
Déploiement policier massif face aux manifestations antigouvernementales
(Nairobi) Les rues étaient vides et la tension élevée lundi à Nairobi, capitale d'habitude dynamique du Kenya où les principales voies d'accès avaient été coupées en amont d'une nouvelle journée de manifestations antigouvernementales, après de récents rassemblements entachés de violences policières et de pillages.
Mary KULUNDU
Agence France-Presse
La Journée Saba Saba (« sept, sept » en swahili, pour 7 juillet) commémore chaque année le soulèvement du 7 juillet 1990, lorsque les Kényans ont manifesté pour l'instauration du multipartisme, au cœur des années sombres du régime autocratique de Daniel arap Moi.
Cette année, cet hommage se conjugue à la vague de contestation qui secoue depuis un an le pays contre les taxes, la corruption, les disparitions forcées et les brutalités policières sous la présidence de William Ruto.
Lundi à la mi-journée, les manifestants semblaient peu nombreux dans les rues désertées du centre-ville, haut lieu des rassemblements ces derniers mois. Des journalistes de l'AFP ont vu un groupe de policiers tirer des gaz lacrymogènes face à une cinquantaine de jeunes hommes, dont certains leur jetaient des pierres.
Plus tôt dans la matinée, sous une fine bruine, seuls quelques passants, boda-boda (motos-taxis) et policiers étaient visibles dans ce pôle de l'économie et du pouvoir politique.
« Je n'ai jamais vu le centre-ville comme ça », a déclaré à l'AFP Edmond Khayimba, un agent de sécurité de 29 ans.
PHOTO THOMAS MUKOYA, REUTERS
Des manifestants se rassemblent pendant les affrontements avec la police lors de la manifestation antigouvernementale Saba Saba, le 7 juillet 2025.
Hanifa Adan, une des figures de ce mouvement décentralisé, a rallié sur X le fait qu'il pleuve sur la police « tandis que nous restons au chaud à la maison. »
Les télévisions locales montraient des rassemblements limités en périphérie de la capitale et dans quelques villes du pays, la police y ayant parfois déployé des canons à eau.
« Ruto ne délivre pas »
Les dernières manifestations du 25 juin, au départ pacifiques, ont tourné à la violence, des jeunes affrontant à coup de jets de pierre la police, qui a répliqué par de grandes quantités de gaz lacrymogènes et de grenades assourdissantes.
Dix-neuf personnes ont été tuées et 500 autres arrêtées, l'exécutif affirmant avoir « déjoué un coup d'État », tandis que les manifestants accusent les autorités de payer des vandales armés pour discréditer leur mouvement.
Le 25 juin devait rendre hommage aux dizaines de victimes du vaste mouvement citoyen de 2024, qui avait culminé avec, le même jour, une brève prise du Parlement par les manifestants.
Ces jeunes de la « Generation Z », pour beaucoup urbains, éduqués et connectés, réclamaient le retrait d'une loi budgétaire controversée ainsi que le départ du président Ruto, élu en 2022 sur la promesse de défendre les plus démunis après des années de difficultés économiques.
« Le gouvernement devrait être responsable. Les jeunes manifestent pour beaucoup de choses comme l'accès à la santé », affirme lundi Rogers Onsomu, un boda-boda de 32 ans venu pour travailler.
« Ce que [Ruto] a promis au pays, il ne le délivre pas. Ce slogan de 'Ruto doit partir', nous ne le lâcherons pas, nous le ferons vivre chaque jour », ajoute-t-il cependant.
Années 1990
Les violences policières entachent l'image du Kenya, pays d'Afrique de l'Est d'environ 55 millions d'habitants, considéré comme l'un des rares États stables et démocratiques dans une région troublée.
Les organisations de défense des droits de la personne, notamment Human Rights Watch (HRW) et Amnistie, ont critiqué la réponse des autorités, tandis que les Nations unies ont déploré les violences, appelant au calme et à l'ouverture d'enquêtes « indépendantes et transparentes ».
Dimanche, un gang armé a attaqué le siège de la Commission kényane des droits de la personne, où se tenait une conférence de presse appelant à la fin des brutalités policières.
Pour l'analyste Gabrielle Lynch, spécialiste de l'Afrique à l'université britannique de Warwick, la réponse étatique rappelle celle de l'époque de Saba Saba.
Le pouvoir avait alors arrêté plus de 1000 personnes, détenues pour certaines pendant deux ans, selon Amnistie internationale.
« Mais nous ne sommes plus dans les années 1990 », pointe Mme Lynch. « Ils ne semblent pas avoir compris que le monde avait changé ».
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16 hours ago
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Il y a une semaine, les policiers de la Sûreté du Québec ont intercepté des Hells Angels qui venaient de manger dans un restaurant de Val-d'Or. Selon la police, les motards se rendaient à la Canada Run, dans l'Ouest canadien. Le 7 juillet dernier. Des membres des Hells Angels, portant leur veste, s'arrêtent et cassent la croûte dans un restaurant de Val-d'Or, en Abitibi. En mai dernier, des membres d'un club subalterne et leur parrain, un membre des Hells Angels de la section de Trois-Rivières, sont aperçus portant leur veste dans un bar de Saguenay. En avril dernier, trois individus reliés aux Marauders, dont un membre arborant ses couleurs à l'intérieur d'un restaurant de Laval, battent sauvagement un client. Les trois hommes sont arrêtés et accusés. Les Marauders sont parrainés par les Hells Angels de la section de Montréal. 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PHOTO FOURNIE PAR LE SERVICE DE POLICE DE LA VILLE DE QUÉBEC Dave Turmel, surnommé le Pic Dave Turmel est ce chef de gang impliqué dans une rébellion contre les Hells Angels qui perdure depuis deux ans dans la région de la capitale nationale et sur la Côte-Nord. Il a été arrêté en Italie à la fin de mars, après une longue cavale. Une telle rébellion a lieu également au Saguenay, où les Hells Angels de Trois-Rivières, qui contrôlent la région, ont maille à partir avec un trafiquant indépendant, All Boivin, toujours recherché par la police. « Il y a plusieurs membres de clubs supporteurs et même des Hells Angels qui ont été les cibles de tentatives de meurtre et de méfaits. Des commerces incendiés, des locaux attaqués, alors ils s'affichaient moins. Mais depuis l'arrestation de Turmel, on constate que les clubs supporteurs, que l'on voyait moins souvent dans les établissements licenciés ou dans les festivals, sont de plus en plus voyants et sont moins gênés de porter leurs couleurs. 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