
Le gouvernement fribourgeois ne barrera pas la route à Allseas
Les monstres des mers de la multinationale Allseas pourraient bientôt partir à la conquête des fonds marins. Ici à Istanbul.
AFP
Le Canton de Fribourg peut-il empêcher Donald Trump de lancer une ruée vers les fonds marins , à des milliers de kilomètres de là? Question pas si absurde quand le bras industriel de ce projet – la multinationale Allseas, basée à Châtel-Saint-Denis – navigue sous pavillon fribourgeois.
L'appétit de Trump pour le deep sea mining , qui consiste à labourer le plancher océanique pour en extraire des métaux stratégiques, suscite de vives inquiétudes parmi de nombreux États et organisations environnementales en raison des dommages irréversibles qu'elle pourrait causer aux écosystèmes marins. Tout jugement serait «prématuré»
Au milieu de cette tempête diplomatique, quatre élus de gauche ont apostrophé le gouvernement fribourgeois en mai, à travers deux interpellations distinctes, pour lui demander s'il entendait ou non «fermer les yeux» sur les activités d'Allseas. Ils voulaient également savoir si la société avait bénéficié de subventions cantonales.
Le Conseil d'État vient d'apporter une réponse commune à ces deux interpellations. Il souligne qu'à ce stade, rien n'indique que la multinationale de Châtel-Saint-Denis viole le droit international, car aucune autorisation n'a encore été délivrée par l'Autorité internationale des fonds marins (AIFM) ou les autorités américaines. Tout jugement dans cette affaire serait donc «prématuré». Le gouvernement précise également qu'Allseas n'a pas bénéficié d'aides financières ou d'avantages fiscaux.
Si une infraction au droit international devait être constatée dans les prochains mois, il appartiendrait «en premier lieu» à la Confédération et aux États concernés de gérer ce dossier délicat. Quant au risque d'éclaboussures sur la réputation du Canton, le Conseil d'État ne prendra pas les devants. Il préfère réagir «au cas par cas» en fonction de «la nature des faits, de leur visibilité médiatique et des réactions institutionnelles». Dilution des responsabilités
La posture «attentiste» du Conseil d'État déçoit beaucoup la députée Verte Liliane Galley, l'une des autrices de l'interpellation. «Tant qu'il n'y a pas d'infraction évidente du droit international, nos autorités cantonales nous expliquent qu'elles n'agiront pas, alors que la construction de ces bulldozers sous-marins est d'ores et déjà lancée! C'est maintenant qu'il faut intervenir. Une fois que les fonds marins seront détruits, il sera trop tard.»
Elle déplore également que l'Exécutif fribourgeois se réfugie derrière le paravent de la Confédération. «La société Allseas profite de cette dilution des responsabilités. Si aucune autorité ne s'empare activement du dossier, on court à la catastrophe écologique.» Au lieu «d'encenser la liberté économique» des grosses sociétés implantées sur son territoire, le Conseil d'État devrait «procéder à une véritable pesée des intérêts». Combat symbolique?
Son collègue de parti Laurent Bronchi, géographe de formation, juge que la réponse du Canton est «décevante, mais pas surprenante», l'influence des cantons dans des affaires internationales étant «forcément limitée», et leurs bases légales «insuffisantes». Il se dit toutefois rassuré d'apprendre qu'Allseas n'a bénéficié d'aucun forfait fiscal.
Mais alors, son intervention ne relevait-elle que du combat symbolique? «Si cela permet à la population de se rendre compte que des actions locales ont des répercussions à l'autre bout du monde, alors que nous voterons bientôt sur l'initiative pour des multinationales responsables , et que le Conseil d'État renforce sa vigilance dans le dossier Allseas, c'est déjà ça de gagné.» La colère de Greenpeace
À l'échelle nationale, la résistance aux plans d'Allseas est portée par le député vaudois Raphaël Mahaim. Il appelle la Confédération à se montrer intransigeante avec la société sise en Veveyse en vertu du moratoire international – même si celui-ci n'est pas contraignant – qu'elle soutient pour s'opposer à l'exploitation commerciale des fonds marins.
Début juillet, Greenpeace Suisse a remis une pétition de plus de 14'000 signatures au siège de l'entreprise pour lui demander de renoncer à l'extraction minière en eaux profondes. Quelques semaines plus tôt, le même message avait été donné de manière plus violente, quand des militants écologistes avaient vandalisé les locaux à Châtel-Saint-Denis.
L'exploitation des fonds marins fait des remous Newsletter
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Thibault Nieuwe Weme a rejoint la rubrique vaudoise en octobre 2022. Après un Bachelor en science politique, il a obtenu son Master à l'Académie du journalisme et des médias (AJM) de l'Université de Neuchâtel. Il est également passé par la rédaction du Temps. Depuis juin 2025, il couvre l'actualité fribourgeoise. Plus d'infos
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