
« Il faut repenser la place de l'enfant »
Notre société réserve-t-elle un traitement inadéquat à l'enfant ?
On est aveuglés, on est des pantins du système. Très tôt, l'enfant est précipité dans une course performative visant à le rendre très rapidement autonome et adapté aux exigences de la société. Il faut que nos enfants se développent au bon rythme, aient de bonnes notes à l'école. On est finalement dans une culture du rendement et de la statistique. Ce qui fait que lorsque notre enfant a un 90 %, on se dit que tout va bien, mais on ne se questionne pas sur ce qu'il y a derrière ce 90 %. Je vois beaucoup d'enfants qui sont d'excellents élèves à l'école, mais qui sont dans une souffrance énorme, car leurs parents ne voient que leur rendement scolaire et se disent que si ça se passe bien à l'école, c'est que tout va bien. Alors que les enfants sont anxieux, fatigués, déprimés. De l'extérieur, l'enfant a un bon rendement et ça n'inquiète personne.
Pourquoi sommes-nous dans une crise de l'enfance ?
On applique aux enfants les principes de l'agriculture intensive. Alors qu'il y a cette possibilité d'être dans la permaculture. La permaculture, c'est le bon sens du jardinier. Le jardinier ne se précipite pas pour asperger son jardin de pesticides. Il regarde ce qui pousse, ce qu'on peut mettre comme plantes les unes à côté des autres. Quand on étend ce principe à la vie et à l'enfant, ça change le paradigme, on pose notre regard sur l'enfant, on l'observe dans tous ces écosystèmes, à l'école, avec ses amis, avec sa famille. On a ainsi une vision à 360 degrés. En tant que médecin, on ne peut pas prendre des décisions en le voyant pendant une heure dans un bureau. On doit l'observer comme une petite pousse dans un jardin, écouter les rétroactions, s'ajuster et élaborer des solutions adaptées. Il y a aussi cette notion importante de biodiversité qu'il faudrait appliquer. C'est lorsque différentes espèces se côtoient qu'il y a une force et une résilience ensemble, et non une monoculture. Dans la vie et dans les écoles, c'est la même chose, pourquoi met-on ensemble les enfants qui ont le même trouble ? Il faut prôner la diversité, que les enfants soient mélangés avec des enfants différents, ne serait-ce que pour développer leur empathie.
Mais les enfants ne sont-ils pas une priorité ?
On ne peut pas supprimer des millions en éducation en se disant que les enfants, c'est la priorité. Il faut une réforme de l'éducation en profondeur, inspirée de la Finlande qui a tout mis à plat pour se recentrer sur les enfants. La permaculture, on peut la pratiquer à petits pas. Par exemple, envisager de travailler sur le potentiel de l'enfant en dehors de son potentiel scolaire. Qu'est-ce que cet enfant peut apporter à la classe ? Dans les premiers jours d'école, les professeurs peuvent découvrir les talents des enfants, au-delà des capacités scolaires. C'est important pour le groupe et pour les enfants. Savoir qu'un enfant dans la classe fait des maquettes ou est très doué en dessin, par exemple. C'est ce dont les enfants ont besoin, plutôt que les réduire à leur note de 40 %.
PHOTO MARIE-HÉLÈNE GILBERT-LAMBERT, FOURNIE PAR CÉLINE LAMY
Céline Lamy, pédopsychiatre et autrice
La permaculture de l'enfance, ça veut dire considérer la vie différemment. Déjà, des professeurs me disent : « Je veux voir l'enfant derrière l'élève. »
Vous parlez dans votre livre de l'importance de la nature pour les enfants.
Être dehors a des bienfaits sur l'ensemble du développement de l'enfant (cognitif, affectif, moteur, social) et sur sa santé physique. L'enfant déploie son talent, sa créativité, il fait face à l'imprévu, au changement. Au Danemark, il y a 700 écoles maternelles nichées dans la forêt. Les écoles des villes ont des lieux forestiers où ils vont explorer. Cela fait partie de l'éducation. On n'enseigne pas la nature, on la vit. Il faut réapprendre à aimer la nature, un lieu apaisant. Le danger, il n'est pas dans la nature, il est à l'intérieur de nos maisons à travers les écrans.
Vous proposez de créer un ministère consacré à l'enfance.
Il faut repenser la place de l'enfant et créer un ministère voué à l'enfance dans le but de coordonner les politiques publiques qui le concernent, relatives à la santé, à l'éducation, à la famille, aux services sociaux et à la justice. Un ministère qui veillerait à ce que les services essentiels soient accessibles, adaptés aux besoins de chacun, et que les politiques publiques prennent en compte les besoins spécifiques (milieux défavorisés, handicaps, besoins éducatifs particuliers). Un ministère qui serait occupé par des adultes et des enfants, qui se parleraient vraiment et qui construiraient ensemble un nouveau jardin de croissance. Pour réenchanter le monde !
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31 minutes ago
- L'Équipe
Karen Khachanov file en quarts de finale à Wimbledon après sa victoire face à Kamil Majchrzak
Le Russe Karen Khachanov est le premier qualifié pour les quarts de finale à Wimbledon, après sa victoire en trois sets (6-4, 6-2, 6-3) face au Polonais Kamil Majchrzak ce dimanche. Karen Khachanov est le premier à inscrire son nom au tableau des quarts de finale de Wimbledon ce dimanche. Le Russe s'est défait sans difficulté du Polonais Kamil Majchrzak, tombeur d'Arthur Rinderknech au tour précédent, en trois sets (6-4, 6-2, 6-3). Khachanov a pris le service de son adversaire dès le troisième jeu du match, et assuré la suite, malgré deux jeux blancs remportés par Majchrzak (4-3, 5-4), qui ne sauvera qu'une balle de set. Même scénario dans le troisième jeu du deuxième set, puis au cinquième, le Russe de 29 ans déroulant pour mener 5-1 et empocher la deuxième manche. Fritz ou Thompson en quarts La partie semblait se diriger vers une victoire rapide du n°20 mondial, qui enlevait à nouveau le troisième jeu dans le troisième set. Mais le Polonais s'accrochait cette fois pour recoller à 2-2, au bout de quatre balles de débreak. Un soulagement de courte durée, puisque le Russe, quart-finaliste à 's-Hertogenbosch et demi-finaliste à Halle cette année, s'imposait sur la mise en jeu de son adversaire, 109e mondial, au terme d'un jeu épique achevé sur un rallye, où on l'a vu s'étaler de tout son long sous le filet, victime d'une glissade sans conséquence. Karen Khachanov concluait logiquement la partie sur sa première balle de match. Il se qualifie pour les quarts de finale, égalant sa meilleure performance à Wimbledon. Il affrontera le vainqueur du duel entre l'Américain Taylor Fritz (5e mondial) et l'Australien Jordan Thompson (44e mondial), à suivre ce dimanche après-midi.


La Presse
37 minutes ago
- La Presse
Sensibiliser les ados aux menstruations
Il y a quatre ans, une élève de Roxanne Dubé-Rémillard s'est crue au seuil de la mort. « Elle avait demandé à sa petite sœur d'aller annoncer à leur mère qu'elle mourait. » L'élève était loin d'être en danger de mort : elle avait simplement ses premières règles. Sa mère lui en avait toujours caché l'existence. « C'est vraiment un traumatisme que cette personne a vécu. » Pour éduquer les adolescents aux menstruations, briser les tabous autour du sujet et éviter qu'une telle histoire se répète, l'initiative La Semaine Rouge encourage les écoles à mener une semaine de sensibilisation menstruelle. À l'école secondaire Saint-Jean-Baptiste à Longueuil, où la plupart des élèves sont issus de l'immigration, le premier évènement du genre a suscité de l'étonnement, de la gêne, mais elle a aussi favorisé des échanges. Table de démonstration de produits menstruels à l'entrée de l'école, jeu-questionnaire sur les règles dans la cafétéria, babillard sur la précarité menstruelle dans le couloir principal… Le but avoué de Roxanne Dubé-Rémillard, qui a piloté l'évènement en novembre dernier, était de « prendre de la place » dans l'espace scolaire pour parler de menstruations. PHOTO ÉDOUARD DESROCHES, LA PRESSE À l'initiative de Roxanne Dubé-Rémillard la Semaine Rouge s'est tenue à l'école où elle travaille. « Parce que c'était la première fois, il y a eu une grosse réaction », témoigne la professeure, qui a vu des élèves incrédules devant les différentes affiches. Les activités organisées s'adressaient à tous, filles comme garçons. Le message : les menstruations concernent tout le monde, et on devrait pouvoir en parler sans gêne. « J'ai l'impression que le tabou sur ce sujet a été brisé au niveau de l'école, mais aussi pour moi », témoigne Mojgan Mir Sadeghi Varzaneh, une élève d'origine iranienne de quatrième secondaire. « C'est plus normal pour moi-même d'en parler qu'avant La Semaine Rouge. » Une occasion d'échanger La visite d'une infirmière le midi a permis d'informer les élèves sur les menstruations et de répondre à leurs questions. Ce rôle de vulgarisation est jugé crucial par bien des élèves, dans cette école où près de la moitié d'entre eux sont nés à l'extérieur du pays. « Dans la famille de certaines personnes, c'est un sujet tabou », témoigne Exaucee Mutombo Nsenga, originaire du Congo. « Si tes parents ne t'ont pas encore expliqué [ce que sont les menstruations] lors de tes premières règles, tu penses que c'est quelque chose que tu as fait, que c'est de ta faute. C'est trop de stress. » PHOTO ÉDOUARD DESROCHES, LA PRESSE Mojgan Mir Sadeghi Varzaneh et Exaucee Mutombo Nsenga fréquentent l'école Saint-Jean-Baptiste. En milieu de semaine, des trousses menstruelles gratuites ont été distribuées. Dans ce milieu défavorisé où l'école fournit le petit déjeuner aux élèves, Roxanne Dubé-Rémillard est convaincue que le coût des produits sanitaires est un enjeu pour de nombreuses familles. Ce fut l'occasion de discuter de précarité menstruelle – soit la difficulté d'accéder à des produits menstruels faute de moyens – avec des élèves qui la vivent dans le secret. La semaine se voulait aussi un moment d'échange, notamment lors de la projection d'un film sur les menstruations dans différentes cultures. Plusieurs élèves nous ont dit que la tradition dans leur pays, c'est que la grand-mère donne une tape dans le visage des jeunes filles après leurs premières règles. Roxanne Dubé-Rémillard À sa surprise, même les garçons se sont prêtés au jeu. « Des garçons sont venus et ont parlé des différentes infusions que leur mère prenait quand elles étaient menstruées. » Un mouvement québécois La semaine organisée à l'école Saint-Jean-Baptiste avait des allures de banc d'essai pour Seréna Québec et le Réseau québécois d'action pour la santé des femmes (RQASF), les organismes à but non lucratif à l'origine de La Semaine Rouge. Les deux premières éditions de l'évènement, en 2022 et en 2023, avaient pris la forme d'ateliers en ligne. Malgré une réponse enthousiaste – 700 inscriptions en 2022 –, les organisatrices ont constaté qu'il fallait aller sur le terrain pour capter l'attention des adolescents. À l'époque, les initiatives de la RQASF autour des menstruations recevaient un accueil mitigé des associations féministes et de santé des femmes. « On craignait que mettre ce sujet de l'avant soit pris comme un signe de faiblesse par rapport aux hommes, » témoigne sa directrice générale, Élise Brunot. PHOTO ÉDOUARD DESROCHES, LA PRESSE Des produits menstruels sont distribués gratuitement sur une table dans le gymnase, accompagnés d'affiches pour La Semaine rouge d'information sur les menstruations. Mais les choses ont évolué ces dernières années. « Les groupes s'emparent du sujet aujourd'hui, notamment autour de l'aspect de la précarité menstruelle. » Malgré le succès de la première Semaine Rouge à l'école Saint-Jean-Baptiste, la gêne autour du sujet demeure présente. « La Semaine Rouge enrichit les personnes culturellement, mais risque aussi de ramener des propos négatifs. Parce que certaines personnes, lorsqu'elles sont mal à l'aise, réagissent en faisant des blagues sur le sujet ou en insultant », témoigne Aley Abu Shady, élève de quatrième secondaire, originaire d'Égypte. Riche de l'expérience de Roxanne Dubé-Rémillard, la troisième édition de La Semaine Rouge aura lieu dans les écoles l'année prochaine. Dix établissements se sont déjà inscrits.


La Presse
38 minutes ago
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Négociations prévues dimanche avant une rencontre Nétanyahou-Trump
Selon des sources palestiniennes, la proposition débattue comprend une trêve de 60 jours, pendant laquelle le Hamas relâcherait 10 otages encore en vie, ainsi qu'un certain nombre de corps de captifs morts, en échange de la libération de Palestiniens détenus par Israël. (Jérusalem) Des négociations indirectes entre Israël et le Hamas palestinien doivent commencer dimanche à Doha pour tenter de trouver un accord sur une trêve à Gaza et une libération d'otages, à la veille d'une rencontre entre Benyamin Nétanyahou et Donald Trump. Chloe ROUVEYROLLES-BAZIRE Agence France-Presse Dans le même temps, la Défense civile locale a annoncé la mort de 14 Palestiniens dans de nouvelles frappes israéliennes dans le territoire palestinien assiégé, affamé et dévasté par 21 mois de guerre. Celle-ci a été déclenchée par une attaque sans précédent du mouvement islamiste palestinien Hamas le 7 octobre 2023 contre Israël, dont l'armée a riposté en lançant une offensive d'envergure à Gaza qui a fait des dizaines de milliers de morts et provoqué un désastre humanitaire. « Les médiateurs ont informé le Hamas qu'un nouveau cycle de négociations indirectes entre le Hamas et Israël débutera ce dimanche à Doha », a indiqué à l'AFP une source palestinienne proche des discussions. La délégation du Hamas conduite par Khalil al-Hayya, se trouve à Doha, selon elle. Les négociateurs israéliens ont eux quitté Israël pour Doha, selon la télévision publique Kan. Ils « poursuivront les efforts pour récupérer nos otages sur la base de la proposition qatarie qu'Israël a acceptée », a indiqué samedi le bureau du premier ministre, Benyamin Nétanyahou. PHOTO JACK GUEZ, ARCHIVES REUTERS Le premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou Il a néanmoins jugé « inacceptables » les « changements que le Hamas cherche à apporter à la proposition ». Vendredi, le Hamas a dit être prêt à « engager immédiatement » des négociations sur la proposition de trêve parrainée par les États-Unis et transmise par les médiateurs qatari et égyptien, à laquelle il a dit avoir présenté « sa réponse », sans plus de détails. « Mission importante » Selon des sources palestiniennes, la proposition comprend une trêve de 60 jours, pendant laquelle le mouvement relâcherait 10 otages encore en vie, ainsi qu'un certain nombre de corps de captifs morts, en échange de la libération de Palestiniens détenus par Israël. PHOTO MAYA LEVIN, AGENCE FRANCE-PRESSE Cette photo prise depuis une position près de la frontière israélienne avec la bande de Gaza montre de la fumée et des débris s'élevant lors d'une frappe israélienne sur le territoire assiégé, le 6 juillet 2025. Les changements réclamés par le Hamas, d'après ces sources, portent sur les modalités du retrait des troupes israéliennes de Gaza, les garanties qu'il souhaite obtenir sur l'arrêt des hostilités après les 60 jours, et sur une reprise en main de la distribution de l'aide humanitaire par l'ONU et des organisations internationales reconnues. Sur les 251 personnes enlevées le 7-Octobre, 49 sont toujours retenues à Gaza, dont 27 déclarées mortes par l'armée israélienne. Le président américain, Donald Trump, a estimé qu'un accord pourrait être conclu « la semaine prochaine ». M. Nétanyahou, qu'il doit recevoir lundi, quittera Israël dimanche vers 17 h locales (10 h heure de l'Est) pour les États-Unis, selon son bureau. M. Nétanyahou a une « mission importante » à Washington, a déclaré le président israélien, Isaac Herzog, après l'avoir rencontré dimanche : « faire avancer un accord pour ramener tous nos otages à la maison ». Une première trêve d'une semaine en novembre 2023 puis une deuxième de deux mois début 2025, ont permis le retour de nombreux otages en échange de la libération de Palestiniens. Le 18 mars, faute d'accord sur la suite du cessez-le-feu, Israël a repris son offensive à Gaza, où le Hamas, considéré comme un mouvement terroriste par les États-Unis, l'Union européenne et Israël, a pris le pouvoir en 2007. « Déchiquetés » Dans la bande de Gaza, dont les plus de deux millions d'habitants, maintes fois déplacés, vivent dans des conditions terribles selon l'ONU et les ONG, 14 Palestiniens ont été tués par des frappes israéliennes, selon Mahmoud Bassal, porte-parole de la Défense civile. PHOTO BASHAR TALEB, AGENCE FRANCE-PRESSE Des Palestiniens recherchent des survivants dans les décombres d'un immeuble du quartier de Cheikh Radwane à Gaza, qui a été la cible d'une frappe israélienne, le 6 juillet 2025. L'une d'elles a touché une maison dans le quartier de Cheikh Radwane dans la ville de Gaza (Nord), où des habitants ont retiré des décombres des corps de victimes, selon des images de l'AFP. À l'hôpital al-Chifa, où 10 morts ont été transportés, des proches pleurent près des corps enveloppés dans des linceuls en plastique posés à même le sol, avant de réciter la prière des morts. « J'ai appris que la maison de mon frère a été visée », raconte Yahya Abou Soufiane. « Je suis arrivé ici et j'ai trouvé des morts et des enfants déchiquetés ». L'armée israélienne, interrogée par l'AFP, a déclaré ne pas être en mesure de commenter des frappes spécifiques en l'absence de coordonnées géographiques précises. Compte tenu des restrictions imposées par Israël aux médias et des difficultés d'accès à Gaza, il est extrêmement difficile pour l'AFP de vérifier de manière indépendante les affirmations des différentes parties.