiveurs. Manson pense pouvoir devenir le vainqueur du conflit en commettant des assassinats puis en imputant la faute aux Noirs. S'inspirant d'un autre morceau des Fab Four, «Piggies», une satire de George Harrison sur le consumérisme, Charles Manson identifie les «porcs» de ce monde comme étant les stars de la ville. Une liste des potentielles victimes naît alors: Elizabeth Taylor, Frank Sinatra, Steve McQueen, Tom Jones, et, fatalement, Sharon Tate. À ce stade, vous trouverez des contenus externes supplémentaires. Si vous acceptez que des cookies soient placés par des fournisseurs externes et que des données personnelles soient ainsi transmises à ces derniers, vous devez autoriser tous les cookies et afficher directement le contenu externe. Il envoie donc ses disciples à ses trousses: les «quatre cavaliers de l'Apocalypse» Tex Watson, Susan Atkins, Linda Kasabian et Patricia Krenwinkel. Une brochette de moins-que-rien complètement anesthésiés de tout sens humain. Dans la bien sombre nuit du 8 août, cette équipée barbare pénètre dans le 10050 Cielo Drive avant de commettre l'indicible, un crime atroce, sordide, terrifiant, qui donnerait sans doute raison à Thomas Hobbes quant à savoir si l'homme naît mauvais ou non. Changement de paradigme Comment relater la nuit d'horreur passée par Sharon Tate, Jay Sebring, Wojciech Frykowski, Abigail Folger et Steven Parent avec décence? Les détails, affreux, sont connus. En l'espace d'une nuit, l'actrice et ses amis sont massacrés par des tueurs souriants. Le lendemain matin, l'Amérique se réveille choquée, alors que les policiers retrouvent les corps des victimes, et que le mot «Pigs» est écrit avec le sang de Sharon Tate sur les murs. Cielo Drive, le matin du 9 août. La police est sur les lieux du drame et transporte le corps de Sharon Tate. imago images / Cinema Publishers Collection Charles Manson et sa bande sont également responsables d'un double meurtre la nuit suivante. Puis d'un autre à la fin du mois d'août. D'autres assassinats, à ce jour non élucidés, sont imputés au gourou et ses disciples. Los Angeles connaît une fin d'été épouvantable, sans suspect à se mettre sous la dent. Mais après une longue enquête retraçant également d'autres méfaits de «La Famille», les points se connectent et un mandat d'arrêt est lancé contre Manson et ses suiveurs en décembre 1969. Stupeur sur la côte ouest, les assassins ont l'apparence de hippies et écoutent la même musique que ceux ayant chanté l'amour à Woodstock. C'est un coup pour les partisans de la paix. Désormais, l'Américain moyen diabolise le mouvement. La fin du «Peace and Love». Satan et ses diables À ce stade, vous trouverez des contenus externes supplémentaires. Si vous acceptez que des cookies soient placés par des fournisseurs externes et que des données personnelles soient ainsi transmises à ces derniers, vous devez autoriser tous les cookies et afficher directement le contenu externe. Le procès dure près de deux ans. Un long chemin de croix pour la famille de Sharon Tate, qui doit supporter non seulement l'horreur des détails mais aussi les sourires et provocations des accusés, visiblement très contents de leurs actes. Manson n'était pas seulement admiré, mais avait un véritable pouvoir de vie et de mort sur ses disciples. En tant que commanditaire des meurtres, il écope de la peine de mort, à l'instar des autres prévenus. Mais un débat constitutionnel sur la peine capitale a lieu au même moment dans les États. Après un imbroglio, le jugement est revu à une sentence de prison à vie. Les trois horreurs ayant participé à l'assassinat avec Tex Watson. imago images/Everett Collection Suite à la mort de Charles Manson en 2017, des questions et affaires restent en suspens. En attendant, le sociopathe et faux prophète fascine encore des générations. Espérons seulement qu'il gît à présent aux côtés de Lucifer, dans le neuvième cercle de l'enfer. Stars et faits divers Newsletter «Dernières nouvelles» Vous voulez rester au top de l'info? «24 heures» vous propose deux rendez-vous par jour, pour ne rien rater de ce qui se passe dans votre Canton, en Suisse ou dans le monde. Autres newsletters Andrea Di Guardo est journaliste RP à la Tribune de Genève depuis mars 2024. Attaché à la rubrique culturelle (pôle Vibrations), il écrit également pour 24 Heures et Le Matin Dimanche. Il s'intéresse aussi aux sujets locaux et internationaux. Il est titulaire d'un Master en journalisme et communication et d'un Bachelor en sciences politiques. Plus d'infos Vous avez trouvé une erreur?Merci de nous la signaler.