logo
Y a-t-il un sucre meilleur qu'un autre ?

Y a-t-il un sucre meilleur qu'un autre ?

La Presse2 days ago
Le sucre de canne est-il meilleur que le sirop de maïs, comme l'affirme Donald Trump ? Une conviction telle que le président américain a assuré jeudi avoir « demandé à Coca-Cola d'utiliser du VRAI sucre de canne dans le Coke aux États-Unis ». Un peu, mais ce n'est pas si simple…
La quantité de sucre dans une cannette de Coca-Cola, quelle que soit sa provenance, s'approche du maximum quotidien recommandé pour un adulte. Donc, en boire régulièrement n'est pas bon pour la santé.
« Une cannette de Coca-Cola, c'est l'équivalent de 10 cuillères à thé de sucre, c'est énorme », dit Stéphanie Chevalier, nutritionniste à l'Institut de recherche du CUSM. « Si quelqu'un mettait 10 cuillères à thé de sucre dans son café, on trouverait ça épouvantable. »
PHOTO SIMON GIROUX, ARCHIVES LA PRESSE
Une cannette de Coca-Cola compte l'équivalent de 10 cuillères à thé de sucre.
Plusieurs organismes, dont la Fondation Cœur et AVC, recommandent de ne pas consommer une quantité de sucre ajouté qui dépasse 10 % des calories ingérées quotidiennement. Pour un régime de 2000 calories par jour, cela correspond à environ 50 grammes de sucre ajouté par jour. Le sucre ajouté n'inclut pas ce qui se trouve naturellement dans les aliments comme les fruits, les pâtes, les patates ou le lait, entre autres.
Mais le type de sucre fait aussi une différence. Le sirop de maïs, décrié par le président des États-Unis, a probablement un effet plus négatif sur le foie que le sucre de canne, quand on le consomme de façon excessive.
« Il y a pas mal de preuves scientifiques que le sirop de maïs à haute teneur en fructose (SMHF), lorsque consommé en excès, augmente le gras dans le foie, dit Mme Chevalier. Ça cause une stéatose hépatique. Le SMHF est aussi associé à davantage d'inflammation. Ces deux éléments nous portent à croire que ce type de sucre est plus mauvais que le sucrose, comme le sucre de canne. »
Le SMHF est utilisé par l'industrie alimentaire depuis des décennies parce qu'il n'est pas cher, se conserve bien et se dilue bien dans les boissons, étant déjà sous forme liquide.
Pourquoi le sirop de maïs est-il plus dommageable pour le foie que le sucrose ? Parce qu'il est métabolisé différemment. « Le glucose et le fructose vont directement dans le foie, mais le fructose va créer de nouveaux acides gras, dit Mme Chevalier. Normalement, ce gras va être relâché dans la circulation sanguine, mais quand il y en a beaucoup, le gras s'accumule dans le foie. »
Le sucrose n'est qu'en partie transformé en gras par le foie. Une partie du sucrose est transformée en glycogène puis relâchée dans la circulation, ce qui va élever la glycémie, explique la nutritionniste de McGill.
Une minorité de biologistes, dont certains reçoivent du financement d'entreprises alimentaires, croient que le SMHF n'est pas plus dommageable pour le foie que les autres sucres : ce qui compte, selon eux, est la quantité de calories ingérées.
Rémi Rabasa-Lhoret, endocrinologue à l'Institut de recherches cliniques de Montréal (IRCM) et président du conseil professionnel de Diabète Québec, estime que la métabolisation du SMHF et du sucrose par le foie est bel et bien différente. « Mais je ne suis pas sûr que ça ait un effet significatif sur la santé. Le message, c'est qu'on mange trop de sucre raffiné », insiste-t-il.
Selon lui, même si on respecte les recommandations de ne pas dépasser 10 % des calories quotidiennes, en se limitant à une cannette de boisson gazeuse et en ne prenant pas d'autre sucre ajouté, il n'est pas sain de consommer autant de sucre en une seule fois. « Il est mieux que le sucre ajouté soit réparti dans la journée », souligne le spécialiste.
Pourquoi Donald Trump s'en mêle
Coca-Cola n'a pas confirmé ce qu'a écrit Donald Trump jeudi, sur son réseau Truth Social : « J'ai demandé à Coca-Cola d'utiliser du VRAI sucre de canne dans le Coke aux États-Unis et ils ont accepté. »
Par voie de communiqué, la multinationale a indiqué « apprécier l'enthousiasme du président Trump ».
Cette sortie fait écho à de nombreuses déclarations de Robert F. Kennedy, le secrétaire à la Santé des États-Unis, qui a dénoncé la présence de SMHF dans les boissons gazeuses. En mai, un rapport d'une commission visant à « redonner sa santé à l'Amérique » (MAHA) avait aussi ciblé le SMHF.
Selon l'agence Reuters, certains pays, dont le Mexique et plusieurs pays européens, utilisent déjà du sucrose pour le Coca-Cola. Ce n'est pas le cas au Canada.
Donald Trump boit quant à lui du Coke Diète, sucré à l'aspartame. Selon la BBC, il a fait installer dans le bureau Ovale de la Maison-Blanche un bouton spécial qui lui sert à demander qu'on lui apporte un Coke Diète.
Orange background

Essayez nos fonctionnalités IA

Découvrez ce que Daily8 IA peut faire pour vous :

Commentaires

Aucun commentaire pour le moment...

Articles connexes

Comment prévenir les crampes musculaires ?
Comment prévenir les crampes musculaires ?

La Presse

time2 days ago

  • La Presse

Comment prévenir les crampes musculaires ?

Deux fois par mois, notre journaliste répond aux questions de lecteurs en matière de santé et de bien-être. « J'ai 58 ans et je fais du vélo. Ces dernières années, la durée et la fréquence des crampes musculaires ne font qu'augmenter, ce qui me force à abandonner des sorties de groupe. J'ai essayé des recettes trouvées sur le web, comme du vinaigre de cornichon, sans résultat. Est-ce possible de se débarrasser des crampes musculaires ? » – M. Bencheqroun Les crampes musculaires associées à l'exercice sont des crampes douloureuses et involontaires des muscles squelettiques (comme le mollet et la cuisse), et elles surviennent pendant l'exercice ou alors juste après. Le traitement le plus reconnu est aussi le plus simple : l'étirement statique. On étire doucement le muscle jusqu'à ce que la crampe s'atténue. Quand la crampe est légère, il est parfois possible de reprendre la séance d'exercice. Mais parfois, les gens doivent'arrêter l'activité et se reposer, pour interrompre le cycle douleur-spasme. Mais est-ce possible de les prévenir, ces crampes ? Ou de les traiter de façon durable ? Peu de chercheurs s'intéressent à la prévention et au traitement des crampes musculaires associées à l'exercice, mais La Presse a joint aux États-Unis l'un des plus actifs dans le domaine : Kevin C. Miller, professeur au département de santé et de performance humaine, à l'Université d'État du Texas. D'emblée, le professeur Miller donne un avertissement : lorsqu'on souffre de crampes musculaires, il faut d'abord s'assurer qu'elles ne sont pas le symptôme d'un problème de santé sous-jacent (comme le diabète, l'hypothyroïdie ou la maladie de Machado-Joseph) ou l'effet secondaire d'un supplément ou d'une médication (comme des médicaments bronchodilatateurs). Pour les gens en santé, maintenant, ne suffit-il pas de s'hydrater davantage, avec des boissons riches en sels minéraux (et donc en électrolytes) ? Ce conseil universel découle d'une théorie bien connue pour expliquer les crampes musculaires : celle de la déshydratation et du déséquilibre électrolytique. Cette théorie a longtemps été dominante, mais plusieurs scientifiques la remettent en question. C'est le cas de Kevin Miller, qui pointe d'abord une faille dans sa logique. Il n'y a aucun lien, dit-il, entre cette cause présumée des crampes (déshydratation et manque d'électrolytes) et le traitement qui fonctionne le mieux : l'étirement statique. « Combien ajoute-t-on de fluide, dans son corps, quand on s'étire ? Aucun. Et combien d'électrolytes ? Aucun », résume-t-il. Des recherches – dont celles de Kevin Miller – ont également montré ceci : qu'ils soient sujets aux crampes ou non, les athlètes perdent des quantités similaires de liquide et d'électrolytes (sodium, potassium, calcium, etc.) pendant l'exercice. Et lorsqu'on déshydrate des personnes en laboratoire, elles ne deviennent pas plus enclines aux crampes provoquées électriquement. L'impact du système nerveux Au tournant des années 2000, le chercheur sud-africain Martin Schwellnus a proposé une autre théorie, aujourd'hui appuyée par plusieurs données : ces crampes seraient plutôt dues à l'effet de la fatigue sur le système nerveux. « Il existe un déséquilibre entre les nerfs qui commandent l'excitation musculaire, et ceux qui commandent la relaxation musculaire, vulgarise Kevin Miller. On peut comparer cela à une bascule : lorsque nous sommes fatigués, l'excitation est plus importante que la relaxation. » Le système nerveux deviendrait donc surexcité, et c'est ce qui provoquerait ces contractions douloureuses et involontaires. Encore là, qu'est-ce qui explique que plusieurs personnes se fatiguent sans pour autant souffrir de crampes ? Inspiré par la théorie de son collègue, Kevin Miller a proposé une nouvelle théorie, appelée « théorie multifactorielle ». Elle repose sur deux éléments : premièrement, plusieurs facteurs peuvent contribuer aux crampes (et ceux-ci varient d'une personne à l'autre), et deuxièmement, chaque personne a un seuil différent. Selon la théorie de Kevin Miller, des causes peuvent donc s'accumuler et faire en sorte qu'une personne atteint son fameux seuil personnel : l'intensité de l'effort, la qualité du sommeil, le manque de glucides, une blessure récente, du stress, un temps chaud et humide… Le manque d'eau et d'électrolytes pourrait aussi jouer un rôle, mais cet élément n'est pas suffisant, à lui seul, pour déclencher une crampe (Kevin Miller l'a testé dans ses expériences). Certaines personnes auraient aussi une prédisposition génétique. Bref, « c'est complexe », résume Kevin Miller. Son conseil aux gens qui en souffrent ? En parler à un professionnel de la santé, d'abord, pour exclure les causes médicales sous-jacentes. Puis, essayer de comprendre dans quel contexte leurs crampes surviennent. Le chercheur propose une série de 16 questions à remplir chaque fois qu'on en a une. « Il faut traiter ça comme une vraie blessure, dit-il, et trouver la recette de ses crampes. Votre recette à vous pourrait être différente de la mienne. C'est pourquoi, dans la littérature, on trouve tant de traitements anecdotiques qui peuvent effectivement fonctionner pour certaines personnes, mais pas pour d'autres. » Consultez l'étude de Kevin Miller (en anglais) (les 16 questions sont au tableau 3) Et le jus de cornichon ? Quelle est cette histoire de jus de cornichon pour traiter les crampes ? Le professeur Miller l'a testée dans une expérience, et effectivement, les participants du groupe « jus de cornichon » ont vu leurs crampes disparaître après 90 secondes en moyenne, soit 40 % plus rapidement que les participants qui prenaient de l'eau déminéralisée ou alors rien du tout. En 90 secondes, le jus de cornichon n'a pourtant pas le temps d'être digéré… Selon l'hypothèse de Kevin Miller, c'est peut-être, encore là, une affaire neurologique. « Si votre corps est dans une spirale douleur/crampe, quand vous buvez du vinaigre, ça donne quelque chose d'autre à votre cerveau », résume-t-il. Le jus de cornichon n'est toutefois pas une panacée : non seulement il est hyper salé, mais il demeure également moins efficace que l'étirement. Pour ce qui est de la prévention des crampes, ni le jus de cornichon ni les étirements ne sont efficaces, selon les expériences du professeur Miller. Écrivez-nous pour poser une question en matière de santé ou de bien-être à notre journaliste

Y a-t-il un sucre meilleur qu'un autre ?
Y a-t-il un sucre meilleur qu'un autre ?

La Presse

time2 days ago

  • La Presse

Y a-t-il un sucre meilleur qu'un autre ?

Le sucre de canne est-il meilleur que le sirop de maïs, comme l'affirme Donald Trump ? Une conviction telle que le président américain a assuré jeudi avoir « demandé à Coca-Cola d'utiliser du VRAI sucre de canne dans le Coke aux États-Unis ». Un peu, mais ce n'est pas si simple… La quantité de sucre dans une cannette de Coca-Cola, quelle que soit sa provenance, s'approche du maximum quotidien recommandé pour un adulte. Donc, en boire régulièrement n'est pas bon pour la santé. « Une cannette de Coca-Cola, c'est l'équivalent de 10 cuillères à thé de sucre, c'est énorme », dit Stéphanie Chevalier, nutritionniste à l'Institut de recherche du CUSM. « Si quelqu'un mettait 10 cuillères à thé de sucre dans son café, on trouverait ça épouvantable. » PHOTO SIMON GIROUX, ARCHIVES LA PRESSE Une cannette de Coca-Cola compte l'équivalent de 10 cuillères à thé de sucre. Plusieurs organismes, dont la Fondation Cœur et AVC, recommandent de ne pas consommer une quantité de sucre ajouté qui dépasse 10 % des calories ingérées quotidiennement. Pour un régime de 2000 calories par jour, cela correspond à environ 50 grammes de sucre ajouté par jour. Le sucre ajouté n'inclut pas ce qui se trouve naturellement dans les aliments comme les fruits, les pâtes, les patates ou le lait, entre autres. Mais le type de sucre fait aussi une différence. Le sirop de maïs, décrié par le président des États-Unis, a probablement un effet plus négatif sur le foie que le sucre de canne, quand on le consomme de façon excessive. « Il y a pas mal de preuves scientifiques que le sirop de maïs à haute teneur en fructose (SMHF), lorsque consommé en excès, augmente le gras dans le foie, dit Mme Chevalier. Ça cause une stéatose hépatique. Le SMHF est aussi associé à davantage d'inflammation. Ces deux éléments nous portent à croire que ce type de sucre est plus mauvais que le sucrose, comme le sucre de canne. » Le SMHF est utilisé par l'industrie alimentaire depuis des décennies parce qu'il n'est pas cher, se conserve bien et se dilue bien dans les boissons, étant déjà sous forme liquide. Pourquoi le sirop de maïs est-il plus dommageable pour le foie que le sucrose ? Parce qu'il est métabolisé différemment. « Le glucose et le fructose vont directement dans le foie, mais le fructose va créer de nouveaux acides gras, dit Mme Chevalier. Normalement, ce gras va être relâché dans la circulation sanguine, mais quand il y en a beaucoup, le gras s'accumule dans le foie. » Le sucrose n'est qu'en partie transformé en gras par le foie. Une partie du sucrose est transformée en glycogène puis relâchée dans la circulation, ce qui va élever la glycémie, explique la nutritionniste de McGill. Une minorité de biologistes, dont certains reçoivent du financement d'entreprises alimentaires, croient que le SMHF n'est pas plus dommageable pour le foie que les autres sucres : ce qui compte, selon eux, est la quantité de calories ingérées. Rémi Rabasa-Lhoret, endocrinologue à l'Institut de recherches cliniques de Montréal (IRCM) et président du conseil professionnel de Diabète Québec, estime que la métabolisation du SMHF et du sucrose par le foie est bel et bien différente. « Mais je ne suis pas sûr que ça ait un effet significatif sur la santé. Le message, c'est qu'on mange trop de sucre raffiné », insiste-t-il. Selon lui, même si on respecte les recommandations de ne pas dépasser 10 % des calories quotidiennes, en se limitant à une cannette de boisson gazeuse et en ne prenant pas d'autre sucre ajouté, il n'est pas sain de consommer autant de sucre en une seule fois. « Il est mieux que le sucre ajouté soit réparti dans la journée », souligne le spécialiste. Pourquoi Donald Trump s'en mêle Coca-Cola n'a pas confirmé ce qu'a écrit Donald Trump jeudi, sur son réseau Truth Social : « J'ai demandé à Coca-Cola d'utiliser du VRAI sucre de canne dans le Coke aux États-Unis et ils ont accepté. » Par voie de communiqué, la multinationale a indiqué « apprécier l'enthousiasme du président Trump ». Cette sortie fait écho à de nombreuses déclarations de Robert F. Kennedy, le secrétaire à la Santé des États-Unis, qui a dénoncé la présence de SMHF dans les boissons gazeuses. En mai, un rapport d'une commission visant à « redonner sa santé à l'Amérique » (MAHA) avait aussi ciblé le SMHF. Selon l'agence Reuters, certains pays, dont le Mexique et plusieurs pays européens, utilisent déjà du sucrose pour le Coca-Cola. Ce n'est pas le cas au Canada. Donald Trump boit quant à lui du Coke Diète, sucré à l'aspartame. Selon la BBC, il a fait installer dans le bureau Ovale de la Maison-Blanche un bouton spécial qui lui sert à demander qu'on lui apporte un Coke Diète.

Docteur, j'ai peur… de tout !
Docteur, j'ai peur… de tout !

La Presse

time3 days ago

  • La Presse

Docteur, j'ai peur… de tout !

Lorsqu'on pense à la multitude des épreuves que l'être humain a dû surmonter au cours de sa longue évolution pour survivre, domestiquer les forces de la nature et occuper le territoire, on ne peut qu'admirer ses capacités d'adaptation et d'invention, son sens de la coopération et, surtout, son courage ! On se dit, ma foi, ce drôle d'animal n'avait peur de rien ! Réjean Bergeron Philosophe, auteur de Je veux être un esclave ! (2016), de L'école amnésique ou Les enfants de Rousseau (2018) et de Homère, la vie et rien d'autre ! (2022) Aujourd'hui, c'est une tout autre histoire. Nos valeureux ancêtres qui parcouraient monts et vallées se sont métamorphosés en êtres fragiles et craintifs qui sursautent à la vue de leur ombre ou d'un titre de livre qui les indispose. Portrait de l'homme moderne L'été, on a peur des piqûres d'insectes, des coups de soleil et de la chaleur, tout particulièrement du terrifiant facteur humidex que tous les « señor météo » de ce monde agitent comme un épouvantail. L'hiver, on a peur du froid et du terrible facteur éolien, ce nouveau visage du Bonhomme Sept Heures qui jadis faisait si peur aux enfants. En cas de tempête de neige, pas de risque à prendre, on s'empresse de fermer les écoles. Tous aux abris avant que le ciel nous tombe sur la tête ! Et on a peur aussi que nos enfants se blessent, se fassent bobo ! Action-réaction : on leur impose alors le port du casque, de la ceinture, des bretelles et du gilet pare-balles avec interdiction de courir, de grimper, de se chamailler – presque de respirer ! Et les adultes ne sont pas en reste. Une enseignante me racontait que chaque année, la direction de son école recommandait fortement à tous les membres du personnel de tenir la rampe lorsqu'ils descendaient l'escalier et, l'hiver, de mettre des crampons à leurs bottes lorsqu'ils allaient marcher dans la cour de récréation. Que voulez-vous, il faut minimiser les risques… de poursuite contre l'employeur ! Il y a aussi cette peur des allergies alimentaires, du sel, du sucre, du gluten ou du mauvais cholestérol. Peur des microbes aussi, des germes, des infections de toutes sortes. « Lavez, lavez », chantait Martine St-Clair, sans oublier de frotter, de désinfecter, d'aseptiser l'intérieur de nos maisons tout comme l'intérieur de notre petit moi qu'il faut cajoler, rassurer, protéger. Allez, encore un effort ! L'être humain est un animal social, fait pour vivre en société, nous ont raconté bien des philosophes depuis plus de 2000 ans. Mais mon dieu que c'est devenu difficile et compliqué de vivre ensemble de nos jours – et surtout tellement menaçant ! Barricadés derrière nos écrans, on s'empresse de virtualiser nos rapports sociaux pour éviter le face-à-face et les contacts physiques. La vie en présentiel est tellement hasardeuse, pleine de surprises et dangereuse ! Comment interpréter le timbre de la voix qui sort de cette bouche ? Comment ne pas voir une intention malveillante dans le regard oblique de cette personne ? Comment se prémunir contre les non-dits, les allusions, les sous-entendus ? Mieux vaut alors se mettre à l'abri, bien emmitouflés dans nos cocons numériques. Oui, pour les êtres fragiles que nous sommes devenus, la vie en société est pleine de menaces qui peuvent se jeter sur nous sans crier gare. Une statue dans un parc, un conférencier, une représentation théâtrale, le titre d'un livre, la présence de celui-ci dans une bibliothèque ou encore le simple fait qu'un mot nouvellement déclaré tabou soit prononcé : voilà autant de manifestations culturelles qui ont désormais le potentiel d'être pointées du doigt par quiconque se sent agressé dans son ressenti. D'où cette ribambelle de traumavertissements diffusés à la télévision, au théâtre ou au cinéma pour nous prévenir qu'on pourrait être heurté non pas par une chute de glace, mais par une scène de violence ou de nudité, un langage vulgaire, la présence de produits du tabac, certains préjugés ou stéréotypes qui ne cadrent plus avec les valeurs de bienveillance, d'ouverture et d'inclusion qui sont dorénavant les nôtres. Y'a pas à dire, tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil ! Au bout du compte, c'est à se demander si les progrès de la science, les exploits de la technologie et le développement de notre civilisation en général n'ont pas eu pour effet de nous fragiliser, de faire de nous des êtres craintifs et anxieux toujours prêts à invoquer mille et une causes pour camoufler notre peur devant la vie, jusqu'à cette peur d'avoir peur. Qu'en pensez-vous ? Participez au dialogue

TÉLÉCHARGER L'APPLICATION

Commencez dès maintenant : Téléchargez l'application

Prêt à plonger dans un monde de contenu mondial aux saveurs locales? Téléchargez l'application Daily8 dès aujourd'hui sur votre app store préféré et commencez à explorer.
app-storeplay-store