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États-Unis : l'ICE sous Trump inquiète et divise les Américains

États-Unis : l'ICE sous Trump inquiète et divise les Américains

24 Heures7 days ago
«Ils sont en roue libre»

Aux États-Unis, la police de l'immigration inquiète
Les agents d'ICE sont en première ligne dans les opérations d'expulsion de sans-papiers du gouvernement Trump. Leurs méthodes suscitent peur et colère. Une journée d'action nationale est prévue vendredi.
Alexis Buisson
- correspondant à New York
Manifestants à Brooklyn, New York, contre un nouveau centre de détention pour immigrants, lors d'une marche le 11 juillet 2025.
Getty Images via AFP/SPENCER PLATT
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En bref : L'agence fédérale ICE intensifie ses opérations d'expulsion depuis le retour de Trump au pouvoir. Elle cible désormais les lieux sensibles comme les hôpitaux et les écoles.
Des inspecteurs fédéraux dénoncent des conditions de détention jugées barbares et dangereuses.
Les communautés d'immigrants développent des stratégies de protection face aux interventions d'ICE.
Lundi 28 juillet, midi, devant le bâtiment du sud de Manhattan qui abrite les tribunaux d'immigration, un groupe de manifestants déploient une banderole sur laquelle figure une quarantaine de visages. Ils appartiennent à des individus «kidnappés», termes employés par les militants, par la police de l'immigration ICE (Immigration and Customs Enforcement). Celle-ci les aurait placés en détention sans respecter leurs droits ou leur dignité.
«Si vous avez une conscience, un cœur, c'est le moment de s'insurger face au régime fasciste de Trump! », lance Emma Kaplan, l'organisatrice du rassemblement. Son groupe, Refuse Fascism, qui appelle à une journée d'action contre ICE ce vendredi 1er août, invite les Américains qui assistent à une arrestation de migrants à utiliser un sifflet ou frapper sur des casseroles pour donner l'alerte.
Fondée en 2003 dans le cadre du nouveau Département de la sécurité intérieure, chargé de la protection du territoire dans le sillage du 11 septembre, cette police fédérale de 21'000 employés est habituée aux controverses. En 2018, quand le premier gouvernement Trump a mis en œuvre une politique de séparation de familles de migrants à la frontière, des associations et l'aile gauche du Parti démocrate ont appelé à «abolir» ICE en réaction à ce qu'elles présentaient comme un long historique de violations des droits de l'homme et de traitement inhumain des détenus (fouilles sans autorisation, profilage racial, abus physiques et sexuels…).
Rapport sur les dérives de l'ICE
Dans un rapport de 1600 pages sorti en 2023, des inspecteurs fédéraux, qui se sont rendus dans des prisons opérées par ICE dans seize États entre 2017 et 2019, ont jugé que les conditions d'incarcération dans certains endroits étaient «barbares», «dangereuses et sales». Ils ont cité le cas d'un asthmatique non pris en charge, d'un homme laissé pour compte, malgré des plaies béantes liées à une opération chirurgicale ou encore d'un handicapé mental attaché à une chaise pour être fouillé.
En mai dernier, Todd Lyons, le directeur par intérim de l'agence, a indiqué que neuf personnes étaient décédées depuis le début de l'année fiscale (1er octobre 2024). Le pic a été atteint en 2020 (21 décès), sur fond de pandémie.
Des agents fédéraux à l'intérieur d'un bâtiment fédéral, accueillant des audiences du Tribunal d'immigration à New York, le 21 juillet 2025.
keystone-sda.ch/EPA/SARAH YENESEL
Avec l'expulsion de l'ensemble des sans-papiers du territoire américain (11 millions de personnes, selon les estimations) promise par le candidat Trump, ICE se retrouve une nouvelle fois sur la sellette. Si les opérations ont été «lentes» en début de mandat, d'après Fanny Lauby, professeure associée à l'Université d'État de Montclair (New Jersey) et spécialiste des questions d'immigration, celles-ci se sont «accélérées» depuis mai grâce au déblocage de nouvelles places de détention à la suite de contrats passés avec des centres pénitentiaires privés et d'accords avec des pays tiers, comme le Salvador, pour accueillir les expulsés.
Dans l'un des décrets signés à son retour au pouvoir, Donald Trump a aussi donné l'autorisation à ICE d'intervenir dans des endroits autrefois jugés sensibles (hôpitaux, écoles, lieux de culte…). Ces derniers mois, des migrants ont aussi été embarqués après leur comparution au tribunal ou avant leur entretien de naturalisation.
Des flyers informent les migrants
Même des immigrés en situation régulière ont été visés, comme Mahmoud Khalil, étudiant propalestinien titulaire d'une carte verte, à New York, ou encore de la doctorante Rumeysa Ozturk, critique d'Israël, à Boston. Elle a été cueillie devant chez elle par six agents masqués, en civil. «Une expérience terrifiante, insiste Fanny Lauby. Depuis le retour au pouvoir de Donald Trump, ICE est en roue libre.»
Dans les quartiers d'immigrés, cette nouvelle réalité a un effet glaçant. À Washington Heights, repaire latino dans le nord de Manhattan, des posters et prospectus informant les migrants de leurs droits en cas d'interpellation ont fait leur apparition dans les écoles et universités, les librairies, les commerces ou les églises. «N'ouvrez pas la porte», «ne signez rien», «élaborez un plan avec votre famille», peut-on ainsi lire sur un document préparé par Make The Road, une association de défense de migrants. Un autre groupe, Eyes on ICE, rappelle que le public a le droit de filmer les agents pendant les arrestations, notamment «les uniformes, les badges et les plaques d'immatriculation».
Les critiques d'ICE craignent que ce climat de peur ne force les sans-papiers à vivre dans l'ombre. En effet, ils pourraient être tentés de renoncer à contacter la police s'ils sont victimes ou témoins d'un crime ou à se rendre à l'hôpital en cas de maladie, par exemple, ce qui peut représenter un danger pour la collectivité.
Des manifestants devant un tableau avec des portraits de personnes arrêtées par l'immigration, Los Angeles, le 4 juillet 2025.
AFP/ETIENNE LAURENT
L'opinion publique américaine est divisée sur l'approche musclée utilisée par le gouvernement Trump. Un récent sondage du «Wall Street Journal» a trouvé que, si la majorité des sondés soutiennent l'expulsion des individus en situation irrégulière, 58% s'opposent à l'envoi de migrants dans un pays qui n'est pas le leur et au non-respect de leurs droits.
Tom Homan, «tsar de la frontière», qui supervise l'application de cette politique, rejette la faute sur les journalistes. «Nonante-cinq pour cent des médias servent de faux narratifs au grand public, a-t-il dit mardi sur Fox News. Septante pour cent des gens qu'on arrête sont des criminels, les autres sont considérés comme des menaces à la sécurité nationale.» Pour sa part, le Département de la sécurité intérieure a indiqué que le nombre d'agressions contre les policiers d'ICE a augmenté de 830% par rapport à l'an dernier.
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Malgré l'interdiction par un tribunal fédéral, la police d'immigration américaine a mené une opération spectaculaire mercredi. Publié aujourd'hui à 00h30 Mis à jour il y a 14 minutes Sur les lieux du raid de la police anti-immigration à Los Angeles, le 6 août 2025. AFP La police américaine de l'immigration a mené mercredi un raid devant un magasin de Los Angeles, malgré la récente interdiction par la justice de ces opérations coup de poing que les défenseurs des droits humains assimilent à de violents contrôles au faciès. Depuis son retour au pouvoir en janvier, le président Donald Trump mène une politique spectaculaire contre l'immigration qu'il dit clandestine voire criminelle, la police spécialisée, appelée ICE, étant largement déployée pour arrêter des personnes généralement originaires d'Amérique latine. Mercredi, des agents ont surgi de l'arrière d'un camion de déménagement avant de se jeter sur un groupe de personnes, une descente filmée par des journalistes embarqués de Fox News, l'une des chaînes préférées des supporteurs de Donald Trump. Ces derniers mois, ces images ont inondé les télévisions et les réseaux sociaux. Elles réjouissent les partisans d'une ligne implacable contre l'immigration autant qu'elles horrifient les défenseurs des droits humains. «Opération Cheval de Troie» Gregory Bovino, le chef de la police aux frontières en Californie, a partagé la vidéo de mercredi avec pour titre «Opération Cheval de Troie». «Il n'y a aucun sanctuaire qui échappe au gouvernement fédéral», s'est félicité sur X le procureur général par intérim Bill Essayli, dans un contexte de bras de fer entre l'administration Trump et ces villes de gauche, comme Los Angeles, dites sanctuaires parce qu'elles limitent leur coopération en matière de lutte contre l'immigration. Ce raid est survenu après qu'un tribunal fédéral a ordonné en juillet l'arrêt de ce type d'opérations. Un appel du gouvernement Trump a été rejeté la semaine dernière, les ONG ayant fait valoir que ces opérations aboutissent essentiellement à l'arrestation de personnes en fonction de leur origine ethnique. Cette décision de justice interdit «d'interpeller et de détenir des personnes sur la seule base d'amalgames liés à leur apparence, leur façon de parler ou l'endroit où elles se trouvent», a rappelé mercredi dans un communiqué Mohammad Tajsar, avocat de l'ACLU, influente organisation de défense des droits civiques. 16 personnes en détention Selon Fox News, au total 16 personnes ont été placées en détention. Fin juillet, l'ONG Human Rights Watch avait dénoncé les conditions «dégradantes et déshumanisantes» dans plusieurs centres de rétention pour migrants. Les raids parfois violents de l'ICE avaient déclenché début juin d'importantes manifestations à Los Angeles. État le plus riche et le plus peuplé du pays, la Californie abrite des millions d'immigrés. Newsletter «Dernières nouvelles» Vous voulez rester au top de l'info? «24 heures» vous propose deux rendez-vous par jour, pour ne rien rater de ce qui se passe dans votre Canton, en Suisse ou dans le monde. Autres newsletters AFP Vous avez trouvé une erreur?Merci de nous la signaler.

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