
184 États tâtonnent pour essayer de trouver un accord
(Genève) Des diplomates venus de 184 pays tentent lundi d'arrondir les angles et de réduire leurs profondes divisions dans l'espoir de pouvoir afficher jeudi comme prévu le premier traité mondial contre la pollution plastique, y compris en milieu marin.
Isabel MALSANG et Robin MILLARD
Agence France-Presse
Après une journée de répit dimanche faisant suite à une première semaine de discussions onusiennes qui n'a marqué aucune avancée décisive, les délégués ont repris lundi leurs travaux en groupes de travail spécialisés ou régionaux.
Quelques rencontres informelles, voire « informelles-informelles » ont eu lieu dimanche ; ce qui signifie en langage onusien des rencontres hors du cadre corseté et transparent des négociations formelles.
Ces rendez-vous discrets, parfois dans des villas autour du lac Léman, permettent une meilleure compréhension respective de positions antagonistes.
Même s'il ne contient pas grand-chose, il y aura un traité comme prévu jeudi, a assuré un négociateur africain à l'AFP qui parle sous condition d'anonymat. « Nous n'avons pas travaillé trois ans pour repartir sans rien ».
Les négociations informelles « vont maintenant très vite », ajoute une autre source diplomatique. Selon cette source, le fait que certains États acceptent ces réunions « informelles-informelles », alors qu'ils sont opposés idéologiquement, est un signe de « recherche de compromis ».
Pays « ambitieux »
Depuis le début des pourparlers il y a deux ans et demi, un groupe de pays essentiellement pétroliers (Arabie saoudite, Koweït, Russie, Iran, Malaisie…) bloque le processus.
Les États-Unis sont proches de cette mouvance, ainsi que l'Inde. Ils souhaitent que le traité porte quasi exclusivement sur le traitement du plastique à l'état de déchets, et s'opposent à toute contrainte sur la partie « amont » du plastique, issu du pétrole.
En face, un groupe grandissant de pays – qualifiés d'« ambitieux » – veulent des mesures pour réguler la production, seule solution pour freiner le fléau de la pollution plastique qui s'infiltre dans les écosystèmes, les montagnes, les fleuves, les océans, et jusqu'à l'intérieur du corps humain.
Ce groupe demande que le traité comporte une clause prévoyant une réduction de la production exponentielle de plastiques, qui doit tripler d'ici 2060.
Il réunit les 27 pays de l'Union européenne (UE), de nombreux pays d'Amérique latine, d'Afrique, l'Australie, le Royaume-Uni, la Suisse, le Canada ainsi que la plupart des pays îliens submergés par des vagues de déchets de plastique venus de l'océan.
Pour le représentant des Palaos, archipel du Pacifique, qui s'exprime au nom de 39 micro-États îliens, le traité doit servir à nettoyer les déchets qui sont « déjà en train d'étouffer l'océan ».
« Nous savions avant de venir que cela ne serait pas facile […], nous sommes venus ici pour essayer de trouver des priorités », dit à l'AFP l'ambassadeur de la Barbade à l'ONU, Matthew Wilson.
Un vote ?
« Le temps presse », a alerté Eirik Lindebjerg, conseiller au WWF sur les politiques plastique, qui suggère, comme d'autres ONG, une accélération radicale des procédures.
« La majorité ambitieuse qui s'est engagée depuis longtemps pour demander un traité fort a choisi de laisser une poignée de pays bloquer le processus. Espérer trouver une porte de sortie par le consensus est une illusion », a-t-il déclaré à l'AFP.
« La seule solution possible pour finaliser un texte dans les temps impartis est de recourir à un vote » selon lui.
Mais le consensus – et non le vote – est la règle par défaut.
« En déclenchant un vote, la minorité qui bloque le processus réaliserait qu'elle va perdre et serait forcée à faire des compromis », ajoute Claire Arkin, porte-parole de l'ONG Gaia (Global alliance for incinerator alternatives), basée en Europe, en Afrique et aux États-Unis. « Il n'est pas trop tard, mais il faut qu'il soit annoncé aussi vite que possible ».
Soixante-dix ministres et une trentaine de hauts cadres d'administration, soit les responsables de l'environnement d'une centaine de pays, sont attendus à Genève à partir de mardi pour aider à débloquer la fin des négociations.
La Commissaire européenne à l'Environnement, Jessika Roswall, a appelé lundi « toutes les parties à être constructives et orientées vers les résultats ». « Nous avons plus de parenthèses dans le texte (c'est-à-dire de paragraphes sur lesquels les pays ne sont pas encore parvenus à s'entendre, NDLR) que de plastique dans la mer », a-t-elle dit.
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184 États tâtonnent pour essayer de trouver un accord
Les négociations sont constamment freinées par un groupe de pays essentiellement pétroliers (Arabie saoudite, Koweït, Russie, Iran, Malaisie…) réunis sous le surnom de « pays qui pensent la même chose ». Les États-Unis sont aussi proches de cette mouvance, ainsi que l'Inde. (Genève) Des diplomates venus de 184 pays tentent lundi d'arrondir les angles et de réduire leurs profondes divisions dans l'espoir de pouvoir afficher jeudi comme prévu le premier traité mondial contre la pollution plastique, y compris en milieu marin. Isabel MALSANG et Robin MILLARD Agence France-Presse Après une journée de répit dimanche faisant suite à une première semaine de discussions onusiennes qui n'a marqué aucune avancée décisive, les délégués ont repris lundi leurs travaux en groupes de travail spécialisés ou régionaux. Quelques rencontres informelles, voire « informelles-informelles » ont eu lieu dimanche ; ce qui signifie en langage onusien des rencontres hors du cadre corseté et transparent des négociations formelles. Ces rendez-vous discrets, parfois dans des villas autour du lac Léman, permettent une meilleure compréhension respective de positions antagonistes. Même s'il ne contient pas grand-chose, il y aura un traité comme prévu jeudi, a assuré un négociateur africain à l'AFP qui parle sous condition d'anonymat. « Nous n'avons pas travaillé trois ans pour repartir sans rien ». Les négociations informelles « vont maintenant très vite », ajoute une autre source diplomatique. Selon cette source, le fait que certains États acceptent ces réunions « informelles-informelles », alors qu'ils sont opposés idéologiquement, est un signe de « recherche de compromis ». Pays « ambitieux » Depuis le début des pourparlers il y a deux ans et demi, un groupe de pays essentiellement pétroliers (Arabie saoudite, Koweït, Russie, Iran, Malaisie…) bloque le processus. Les États-Unis sont proches de cette mouvance, ainsi que l'Inde. Ils souhaitent que le traité porte quasi exclusivement sur le traitement du plastique à l'état de déchets, et s'opposent à toute contrainte sur la partie « amont » du plastique, issu du pétrole. En face, un groupe grandissant de pays – qualifiés d'« ambitieux » – veulent des mesures pour réguler la production, seule solution pour freiner le fléau de la pollution plastique qui s'infiltre dans les écosystèmes, les montagnes, les fleuves, les océans, et jusqu'à l'intérieur du corps humain. Ce groupe demande que le traité comporte une clause prévoyant une réduction de la production exponentielle de plastiques, qui doit tripler d'ici 2060. Il réunit les 27 pays de l'Union européenne (UE), de nombreux pays d'Amérique latine, d'Afrique, l'Australie, le Royaume-Uni, la Suisse, le Canada ainsi que la plupart des pays îliens submergés par des vagues de déchets de plastique venus de l'océan. Pour le représentant des Palaos, archipel du Pacifique, qui s'exprime au nom de 39 micro-États îliens, le traité doit servir à nettoyer les déchets qui sont « déjà en train d'étouffer l'océan ». « Nous savions avant de venir que cela ne serait pas facile […], nous sommes venus ici pour essayer de trouver des priorités », dit à l'AFP l'ambassadeur de la Barbade à l'ONU, Matthew Wilson. Un vote ? « Le temps presse », a alerté Eirik Lindebjerg, conseiller au WWF sur les politiques plastique, qui suggère, comme d'autres ONG, une accélération radicale des procédures. « La majorité ambitieuse qui s'est engagée depuis longtemps pour demander un traité fort a choisi de laisser une poignée de pays bloquer le processus. Espérer trouver une porte de sortie par le consensus est une illusion », a-t-il déclaré à l'AFP. « La seule solution possible pour finaliser un texte dans les temps impartis est de recourir à un vote » selon lui. Mais le consensus – et non le vote – est la règle par défaut. « En déclenchant un vote, la minorité qui bloque le processus réaliserait qu'elle va perdre et serait forcée à faire des compromis », ajoute Claire Arkin, porte-parole de l'ONG Gaia (Global alliance for incinerator alternatives), basée en Europe, en Afrique et aux États-Unis. « Il n'est pas trop tard, mais il faut qu'il soit annoncé aussi vite que possible ». Soixante-dix ministres et une trentaine de hauts cadres d'administration, soit les responsables de l'environnement d'une centaine de pays, sont attendus à Genève à partir de mardi pour aider à débloquer la fin des négociations. La Commissaire européenne à l'Environnement, Jessika Roswall, a appelé lundi « toutes les parties à être constructives et orientées vers les résultats ». « Nous avons plus de parenthèses dans le texte (c'est-à-dire de paragraphes sur lesquels les pays ne sont pas encore parvenus à s'entendre, NDLR) que de plastique dans la mer », a-t-elle dit.


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Funérailles des six journalistes palestiniens tués par une frappe israélienne
Beginning of dialog window. Escape will cancel and close the window. (Gaza) L'ONU a condamné lundi le « meurtre » de six journalistes palestiniens, tués par une frappe israélienne délibérée dans la bande de Gaza, parmi lesquels un correspondant célèbre d'Al Jazeera accusé par l'armée d'être un combattant du Hamas. par l'équipe de l'AFP à Gaza, avec Hervé BAR à Jérusalem Agence France-Presse Ce qu'il faut savoir La chaîne d'information qatarie Al Jazeera a fait état de la mort de cinq de ses employés dans « une attaque ciblée israélienne ». Leurs funérailles ont eu lieu lundi ; L'armée israélienne a dit avoir pris l'un des journalistes pour cible, le qualifiant de « terroriste » qui « se faisait passer pour un journaliste » ; Benyamin Nétanyahou a affirmé dimanche avoir donné l'ordre à l'armée d'autoriser un plus grand nombre de médias internationaux à travailler sous son contrôle dans Gaza ; Le cabinet de sécurité israélien a approuvé vendredi un plan pour « prendre le contrôle » de la ville de Gaza. Au moment où le gouvernement israélien se montre déterminé à mettre en œuvre son nouveau plan d'opération dans le territoire palestinien assiégé, six journalistes, dont cinq employés de la chaîne qatarie parmi lesquels l'un de ses principaux correspondants sur place, ont été tués pendant la nuit dans une frappe israélienne sur une tente où ils étaient installés dans la ville de Gaza, devant l'hôpital al-Chifa. 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