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Le prochain chapitre de la tragédie haïtienne sera signé Trump

Le prochain chapitre de la tragédie haïtienne sera signé Trump

La Presse14-07-2025
Un migrant haïtien détenu par des agents du U.S. Immigration and Customs Enforcement (ICE) à New York, en mai
Aux États-Unis en 2025, c'est maintenant une réalité. D'ici moins de deux mois, à partir du 2 septembre prochain, 525 000 ressortissants haïtiens risquent l'expulsion vers leur pays d'origine largement contrôlé par des gangs armés.
Gilles Rivard
Fellow à l'Institut d'études internationales de Montréal (IEIM) de l'UQAM et ancien ambassadeur du Canada à Port-au-Prince
Leur statut de résident temporaire sera révoqué bien qu'une bonne partie d'entre eux aient été accueillis aux États-Unis il y a plus de 15 ans, à la suite du tremblement de terre de 2010. Pour le département de la Sécurité intérieure des États-Unis, le retour dans leur pays n'est pas un problème puisque Haïti est jugé « sûr », selon son analyse.
Au même moment, le département d'État américain déconseille aux ressortissants américains de voyager en Haïti en raison de la violence, de l'insécurité et des risques élevés de kidnapping.
Cette annonce faite il y a quelques semaines est rapidement tombée dans l'oubli comme la majorité des nouvelles traitant d'Haïti d'ailleurs.
On aurait pu penser que le gouvernement haïtien, par l'intermédiaire du Conseil présidentiel de transition (CPT), aurait réagi avec force et alerté la diaspora haïtienne, les organisations internationales et les pays amis. Si peu !
Les préoccupations du CPT sont malheureusement ailleurs.
PHOTO CLARENS SIFFROY, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE
De gauche à droite : les membres du Conseil présidentiel de transition Leslie Voltaire, Edgard Leblanc Fils, Smith Augustin et le premier ministre d'Haïti, Alix Didier Fils-Aimé, en 2021
Rappelons-nous que le CPT a été mis en place avec l'appui de la Communauté des Caraïbes (CARICOM) et des principaux pays amis en avril 2024. On pensait bien avoir trouvé à ce moment l'approche permettant de dénouer cette crise constitutionnelle qui n'en finit plus.
Erreur ! Que se passe-t-il avec le CPT 15 mois plus tard ? En lisant Le Nouvelliste, quotidien haïtien sérieux et respecté, on apprend que le CPT gère des crises internes et que trois de ses membres sont accusés de corruption par les Nations unies. Quant aux élections prévues pour février 2026, on n'en parle même pas. Pourtant, celles-ci sont la clef du rétablissement de la stabilité dans ce pays.
Plein les bras
Ce gouvernement intérimaire, aussi inefficace, soit-il, aurait tout intérêt à combattre avec énergie cette décision controversée des autorités américaines pour deux raisons.
D'abord, le retour d'Haïtiens qui ont quitté le pays depuis des années pourrait grossir les rangs des démunis et des déplacés alors que le pays en a déjà plein les bras avec la situation actuelle. Des expulsés risquent de rejoindre les bandes armées si pour ces gens c'est le seul moyen de subsister.
En second lieu, ce qui a permis à Haïti de survivre malgré toutes les épreuves et les crises qu'a connues le pays depuis plus de 40 ans, ce sont les transferts de fonds des communautés haïtiennes vivant à l'étranger.
Ces transferts d'argent sont plus importants que toute l'aide internationale réunie et permettent aux familles haïtiennes de subsister dans un contexte très difficile. En 2022, ces transferts de fonds totalisaient 2,8 milliards de dollars américains : quatre fois la somme des exportations ⁠1.
L'expulsion de milliers d'Haïtiens vivant aux États-Unis avec des emplois bien rémunérés privera leurs familles en Haïti d'une bonne partie de cet argent.
À partir du moment où le sort d'un demi-million d'Haïtiens n'est pas une priorité pour le Conseil présidentiel de transition, comment en faire une priorité pour la communauté internationale ?
Comment se mobiliser face à cette décision inhumaine du gouvernement américain ?
Et si ce n'était que cela ? Avec l'absence pour encore des années d'un président désigné à la tête d'un gouvernement légitime, cette stabilité essentielle pour faire d'Haïti un pays où l'on peut vivre n'est pas envisageable. Pendant ce temps, le pays sombre lentement mais sûrement dans le chaos. Le nombre de déplacés fuyant la violence et l'insécurité ne cesse de s'accroître.
La semaine dernière, une nouvelle étape de l'autodestruction du pays a été franchie par les gangs armés avec l'incendie de l'hôtel Oloffson ⁠2, un symbole du patrimoine architectural, de la culture et de la vie sociale du pays.
Où cela s'arrêtera-t-il ? Hélas, on peut déjà écrire les prochains chapitres de cette tragédie. Les boat people se multiplieront dans la mer des Caraïbes. Les affrontements frontaliers avec la République dominicaine deviendront plus nombreux et plus violents, accroissant l'instabilité régionale.
Le contingent militaire du Kenya actuellement embourbé dans le pays ne réussit à contrôler que 20 % de la capitale. Cette mission est un échec. On en arrivera à l'inévitable, soit envisager l'envoi d'une nouvelle mission des Nations unies afin de ramener une certaine stabilité en Haïti. Plusieurs de mes contacts en Haïti souhaitent que ce scénario se matérialise, et rapidement. Y a-t-il d'autres solutions ?
1. Consultez l'Étude rétrospective sur les transferts de fonds de la diaspora haïtienne
2. Lisez la chronique « Violences en Haïti : Nous n'irons plus à l'Oloffson »
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