
Protection inédite pour des candidats aux fédérales
Pour la première fois au Canada, des candidats aux élections ont été protégés par une firme de sécurité privée. Ottawa a accordé 32 millions en contrats pour ajouter à la protection déjà assurée par la GRC aux chefs de partis. Une décision motivée par la hausse de la haine en ligne.
« Les menaces liées aux élections deviennent plus complexes et plus intenses », affirme Pierre-Alain Bujold, porte-parole du Bureau du Conseil privé, le « ministère » chargé de conseiller le premier ministre de manière impartiale.
Des agents de la GRC protègent déjà le premier ministre et les ministres du gouvernement. Lors d'une campagne électorale, la Gendarmerie doit également « assurer la protection des chefs des partis politiques qui ont le statut de parti officiel à la Chambre des communes », indique sa porte-parole Robin Percival.
Mais pour la campagne électorale qui s'est déroulée ce printemps, Ottawa a senti le besoin d'inclure les candidats aux élections qui ne sont pas et n'ont jamais été protégés par la GRC ou des polices locales.
22 candidats protégés
C'est une filiale de Garda World qui a obtenu cinq contrats, le 25 mars dernier, pour une somme totale de près de 32 millions. Il y a un contrat pour chacune des grandes régions du pays (Atlantique, Québec, Ontario, Prairies et Ouest).
Vingt-deux candidats ont eu accès à ce programme qui pouvait prendre deux formes. Les candidats pouvaient avoir un agent les accompagnant sur le terrain pendant leur porte-à-porte, dans des soupers spaghetti ou autres activités liées à la campagne électorale.
Ils pouvaient également avoir un gardien qui surveillait leur résidence. Dans tous les cas, le personnel de Garda était non armé. La protection pouvait également s'étendre jusqu'à une semaine après le scrutin du 28 avril dernier, que la personne ait été élue ou non, « si les menaces persist[ai]ent », précise le contrat.
Une majorité de candidats protégés représentaient le Parti libéral et faisaient campagne dans des circonscriptions de l'Ontario. Cinq des 22 candidats ont eu besoin de la double protection : sécurité à la résidence couplée à une protection rapprochée sur le terrain.
Il fallait répondre à au moins un de huit critères, selon un complément d'information fourni à La Presse par le Bureau du Conseil privé, pour être protégé. Cela inclut des menaces précises de s'en prendre physiquement au candidat, des actes de vandalisme contre sa résidence ou son véhicule, des « personnes non invitées perturbatrices » à son domicile, des messages sur les réseaux sociaux qui révèlent son adresse (doxxing), etc.
Consultez les détails du programme de protection des candidats
Une protection appréciée
Il n'a pas été possible de savoir qui, au juste, avait pu profiter de ce programme. Le Parti libéral et le Nouveau Parti démocratique ont confirmé à La Presse que certains de leurs candidats, sans préciser lesquels, avaient demandé cette protection.
Lucy Wilson, directrice nationale du NPD, nous a indiqué par courriel que « la montée de la haine en ligne, parfois même renforcée par des politiciens ici au Canada et aux États-Unis, a créé un environnement moins sûr […] pour les personnes qui décident de se présenter pour servir leurs communautés ». Le NPD dit qu'il est reconnaissant que ce service ait été fourni par le gouvernement fédéral.
Le Parti libéral abonde dans le même sens : « Nous avons été ravis d'avoir pu mettre en contact les candidats qui avaient besoin d'appui avec les ressources et les services appropriés offerts par ce nouveau programme », nous écrit Matteo Rossi, son porte-parole.
Chacune des personnes qui participent à notre démocratie doit se sentir en sécurité et respectée.
Matteo Rossi, porte-parole du Parti libéral du Canada
Aucun candidat du Bloc québécois n'a exprimé le besoin de se prévaloir de la protection offerte par le programme, selon l'attaché de presse du parti Julien Coulombe-Bonnafous. Le Parti conservateur n'a pas répondu aux questions de La Presse.
Menaces en croissance
Ce programme de protection des candidats vient s'ajouter à une série de mesures pour faire face aux menaces de plus en plus nombreuses contre les institutions démocratiques et le processus électoral.
En 2019, par exemple, Ottawa avait mis sur pied un Groupe de travail sur les menaces en matière de sécurité et de renseignements visant les élections. Il réunit quatre agences fédérales, dont la GRC et le SCRS. Il collige notamment du renseignement sur les tentatives d'ingérence étrangère.
En France, lors de la plus récente campagne électorale législative, à l'été 2024, 51 candidats ou militants ont été « agressés physiquement », selon le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin. Aucun cas n'a été signalé pendant la campagne électorale de 2025 au Canada. Mais depuis la pandémie, des politiciens ont régulièrement été la cible de harcèlement. L'ex-chef néo-démocrate Jagmeet Singh a été harcelé en pleine rue en 2022 et en 2024.
Un sondage de la Fédération québécoise des municipalités révélait en 2023 que 39 % des élus municipaux déclaraient avoir été victimes de harcèlement ou d'intimidation au moins une fois au cours de leur carrière. Ils n'étaient que 28 % en 2017.
Avec la collaboration de William Leclerc, La Presse
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