
L'effet Boomerang des dossiers Epstein
(New York) Depuis une semaine, le mouvement MAGA traverse une crise existentielle qui menace Donald Trump. La cause : la façon dont le département de la Justice gère les dossiers Jeffrey Epstein, du nom du pédocriminel retrouvé mort dans la cellule où il attendait son procès pour abus sexuels sur mineures, en août 2019.
Quel a été l'élément déclencheur de cette crise ?
Lundi dernier, le département de la Justice a publié un document de deux pages contenant ce que ses dirigeants ont présenté comme étant les conclusions du FBI sur les dossiers Epstein. Ces conclusions contredisent les principaux arguments ayant alimenté les théories complotistes concernant Epstein : le financier déchu s'est bel et bien suicidé ; il n'a fait chanter aucun des personnages riches et puissants qu'il fréquentait ; aucune « liste de clients incriminante » ne se trouvait parmi les dossiers portant son nom. Cette dernière conclusion a fait exploser de nombreux adeptes du mouvement MAGA.
Quelle est l'importance de cette liste ?
Depuis des années, les figures de proue du mouvement MAGA, que ce soient des politiciens ou des influenceurs, accusent le département de la Justice et le FBI de cacher la « liste des clients d'Epstein » afin de protéger des membres de l'élite financière et politique américaine et internationale, y compris Bill Clinton et d'autres démocrates.
PHOTO LAUREN LEIGH BACHO, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS
Le vice-président des États-Unis, J.D. Vance
« Sérieusement, nous devons publier la liste d'Epstein », a dit J.D. Vance, futur vice-président, en octobre 2024.
« La liste d'Epstein va ébranler le Parti démocrate », a prédit le baladodiffuseur Dan Bongino, devenu directeur adjoint du FBI, en septembre 2024 (son patron actuel, Kash Patel, a tenu des propos semblables à la même époque). En février dernier, la procureure générale des États-Unis, Pam Bondi, a fait saliver les complotistes du mouvement MAGA en affirmant sur Fox News que la liste d'Epstein était « sur [son] bureau ». Or, la semaine dernière, elle a déclaré qu'elle parlait des dossiers Epstein et non d'une « liste de clients ».
L'explication de Bondi a-t-elle été acceptée ?
À en juger par la réaction des influenceurs MAGA, la réponse est un non retentissant. Laura Loomer a réclamé la démission de la procureure générale, lui reprochant d'être « très préjudiciable à l'image du président Trump ».
PHOTO TED SHAFFREY, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS
Laura Loomer est une militante américaine associée à l'extrême droite.
Steve Bannon a demandé la nomination d'un procureur spécial chargé d'enquêter sur « tous » les dossiers Epstein. « C'est le premier grand scandale attribuable à l'administration Trump, ce n'est pas un faux scandale médiatique comme la gauche essaie d'en imputer un au président Trump tous les deux jours », a commenté Megyn Kelly lors d'un panel animé par Charlie Kirk, vendredi dernier. « Il s'agit d'un scandale créé par la droite, et cela ne se passe pas bien. Je dois être honnête, je blâme Pam Bondi. »
Comment Trump réagit-il à ce scandale ?
Samedi, il a publié sur Truth Social un long message dans lequel il s'est demandé pourquoi ses « gars » et ses « filles » du mouvement MAGA « s'en prennent tous à la procureure générale Pam Bondi, qui fait un TRAVAIL FANTASTIQUE ! ». Il a enchaîné en reprochant bizarrement à son camp de donner « de la publicité à des dossiers écrits par Obama, Hillary la véreuse, Comey, Brennan et les criminels de l'administration Biden ». Jeffrey Epstein, faut-il le rappeler, a été arrêté, inculpé et trouvé mort dans sa cellule pendant le premier mandat de Trump. Fait révélateur d'une situation qu'un animateur de Fox News a qualifiée de « bombe à retardement », le message du président a suscité plus de commentaires négatifs que positifs, du jamais-vu sur Truth Social. C'est comme si le lien de confiance entre l'homme qui avait promis de rendre publics les dossiers Epstein et ses partisans avait été entamé.
Les MAGA reprochent-t-ils à Trump ses liens avec Epstein ?
Fait étonnant, le sujet n'a jamais été au cœur des préoccupations des partisans du président. Ceux-ci se sont intéressés aux autres personnages puissants qui ont fréquenté le financier new-yorkais, dont le président Bill Clinton, l'ancien premier ministre israélien Ehud Barak et le prince Andrew. Mais ils ont toujours négligé le fait que Trump a fréquenté de façon régulière Epstein pendant près de 20 ans.
Lors d'une interview accordée au magazine New York en 2002, le futur président avait qualifié son ami de New York et de Palm Beach de « gars formidable ».
Et d'ajouter : « On dit même qu'il aime les belles femmes autant que moi, et beaucoup d'entre elles sont plutôt jeunes. » Trump a fini par se brouiller avec Epstein, tout comme il a fini par rompre avec Elon Musk, qui a notamment relayé sur X l'allégation selon laquelle son nom apparaît « dans les dossiers Epstein ».
Les démocrates tentent-ils d'exploiter la crise ?
Le représentant démocrate de Californie Ro Khanna tentera mardi d'ajouter un amendement à un projet de loi à l'examen afin de forcer la procureure générale des États-Unis à publier « tout dossier ou élément de preuve lié à l'enquête, la poursuite ou l'incarcération » d'Epstein.
PHOTO SUE OGROCKI, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS
Ro Khanna, représentant démocrate de Californie
« Pourquoi les dossiers Epstein sont-ils toujours cachés ? Qui sont les riches et les puissants protégés ? », a demandé M. Khanna dimanche sur X. « Mardi, j'introduirai un amendement pour forcer un vote exigeant que les dossiers complets d'Epstein soient rendus publics. Le président de la Chambre des représentants doit demander un vote et obliger tous les membres du Congrès à se prononcer. » Si le président de la Chambre, Mike Johnson, bloque l'amendement, les démocrates pourront accuser les républicains d'avoir rompu la promesse qu'ils ont faite aux adeptes du mouvement MAGA de rendre publics les dossiers Epstein. Des théories du complot ont été élaborées pour moins que ça.
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